Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, 27 octobre 1993), que M. X... a contesté le rejet, par la direction des services fiscaux, de sa réclamation tendant au remboursement de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur qu'il a acquittée au titre de l'année 1992, en qualité de propriétaire d'un véhicule d'importation d'une puissance de 23 CV, mis en circulation le 9 décembre 1988 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief au jugement d'avoir rejeté sa demande de restitution de taxe, alors, selon le moyen, qu'en faisant application au litige de l'article 35 de la loi de finances rectificative du 22 juin 1993, qui confère rétroactivement valeur législative à la circulaire sur le fondement de laquelle la taxe a été établie en méconnaissance des règles constitutionnelles, le Tribunal a violé l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que si le droit de toute personne à un procès équitable, garanti par l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, peut être invoqué devant toute juridiction civile statuant en matière fiscale, les juges du fond ont pu, sans violer ce texte, faire application d'une loi nouvelle rétroactive entrée en vigueur au cours de l'instance, dès lors qu'elle n'avait pour objet que de valider une réglementation antérieure conforme au droit communautaire ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait encore grief à la décision attaquée d'avoir statué comme elle l'a fait, alors, selon le pourvoi, que les juges du fond n'ont pas répondu aux conclusions relatives au maintien de l'effet protecteur dont bénéficient les véhicules de fabrication nationale en raison du mode de détermination de la puissance fiscale, même après la suppression de la limitation du facteur K par la circulaire du 12 janvier 1988, ni aux conclusions faisant valoir que la puissance fiscale de son véhicule avait été fixée selon le système antérieur à l'entrée en vigueur de la circulaire précitée et jugé discriminatoire par la Cour de justice des Communautés européennes, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que le Tribunal, qui a relevé que le système de taxation contesté était fondé sur un barème dont la progressivité ne révélait aucune variation significative défavorable aux véhicules importés et qui a estimé que M. X... ne rapportait pas la preuve de la prise en compte d'éléments de nature à conférer un caractère discriminatoire à la taxe dont il s'est acquitté, a ainsi répondu aux conclusions invoquées ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen auquel M. X... a déclaré renoncer :
REJETTE le pourvoi.
MOYENS ANNEXES
Moyens produits par la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat aux Conseils pour M. X... ;
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de restitution de la taxe qu'il a acquittée au titre de l'année 1991-1992 pour son véhicule Jeep de 23 CV mis en circulation le 9 décembre 1988 ;
AUX MOTIFS QUE la loi de finances rectificative pour 1993 a, en son article 35, disposé que, pour l'application des articles 1010, 1599 G et 1599 sexdecies du Code général des impôts, la puissance fiscale des véhicules exprimée en chevaux-vapeur est égale à la puissance administrative déterminée lors de la réception du véhicule, conformément aux règles posées par les circulaires ministérielles figurant en annexe de la loi, et que des circulaires et leurs annexes ont valeur législative en tant qu'elles fixent les règles qui servent à la détermination du tarif de l'impôt ; que la même loi de finances rectificative a énoncé en son article 35-II que les dispositions du I ont un caractère rétroactif et s'appliquent, sous réserve des dispositions de justice passées en force de chose jugée, aux taxes instituées par les articles 1er de la loi du 30 juin 1956 et ceux d'autres lois énumérés jusqu'à la loi de finances pour 1983 et relatives à la taxe spéciale et à la taxe différentielle sur les véhicules terrestres à moteur ;
ALORS QUE méconnaît le droit du contribuable à ce que le litige qui l'oppose à l'Administration à la suite de la réclamation qu'il a formée en vue de la restitution de la taxe établie sur le fondement d'une simple circulaire, en méconnaissance des règles constitutionnelles, soit jugé dans le cadre d'un procès équitable opposant des parties disposant d'armes égales, l'application à ce litige de l'article 35 de la loi de finances rectificative du 22 juin 1993 conférant rétroactivement une valeur législative à ladite circulaire ; que dès lors, en opposant au demandeur, dont la réclamation datait du 21 janvier 1992, les dispositions de l'article 35 de la loi du 22 juin 1993, pour rejeter son moyen tiré de ce que la taxe qu'il avait acquittée au titre de l'année 1992 était dépourvue de fondement légal, le tribunal de grande instance a violé l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de restitution de la taxe qu'il a acquittée au titre de l'année 1991-1992 pour son véhicule Jeep de 23 CV mis en circulation le 9 décembre 1988 ;
AUX MOTIFS QUE le demandeur doit établir que le système de la taxe différentielle en vigueur pour la campagne 1989-1990 est basé sur un calcul ou prend compte des éléments qui permettent de favoriser la fabrication française de voitures ; qu'il n'apporte pourtant aucune critique précise sur les modes de calcul retenus par l'Administration, s'en tenant aux condamnations prononcées par la Cour de justice des Communautés européennes dans ses arrêts concernant la France rendus les 9 mai 1985 (Humblot) et 17 septembre 1987 (Feldain) ; que les dispositions prises le 12 janvier 1988 pour la détermination de la puissance fiscale des véhicules en vue de l'application des dispositions de l'article 1599 G ont supprimé, dans les modalités de calcul de cette puissance, la limitation du " facteur K " qui était défavorable aux voitures importées (grief retenu par l'arrêt Feldain) ; que le demandeur n'est donc pas fondé à soutenir que les dispositions appliquées pour le calcul de la taxe différentielle dont il s'est acquitté seraient incompatibles avec les stipulations de l'article 95 du Traité instituant la Communauté économique européenne ; que, si la circulaire du 12 janvier 1988 n'a pas d'effet obligatoire, il n'en demeure pas moins qu'elle fixe le mode de calcul utilisé effectivement par l'Administration pour déterminer la taxe différentielle acquittée par le demandeur, qui ne démontre pas en quoi le calcul est discriminatoire au regard du droit de la concurrence européen ;
1° ALORS QUE, dans ses conclusions, M. X... se proposait d'établir, par un calcul précis dont il exposait le détail, que même après la suppression, par la circulaire ministérielle du 12 janvier 1988, de la limitation du facteur K, le mode de détermination de la puissance fiscale des véhicules sur la base de la circulaire du 23 décembre 1977 demeurait défavorable aux véhicules à moteur atmosphériques importés des autres Etats membres de l'Union européenne, et comportait de ce fait un effet protecteur des véhicules de production nationale contrairement aux exigences de l'article 95 du traité de Rome ; qu'en s'abstenant de toute réponse à ce moyen, le tribunal de grande instance a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2° ALORS QUE, dans ses conclusions, M. X... faisait en outre valoir que la puissance fiscale de son véhicule Jeep avait été déterminée en fonction d'un procès-verbal de réception par type antérieur à l'entrée en vigueur de la circulaire du 12 janvier 1988 ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces conclusions de nature à faire apparaître que la puissance fiscale du véhicule du demandeur avait été fixée par application du système que, dans son arrêt du 17 septembre 1987, la Cour de justice des Communautés européennes avait jugé discriminatoire, le tribunal de grande instance a, de ce chef encore, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de restitution de la taxe qu'il a acquittée au titre de l'année 1991-1992 pour son véhicule Jeep de 23 CV mis en circulation le 9 décembre 1988 ;
AUX MOTIFS QUE le choix par l'administration fiscale, d'un barème appliquant une progression géométrique d'une catégorie à une autre, n'est pas en soi en contradiction avec l'article 95 du traité de Rome, dès lors qu'il n'existe dans la progression des coefficients aucune différence significative qui permette de déceler un éventuel effet discriminatoire ou protecteur en faveur des voitures de fabrication française ; que, si l'on examine les coefficients de progressivité dans le régime de la taxe différentielle appliqué au demandeur, on constate qu'ils varient de 1,17 à 2,36, les plus forts étant ceux de la catégorie des 8 à CV (2,36) et de la catégorie 12 à 14 CV (1,77), les coefficients de 1,22 - 1,49 et 1,50, appliqués aux catégories allant de 16 CV à 23 CV et au-delà, n'apparaissent donc pas particulièrement discriminatoires ;
ALORS QUE comporte un effet discriminatoire ou protecteur prohibé par l'article 95 du traité de Rome le système de taxation appliquant un coefficient multiplicateur dont la progression de tranche en tranche est plus forte à partir de celles qui correspondent à des véhicules d'importation que pour les tranches inférieures auxquelles correspond l'essentiel de la production nationale ; le Tribunal qui n'a pas déchargé le demandeur des taxes établies par application de l'article 20-1 de la loi du 30 décembre 1987, qui établit un tel système, a violé ledit article du traité de Rome.