Vu la requête, enregistrée le 24 juin 1999 au greffe de la cour, présentée pour M. X, demeurant ... par Me Latournerie, avocat ;
M. X demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 20 avril 1999 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à payer à la commune de Brantôme à titre personnel la somme de 83.214 F, in solidum avec l'entreprise Vigier la somme de 22.021,56 F, in solidum avec la société les Charpentiers couvreurs du Périgord la somme de 66.403,69 F, in solidum avec la société les Charpentiers couvreurs du Périgord et l'entreprise Vigier les sommes de 57.936,60 F et 18.271,50 F ;
2°) de rejeter les demandes en ce sens devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner la société Ceten Apave, la société les Charpentiers couvreurs du Périgord et l'entreprise Vigier à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui au titre des diverses infiltrations constatées ;
Classement CNIJ : 39-06-01-04-03 C+
39-06-01-04-04-01
39-06-01-07-01
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2004 :
- le rapport de M. Desramé,
- les observations de Me Exshaw, avocat de la commune de Brantôme ;
- les observations de Me de Lestrange, avocat de la société Vigier ;
- les observations de Me Missiaen pour Me Bayle, avocat de la SARL Charpentiers couvreurs du Périgord ;
- les observation de Me Beauchet pour la SCP Serge Guy - Viénot - Laurence Bryden avocat de la société Ceten-Apave ;
- et les conclusions de M. Bec, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, suite à une délibération de son conseil municipal en date du 16 août 1984, la commune de Brantôme a signé le 30 août 1984 une convention avec la Société d' économie mixte du Périgord pour la réalisation d'un bâtiment destiné à abriter les services de la brigade de gendarmerie de Brantôme et les logements des familles des gendarmes ; que la conception de l'ouvrage a été assurée par M. X, architecte, que le lot gros-oeuvre a été attribué à l'entreprise Vigier ; que les lots couvertures et charpentes ont été confiés à la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord ; que le Ceten-Apave était chargé d'une mission de contrôle technique ; que la réception définitive des travaux fut prononcée sans réserves le 13 septembre 1995 ; que suite à des infiltrations et des moisissures constatées dans les locaux, la commune de Brantôme a recherché la responsabilité décennale des constructeurs ; que par le jugement attaqué, M. X, l'entreprise Vigier et la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord furent condamnés à payer diverses indemnités à la commune ; que M. X interjette régulièrement appel de ce jugement ; que, suite à son décès intervenu en cours d'instance, ses héritiers ont déclaré vouloir reprendre l'instance à leur compte ; que la commune de Brantôme et l'entreprise Vigier font appel incident et provoqué ;
Sur l'appel principal de M. X :
En ce qui concerne la qualité de constructeur du bureau d'études Ceten-Apave :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Ceten-Apave était investi d'une mission de contrôle technique qui, outre le rôle important qui lui était dévolu dans les phases de conception et d' exécution de l'ouvrage, devait le conduire, aux termes de l'article 5-2 du contrat qu'il avait signé avec la commune à exercer son contrôle sur les « ouvrages de clos et de couvert fixés ou mobiles qui offrent une protection au moins partielle contre les agressions des éléments extérieurs » ; qu'à ce titre sa responsabilité est susceptible d' être engagée à l'égard du maître d'ouvrage du fait des désordres constatés sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que M. X est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que le Ceten-Apave n'avait pas la qualité de constructeur ;
En ce qui concerne l'étanchéité de la verrière :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise que si des infiltrations peuvent se produire par temps de neige au niveau de la verrière située en partie centrale du fait de l'insuffisance de la hauteur du relevé, ces désordres, dont la survenance reste exceptionnelle, ne sont pas de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination, dans la mesure où ladite verrière ne surplombe aucune partie habitée de l'immeuble ; que M. X est donc fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à payer la somme de 72.360 F au titre des travaux de sur-élévation de la verrière ;
En ce qui concerne les désordres constatés au niveau des fenêtres :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que si des infiltrations se produisent au niveau des appuis des fenêtres, ceux-ci ont été réalisés par l'entreprise Vigier conformément aux plans de l'architecte ; que M. X n'est dès lors pas fondé à demander que les travaux de nature à remédier à ces désordres, évalués par l'expert à la somme de 6.946,56 F(1.059 euros), soient mis à la charge de la seule entreprise Vigier ;
En ce qui concerne les désordres liés à l'absence d'écran à air :
Considérant que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamné solidairement avec l'entreprise Vigier à payer à la commune de Brantôme une somme de 15.075 F(2.298 euros) pour remédier aux courants d'air constatés du fait de l'absence d'écran à air entre l'intérieur et l'extérieur dans la mesure où ce dispositif n'était pas obligatoire à l'époque des travaux et que la gène qui en résulte n'est pas telle qu'elle rende l'immeuble impropre à sa destination ;
En ce qui concerne les moisissures intérieures :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les moisissures, qui affectent un nombre important d'appartements et qui constituent une gêne sérieuse pour les occupants, sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;
Considérant qu'une première série de moisissures est due à une condensation au niveau des poutres de l'ossature en béton armé lorsqu'elles entrent en contact de l'ambiance intérieure du bâtiment ; que ce désordre est dû à un défaut de conception générale de l'ouvrage et engage donc la responsabilité de l'architecte ; que M. X n'est dès lors pas fondé à soutenir que les réparations correspondantes, évaluées par l'expert à 3.000 F hors taxes (457,35 euros) par appartement, n'auraient pas dû être mises à sa charge ;
Considérant qu'une seconde série de moisissures dans les appartements est la conséquence de l'ensemble des désordres relevés, dont il a été dit ci-dessus qu'ils sont imputables au moins pour partie à l'action de l'architecte ; que dès lors celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les travaux de réfection qu'elles entraînent, évalués par l'expert à la somme de 42.933,60 F (6545 euros) ont été mis à la charge solidaire des constructeurs ;
En ce qui concerne les troubles de jouissance :
Considérant que la commune de Brantôme, qui a donné l'immeuble en location à la gendarmerie, n'a justifié devant le tribunal d'aucune perte de loyers ; que c'est donc à tort que le tribunal a condamné M. X, solidairement avec l'entreprise Vigier et la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord, à lui payer la somme de 15.000 F (2.286,74 euros) à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné en propre à payer à la commune de Brantôme une somme de 72.360 F (11.031,21 euros) au titre des désordres affectant la verrière et solidairement avec l'entreprise Vigier et la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord une somme de 15.000 F (2.286,74 euros) au titre des troubles de jouissance ainsi que solidairement avec l'entreprise Vigier une somme de 15.075 F(2.298 euros) pour remédier aux courants d'air constatés ;
En ce qui concerne les conclusions de M. X tendant à être garanti par les autres constructeurs :
Considérant que contrairement à ce qui est soutenu en défense par le Ceten-Apave, les conclusions de M. X tendant à être garanti par l'ensemble des intervenants sur le chantier, y compris le bureau de contrôle technique, ne sont pas nouvelles en appel et sont dès lors recevables, quand bien même le tribunal aurait omis de statuer sur lesdites conclusions ;
Considérant que M. X n'est pas fondé à demander à être garanti par l'entreprise Vigier de la condamnation prononcée contre lui pour un montant de 10.854 F (1.654,68 euros) au titre des moisissures liées au pont thermique constitué par les poutres assurant l'ossature en béton armé, l'entreprise Vigier ayant exécuté les travaux conformément aux instructions de l'architecte ; que la deuxième série de moisissures qui a engendré des travaux de reprise dans les appartements d'un montant de 42.933,60 F (6.545,19 euros) étant liée à l'ensemble des désordres constatés pour lesquels l'architecte n'a qu'une responsabilité partagée avec le couvreur et le bureau de contrôle, M. X est fondé à demander à être garanti par la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord et le Ceten-Apave à hauteur respectivement de 40 % et 20 % chacun, du montant total des condamnations prononcées contre lui, soit 42.933,60 F (6.545,19 euros) ; que s'agissant de la condamnation prononcée au titre des malfaçons des appuis des fenêtres pour un montant de 6.946,56 F(1.059 euros), M. X n'est pas fondé à demander à être garanti par l'entreprise Vigier à hauteur de 50 %, dans la mesure où cette société a effectué les travaux en stricte conformité avec les plans fournis par l'architecte et sans qu'aucun manquement aux règles de l'art ne puisse lui être reproché dans la réalisation desdits travaux ; qu'enfin au titre des autres condamnations prononcées par les premiers juges pour un montant total de 67.525,27 F (10.294,16 euros) et qui sont liées aux désordres engendrés par les infiltrations par les rives, au niveau des liaisons brisis-terrasson et par les chéneaux, dont l'imputabilité n'est plus contestée en appel, il y a lieu de faire droit à la demande de M. X tendant à être garanti dans la limite de 40 % par la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord, dans la mesure où cette entreprise spécialisée a effectué des travaux non conformes aux règles de l'art et dans la limite de 20 % par le Ceten-Apave, qui a, s'agissant des liaisons brisis-terrasson, omis d'exiger du concepteur et de l'entreprise titulaire du lot couverture un plan d'exécution de détail alors que la complexité des travaux de toiture l'exigeait et qui a, de la même façon négligé d'imposer au concepteur et à l'entreprise une étude détaillée des dispositions techniques de réalisation des rives en tuiles romanes coupées biaises à l'origine des infiltrations ;
Sur l'appel incident de la commune de Brantôme :
Considérant que la commune de Brantôme demande en premier lieu, dans l'hypothèse où la cour réformerait la condamnation au paiement de la somme de 72.360 F prononcée à l'encontre de M. X sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil, de lui substituer une condamnation de même montant sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil ;
Considérant que les rapports contractuels entre la commune, maître d'ouvrage, et M. X, architecte, ayant pris fin après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement, les désordres dont s'agit, qui n'étaient d'ailleurs pas apparents lors de la réception définitive des travaux, ne sauraient en tout état de cause entraîner la mise en jeu de la responsabilité contractuelle de l'architecte ; qu'il s'en suit que ces conclusions d'appel incident de la commune de Brantôme doivent être rejetées ;
Considérant que la commune de Brantôme demande en second lieu que les intérêts visés à l'article 7 du jugement du 20 avril 1999 produisent eux mêmes intérêts dans les conditions prévues à l'article 1154 du code civil ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la commune de Brantôme a demandé dans son mémoire enregistré le 3 août 1999 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date que, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que cette collectivité n'a pas ensuite formulé de nouvelles demandes de capitalisation, à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur les conclusions d'appel incident et d'appel provoqué de l'entreprise Vigier :
Considérant que la situation de l'entreprise Vigier se trouve aggravée par l'admission partielle des conclusions de M. X ; que ses conclusions sont donc recevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'entreprise Vigier n'a pas à supporter les sommes relatives aux troubles de jouissance, invoqués par la commune, dont l'existence n'est pas établie ; que de la même façon, elle a été à tort condamnée par le tribunal administratif, solidairement avec M. X, à réparer les conséquences liées à l'absence d'écran à air, dispositif dont l'installation n'était pas obligatoire à l'époque du marché litigieux ; qu'enfin les appuis des fenêtres ont été réalisés par elle en stricte conformité avec les plans fournis par l'architecte, dont elle ne pouvait déceler le caractère erroné ; que les désordres ne sont pas dus à une mauvaise exécution des travaux par l'entreprise et ne peuvent dès lors être regardés comme lui étant imputables ; qu'elle est également fondée à demander sur ce point la réformation du jugement attaqué ; que ce jugement n'ayant mis à sa charge que les postes de préjudice ci-dessus énumérés, elle est par suite fondée à demander sa mise hors de cause ;
Considérant que si l'entreprise Vigier soutient également que la commune de Brantôme reste lui devoir une somme de 4.171,64 euros au titre de l'exécution du marché et demande à ce titre la condamnation de la commune, ces conclusions nouvelles en appel sont en tout état de cause irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas, dans la présente instance partie perdante, soit condamné à payer une somme à ce titre à la commune de Brantôme, au Ceten-Apave, à la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord et à l'entreprise Vigier ; qu'il n' y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'entreprise Vigier dirigées à ce titre contre la commune de Brantôme ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'entreprise Vigier est mise hors de cause.
Article 2 : La somme que M. X a été condamné à payer à la commune de Brantôme est ramenée de 301.932,85 F (46.029,37 euros) à 199.497,91 F (30.413,26 euros) dont 13.744,89 euros (90.160,57 F) en propre et le reste soit 16.668,37 euros (109.337,29 F) solidairement avec la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord .
Article 3 : La SARL les charpentiers couvreurs du Périgord est condamnée à payer à la commune de Brantôme la somme de 2.457,72 euros (16.121,58 F).
Article 4 : Les frais de l'expertise en référé sont mis à la charge solidaire de M. X et de la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord.
Article 5 : Les articles 2,3,4,5,6 et 9 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 20 avril 1999 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 6 : La somme de 16.668,37 euros mise à la charge solidaire de M. X et la SARL les Charpentiers et couvreurs du Périgord sera supportée à concurrence de 40 % par M. X et la SARL les Charpentiers et couvreurs du Périgord et des 20 % restant par le Ceten-Apave.
Article 7 : Les intérêts des sommes que M. X et la SARL les Charpentiers et couvreurs du Périgord ont été condamnés à payer à la commune de Brantôme du fait du jugement du 20 avril 999, modifié par le présent arrêt, échus à la date du 3 août 1999 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 8 : Le surplus des conclusions de M X et le surplus des conclusions d'appel incident de la commune de Brantôme et d'appel provoqué de l'entreprise Vigier sont rejetés.
Article 9 : Les conclusions de la commune de Brantôme, du Ceten-Apave, de la SARL les Charpentiers couvreurs du Périgord et de l'entreprise Vigier tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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99BX01515