LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 14 avril 2011), que M. X..., directeur général délégué de la société par actions simplifiée GRS Valtech (la société GRS Valtech) a été révoqué de cette fonction par une assemblée générale ordinaire tenue le 27 juillet 2006 ; que soutenant que sa révocation avait été décidée dans des conditions injurieuses et vexatoires parce qu'il n'avait pas été convoqué pour présenter sa défense, M. X... a fait assigner la société GRS Valtech en réparation ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à la réparation du préjudice subi du fait des conditions abusives de sa révocation, alors selon le moyen, que la révocation d'un mandataire social donne lieu à indemnisation, indépendamment de ses éventuels motifs, dès lors qu'elle a été décidée dans des circonstances abusives, notamment, en l'absence de respect du principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a retenu que l'attitude du mandataire social, ses divergences et critiques formulées à l'encontre de la société n'appelaient pas d'autre réponse que la révocation sans obligation de discussion préalable ; qu'en considérant de la sorte que les motifs de la révocation litigieuse justifiaient la méconnaissance du principe de la contradiction à l'égard du mandataire révoqué, qui n'avait donc pas été révoqué abusivement, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que M. X... avait, préalablement à la décision de révocation, adressé un courriel au président-directeur général de la société GRS Valtech, par lequel il faisait part, non seulement des divergences de vue existant entre lui et ce dernier ainsi que des critiques qu'il formulait à l'encontre de la société, mais encore, en des termes clairs et précis, qui ne souffrent aucune interprétation, de sa volonté d'imposer à la société son point de vue, pour continuer à exercer ses fonctions ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que M. X... avait exprimé spontanément ses points de désaccord et, par une démarche personnelle, exprimé des conditions à la continuation de ses fonctions, la cour d'appel a exactement retenu que la société et ses organes n'avaient pas l'obligation d'ouvrir une discussion préalable à la décision de révocation face aux critiques et alternatives formulées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la première branche du moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la société GRS Valtech la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le directeur général (M. X..., l'exposant) d'une société anonyme simplifiée (la SAS GRS VALTECH), révoqué de ses fonctions, de sa demande tendant à la réparation du préjudice subi du fait des conditions abusives de cette révocation ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE, en droit, il n'était pas discuté que devait s'appliquer l'article 15 des statuts de la société GRS VALTECH selon lequel le directeur général était révocable à tout moment sans motif, ce qui pouvait donner lieu au versement d'indemnités, et qu'il appartenait au juge de rechercher si cette révocation provenait d'un abus de droit commis par la société, pouvant résulter des conditions injurieuses et vexatoires dans lesquelles la décision avait été prise ; que cette appréciation des circonstances de fait ne pouvait résulter que d'un examen in concreto des conditions dans lesquelles la révocation était intervenue ; que le mail du 26 juillet 2006 envoyé par M. X... à M. Y..., président-directeur général, témoignait non seulement des divergences de vue existant entre lui et le président mais également des critiques qu'il formulait à l'encontre de la société dont il était le directeur général délégué ; que ce mail exprimait en termes clairs et précis la volonté de M. X... d'imposer à la société son point de vue pour continuer à exercer ses fonctions ; que cette attitude n'appelait pas d'autre réponse que la révocation du mandat, décision prise par l'assemblée générale du 27 juillet 2006 ; que la société et ses organes n'avaient aucune obligation de prendre la précaution d'ouvrir une discussion préalable à une telle décision face aux critiques et alternatives formulées ; que la société avait tiré les conséquences de l'attitude du mandataire social, qu'elle n'avait ni commis un abus ni agi de manière vexatoire et injurieuse ; que, par ailleurs, la décision de révocation lui avait été communiquée dans une lettre du 24 août 2006 et un courrier du 12 septembre 2006 ; qu'il ressortait de l'ensemble des pièces données au débat qu'en réalité M. X... n'avait pas rejoint le poste dans lequel il avait été nommé comme chargé de mission quand, dès le 5 septembre 2006, M. Y... lui demandait de justifier d'un emploi du temps ; que dans l'ensemble des faits qui s'étaient déroulés avant et après la révocation du mandat social, la société GRS VALTECH n'avait commis aucun abus ; que la décision des premiers juges dont les motifs étaient pertinents devait être confirmée (arrêt attaqué, p. 3, 5ème à 13ème al., et p. 4, 1er à 3ème al.) ; que, en raison du changement comportemental de M. X... survenu antérieurement à la révocation et à ses désaccords sur la conduite de la société exprimés par mail du 26 juillet 2006, la société GRS VALTECH était justifiée dans sa révocation ; que, par l'assemblée générale du 27 juillet 2006, celle-ci avait révoqué M. X... de son mandat sans lui laisser la possibilité de s'expliquer ; qu'en matière de révocation des dirigeants sociaux, le principe des droits de la défense devait être respecté ; que, dans le cadre des SAS, fondées sur une grande liberté d'organisation, ce principe s'imposait seulement lorsque le dirigeant avait une chance de convaincre l'organe qui avait décidé sa révocation de revenir sur sa décision ; qu'en l'espèce, même si M. X... n'avait pas eu la possibilité de s'expliquer sur sa révocation, compte tenu de la répartition du capital, détenue très majoritairement par la société VEOLIA PROPRETE et du mode de révocation utilisé, son audition n'était pas de nature à empêcher sa révocation (jugement confirmé, p. 3, 5ème à 9ème attendus, 11ème à 15ème attendus) ;
ALORS QUE la révocation d'un mandataire social est abusive dès lors que, quels que soient son mode et l'organisation de la société, elle a été décidée brutalement sans respecter le principe de la contradiction, lequel exige que le mandataire ait été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à la décision ; qu'en l'espèce, en retenant que, du seul fait de son organisation spécifique et du mode de révocation utilisé, la société n'avait pas commis d'abus en révoquant son directeur général sans lui avoir laissé la possibilité de s'expliquer sur sa révocation, autrement dit sans avoir respecté le principe de la contradiction, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE, au surplus, la révocation d'un mandataire social donne lieu à indemnisation, indépendamment de ses éventuels motifs, dès lors qu'elle a été décidée dans des circonstances abusives, notamment, en l'absence de respect du principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a retenu que l'attitude du mandataire social, ses divergences et critiques formulées à l'encontre de la société n'appelaient pas d'autre réponse que la révocation sans obligation de discussion préalable ; qu'en considérant de la sorte que les motifs de la révocation litigieuse justifiaient la méconnaissance du principe de la contradiction à l'égard du mandataire révoqué, qui n'avait donc pas été révoqué abusivement, la cour d'appel a derechef violé l'article 1382 du code civil.