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15/06/2010 | FRANCE | N°09-40213

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 juin 2010, 09-40213


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 19 novembre 2008) que Mme X..., salariée de la société Thalès Avionics qui l'employait en qualité de gestionnaire de production, soutenant avoir fait l'objet dans le déroulement de sa carrière au sein de l'entreprise d'une différence de traitement en raison de ses fonctions de déléguée syndicale CGT, a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes ;
Attendu que la société Thalès Avionics fait grief à l'arrêt attaqué, de l

'avoir condamnée à verser une somme à titre de provision à la salariée, alors, sel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 19 novembre 2008) que Mme X..., salariée de la société Thalès Avionics qui l'employait en qualité de gestionnaire de production, soutenant avoir fait l'objet dans le déroulement de sa carrière au sein de l'entreprise d'une différence de traitement en raison de ses fonctions de déléguée syndicale CGT, a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes ;
Attendu que la société Thalès Avionics fait grief à l'arrêt attaqué, de l'avoir condamnée à verser une somme à titre de provision à la salariée, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une simple proposition transactionnelle ne peut valoir ni reconnaissance de dette ni reconnaissance de responsabilité à moins que celle-ci ne résulte expressément des termes de l'acte ; qu'en l'espèce, la société Thales Avionics avait proposé à Mme X..., par lettre du 15 juin 2006, un rattrapage de salaire selon des modalités qui y étaient détaillées ; que cette proposition transactionnelle faite par l'employeur et refusée par la salariée ne contenait de la part de l'employeur aucune reconnaissance expresse de dette, de responsabilité ou de discrimination syndicale subie par la salariée ; qu'en se fondant néanmoins sur ce document pour retenir que le principe de l'obligation de l'employeur n'était pas sérieusement contestable et le condamner à verser une provision à la salariée, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2048 du code civil ;
2°/ alors que les juges ne sauraient dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la lettre du15 juin 2006 mentionnait : "Conformément aux pratiques en vigueur au sein du groupe et approuvées par votre organisation syndicale, nous avons analysé votre déroulement de carrière en observant les situations des personnes de même niveau de formation initiale DUT ou BTS de même type de métier, embauchées entre 1979 et 1983" et proposait à la salariée à partir de cette analyse "les dispositions suivantes : - un rattrapage d'un montant de 41 000 euros - une augmentation individuelle de 15 % en date d'effet du 1er janvier 2004 - une augmentation individuelle de 15 % en date d'effet du 1er janvier 2005 - une augmentation individuelle de 6,3 % en date d'effet du 1er juin 2006 - une promotion au niveau V3 en date d'effet du 1er juin 2006" ; que la lettre du 16 juillet 2007 adressée par la société Thales Avionics à la section syndicale CGT, indiquait, concernant Mme X... : "une proposition a été transmise à Mme X... le 15 juin 2006. Mme X... ne l'a pas acceptée. Cette proposition reste valable et n'est pas susceptible d'évoluer" ; que dans aucun de ces deux courriers, l'employeur ne s'était donc reconnu coupable d'une quelconque discrimination syndicale à l'égard de Mme X... ; qu'en affirmant néanmoins qu' "en ce qui concerne Mme X..., ces deux courriers caractérisent une reconnaissance incontestable de responsabilité » (arrêt p. 4 § 5), la cour d'appel a dénaturé ces documents et violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ alors en tout état de cause que saisi d'une action fondée sur une discrimination syndicale, le juge doit recueillir les éléments propres à établir une différence de traitement et, si elle existe, examiner les éléments objectifs produits par l'employeur pour la justifier ; qu'en l'espèce la cour d'appel a relevé qu'aux termes des lettres du 15 juin 2006 et 16 juillet 2007, la société Thales Avionics n'avait pas indiqué ne pas avoir examiné les éléments objectifs étrangers à toute discrimination expliquant les disparités constatées, ni ne s'était réservée la possibilité de le faire ultérieurement si les pourparlers transactionnels échouaient ; que ces circonstances étaient totalement indifférentes dans la mesure où, devant les juges, l'employeur apportait des éléments justifiant les disparités constatées ; qu'en s'abstenant de procéder à leur examen, comme elle aurait dû le faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2141-5 du code du travail ;
Mais attendu que, procédant à une interprétation, exclusive de dénaturation, des correspondances adressées par la société à sa salariée les 15 juin 2006 et 16 juillet 2007, l'arrêt retient que l'employeur y reconnaît l'existence, au détriment de l'intéressée, d'une disparité de traitement dont il ne conteste pas qu'elle est en rapport avec ses activités syndicales et lui propose en conséquence un important rattrapage indiciaire et pécuniaire ; que la cour d'appel, qui n'était dès lors pas tenue de procéder à la recherche prétendument omise selon la troisième branche du moyen, que ses constatations rendaient inutiles, a exactement décidé que l'obligation de la société n'était pas sérieusement contestable ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Thales Avionics aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Thales Avionics
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société THALES AVIONICS à verser à madame Evelyne X... une provision de 41.000 euros, ce sans autre précision, de l'AVOIR condamnée à verser à madame X... la somme de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
AUX MOTIFS QUE si d'une manière générale une simple offre de transaction n'entraîne aucune reconnaissance de responsabilité mais doit s'analyser comme la volonté d'éviter les aléas d'une procédure judiciaire, il en va différemment lorsque les propositions d'une partie révèlent, à tout le moins, une absence de contestation sérieuse du principe de la créance ou de la responsabilité ; qu'en l'espèce, madame Eveline X... produit un courrier de la société THALES AVIONICS en date du 15 juin 2006 faisant suite à une entrevue du 17 mars 2006 et à une conversation téléphonique du juin 2006 ; ce courrier indique qu'après analyse du déroulement de carrière de madame Eveline X... en observant les situations des personnes de même niveau de formation initiale, de même métier, embauchée entre 1979 et 1983, est proposé un rattrapage d'un montant de 41.000 euros, une augmentation individuelle de 15 % en date d'effet du 1er janvier 2004, une augmentation individuelle de 15 % en date du 1er janvier 2005, une augmentation individuelle de 6,3 % en date d'effet du 1er janvier 2006, une promotion au niveau V3 en date d'effet du 1er juin 2006 ; qu'il convient de constater que ce courrier ne comporte aucunement que la proposition est faite dans le but d'éviter un litige, ou a un caractère confidentiel. Pas d'avantage, la société THALES AVIONICS n'indique qu'elle se réserve la possibilité ultérieure si les pourparlers échouaient de rechercher si existait des éléments objectifs étrangers à toute discrimination expliquant les disparités constatées ; au demeurant la société THALES AVIONICS n'indique pas ne pas avoir effectué cette recherche et n'envisager de l'effectuer qu'en cas d'échec de la démarche transactionnelle ; que dans un courrier du 16 juillet 2007 adressé à la section syndicale CGT Thales Avionics, la société THALES AVIONICS a passé en revue 7 dossiers de discrimination syndicale en litige et adressé ses dernières propositions. Il était indiqué, en ce qui concernait madame Eveline X..., sans aucune restriction que la proposition du 15 juin 2006 précitée restait valable et n'était pas susceptible d'évoluer ; cette proposition n'était accompagnée d'aucune condition. Les autres dossiers faisaient également l'objet d'examens particuliers ; certains examens mettant en évidence l'absence de toute différence dans les évolutions de carrière et, donc, l'absence de proposition ; un autre tenait compte de l'absence de disparité mais considérait que la qualité des performances du salarié justifiait le passage au niveau supérieur et une augmentation individuelle ; un autre, après nouvelle analyse de la situation aboutissait à un important réajustement salarial ; un autre constatait l'absence de lien entre la non évolution de la carrière débutée en 1980 et les mandats obtenus en 2006 et 2007, mais concluait à un approfondissement de la question de sa classification ; le dernier intéressait un salarié dont la performance était considérée par la société THALES AVIONICS comme très insuffisante et débouchait sur un plan d'action devant permettre de traiter la situation ; qu'il résulte de ce dernier courrier, qu'à aucun moment dans ses propositions la société THALES AVIONICS n'a entendu tenir pour acquis qu'elle ne discutait pas les raisons objectives susceptibles de justifier les différences constatées et se réservait la possibilité ultérieure à ce sujet. Tout au contraire, la société THALES AVIONICS a, salarié par salarié, par courrier officiel, entendu aborder la réalité d'une discrimination dans les conditions complètes de l'article L.1134-1 du code du travail ; qu'enfin la société THALES AVIONICS ne peut valablement soutenir ne pas avoir été en mesure de discuter les éléments objectifs expliquant la différence de traitement entre madame Eveline X... et les autres salariés, alors que précisément la lettre du 16 juillet 2007 précitée comporte une telle discussion pour les salariés dont elle contestait le principe même de toute discrimination et alors même qu'existait une disparité dans l'évolution de carrière ; qu'en conséquence en ce qui concerne madame Eveline X..., les deux courriers caractérisent une reconnaissance incontestable de responsabilité ; que la Cour confirme donc la décision déférée qui a considéré que le principe de l'obligation n'était pas sérieusement contestable ; que par contre, notre cour ne saurait considérer que les propositions précises faites par la société THALES AVIONICS au titre de la réparation du préjudice subi par madame X... ne comportent pas une part de recherche de compromis collective étrangère à la situation personnelle de celle-ci et doivent être prises au pied de la lettre. De telle sorte qu'il ne peut être considéré qu'il y a lieu, au-delà de l'allocation d'une provision justifiée par l'existence de l'obligation de la société THALES AVIONICS de prescrire les mesures de remise en état sollicitées qui ne se justifient pas et dont l'ampleur sera de la compétence du juge du fond ; que les éléments de la cause justifient que la société THALES AVIONICS soit condamnée à verser à madame X... la somme de 41.000 euros à titre de provision sans qu'il soit justifié d'identifier comme l'a fait le premier juge certains chefs de préjudice plutôt que d'autres ;
1. – ALORS QU'une simple proposition transactionnelle ne peut valoir ni reconnaissance de dette ni reconnaissance de responsabilité à moins que celle-ci ne résulte expressément des termes de l'acte ; qu'en l'espèce, la société THALES AVIONICS avait proposé à madame X..., par lettre du 15 juin 2006, un rattrapage de salaire selon des modalités qui y étaient détaillées ; que cette proposition transactionnelle faite par l'employeur et refusée par la salariée ne contenait de la part de l'employeur aucune reconnaissance expresse de dette, de responsabilité ou de discrimination syndicale subie par la salariée ; qu'en se fondant néanmoins sur ce document pour retenir que le principe de l'obligation de l'employeur n'était pas sérieusement contestable et le condamner à verser une provision à la salariée, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 2048 du code civil ;
2. – ALORS QUE les juges ne sauraient dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la lettre du 15 juin 2006 mentionnait : « Conformément aux pratiques en vigueur au sein du groupe et approuvées par votre organisation syndicale, nous avons analysé votre déroulement de carrière en observant les situations des personnes de même niveau de formation initiale DUT ou BTS de même type de métier, embauchées entre 1979 et 1983 » et proposait à la salariée à partir de cette analyse « les dispositions suivantes :
- un rattrapage d'un montant de 41.000 euros- une augmentation individuelle de 15 % en date d'effet du 01-01-2004- une augmentation individuelle de 15 % en date d'effet du 01-01-2005- une augmentation individuelle de 6,3 % en date d'effet du 01-06-2006 - une promotion au niveau V3 en date d'effet du 01-06-2006 » ; que la lettre du 16 juillet 2007 adressée par la société THALES AVIONICS à la section syndicale CGT, indiquait, concernant madame X... :
« Une proposition a été transmise à madame X... le 15/06/2006. Madame X... ne l'a pas acceptée. Cette proposition reste valable et n'est pas susceptible d'évoluer » ; que dans aucun de ces deux courriers, l'employeur ne s'était donc reconnu coupable d'une quelconque discrimination syndicale à l'égard de madame X... ; qu'en affirmant néanmoins qu'« en ce qui concerne madame Eveline X..., ces deux courriers caractérisent une reconnaissance incontestable de responsabilité » (arrêt p.4 § 5), la Cour d'appel a dénaturé ces documents et violé l'article 1134 du code civil ;
3. – ALORS en tout état de cause QUE saisi d'une action fondée sur une discrimination syndicale, le juge doit recueillir les éléments propres à établir une différence de traitement et, si elle existe, examiner les éléments objectifs produits par l'employeur pour la justifier ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a relevé qu'aux termes des lettres du 15 juin 2006 et 16 juillet 2007, la société THALES AVIONICS n'avait pas indiqué ne pas avoir examiné les éléments objectifs étrangers à toute discrimination expliquant les disparités constatées, ni ne s'était réservée la possibilité de le faire ultérieurement si les pourparlers transactionnels échouaient ; que ces circonstances étaient totalement indifférentes dans la mesure où, devant les juges, l'employeur apportait des éléments justifiant les disparités constatées ; qu'en s'abstenant de procéder à leur examen, comme elle aurait dû le faire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.2141-5 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40213
Date de la décision : 15/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 19 novembre 2008, Cour d'appel de Toulouse, 19 novembre 2008, 08/03457

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 19 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jui. 2010, pourvoi n°09-40213


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.40213
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