Vu, enregistrée à son secrétariat le 22 juillet 2004, la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Mme Monique X et le centre hospitalier régional de Metz-Thionville devant le conseil de prud'hommes de Thionville ;
Vu le déclinatoire présenté le 2 mars 2004 par le PREFET DE LA MOSELLE, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente par le motif que Mme X, dont le contrat de travail a été transféré au centre hospitalier régional de Metz-Thionville et à laquelle un contrat de droit public a été proposé par ce centre hospitalier, est un agent de droit public ;
Vu le jugement du 29 avril 2004 par lequel le conseil de prud'hommes de Thionville a rejeté le déclinatoire de compétence ;
Vu l'arrêté du 19 mai 2004 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu le jugement du 3 juin 2004 par lequel le conseil de prud'hommes de Thionville a sursis à toute procédure ;
Vu, enregistré le 22 juillet 2004, le mémoire présenté par Mme X tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit par les motifs que le déclinatoire du 2 mars 2004 est irrecevable dès lors d'une part qu'un préfet ne peut présenter successivement deux déclinatoires sur la même affaire et d'autre part que le préfet s'est désisté de son premier déclinatoire du 22 janvier 2004, lors de l'audience du conseil de prud'hommes de Thionville du 5 février 2004 ; qu'à la date de la rupture de son contrat avec le centre hospitalier régional de Metz-Thionville, ce contrat était un contrat de travail transféré en vertu de l'article L. 122-12 du code du travail, le contrat de droit public proposé par le centre hospitalier n'ayant pas été signé ;
Vu, enregistré le 22 juillet 2004, le mémoire présenté par le centre hospitalier régional de Metz-Thionville tendant à la confirmation de l'arrêté de conflit par les motifs que le déclinatoire du 2 mars 2004 est recevable ; que la juridiction administrative est compétente dès lors que le centre hospitalier, qui était tenu de placer Mme X sous un régime de droit public, lui a proposé dès le 22 mai 2003 un contrat de droit public à durée indéterminée sans modification de sa rémunération ;
Vu, enregistré le 22 juillet 2004, le nouveau mémoire, présenté par Mme X tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit par les mêmes motifs ;
Vu, enregistrées le 25 août 2004, les observations présentées par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ; le ministre conclut à la confirmation de l'arrêté de conflit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 modifiée ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 modifiée ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu la directive n° 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 ;
Vu le code du travail, et notamment son article L. 122-12 ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Martin, membre du Tribunal,
- les conclusions de M. Duplat, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure de conflit :
Considérant qu'il résulte des articles 6 et 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828 que le préfet ne peut, après qu'un premier déclinatoire a été rejeté sans qu'il ait élevé le conflit dans le délai de quinzaine, présenter un second déclinatoire dans la même instance ; qu'en revanche, ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'il présente un second déclinatoire après avoir retiré un précédent déclinatoire avant que le tribunal saisi n'y statue ;
Considérant que la procédure de conflit régie par l'ordonnance du 1er juin 1828 confère au préfet des pouvoirs spécifiques auxquels ne sont pas applicables les dispositions du nouveau code de procédure civile relatives au désistement ; que, par suite, la circonstance que le PREFET DE LA MOSELLE a retiré le 4 février 2004 le déclinatoire présenté le 22 janvier 2004, avant que le conseil de prud'hommes de Thionville n'y statue, n'a pas le caractère d'un désistement d'instance ou d'action ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 19 mai 2004 par lequel le PREFET DE LA MOSELLE a élevé le conflit à la suite du rejet, par le conseil de prud'hommes de Thionville d'un nouveau déclinatoire en date du 2 mars 2004 n'est pas entaché d'irrégularité ;
Sur la compétence :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du code du travail : S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;
Considérant que si les dispositions précitées, interprétées au regard de la directive n° 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001, imposent le maintien des contrats de travail en cours y compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; que lorsqu'un salarié refuse de signer le contrat de droit public qui lui est proposé, le litige relatif aux conséquences de ce refus relève de la compétence du juge judiciaire, dès lors que ce salarié n'a jamais été lié au nouvel employeur public par un rapport de droit public ;
Considérant que Mme X, dont le contrat de travail a été transféré, en vertu de l'article L. 122-12 du code du travail, de la clinique Notre-Dame à Thionville au centre hospitalier régional de Metz-Thionville à la date du 1er juin 2003, n'a pas signé le contrat de droit public qui lui a été proposé par le centre hospitalier ; que, dans ces conditions, le litige qui oppose Mme X au centre hospitalier quant aux conséquences de ce que Mme X analyse comme un licenciement relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire ; que, par suite, c'est à tort que le conflit a été élevé ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 19 mai 2004 par le PREFET DE LA MOSELLE est annulé.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.