LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 2 mai 2005 par la société Laboratoire Sicobel en qualité d'animatrice formatrice, sa mission consistant à assurer la promotion des produits commercialisés par la société sur les départements 30, 34 et 66 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale notamment d'une demande en paiement d'un rappel de frais de déplacement et de frais de repas ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt, après avoir constaté que le contrat de travail stipulait, en son article 6, un remboursement forfaitaire à raison de 9,90 euros par journée d'animation à Montpellier et Saint-Aunés, 27 euros pour Nimes et 45 euros pour Perpignan, ledit forfait couvrant les frais de déplacement et de déjeuner, retient que le simple énoncé de ces sommes suffit à établir que la prise en charge est nettement en deçà des frais réels, lesquels s'imputent nécessairement sur la rémunération de la salariée ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si la rémunération de la salariée avait été ramenée à une somme inférieure au SMIC, alors que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'il ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Laboratoire Sicobel à payer à Mme X... une somme à titre de rappel de frais de repas et de frais de déplacement, l'arrêt rendu le 2 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoire Sicobel.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Laboratoire Sicobel à payer à Melle X... la somme de 7 713,18 euros à titre de rappel de frais de déplacement et celle de 7 466,42 à titre de rappel de frais de repas,
AUX MOTIFS QUE ; « Les frais qu'un salarié justifie avoir exposés, pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due ;
L'article 6 du contrat de travail signé entre les parties le 2 mai 2005 prévoit pour les frais engagés par la salariée un remboursement forfaitaire à raison de 9,90 euros par journée d'animation à Montpellier et Saint Aunès, 27 euros pour Nîmes et 45 euros pour Perpignan ;ledit forfait couvrant les frais de déplacements et de déjeuner, les frais de péage et de parking étant remboursés en sus ;
Le simple énoncé de ces sommes suffit à établir que la « prise en charge »est nettement en deçà des frais réels, ce qu'au demeurant l'employeur reconnaît clairement en page 12 de ses conclusions ;
Il est établi et non discuté par le Laboratoire Sicobel que Mademoiselle X... était tenue de faire l'avance de l'ensemble de ces frais lesquels s'imputaient nécessairement sur sa rémunération, fût-ce sur un mois selon la célérité mise par l'employeur à procéder à leur remboursement ;
Au surplus, le laboratoire Sicobel ne nie pas que, bien que fixé de manière forfaitaire, le remboursement ne s'opérait, tel qu'écrit dans le contrat de travail , que sur production des justificatifs « des frais d'essence et note de restauration » ; que ce faisant, il soumettait la salariée à un contrôle de prise en charge desdits frais pour lesquels il avait mensuellement la preuve matérielle que leur remboursement s'effectuait en deçà de leur coût réel et qu'une part de ceux-ci s'imputait tous les mois sur le salaire ;
La Cour confirmera en conséquence la décision du conseil de prud'hommes qui, après avoir examiné les tableaux produits par la salariée, pris en considération les barèmes fiscaux en vigueur comme la convention collective applicable des produits chimiques, a condamné le Laboratoire Sicobel à payer à Melle X... la somme de 7 713,18 euros à titre de rappel des frais de déplacements et celle de 7466,42 euros pour rappel des frais de repas, toutes sommes discutées par l'employeur dans leur principe mais non pas dans leur mode de calcul ; »,
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE ; « Sur les rappels de frais
Attendu que Mademoiselle X... a dû supporter d'importantes dépenses pour pouvoir travailler dans des conditions normales.
Attendu que ces frais ne lui ont été remboursés que de manière partielle sur la base d'un forfait défini par l'entreprise très en deçà des frais réels déboursés, du barème fiscal en vigueur et de la convention des industries chimiques.
Le conseil dit allouer la somme de 7 713,18 euros s'agissant des frais de déplacement et la somme de 7466,42 euros s'agissant des frais de repas. »,
ALORS QUE la licéité d'une clause contractuelle prévoyant que salarié conservera la charge des frais professionnels moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire est soumise à la seule condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au Smic ou au minimum conventionnellement garanti ; qu'en constatant, pour allouer à Melle X... le rappel de ses frais de déplacement et de ses frais de repas calculé par cette dernière, que si l'article 6 du contrat de travail prévoyait un remboursement forfaitaire couvrant les frais de déplacement et de déjeuner dont le montant variait en fonction du lieu de mission de la salariée, « le simple énoncé de ces sommes suffit à établir que la prise en charge est nettement en deçà des frais réels » et qu'une part des frais s'imputait tous les mois sur le salaire, la Cour a statué par des motifs inopérants et partant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil