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14/11/2013 | FRANCE | N°12-22655

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 novembre 2013, 12-22655


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 1275, 1289 et 1290 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SCI Y... ayant acquis, en vue de leur location, douze appartements en état futur d'achèvement qui furent livrés avec retard, a assigné la société Querraggia en exécution de son engagement à réparer les pertes de revenus locatifs, laquelle a, reconventionnellement, sollicité la condamnation de la SCI à lui payer le solde du prix de vente des appartements ;

que la SCI Y... lui a alors opposé que sa créance était éteinte par comp...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 1275, 1289 et 1290 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SCI Y... ayant acquis, en vue de leur location, douze appartements en état futur d'achèvement qui furent livrés avec retard, a assigné la société Querraggia en exécution de son engagement à réparer les pertes de revenus locatifs, laquelle a, reconventionnellement, sollicité la condamnation de la SCI à lui payer le solde du prix de vente des appartements ; que la SCI Y... lui a alors opposé que sa créance était éteinte par compensation avec la créance de prix de vente du terrain d'assiette de la construction dont M. Y... était personnellement titulaire, et qui avait fait l'objet de la délégation de paiement « contenant ordre irrévocable de paiement » à la société Querraggia ;
Attendu que pour rejeter les demandes de la société Querraggia et la condamner à payer à la société Y... la somme de 9 893, 56 euros, l'arrêt retient que la délégation de créance permettait à la société Y... de suppléer le défaut de réciprocité des créances et de se prévaloir d'une compensation de plein droit entre ce qu'elle devait à la société Querraggia et la créance dont son représentant légal, M. Y..., était titulaire, à titre personnel, envers la société Querraggia ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'acte litigieux n'emportait pas novation, en sorte que faute d'avoir constaté l'existence d'une telle novation, seule susceptible de justifier la compensation qu'elle retenait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il opère une compensation de plein droit entre la créance détenue par la société Querraggia et celle détenue par M. Y... et condamne la société Querraggia à payer à la société Y... la somme de 9 893, 56 euros, l'arrêt rendu le 6 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Querraggia.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR, après compensation des créances réciproques, condamné la société QUERRAGGIA à payer à la société Y... JL la somme de 9. 893, 95 ¿ et D'AVOIR donc écarté la demande que la société QUERRAGGIA avait formée contre la société Y... afin qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de 107. 201, 32 ¿ représentant les intérêts contractuels échus du 16 janvier 2009 au 9 novembre 2010 sur le prix de vente des appartements ;
AUX MOTIFS QUE, sur la compensation, il est constant que la société QUERRAGGIA détenait envers la société Y... une créance d'un montant de 492. 553, 92 euros en principal au titre du solde du prix des appartements ; que, toutefois, comme le fait valoir la société Y..., il résulte du décompte établi dans une lettre en date du 16 septembre 2008 émanant de Maître X..., notaire choisi par les parties dans le cadre de l'opération immobilière litigieuse, que cette créance devait être payée à due concurrence par compensation avec celle d'un montant de 457. 247, 05 ¿, exigible au plus tard le 12 mai 2009, détenue par M. Joseph Y... envers la société QUERRAGGIA au titre de la vente du terrain sur lequel la résidence a été édifiée ; que, comme le soutient la société QUERRAGGIA, le fait que le titulaire de la seconde créance soit M. Y... personnellement et non la société Y... dont il est le gérant, était de nature à empêcher la compensation légale ; que toutefois, la société Y... soutient avec exactitude que cet obstacle a disparu suite à la signature à son profit par M. Y..., par acte du 7 avril 2009, d'une délégation de paiement avec ordre irrévocable de paiement donné à Maître X...portant sur le versement à la société QUERRAGGIA de la somme de 457. 247, 05 ¿ afin de permettre à la société Y... de s'acquitter à due concurrence du prix d'acquisition des appartements ; qu'en raison de cette délégation de paiement, qui n'avait pas à être acceptée par la société QUERRAGGIA, contrairement à ce que celle-ci prétend, puisqu'elle portait sur une créance dont M. Y... était titulaire, la compensation s'est opérée de plein droit entre les dettes respectives devenues certaines, liquides et exigibles à compter du 7 avril 2009, date de la délégation de paiement destinée à mettre en oeuvre la compensation convenue dans l'écrit du 16 septembre 2008, comme le soutient la société Y... ; que, par suite, la société QUERRAGGIA n'est pas fondée à se prévaloir des effets de la cession de créance entre M. Y... et la société Y... signifiée le 9 novembre 2010 mais qui n'est intervenue qu'en tant que de besoin, compte tenu de la délégation de paiement précitée dont le contenu est d'ailleurs précisément rappelée dans l'acte de cession ; que dans la mesure où par application de la compensation légale, la créance de la société QUERRAGGIA s'est éteinte jusqu'à concurrence de 35. 306, 87 ¿ (492. 553, 92-457. 247, 05), cette dernière ne peut prétendre à l'allocation d'intérêts de retard d'un montant de 107. 230, 32 ¿ qu'elle a arrêté sur la base d'un principal de 492. 553, 92 ¿ ; qu'en considération d'autres sommes, non contestées, dues par la société QUERRAGGIA à la société Y..., le compte entre les parties s'établit ainsi qu'il suit :- somme due à la société QUERRAGGIA après compensation légale : 35. 306, 87 ¿ ;- sommes dues à la société Y... : au titre de l'engagement de garantie du 28 octobre 2008 : 23. 102, 21 ¿, au titre de la transaction faisant suite au jugement du 24 octobre 2009 : 22. 098, 22 ¿, total : 45. 200, 43 ¿ ; qu'après compensation judiciaire de ces créances incontestablement connexes, la société QUERRAGGIA est en définitive redevable envers la société Y... de la somme de 9. 893, 56 ¿ qui correspond au montant de la condamnation prononcée à son encontre par le premier juge. Il convient par suite de la débouter de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 118. 452, 41 ¿ ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la société QUERRAGGIA sollicite en sa faveur le paiement du solde du prix des appartements de 492. 553, 92 ¿ mais qu'il apparaît du décompte du notaire du 16 septembre 2008 que la société QUERRAGGIA est redevable d'une somme de 457. 247, 05 ¿ correspondant au prix du terrain d'assiette de la construction, sachant que la SCI étant transparente fiscalement et juridiquement, le créancier peut être M. Y... Jean-Louis, associé majoritaire et gérant de la SCI ;
1. ALORS QUE sous l'intitulé ¿ ¿ délégation de paiement contenant ordre irrévocable de paiement'', la société Y... et son gérant, M. Y..., sont convenus, par acte du 7 avril 2009, que M. Y... donnait « l'ordre irrévocable à un notaire niçois/ de verser, à concurrence de la somme de QUATRE CENT CINQUANTE SEPT MILLE TROIS CENT QUARANTE SEPT EUROS ET CINQ CENTS (457. 347, 05 EUR), le prix devant lui revenir de la vente à la société QUERRAGGIA susnommée, des biens immobiliers lui appartenant en propres sis à CORTE (20250) ¿ A la société QUERRAGGIA, susnommée/ pour paiement à due concurrence du prix des droits et biens immobiliers dépendant d'un ensemble immobilier divisé en copropriété édifiés à CORTE (Haute Corse) ¿ afin de permettre à la société SCI Y... JL de s'acquitter-à hauteur de pareille somme-du prix d'acquisition desdits biens et droits immobiliers » et que « la présente délégation produira ses effets au jour de l'appel de fonds par Maître François-Régis X...du solde du prix de vente des biens et droits immobiliers précités » ; qu'il résulte ainsi des termes clairs et précis de l'acte du 7 avril 2009 qu'en donnant instruction à son notaire de s'acquitter de la dette de la société Y... (délégant) envers la société QUERRAGGIA (délégataire) sur ses fonds propres, M. Y..., en tant que délégué, a seulement repris à son compte l'obligation contractée par la société Y... envers la société QUERRAGGIA sans transférer corrélativement à la société Y... la créance de prix de vente du terrain dont il était titulaire pour sa part envers la société QUERRAGGIA ; qu'en décidant, à l'inverse, qu'une telle délégation de créance permettait à la société Y... de suppléer le défaut de réciprocité des créances et de se prévaloir d'une compensation de plein droit entre ce qu'elle devait à la société QUERRAGGIA et ce que cette dernière restait devoir à M. Y... qui aurait transmis à la société Y... sa créance par l'effet de l'acte du 7 juillet 2009 portant délégation de créance et ordre irrévocable de paiement, la cour d'appel a donc dénaturé les termes clairs et précis de l'acte du 7 avril 2009 ; qu'ainsi, elle a violé l'article 1134 du Code civil ;
2. ALORS QUE la délégation est un acte juridique par lequel une personne, appelée délégant, obtient d'une autre, appelée déléguée, qu'elle s'engage envers une troisième, appelée délégataire, laquelle accepte cet engagement ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence de toute cession de créance, la seule délégation de personne n'emporte pas transfert au déléguant de la créance dont le délégué reste titulaire envers le délégataire de sorte que le délégué ne peut pas se prévaloir d'une compensation de plein droit entre ce qu'il reste devoir au délégataire et ce que le délégataire doit au délégué, à défaut de réciprocité entre les deux créances ; qu'il résulte des stipulations claires et précises de l'acte précité du 7 avril 2009 que la société Y..., le déléguant, a fait supporter à son représentant légal, M. Y..., le délégué, la charge d'acquitter la dette qu'elle avait contractée envers la société QUERRAGGIA, le délégataire, de s'acquitter du prix d'acquisition des appartements qu'elle avait acquis en l'état de futur achèvement sans que M. Y... transfère à la société Y... la créance de prix de vente des terrains dont il était titulaire envers le délégataire ; qu'en décidant cependant qu'une telle délégation de créance permettait à la société Y... de suppléer le défaut de réciprocité des créances et de se prévaloir d'une compensation de plein droit entre ce qu'elle devait à la société QUERRAGGIA et la créance dont son représentant légal, M. Jean-Louis Y..., était titulaire, à titre personnel, envers la société QUERRAGGIA, quand la délégation de créance n'emportait pas transfert à la société Y... de la créance dont son représentant légal était titulaire à titre personnel envers la société QUERRAGGIA, la cour d'appel a violé les articles 1275, 1289 et 1290 du Code civil ;
3. ALORS QUE l'acte du 7 avril 2009 emporte d'autant moins transfert de la créance à la société Y... de la créance dont son gérant était titulaire envers la société QUERRAGGIA que la société QUERRAGGIA a rappelé dans ses conclusions que M. Y... et la société Y... avaient éprouvé la nécessité, en cours d'instance d'appel, de régulariser un acte de cession de créance qu'ils avaient fait signifier à la société QUERRAGGIA, par acte du 9 novembre 2010, dans les formes et conditions de l'article 1690 du Code civil, soit postérieurement à l'acte du 7 avril 2009 (conclusions, p. 8) ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen tiré de l'existence d'une cession de créance postérieure à l'acte de délégation de paiement, la cour d'appel, à tout le moins, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE nul ne peut être engagé s'il ne l'a pas voulu ; qu'il s'ensuit que la société QUERRAGGIA ne pouvait pas être obligée envers un nouveau créancier, la société Y..., que lui désignait M. Y..., si elle n'y avait pas consenti ; qu'en décidant que la société Y... pouvait se prévaloir d'une compensation de plein droit entre le prix d'acquisition des appartements qu'elle restait devoir à la société QUERRAGGIA et le prix de vente des terrains en conséquence d'une délégation de paiement qui pouvait s'opérer sans l'accord de la société QUERRAGGIA, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1275 et 1277 du Code civil ;
5. ALORS si tel n'est pas le cas QUE la délégation de personne est subordonnée à l'accord du délégataire ; qu'en décidant que la société Y... a désigné à son créancier, la société QUERRAGGIA, un nouveau débiteur, M. Y..., afin qu'il lui permette de s'acquitter du prix d'acquisition des appartements, sans qu'il soit nécessaire de recueillir l'accord de la société QUERRAGGIA, créancier délégataire, et qu'il était donc permis à la société Y... de se prévaloir des effets de la compensation de plein droit en conséquence d'une telle délégation de paiement, la cour d'appel a subsidiairement violé les articles 1134 et 1275 du Code civil ;
6. ALORS QUE la compensation légale est subordonnée à la condition de la réciprocité des créances respectives ; qu'en opérant la compensation entre la créance de la société QUERRAGGIA sur la société Y... et une créance du représentant légal de la société Y... qui est une société civile immobilière après avoir constaté que cette personne morale est transparente fiscalement et juridiquement, quand la société civile immobilière est investie d'une personnalité juridique distincte de celle de ses associés, la cour d'appel a violé l'article 1842 du Code civil, ensemble les articles 1289 et 1290 du Code civil.
7. ALORS QUE Me X..., par lettre du 16 septembre 2008, a seulement écrit que « dès l'exigibilité de la somme par la société QUERRAGGIA, il transmettrait à M. Y... la somme de 457. 247, 05 ¿ à charge pour la SCI Y... de me verser la somme de 492. 553, 92 ¿ » ; qu'en d'autres termes, il était seulement convenu que le notaire remettrait à M. Y... le prix de vente du terrain, soit 457. 247, 05 ¿, et que la SCI Y... s'acquitterait ensuite par son intermédiaire du prix de vente des appartements, soit la somme de 492. 553, 92 ¿, sans que les parties s'engagent dans l'avenir à procéder à un paiement par voie de compensation ; qu'en déduisant cependant des termes de ce courrier du 16 septembre 2008 qu'il était convenu entre les parties que le prix de vente des appartements devait être payé par compensation avec le prix de vente du terrain, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-22655
Date de la décision : 14/11/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Bastia, 6 juin 2012, 10/00785

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 06 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 nov. 2013, pourvoi n°12-22655


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.22655
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