LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que Mme X..., qui avait sollicité de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (la caisse) un relevé de carrière, a contesté les reports figurant à son compte de cotisations, notamment, pour les années 1992 et 1993 au cours desquelles elle avait effectué des stages de formation en vue d'un reclassement professionnel ; qu'elle a saisi d'un recours la juridiction de sécurité sociale ;
Sur le premier moyen, pris en seconde branche :
Vu les articles L. 962-3 (devenu l'article L. 6342-3) du code du travail, L. 351-3, R. 351-12 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 25 et 26 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 1990 relative à l'assurance-chômage agréée par l'arrêté ministériel du 14 mai 1990 et l'article 51 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 1993 relative à l'assurance-chômage agréée par l'arrêté ministériel du 4 janvier 1993 ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les cotisations de sécurité sociale des stagiaires qui sont rémunérés par l'Etat ou la région pendant la durée du stage sont intégralement prises en charge par l'Etat ou la région ; qu'il résulte des deux suivants que sont prises en considération en vue de l'ouverture du droit à pension les périodes pendant lesquelles l'assuré a bénéficié d'un revenu de remplacement ; qu'il résulte des trois derniers que sur les allocations de formation-reclassement, qui constituent des revenus de remplacement, est précomptée une participation affectée au financement des retraites complémentaires des chômeurs indemnisés ;
Attendu que pour ordonner à la caisse de régulariser le relevé de carrière de Mme X... concernant la période du 2 novembre 1992 au 28 mai 1993 et de recalculer en conséquence le montant des salaires à reporter sur son compte pour cette période, l'arrêt relève que Mme X... a bénéficié, pendant cette période, d'une allocation formation-reclassement par décision de l'ASSEDIC du 17 novembre 1992 ; qu'il retient que peu importe la personne, Etat ou UNEDIC, prenant en charge l'allocation de formation-reclassement de l'intéressée, dès lors qu'il résulte de la lecture des avis de paiement de cette allocation que des cotisations précompte retraite étaient prélevées tous les mois de la formation sur la base d'un taux de 1,20 % ; qu'il s'ensuit que Mme X... a ainsi cotisé normalement au régime général de retraite comme un salarié et non comme un demandeur d'emploi ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que les précomptes opérés sur les allocations de formation-reclassement versées par l'ASSEDIC sont affectés au financement des retraites complémentaires et non de la retraite de base du régime général, d'autre part, que les périodes pendant lesquelles un assuré perçoit des allocations de formation-reclassement, qui sont des revenus de remplacement, sont des périodes assimilées à des périodes d'assurance prises en considération en vue de l'ouverture du droit à pension mais ne pouvant donner lieu à report de salaires au compte de l'assuré, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner la caisse à payer à Mme X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt, par motifs propres et adoptés, retient que la caisse a validé au fur et à mesure de la procédure les périodes dont elle a refusé initialement la validation et a commis une faute consistant à se contenter des seuls avis de paiement par les ASSEDIC pour conclure que Mme X... bénéficiait d'indemnités de chômage ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la caisse, qui n'a pas validé la période litigieuse, était fondée à opposer à l'intéressée le fait que les avis de paiement reçus par celle-ci pendant cette période émanaient de l'ASSEDIC, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, sauf celle concernant la période du 6 novembre 2000 au 9 mars 2001, l'arrêt rendu le 20 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute Mme X... de son recours ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
;Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés ;
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR annulé la décision du 24 juin 2005 de la Commission de recours amiable de la CNAV concernant la période du 2 novembre 1992 au 28 mai 1993, d'AVOIR ordonné à la Caisse de régulariser le relevé de carrière de Mme X... et de recalculer en conséquence le montant des salaires à reporter sur son compte pour les périodes précitées et d'AVOIR condamné la Caisse à payer Mme X... 2.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « il n'est pas contesté que Madame Christine X... a suivi un stage de formation niveau III "correspondant assurance qualité" du 2 novembre 1992 au 28 mai 2003 au sein de l'école d'ingénieurs CESI-Paris Ile de France ; elle a bénéficié, pendant cette période, dune allocation formation reclassement (AFR) par décision de l'ASSEDIC de Palaiseau du 17 novembre 1992 ;
Aucune des parties ne produit aux débats la convention UNEDIC-Etat du 26 juin 1990 en vigueur à l'époque de ce stage ; en fait, peu importe l'autorité administrative prenant en charge l'AFR de Madame Christine X..., Etat ou UNEDIC, dès lors qu'il résulte de la lecture des avis de paiement de cette AFR produits par l'intimée que des cotisations précompte retraite étaient prélevées tous les mois de la formation sur la base d'un taux de 1,20%; que Madame Christine X... a ainsi cotisé normalement au régime retraite générale comme un salarié et non comme un demandeur d'emploi ; ce n'est qu'à l'issue de ce stage qu'elle sera de nouveau demandeur d'emploi percevant d'ailleurs l'allocation dégressive unique (AUD) comme le lui a précisé l'ASSEDIC dans une lettre datée du 8 juin 1993, Madame Christine X... étant "réinscrite" comme demandeur d'emploi ce qui signifie bien qu'elle ne l'était plus dans la période de "Formation AFR" (…) ;
L'incertitude sur le montant d'une retraite peut inciter l'assuré à continuer à travailler pour améliorer financièrement ses conditions de retraité et ne pas demander la liquidation de la retraite, ce qui est le cas de Madame Christine X... dont le préjudice est certain et direct ; en l'espèce, la Caisse a validé au fur et à mesure de la procédure les périodes dont elle a refusé initialement ladite validation ;
En conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon l'article L.962-1 du Code du Travail (ancien article L.980-1), toute personne qui suit un stage de formation professionnelle continue est obligatoirement affilié à un régime de sécurité sociale.
L'article L.962-3 de ce Code (ancien article L.980-3) précise que les cotisations de sécurité sociale des stagiaires qui sont rémunérés par l'Etat ou la Région pendant la durée du stage sont intégralement prises en charge par l'Etat. Ces cotisations sont calculées sur la base de taux forfaitaires fixés par voie réglementaire.
L'article L.351-3 alinéa 4 du Code du Travail relatif au revenu de remplacement en cas de chômage involontaire prévoit d'ailleurs que "le temps consacré avec l'accord de l'ANPE à des actions de formation rémunérées s'impute sur la durée de services de l'allocation d'assurance".
Il ressort ainsi de ces différentes dispositions, d'une part, que durant un stage de formation professionnelle financé par l'Etat ou la Région, les cotisations de sécurité sociale sont versées et couvrent notamment l'assurance vieillesse et, d'autre part, que la durée d'un stage de formation professionnelle effectuée en accord avec l'ANPE durant une période de chômage involontaire s'impute sur la durée de l'assurance chômage.
En l'espèce, (…) pour la période du 02 novembre 1992 au 28 mai 1993, Madame X... verse aux débats :
- une attestation de fin de cycle établi par l'Ecole d'Ingénieurs CESI du 28 mai 1993 précisant qu'elle a suivi la "formation de niveau III correspondant assurance qualité" ;
- une attestation d'inscription à un stage de formation dans le cadre d'une demande d'Allocation de Formation de Reclassement de l'ANPE du 05 novembre 1992 précisant bien la période en cause et prévoyant un stage de 1.131 heures ;
- des avis de paiement des ASSEDIC de l'Essonne mentionnant le versement de cotisations précompte retraite et de cotisations sociales - un courrier du 20 avril 1993 de l'Agence Locale pour l'Emploi de PALAISEAU suivant lequel durant cette période de formation elle était radiée de la liste des demandeurs d'emploi et suivant lequel elle se doit de se réinscrire comme demandeur d'emploi afin de pouvoir percevoir les allocations chômage correspondantes ;
- un courrier du 08 juin 1993 précisant qu'elle a été réinscrite comme demandeur d'emploi le 30 mai 1993 et qu'elle bénéficie ainsi de l'allocation unique dégressive.
Il résulte de ces éléments que du 02 novembre 1992 au 28 mai 1993 (…), Madame X... a été radiée de la liste des demandeurs d'emploi, qu'elle n'était pas indemnisée au titre de l'assurance chômage mais qu'elle était rémunérée au titre d'un stage de formation continue financé par l'État.
En conséquence, il convient d'annuler la décision du 24 juin 2005 de la Commission de Recours Amiable de la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse concernant les périodes allant du 02 novembre 1992 au 28 mai 1993 … et de lui ordonner de régulariser le relevé de carrière de Madame Christine X..., de recalculer en conséquence le montant des salaires à reporter sur son compte sur la base de taux forfaitaires fixés par voie réglementaire après, le cas échéant, s'être renseignée sur les modalités de répartition du nombre d'heures effectuées durant ces stages, notamment auprès des organismes figurant dans les différentes pièces produites aux débats comme l'ASSEDIC de l'Essonne, l'Agence Locale pour l'Emploi de PALAISEAU ou l'ANPE de MASSY.
Il ressort enfin des différents courriers recommandés envoyés depuis le début de l'année 2003 que Madame X... a tenté de faire valoir en vain ses périodes de stage de formation auprès des différents agents de la CNAV et auprès de la Commission de Recours Amiable en produisant depuis l'origine les différents documents qu'elle a finalement soumis à l'appréciation du Tribunal. Ainsi, pour s'être contentée des seuls avis de paiement par les ASSEDIC pour conclure que Madame X... bénéficiait d'indemnités de chômage, la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse a commis une faute et doit être déclarée responsable du préjudice qu'elle a causé à Madame X.... Compte-tenu du temps que cette dernière a consacré et de l'incertitude dans laquelle elle s'est trouvée pendant près de trois ans sur l'évaluation du montant de sa retraite, la somme de 2.000 euros doit être allouée à Madame X... pour le préjudice ainsi subi.
La Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse sera ainsi condamnée à payer à Madame X... la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts » ;
1. ALORS QU'aucune des parties n'avait fait valoir que les allocations de formation reclassement qui avaient été versées à Mme X... pendant la période du 2 novembre 1992 au 28 mai 1993 auraient fait l'objet de retenues de cotisations au titre du régime de retraite de base ; qu'en retenant que Mme X... avait cotisé normalement au régime de retraite générale comme un salarié pendant cette période, du fait du prélèvement tous les mois de la formation de cotisations pré-compte retraite, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 7 du nouveau code de procédure civile ;
2. ALORS QU' est comptée comme période d'assurance pour l'ouverture du droit à pension de vieillesse la période pendant laquelle l'assuré a bénéficié, au titre du régime d'assurance-chômage, d'une allocation de formation-reclassement qui a fait l'objet d'un précompte de cotisations destinées au financement des retraites complémentaires, peu importe que durant cette période de formation, l'assuré ait été radié de la liste des demandeurs d'emploi ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L 351-3, R 351-12 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 25 et 26 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 1990 relative à l'assurance-chômage et l'article 51 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 1993 relative à l'assurance-chômage.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la CNAV à payer à Madame X... la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE "l'incertitude sur le montant d'une retraite peut inciter l'assuré à continuer à travailler pour améliorer financièrement ses conditions de retraité et ne pas demander la liquidation de la retraite, ce qui est le cas de Madame Christine X... dont le préjudice est certain et direct ; qu'en l'espèce, la Caisse a validé au fur et à mesure de la procédure les périodes dont elle a refusé initialement ladite validation"
ET AUX MOTIFS QUE "Il ressort enfin des différents courriers recommandés envoyés depuis le début de l'année 2003 que Madame X... a tenté de faire valoir en vain ses périodes de stage de formation auprès des différents agents de la CNAV et auprès de la Commission de Recours Amiable en produisant depuis l'origine les différents documents qu'elle a finalement soumis à l'appréciation du Tribunal. Ainsi, pour s'être contentée, des seuls avis de paiement par les ASSEDIC pour conclure que Madame X... bénéficiait d'indemnités de chômage, la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse a commis une faute et doit être déclarée responsable du préjudice qu'elle a causé à Madame X.... Compte tenu du temps que cette dernière a consacré et de l'incertitude dans laquelle elle s'est trouvée pendant près de trois ans sur l'évaluation du montant de sa retraite, la somme de 2.000 euros doit être allouée à Madame X... pour le préjudice ainsi subi".
ALORS QUE la divergence d'interprétation d'un texte ne constitue pas une faute ; qu'en reprochant à la CNAV d'avoir considéré que Madame X... bénéficiait d'indemnités de chômage quand cette position reposait sur une interprétation des textes applicables divergente de celle adoptée par l'assurée, la Cour d'appel a violé l'article du Code civil ;
ET ALORS QUE la CNAV faisait valoir qu'au mois de septembre 2004, Madame X... pouvait prétendre à une prestation à taux plein quel que soit son nombre de trimestres de sorte que rien ne s'opposait à ce que l'intéressée effectue sa demande de retraite à l'effet de sauvegarder ses droits, ce qu'elle n'avait pas fait ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des conclusions de la CNAV dont il résultait l'absence de lien de causalité entre la faute prétendument commise par la CNAV et le préjudice subi par l'assurée, la Cour d'appel a violé l'article 417 du Code de procédure civile.