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06/12/2001 | FRANCE | N°99-21870

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 décembre 2001, 99-21870


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 octobre 1999), que M. Y... et Mme X... de Saint-Pulgent ont constitué entre eux une société civile professionnelle d'avocats (la SCP) ; qu'à la suite de dissensions entre les associés, Mme X... de Saint-Pulgent a formé une demande d'arbitrage ; que l'arbitre, désigné par un compromis lui donnant mission de statuer en droit, à charge d'appel, a rendu trois sentences ; que la première a été rendue le 10 octobre 1997 à titre provisionnel et avant-dire droit ; que la deuxième a dit, le 19 novembre 1997, qu'il n'y avait pas lieu à interpré

tation de la précédente ; que par la troisième, rendue le 18 déce...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 octobre 1999), que M. Y... et Mme X... de Saint-Pulgent ont constitué entre eux une société civile professionnelle d'avocats (la SCP) ; qu'à la suite de dissensions entre les associés, Mme X... de Saint-Pulgent a formé une demande d'arbitrage ; que l'arbitre, désigné par un compromis lui donnant mission de statuer en droit, à charge d'appel, a rendu trois sentences ; que la première a été rendue le 10 octobre 1997 à titre provisionnel et avant-dire droit ; que la deuxième a dit, le 19 novembre 1997, qu'il n'y avait pas lieu à interprétation de la précédente ; que par la troisième, rendue le 18 décembre 1997, l'arbitre s'est déclaré incompétent pour statuer sur le recours en révision formé par M. Y... contre les deux premières sentences ; que, sur appels interjetés par M. Y... et la SCP, la cour d'appel a déclaré irrecevables les appels des deux premières sentences et le recours en révision contre la dernière ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... et la SCP font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevables les appels interjetés à l'encontre des sentences rendues les 10 octobre et 19 novembre 1997, alors, selon le moyen :

1° que le droit de faire appel d'une sentence arbitrale et ses limites éventuelles sont déterminés non par les règles de procédure civile mais par le compromis qui s'impose tant au juge qu'aux signataires ; qu'en retenant que si les parties avaient donné mission à l'arbitre de statuer en droit et à charge d'appel, cette voie de recours ne pouvait être exercée contre les jugements qui ne tranchaient pas tout ou partie du principal, indépendamment des jugements sur le fond, telle la sentence du 10 octobre 1997 qui avait été rendue à titre provisionnel et tous droits et moyens des parties réservés, tandis que celle en date du 19 novembre suivant n'avait fait que rejeter la demande d'interprétation de la première, l'arrêt attaqué a fait application des règles qui gouvernent l'appel des décisions judiciaires sans constater cependant que les parties seraient convenues de limiter le droit d'appel expressément réservé par la sentence arbitrale, qui n'avait d'ailleurs pas à être énoncée sous forme d'un dispositif tranchant partie du principal ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil ainsi que 544 et 1460 du nouveau Code de procédure civile ;

2° que la sentence arbitrale du 10 octobre 1997 ayant autorisé Mme X... à quitter les locaux de la SCP, à exercer à telle adresse professionnelle qui lui conviendrait, à effectuer en nature une reprise de certains dossiers, et lui ayant par ailleurs ordonné " du fait de son retrait de la SCP ", de donner sa démission de ses fonctions de cogérante, de restituer la carte de crédit et les carnets de chèques de la société, de demander le retrait de sa signature sur le compte de la société, avait bien tranché partie du principal pour avoir accordé le retrait sollicité, peu important les termes employés selon lesquels l'arbitre avait statué " tous droits et moyens des parties réservés et à titre provisionnel ", ces termes ne liant pas le juge tenu de restituer à la décision entreprise son exacte qualification ; qu'en déclarant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 544 du nouveau Code de procédure civile ;

3° que la décision, qui se borne à ordonner une mesure provisoire ou une mesure d'instruction, n'a pas au principal autorité de la chose jugée et ne dessaisit pas le juge qui peut toujours la modifier ou la rapporter, en sorte qu'elle ne peut faire l'objet d'un recours en révision, lequel n'est ouvert qu'à l'encontre des jugements passés en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; que la juridiction du second degré ne pouvait retenir que l'arbitre avait exactement décidé dans sa sentence du 18 décembre 1997 qu'en application de l'article 1491 du nouveau Code de procédure civile il n'était pas compétent pour connaître du recours en révision contre la sentence du 10 octobre 1997 puisque seule elle-même était compétente pour l'examiner, s'en estimant effectivement saisie, sans en déduire que, dès lors qu'elle avait pu être attaquée par le recours en révision, la sentence du 10 octobre 1997 ne pouvait constituer une décision purement provisoire et avant-dire droit ; qu'en statuant comme elle l'a fait par deux chefs de dispositif radicalement incompatibles, la cour d'appel a violé les articles 544, 482, 483, 593 et 1491 du nouveau Code de procédure civile ;

4° que l'appel est toujours recevable lorsque la juridiction qui a rendu la décision entreprise a excédé ses pouvoirs ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si l'arbitre ayant rendu la sentence du 10 octobre 1997 avait excédé sa saisine dans la mesure où, tenu en vertu du compromis de statuer en droit, il avait, en méconnaissance des dispositions de la loi du 29 novembre 1966, autorisé Mme X... à exercer son activité d'avocat à titre individuel en dehors des locaux de la SCP dont elle faisait partie et qui n'était pas dissoute, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 544 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la décision du 10 octobre 1997 avait ordonné une expertise et des mesures urgentes et provisoires, sans trancher tout ou partie du principal, l'arrêt décide à bon droit que cette décision, qui participait de l'instruction du litige et ne préjugeait pas de son règlement, ne pouvait faire l'objet d'un recours indépendamment de la sentence sur le fond ;

Et attendu que la cour d'appel qui, en présence d'écritures invoquant une simple erreur de droit, n'avait pas à rechercher un éventuel excès de pouvoir de la part de l'arbitre, a statué sur la recevabilité de l'appel de la sentence du 10 octobre 1997 et sur la recevabilité du recours en révision par des dispositions indépendantes les unes des autres de sorte que le moyen qui invoque leur incompatibilité est inopérant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen : (Publication sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 99-21870
Date de la décision : 06/12/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARBITRAGE - Sentence - Appel - Décision participant de l'instruction du litige et ne préjugeant pas de son règlement - Recours indépendant de celui de la sentence sur le fond - Possibilité (non) .

APPEL CIVIL - Décisions susceptibles - Décision d'avant dire droit - Dispositif tranchant une partie du principal - Nécessité

Ne peut faire l'objet d'un recours indépendamment de la sentence sur le fond la décision de l'arbitre qui, ayant ordonné une expertise et des mesures urgentes et provisoires sans trancher tout ou partie du principal, participe de l'instruction du litige et ne préjuge pas de son règlement.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 20 octobre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 déc. 2001, pourvoi n°99-21870, Bull. civ. 2001 II N° 182 p. 127
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2001 II N° 182 p. 127

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Buffet .
Avocat général : Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Etienne.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:99.21870
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