Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris :
- par une requête n° 1808002, enregistrée le 23 mai 2018, d'annuler l'arrêté du 23 mars 2018 par lequel le ministre de l'intérieur a maintenu son assignation à résidence sur le territoire de la commune de Saint-Jean-d'Angély dans les conditions fixées par l'arrêté ministériel du 24 novembre 2016, modifié par l'arrêté du 30 janvier 2017, sous réserve des dispositions de l'article 2 de l'arrêté, qui prévoient qu'il doit se présenter trois fois par jour à 9h.15, 15h.15 et 17h.45 à la brigade de gendarmerie située sur cette commune, y compris le dimanche et les jours fériés ;
- par une requête n° 1907591, enregistrée le 15 avril 2019, d'annuler l'arrêté du 14 février 2019 par lequel le ministre de l'intérieur l'a assigné à résidence sur le territoire de la commune d'Aurillac ;
- par une requête n° 1913702, enregistrée le 25 juin 2019, d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le ministre de l'intérieur a modifié son lieu d'assignation à résidence sur le territoire de la commune d'Aurillac.
Par un jugement n°s 1808002, 1907591, 1913702 du 28 janvier 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 février 2021, et des mémoires enregistrés les 28 mars 2021 et 4 février 2023, M. D..., représenté par Me Daoud, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 1808002, 1907591, 1913702 du 28 janvier 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les arrêtés précités du ministre de l'intérieur en date des 23 mars 2018, 14 février 2019 et 13 mai 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Le jugement attaqué encourt la censure :
S'agissant de la légalité de l'arrêté du 23 mars 2018 :
- au regard de l'invocation de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le tribunal n'a pas répondu à l'ensemble de son argumentation selon laquelle l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'était pas prévisible au regard de ces stipulations, en jugeant que l'intéressé ne pouvait se prévaloir des stipulations en cause, le tribunal a commis une erreur de droit, il a également dénaturé l'articulation des moyens de la requête ;
- au regard de l'invocation des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, le tribunal a commis des erreurs de droit et de fait en jugeant qu'il n'existait aucune perspective raisonnable d'éloignement, en inversant la charge de la preuve et qu'il existait une perspective d'éloignement de l'intéressé ;
- en jugeant que l'intéressé représentait une menace pour l'ordre public, le tribunal a dénaturé le moyen dont il était saisi et commis une erreur de droit ;
- sur le moyen tiré de la violation de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le tribunal n'a pas procédé au contrôle qui lui est imposé en cette matière par la Cour européenne des droits de l'homme et a dénaturé le moyen ;
- sur le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le tribunal a commis une erreur de droit et a procédé à une inversion de la charge de la preuve en estimant que les éléments contenus dans l'arrêté n'étaient pas sérieusement contestés ;
S'agissant de la légalité de l'arrêté du 14 février 2019 :
- en jugeant que l'arrêté était suffisamment motivé, le tribunal a omis de se prononcer sur le fait que l'arrêté ne mentionne pas la raison pour laquelle cet hébergement ne peut plus se poursuivre ;
- pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées, le jugement encourt l'annulation en tant qu'il a rejeté les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et des articles 5 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la légalité de l'arrêté du 13 mai 2019 :
- sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, le tribunal a omis de prendre en considération le fait que l'arrêté ne mentionne pas la raison pour laquelle l'hébergement ne peut plus se poursuivre ;
- sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du protocole additionnel n° 4, le jugement encourt la censure pour avoir considéré que la dangerosité du requérant était établie ;
- sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le jugement doit être réformé en tant qu'il estime que la dangerosité du requérant est établie et qu'elle autorise une atteinte à son droit au respect d'une vie privée et familiale ;
- sur la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le fait que l'intéressé a été privé de se nourrir normalement constitue un traitement inhumain ;
Les arrêtés attaqués sont illégaux :
S'agissant de la légalité de l'arrêté du 23 mars 2018 :
- il méconnaît les stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que l'assignation à résidence dont il fait l'objet constitue une mesure privative de liberté qui ne s'inscrit dans aucune des hypothèses prévues par cet article ;
- les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit de l'asile sont méconnues dès lors qu'il n'existe plus de perspective raisonnable d'éloignement ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation quant à la menace pour l'ordre public ;
- les stipulations de l'article 2 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues ;
S'agissant de la légalité de l'arrêté du 14 février 2019 :
- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation, dès lors que sa lecture ne permet pas de savoir s'il s'agit d'une nouvelle décision de maintien sous assignation à résidence ou si elle modifie uniquement les modalités d'assignation à résidence, et que ne sont pas précisées les raisons pour lesquelles l'hébergement dans l'hôtel où il demeurait ne peut se poursuivre ;
- l'arrêté est illégal par voie d'exception d'illégalité de l'arrêté du 23 mars 2018 sur lequel il se fonde ;
- les stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues dès lors que l'assignation à résidence dont il fait l'objet constitue une mesure privative de libertés prohibée par cet article ;
- les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers sont méconnues dès lors qu'il n'existe pas, à la date de l'arrêté litigieux, de perspective raisonnable d'éloignement ;
- les stipulations de l'article 2 du protocole n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues pour les mêmes raisons que celles exposées à l'encontre de l'arrêté du 23 mars 2018 ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues ;
Sur l'illégalité de l'arrêté du 13 mai 2019 :
- cet arrêté est insuffisamment motivé en ce que le préfet n'explicite pas les raisons pour lesquelles l'hôtel où résidait l'intéressé n'est plus en mesure de l'héberger, et en ce qu'il ne précise pas les raisons qui ont conduit à un changement de type d'hébergement, d'un hôtel à une maison, ce changement faisant que les repas de l'intéressé ne sont désormais plus pris en charge ;
- l'arrêté est illégal dès lors qu'il a été pris au visa des arrêtés du 23 mars 2018 et 14 février 2019 qui sont eux-mêmes illégaux ;
- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues, l'assignation à résidence dont fait l'objet l'intéressé étant assimilables à une détention, il doit jouir des mêmes droits que les détenus, en particulier la prise en charge de ses repas, en outre, il est contraint à résider à 40 mn à pieds de l'hôtel de police d'Aurillac auquel il doit se présenter deux fois par jour, y compris les dimanches et jours fériés, de 10 heures à 17 heures ;
- les stipulations de l'article 2 du protocole n° 4 à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées à l'encontre de l'arrêté du 23 mars 2018 ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées à l'encontre de l'arrêté du 23 mars 2018 ;
- l'obligation de présentation aux forces de l'ordre est inadaptée à sa situation compte tenu de la distance séparant son lieu de résidence de l'hôtel de police et des moyens de transport à sa disposition.
Par une intervention, enregistrée le 30 juin 2021, le Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI) et la Ligue des droits de l'homme (LDH), représentés par Me Maugendre, demandent que la Cour fasse droit aux conclusions de la requête de M. D....
Les associations soutiennent que :
- elles présentent un intérêt leur donnant qualité pour intervenir à l'appui des conclusions de la requête ;
- les arrêtés contestés sont irréguliers dès lors qu'ils se fondent sur l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, inconventionnel au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier des stipulations de l'article 2 du protocole n° 4 de la convention en l'absence de limite dans le temps de la mesure restrictive de libertés conjuguée avec l'absence d'intervention du juge ;
- les arrêtés en litige portent atteinte aux droits fondamentaux que le requérant tient des articles 5, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que, s'agissant de l'article 5 § 4, l'assignation à résidence est constitutive d'une peine privative de liberté, laquelle n'est pas assortie des garanties exigées par cet article, étant décidée par l'administration seule sans qu'aucun contrôle du juge judiciaire ne soit ouvert à bref délai : s'agissant de l'article 3, compte tenu des modalités d'assignation à résidence et de sa durée, celle-ci constitue un traitement inhumain et dégradant ; s'agissant de l'article 8, compte tenu de ce qui vient d'être dit s'agissant de la violation de l'article 3 ;
- les arrêtés en litige portent atteinte au respect de la vie privée rattachée à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et du droit à mener une vie familiale normale garantie au dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, compte tenu des modalités et de la durée de l'assignation à résidence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Un mémoire additionnel a été produit pour M. D... le 22 mars 2023, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel n° 4 ;
- le code pénal ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision n° 2017-674 QPC du 1er décembre 2017 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. I...,
- les conclusions de M. X..., rapporteur public,
- les observations de Me de Castelbajac, avocat, substituant Me Daoud, pour M. D... et de Me Maugendre, avocat, pour La Ligue des droits de l'homme et le Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s.
Une note en délibéré a été produite le 3 avril 2023 pour M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... D..., ressortissant algérien né le 3 août 1974 a fait l'objet d'une condamnation définitive par la cour d'appel de Paris le 14 décembre 2005 à six ans d'emprisonnement et à la peine complémentaire d'interdiction définitive du territoire français pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un projet d'attentat terroriste à Paris. Le 16 avril 2008, le préfet de police a fixé l'Algérie comme pays de destination en vue de l'exécution de l'interdiction définitive du territoire français. Son expulsion vers l'Algérie été suspendue à la suite de la saisine par M. D... de la Cour européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui, en application de l'article 39 de son règlement a demandé aux autorités françaises de procéder à cette suspension, puis, à la suite de l'arrêt de la même Cour du 3 décembre 2009. Dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, M. D... a fait l'objet d'assignations à résidence successives, d'abord à Guéret, dans la Creuse, puis à Longeau-Percy et Fayl-Billot, dans la Haute-Marne, à Lacaune et Carmaux, dans le Tarn, enfin à Saint-Jean-d'Angely, dans les Charentes, et à Aurillac, dans le Cantal. Par un jugement en date du 28 janvier 2021 dont il est fait appel par la présente requête, le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de M. D... tendant respectivement à l'annulation de l'arrêté du 23 mars 2018 par lequel le ministre de l'intérieur a maintenu son assignation à résidence sur le territoire de la commune de Saint-Jean-d'Angély dans les conditions fixées par l'arrêté ministériel du 24 novembre 2016, modifié par l'arrêté du 30 janvier 2017, sous réserve des dispositions de l'article 2 de l'arrêté, qui prévoient qu'il doit se présenter trois fois par jour à 9h.15, 15h.15 et 17h. 45 à la brigade de gendarmerie située sur cette commune, y compris le dimanche et les jours fériés, à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2019 par lequel le même ministre l'a assigné à résidence sur le territoire de la commune d'Aurillac, et enfin, l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le ministre de l'intérieur a modifié son lieu d'assignation à résidence sur le territoire de la commune d'Aurillac. L'affaire étant en état, il y a lieu d'y statuer, sans que ne soit susceptible d'y faire obstacle, dès lors que la procédure devant la juridiction administrative est écrite, l'absence de M. D... lors de l'audience, à laquelle il est représenté par son avocat.
Sur l'intervention du GISTI et de la LDH :
2. Eu égard à leurs objets respectifs, tant le GISTI que la LDH justifient d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien des moyens et conclusions de M. D.... Leur intervention doit, par suite, être admise.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
S'agissant des conclusions dirigées contre l'arrêté du 23 mars 2018 :
3. M. D... a été assigné à résidence sur le territoire de la commune de Saint-Jean-d'Angély par un arrêté du ministre de l'intérieur du 24 novembre 2016, lequel lui imposait de se présenter quatre fois par jour à la brigade de gendarmerie de la commune à 9 heures 15, 11 heures 45, 15 heures 15 et 17 heures 45, ainsi que de demeurer dans les locaux où il réside pendant un intervalle de temps de dix heures par jour allant de 21 heures à 7 heures. Par un arrêté du 30 janvier 2017, le ministre de l'intérieur a élargi le périmètre du lieu d'assignation à résidence de M. D... à une partie du territoire de la commune limitrophe de Lavergne, dans le secteur de Moulinveau. Par l'arrêté du 23 mars 2018 en litige, le ministre de l'intérieur a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, maintenu son assignation à résidence dans les conditions fixées par l'arrêté du 24 novembre 2016, modifié par l'arrêté du 30 janvier 2017, sous réserve des dispositions de l'article 2 de l'arrêté qui prévoient que M. D... doit se présenter trois fois par jour à 9 heures 15, 15 heures 15 et 17 heures 15 à la brigade de gendarmerie de cette commune, y compris les dimanches et les jours fériés.
4. Aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version issue de la loi n° 2018-187 du 20 mars 2018, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans un autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, dans les cas suivants : / (...) 5° Si l'étranger doit être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction du territoire prévue au deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal ; (...) La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée. (...) Par exception : c° Dans le cas prévu au 5° du présent article, la durée maximale de six mois ne s'applique pas. Au-delà d'une durée de cinq ans, le maintien sous assignation à résidence fait l'objet d'une décision spécialement motivée faisant état des circonstances particulières justifiant cette prolongation au regard, notamment, de l'absence de garanties suffisantes de représentation de l'étranger ou si sa présence constitue une menace grave pour l'ordre public. L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie (...) L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou d'une interdiction judiciaire ou administrative du territoire prononcés en tout point du territoire de la République peut, quel que soit l'endroit où il se trouve, être astreint à résider dans les lieux choisis par l'autorité administrative dans l'ensemble du territoire de la République (...) Si l'étranger présente une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, l'autorité administrative peut le faire conduire par les services de police ou de gendarmerie jusqu'aux lieux d'assignation (...) ".
Sur les moyens tirés de la violation des stipulations des articles 2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 5 de la même convention :
5. Aux termes de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Quiconque se trouve régulièrement sur le territoire d'un Etat a le droit d'y circuler librement et d'y choisir le lieu de sa résidence. (...) / 3. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l'ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. (...) ".
6. Pour contester le jugement du 28 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 mars 2018, M. D... reprend en appel, sans apporter aucune argumentation ou élément nouveaux, le moyen qu'il avait invoqué en première instance, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du fait de l'inconventionnalité des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 6 et 7 de leur jugement, lequel est suffisamment motivé.
7. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations par l'arrêté attaqué doit, en tout état de cause, être écarté.
8. Aux termes des stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf (...) : /a) s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent ; /b) s'il a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention régulière pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal en vue de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi ; / c) s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente (...) ; /f) s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours (...) Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale ".
9. Il résulte des modalités d'exécution de l'assignation à résidence telles que décrites au point 1 du présent arrêt que M. D... ne doit demeurer dans les locaux dans lesquels il réside que de 21 heures à 7 heures, soit une plage horaire de 10 heures par jour, et s'il est tenu de se présenter à la brigade de gendarmerie trois fois par jour, il peut librement se déplacer en dehors de ce temps dans le périmètre d'assignation, lequel s'étend à la commune de Saint-Jean-d'Angely et une partie de la commune de La Vergne, où il peut recevoir sa famille et les personnes de son choix, qu'il dispose d'un téléphone et d'un ordinateur portable. Ainsi, la mesure d'assignation dont fait l'objet M. D... n'a pas, compte tenu de ses modalités d'exécution, le caractère d'une mesure privative de liberté au sens des stipulations précitées, et la durée de la mesure d'assignation à résidence prise à l'égard d'étrangers qui ne peuvent être éloignés n'est pas de nature à transformer la mesure restrictive de liberté qu'est une assignation à résidence en une mesure privative de liberté, ainsi que l'a d'ailleurs jugé le Conseil constitutionnel (n° 2017-674 QPC). Par suite, le moyen de la requête tiré de ce que les conditions très rigoureuses de son assignation à résidence équivalent à une détention, alors qu'il ne rentre dans aucun des cas prévus par le texte précité, doit être écarté.
10. S'il est également soutenu par les intervenants que les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec les stipulations de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 de la convention européenne de protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des stipulations de l'article 5 § 4 de la même convention en ce que, d'une part, la mesure d'assignation à résidence ne procéderait pas d'un juge, et, d'autre part, que les garanties prévues par les stipulations de l'article 5 § 4 ne sont pas respectées, ainsi qu'il a été dit aux points 6 et 9 du présent arrêt, la mesure d'assignation à résidence n'entre pas dans le champ de ces stipulations. En outre, d'une part, l'étranger assigné à résidence en conséquence de la peine d'interdiction du territoire prononcée par le juge pénal a la possibilité de demander au juge judiciaire le relèvement de cette interdiction, ainsi que l'a d'ailleurs fait M. D.... D'autre part, la mesure d'assignation à résidence ou le refus d'abroger cette mesure par le ministre est susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge administratif, ainsi qu'y a également procédé à plusieurs reprises M. D..., le cas échéant en utilisant les procédures d'urgence que sont le référé suspension et le référé liberté, de même que sont susceptibles de faire l'objet d'un contrôle par le même juge les modalités de l'assignation à résidence. Enfin, la mesure d'assignation à résidence ne présente pas un caractère illimité dès lors que le maintien de cette mesure, aux termes des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, fait l'objet d'un examen tous les cinq ans par l'autorité administrative, et que son éventuelle prolongation doit résulter d'une décision spécialement motivée faisant état des circonstances particulières justifiant cette prolongation au regard, notamment, de la menace grave pour l'ordre public qu'est susceptible de représenter la présence de l'intéressé sur le territoire national, outre qu'elle doit se justifier par une perspective raisonnable d'exécution de l'obligation d'éloignement.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
11. D'une part, ainsi que l'a jugé le tribunal, si M. D... se prévaut de la décision rendue en sa faveur en 2009 par la Cour européenne des droits de l'homme par son arrêt n° 19576/08 du 3 décembre 2009, pour établir qu'il existait, à la date de l'arrêté attaqué, aucune perspective raisonnable d'éloignement vers son pays d'origine dès lors qu'il y encourrait des menaces pour sa vie ou sa liberté ou des risques de traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il résulte des termes mêmes de cette décision qu'elle a été prise en tenant compte des risques encourus par les suspects de terrorisme en cas de renvoi en Algérie au regard de la situation qui prévalait alors dans ce pays. En revanche, à la date d'édiction de l'arrêté attaqué, la même Cour a jugé, par son arrêt A.M. c/ France n° 12148/18 du 29 avril 2019 que, compte tenu des évolutions survenues en Algérie, la situation ne faisait plus obstacle, à elle seule, à l'éloignement des personnes suspectes de terrorisme vers ce pays. En outre, ainsi que le fait valoir, sans être contredit, le ministre, M. E... C..., qui appartenait à la même cellule terroriste que le requérant et a été condamné à une peine de dix ans d'emprisonnement dans le cadre du même procès terroriste, a accepté, du fait de ce changement de circonstances en Algérie, son expulsion vers ce pays alors même qu'il y faisait l'objet d'une condamnation par contumace à vingt ans de prison. Acquitté à l'issue de son procès d'appel, M. C... n'a fait l'objet depuis son retour, notamment pendant l'attente de l'issue de son procès, d'aucun traitement inhumain ou dégradant. Ainsi, M. D... n'apporte, en se bornant à faire état de considérations générales sur la situation politique en Algérie, aucun élément de nature à établir qu'à la date de la décision attaquée, il serait susceptible de faire l'objet en Algérie de traitements à caractère inhumain ou dégradant.
12. D'autre part, ainsi que l'a également jugé le tribunal, M. D... se borne à soutenir qu'aucun pays n'a voulu l'accueillir à ce jour malgré ses nombreuses demandes, sans apporter d'éléments au soutien de ses allégations, et le ministre de l'intérieur soutient, sans être contredit, que M. D... n'a renouvelé ses demandes que dans six Etats, et pour la dernière fois en 2013.
13. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce qu'il n'existe pas de perspective raisonnable d'exécution de son expulsion et qu'ainsi sont méconnues les dispositions de l'article L. 561-1 précitées doit être écarté.
Sur le moyen tiré de l'existence d'une erreur de fait et d'appréciation quant à la menace pour l'ordre public :
14. Pour contester le jugement du 28 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté en litige, M. D... reprend en appel, sans apporter aucune argumentation ou élément nouveaux, le moyen qu'il avait invoqué en première instance, tiré de l'erreur d'appréciation quant à l'existence d'une menace pour l'ordre public. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 16 de leur jugement. Au surplus, par une décision du 21 septembre 2022, la cour d'appel de Paris a rejeté la demande de M. D... tendant à ce qu'il soit relevé de la peine complémentaire l'interdiction définitive du territoire français prononcée à son encontre, en considérant qu'à la date de son arrêt M. D... constituait toujours une menace actuelle pour l'ordre public. Ce faisant, si la cour d'appel s'est pour partie fondée sur des faits postérieurs à la date de l'arrêté attaqué, ces faits, non-respect des obligations résultant de l'assignation à résidence, persistance de contacts et de liens avec la mouvance islamiste radicale et l'ultra-gauche, sont, compte tenu de la continuité du comportement de M. D..., de nature à éclairer la dangerosité que pouvait présenter M. D... à la date de l'arrêté en litige.
Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
15. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi ou qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
16. Si, ainsi que l'a jugé le tribunal, l'assignation à résidence de M. D... a pour effet de l'éloigner durablement de sa compagne, de nationalité française, de leurs trois enfants communs en bas âge et de la fille de sa compagne, alors qu'il est dépourvu de tout lien familial et personnel à Saint-Jean-d'Angely, compte tenu de ce qui est jugé au point 14, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des finalités poursuivies par cet arrêté.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
17. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ou à des à des traitements inhumains ou dégradants ".
18. L'assignation à résidence dont fait l'objet M. D..., laquelle ne présente pas un " caractère perpétuel ", contrairement à ce qu'il est soutenu, et ses modalités de mise en œuvre, telles que précédemment décrites, ne sont pas de nature à caractériser un traitement inhumain ou dégradant au sens des stipulations précitées. Par suite, le moyen tiré de la violation de ces stipulations, doit être écarté.
19. Si les intervenants invoquent enfin les dispositions de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et l'alinéa 10ème du préambule de Constitution de 1946, relatives au respect de la vie privée et familiale, ainsi que la décision n° 2017-674 QPC du Conseil constitutionnel du 1er décembre 2017 et ses réserves d'interprétation, ils n'en tirent aucun moyen propre à l'encontre de la décision attaquée.
20. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 23 mars 2018 doivent être rejetées.
Sur la légalité de l'arrêté du 14 février 2019 :
S'agissant du moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté :
21. En premier lieu, pour contester le jugement du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté M. D... reprend en appel, sans apporter aucune argumentation ou élément nouveaux, le moyen qu'il avait invoqué en première instance, tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté, notamment en ce que cet arrêté est ambiguë quant à sa portée. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 23 et 24 de leur jugement, lequel est suffisamment motivé, le tribunal n'étant pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments des parties, en particulier celui relatif à l'absence d'explicitation des raisons pour lesquelles l'hébergement dans l'hôtel où il demeurait ne peut se poursuivre, dès lors qu'il s'agit là du simple constat d'une situation de fait dont le ministre a entendu tirer les conséquences.
22. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 20 que l'arrêté du 23 mars 2018 n'est pas entaché d'illégalité. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que l'arrêté du 14 février 2019 est entaché d'illégalité du fait de l'illégalité de l'arrêté du 23 mars 2018.
23. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 à 18, les moyens invoqués à l'encontre de l'arrêté du 14 février 2019 tirés de la méconnaissance des articles 2 du protocole additionnel n° 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 5, 8 et 3 de la même convention, des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation quant à l'existence d'une menace pour l'ordre public doivent être écartés.
24. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 14 février 2019 doivent être rejetées.
Sur la légalité de l'arrêté du 13 mai 2019 :
25. En premier lieu, M. D... soutient, d'une part, que l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé du fait de l'absence de mention des motifs de son changement d'assignation à résidence, l'arrêté en litige se bornant à faire état de ce que l'hôtel Campanile n'était plus en mesure de l'héberger à compter du 17 mai 2019. Toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal, la décision attaquée vise les textes dont elle fait application, et fait état du motif de fait qui justifie le changement d'assignation à résidence : le constat que l'hébergement dans l'hôtel où demeurait M. D..., ne peut se poursuivre, état de fait dont le préfet a entendu tirer les conséquences, sans qu'il appartienne à ce dernier, à supposer même qu'il en ait eu connaissance, d'exposer les raisons pour lesquelles l'hôtel en cause n'était plus en mesure d'assurer cet hébergement.
26. D'autre part, si M. D... soutient également que l'arrêté est insuffisamment motivé en ce qu'il n'expose pas les raisons pour lesquelles il sera désormais hébergé dans une maison individuelle et non plus à l'hôtel, ce qui aurait pour conséquence de mettre fin à la prise en charge de ses repas, la décision attaquée n'avait pas à exposer de telles considérations dès lors qu'elle ne porte que sur le lieu de l'assignation à résidence et non sur la question de la prise en charge des repas de M. D... dont, au demeurant, l'intéressé, qui ne peut prétendre à aucun droit à être nourri, n'a pas demandé la prise en charge.
27. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement et de la décision attaqués doivent être écartés.
28. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été jugé aux points 20 et 24, les arrêtés des 23 mars 2018 et 14 février 2019 n'étant entachés d'aucune illégalité, M. D... ne peut se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de ces décisions à l'encontre de la décision du 13 mai 2019.
29. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, le moyen de la requête tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
30. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 9 et 10 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, alors en particulier que les conditions de l'assignation à résidence de M. D... à Aurillac ne sont pas plus restrictives que les conditions de l'assignation à Saint-Jean-d'Angely, les passages de l'intéressé à l'hôtel de police étant désormais fixés à deux par jour, être écarté dans ses différentes branches.
31. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de prise en charge des frais de repas de M. D... depuis son départ de l'hôtel qui l'hébergeait est constitutive d'un traitement inhumain ou dégradant au sens des stipulations de l'article 3 de la déclaration européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, non plus que les modalités de son assignation à résidence, ainsi qu'il a déjà été dit au point 18.
32. En sixième lieu, ainsi qu'il a été précédemment jugé pour les arrêtés des 23 mars 2018 et 14 février 2019, l'assignation à résidence dont il fait l'objet ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D..., garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et aux dispositions de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et de l'alinéa 10ème du préambule de la Constitution de 1946, invoquées par les intervenants, une atteinte disproportionnée eu égard aux buts qu'elle poursuit. Alors en particulier que, s'agissant de l'assignation à résidence de M. D... à Aurillac, celle-ci l'a rapproché de sa famille, qui réside à Carmaux, et que le passage d'un hébergement hôtelier à une maison individuelle n'est en aucune manière, susceptible de constituer une entrave au droit de l'intéressé à mener une vie privée et familiale.
33. En septième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... réside à 3,1 km de l'hôtel de Police où il doit se rendre deux fois par jour, soit 41 minutes de marche à pied, que le quartier résidentiel où est assigné l'intéressé est desservi par une ligne de bus, et le ministre soutient, sans être contredit, que M. D... dispose d'un vélo, ce qui lui permet de se rendre à l'hôtel de police sans difficultés, y compris les dimanches et jours fériés quand, ainsi qu'il est allégué par M. D..., les transports en commun ne fonctionnent pas. Par suite M. D... n'est pas fondé à soutenir que les conditions de son assignation à résidence ne seraient pas adaptées et proportionnées à sa situation, alors au demeurant qu'il est désormais soumis à deux passages journaliers au poste de police, au lieu de trois par le passé.
34. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 14 février 2019 doivent être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
35. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. D... tendant à ce que l'Etat, lequel n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à lui verser la somme de 7 000 euros qu'il demande au titre des frais liés à l'instance.
DECIDE :
Article 1er : L'intervention du GISTI et de la LDH est admise.
Article 2 : La requête de M. D... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au Groupe d'information et de soutien aux immigré.e.s (GISTI), à la Ligue des droits de l'homme (LDH) et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :
- M. I..., premier vice-président,
- Mme H..., première conseillère,
- M. G..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023.
Le président de chambre-rapporteur,
J. I... L'assesseure la plus ancienne,
M. H...
La greffière,
Y. F...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA00933 2