LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 31 3 de la loi n° 90 568 du 2 juillet 1990 modifié par la loi n° 2005 516 du 20 mai 2005, L. 2411 13, L. 1455 6, L. 1455 7 du code du travail et 40 du décret n° 82 453 du 28 mai 1982 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu en matière de référé, que M. Jean X..., engagé comme agent contractuel de droit privé le 16 août 1999 par La Poste, a été désigné, le 6 septembre 2005, par le syndicat en qualité de représentant au comité d'hygiène et de sécurité de l'agence de Geispolsheim où il était affecté ; qu'il a été licencié par lettre du 26 février 2007 ; que la CGT ayant contesté la régularité de ce licenciement prononcé sans autorisation administrative, La Poste a indiqué par lettre du 26 février 2007 que le salarié ne bénéficiait pas de cette protection ; que ce dernier a saisi la formation des référés du conseil de prud'hommes pour voir reconnaître sa qualité de membre de la délégation du personnel du CHSCT et juger que l'irrégularité de son licenciement constituait un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser en ordonnant sa réintégration ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt infirmatif retient qu'il résulte de l'article 31 3 de la loi du 2 juillet 1990 que les dispositions du titre III du livre 2 du code du travail alors en vigueur, sont applicables à la Poste ce dont il résulte qu'en l'absence d'exclusion légale expresse, il y a lieu de faire application de la procédure spéciale de licenciement prévue par l'article L. 236 11 devenu L. 2411 13 du code du travail qui figure dans ce titre ; que cependant ce dernier texte réserve cette protection aux salariés qui siègent en qualité de représentant du personnel au comité d'hygiène et de sécurité de La Poste, et qu'elle ne s'étend pas aux institutions représentatives mises en place par un accord au sein de l'entreprise qui ne sont pas de même nature que les institutions légales ; que le représentant syndical au CHSCT n'est pas prévu par le code du travail ; qu'il n'apparait donc pas qu'en refusant à M. Jean X..., désigné en tant que représentant syndical au comité d'hygiène et de sécurité et non en tant que représentant du personnel élu, la protection réservée par le code du travail aux seuls représentants élus d'un CHSCT, La Poste ait méconnu de façon manifeste les dispositions légales protectrices ;
Attendu cependant que selon l'article 31-3 de la loi 90-568 du 2 juillet 1990 relatif à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, "les titres III et IV du livre II du code du travail s'appliquent à l'ensemble du personnel de La Poste sous réserve des adaptations, précisées en Conseil d'Etat tenant compte des dispositions particulières relatives aux fonctionnaires et à l'emploi des agents contractuels", que, toutefois, aucun décret n'ayant été pris par le pouvoir réglementaire, l'organisation, au sein de La Poste, des CHSCT est toujours soumise aux dispositions du décret n° 2453 du 28 mai 1982 organisant les CHSCT dans la fonction publique de sorte qu'en application de l'article 40 de ce décret les représentants du personnel au CHSCT sont désignés par les organisations syndicales ;
Qu'en statuant comme elle a fait alors que M. Jean X..., en sa qualité de représentant du personnel au CHSCT bénéficiait du statut protecteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Confirme l'ordonnance du conseil de prud'hommes de Colmar du 4 mars 2008 ;
Condamne La Poste aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne La Poste à payer à M. Jean X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. Jean X...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. JEAN X... de ses demandes tendant à sa réintégration au poste d'opérateur au sein de l'agence COLIPOSTE de Geispolsheim de la société LA POSTE et de versement d'une provision ;
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article 3 du décret du 28 mai 1982, les règles définies au titre III du Livre deuxième, sous réserve de ses propres dispositions en matière d'hygiène et de sécurité, sont applicables aux salariés de LA POSTE ; parmi les règles de ce décret, figurent celles relatives au rôle des comités d'hygiène et de sécurité, leur composition et la désignation de leurs membres ; qu'en ce qui concerne la protection des membres du CHSCT, faute de dispositions particulières, il y a donc lieu de faire application des dispositions de l'article L. 236-11 du Code du travail, qui figure bien au titre III du Livre deuxième de ce code ; que ces dispositions renvoient à l'art. L 436-1 du même code : est donc applicable aux salariés qui siègent dans un CHSCT la protection applicable aux membres d'un comité d'entreprise ou aux représentants syndicaux prévus par l'art. L. 433-1 du code ; que cependant cette protection n'est étendue par l'art. L 236-11 susvisé qu'aux salariés qui siègent dans ce comité qu'en qualité de représentants du personnel ; qu'il a été jugé que la protection légale n'est due que si l'institution mise en place par un accord au sein de niveau de l'entreprise était de même nature que celle prévue par une institution légale génératrice du même statut (Cass. Soc. 29 janv. 2003, n° 00-45.961, Cass. Soc. 18 mai 2005) ; que le représentant syndical désigné au CHSCT est un organe dont l'existence n'est pas prévue par le code du travail, et n'est pas une institution de même nature que celle prévue par ce code et qu'aucun texte ne rend applicable de manière certaine la protection due aux représentants salariés élus au sein du CHSCT à ce représentant ; que s'agissant d'une protection exorbitante du droit commun les textes doivent recevoir devant la juridiction des référés une interprétation littérale et appropriée de manière non discutable ; qu'il n'apparaît donc pas qu'en refusant à M. JEAN X..., désigné en tant que représentant syndical auprès du comité CHSCT et non en tant que représentant du personnel élu, la protection réservée par les dispositions applicables du Code du travail aux seuls représentants du personnel élus au sein d'un CHSCT, La Poste ait méconnu de manière manifeste des dispositions légales protectrices applicables aux représentants du personnel et aux représentants syndicaux siégeant au comité d'entreprise ; que M JEAN X... invoque en outre l'art. 68 de la convention collective de La Poste, qui prévoit en effet la consultation obligatoire de la Commission consultative paritaire pour le licenciement d'un représentant du personnel ; que cette disposition n'est cependant pas de nature à répondre à la situation de M. JEAN X... qui se prévaut de la qualité de représentant syndical et critique non pas l'absence de consultation de cette commission mais bien l'absence de demande d'autorisation à l'Inspection du travail ; que quant à la convention n° 135 de l'Organisation internationale du travail également invoquée par M. JEAN X..., elle prévoit en effet la nécessité d'assurer une protection des salariés et de leurs représentants et proscrit le licenciement de salariés motivé par leur qualité de représentants des travailleurs ; que cependant ces dispositions, certes supérieures à la loi et aux règlements, n'apparaît pas manifestement méconnue par la procédure de licenciement qui a été précédée de la consultation de la Commission consultative à laquelle La Poste s'est conformée et dont il n'est pas allégué que la procédure de licenciement aurait été engagée contre M JEAN X... en raison de son activité à ce titre ; que la demande de M. JEAN X... rejetée, faute d'un trouble manifestement illicite, doit être rejetée ;
ALORS QU'aux termes de l'article L. 236-11, devenu L. 2411-13 du Code du travail applicable à LA POSTE, les représentants du personnel au CHSCT sont soumis à la procédure de licenciement exorbitante du droit commun ; qu'en vertu de l'article 40 du décret n°82-453 du 28 mai 1982, les représentants du personnel au CHSCT de LA POSTE sont désignés par les syndicats représentatifs ; qu'ils bénéficient donc du statut protecteur, peu important leur mode de désignation, différent de celui des autres entreprises ; qu'en omettant de solliciter l'autorisation de l'Inspection du travail avant de licencier M. JEAN X..., désigné représentant de la CGT au CHSCT de LA POSTE, celle-ci a commis un trouble manifestement illicite ; qu'en en décidant autrement, la Cour d'appel a violé les textes susvisés et l'article R. 516-31, devenu L. 1455-6 et 1455-7 du Code du travail ;