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09/12/1999 | FRANCE | N°97-21074

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 décembre 1999, 97-21074


ARRÊT N° 2

Donne acte à Mme Inès de X... de la reprise de l'instance engagée par son mari, décédé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un film intitulé " Les Voleurs d'organes ", réalisé par Mme A... et Mme Y..., a été présenté au public le 12 mai 1994, diffusé par la chaîne de télévision Planète pendant la semaine du 19 au 25 septembre 1994, et par la chaîne de télévision M6 le 8 janvier 1995 ; que s'estimant diffamés par ce reportage, l'institut X... de America (l'Institut) et M. Barraquer Z... ont fait assigner en réparation de leur préjudice, devan

t le tribunal de grande instance de Paris, par actes d'huissier des 16 août, 30 septemb...

ARRÊT N° 2

Donne acte à Mme Inès de X... de la reprise de l'instance engagée par son mari, décédé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un film intitulé " Les Voleurs d'organes ", réalisé par Mme A... et Mme Y..., a été présenté au public le 12 mai 1994, diffusé par la chaîne de télévision Planète pendant la semaine du 19 au 25 septembre 1994, et par la chaîne de télévision M6 le 8 janvier 1995 ; que s'estimant diffamés par ce reportage, l'institut X... de America (l'Institut) et M. Barraquer Z... ont fait assigner en réparation de leur préjudice, devant le tribunal de grande instance de Paris, par actes d'huissier des 16 août, 30 septembre, 4 et 24 octobre 1994, et 12 janvier 1995, la société Capa Press, producteur du film, les réalisateurs du film, ainsi que les sociétés Planète Câble et Métropole Télévision M6 ; que le Tribunal a déclaré irrecevable l'action de M. Barraquer Z..., débouté l'institut de ses demandes relatives à la diffusion sur Planète, et déclaré prescrite l'action concernant la diffusion sur M6 ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré, sur le fondement de l'article 53, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881, les actions engagées par l'Institut et par M. Barraquer Z... irrecevables, alors, selon le moyen, que, d'une part, suivant les dispositions de l'article 6-1° de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des articles 422, 425, 427 et 428, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, l'assignation introductive d'une instance civile en matière de presse n'a pas à être préalablement notifiée par le demandeur au ministère public ; qu'en imposant pareille diligence exclusivement prévue par l'article 53, alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 pour la citation qu'il incombe au plaignant de notifier tant au prévenu qu'au ministère public devant le tribunal correctionnel, la cour d'appel a violé les textes précités ; que, d'autre part, en modifiant ainsi sans raison et de manière imprévisible les règles de procédure applicables depuis un siècle aux procès de presse portés devant le juge civil, la cour d'appel a derechef méconnu les dispositions de l'article 6-1° de la Convention européenne sur la prévisibilité des règles processuelles en cours dans le cadre d'un procès équitable ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 que l'assignation délivrée à la requête du plaignant doit préciser et qualifier le fait invoqué, indiquer le texte de loi applicable à la demande, contenir élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et être notifiée au ministère public ;

Et attendu qu'en retenant que ledit article est applicable à l'action civile introduite devant la juridiction civile, dès lors qu'aucun texte législatif n'en écarte l'application devant cette juridiction, l'arrêt, qui n'a pas méconnu le droit à un procès équitable, a fait l'exacte application des textes visés au moyen, et du principe de l'égalité des armes dans les procès relatifs aux infractions de presse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble les articles 73 et 74, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que dans les instances civiles en réparation d'infractions de presse, l'exception de nullité de l'assignation doit être invoquée avant toute défense au fond ;

Attendu que, selon l'arrêt, les défendeurs ont excipé pour la première fois, devant la cour d'appel, de la nullité des assignations pour défaut de notification au ministère public ;

Attendu que pour accueillir cette exception, et déclarer irrecevables les actions engagées par l'Institut et par M. Barraquer Z..., l'arrêt relève que le régime des exceptions de nullité applicable devant la juridiction civile est organisé par les dispositions des articles 112 à 121 du nouveau Code de procédure civile de sorte que ne sauraient ici recevoir application celles de l'article 385 du Code de procédure pénale ; que l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 institue des formalités substantielles d'ordre public dont l'inobservation sanctionnée par " la nullité de la poursuite " ne saurait être assimilée à un simple vice de forme mais constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte introductif ; qu'en vertu des articles 118 et 119 du nouveau Code de procédure civile, l'exception de nullité fondée sur cette irrégularité peut être invoquée pour la première fois en cause d'appel, sans que la partie qui s'en prévaut doive justifier d'un grief ; que les assignations délivrées à la demande de M. Barraquer Z... et de l'Institut n'ont pas été notifiées au ministère public ; que ces assignations, nulles au regard des dispositions de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, n'ont pu valablement saisir le Tribunal, ni interrompre la prescription, dont le délai est expiré ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'exception de nullité était irrecevable devant elle, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt n° 33 rendu le 18 novembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 97-21074
Date de la décision : 09/12/1999
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Violation - Ministère public - Partie jointe - Réponse - Dépôt d'une note en délibéré - Constatations suffisantes.

1° COURS ET TRIBUNAUX - Délibéré - Note en délibéré - Note en réponse aux observations du ministère public - Note contradictoire - Portée.

1° Il ne saurait être fait grief à une cour d'appel d'avoir statué sur l'argumentation soutenue oralement par le ministère public, partie jointe, ayant eu la parole le dernier conformément à l'article 443 du nouveau Code de procédure civile, dès lors que les parties avaient été invitées, en application des dispositions de l'article 445 du nouveau Code de procédure civile à communiquer toutes notes en délibéré utiles pour y répondre, ce qu'elles avaient fait (arrêt n° 1).

2° PRESSE - Diffamation et injures - Action civile - Assignation - Exception de nullité - Exception fondée sur l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 - Proposition in limine litis - Nécessité.

2° DIFFAMATION ET INJURES - Diffamation - Action civile - Assignation - Exception de nullité - Exception fondée sur l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 - Proposition in limine litis - Nécessité 2° PROCEDURE CIVILE - Exception - Proposition in limine litis - Exception fondée sur l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881.

2° Il résulte des articles 53 de la loi du 29 juillet 1881, 73 et 74, alinéa 1er du nouveau Code de procédure civile, que dans les instances civiles en réparation d'infractions de presse, l'exception de nullité de l'assignation doit être invoquée avant toute défense au fond. En conséquence l'exception de nullité qui n'a pas été présentée en première instance est irrecevable devant la cour d'appel (arrêts nos 1 et 2).

3° PRESSE - Diffamation et injures - Action civile - Assignation - Article 53 de la loi du 29 juillet 1881 - Application.

3° DIFFAMATION ET INJURES - Diffamation - Action civile - Assignation - Article 53 de la loi du 29 juillet 1881 - Application 3° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales - Interprétation - Article 6 - 1 - Procès équitable - Infractions de presse - Loi du 29 juillet 1881 - Article 53 - Application devant les juridictions civiles.

3° L'application de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 devant les juridictions civiles qui n'est écartée par aucun texte législatif ne méconnaît pas le droit à un procès équitable et le principe de l'égalité des armes dans les instances relatives aux infractions de presse (arrêt n° 2).


Références :

1° :
2° :
2° :
Loi du 29 juillet 1881 art. 53
Nouveau Code de procédure civile 73, 74 al. 1
nouveau Code de procédure civile 445, 443

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 novembre 1997

A RAPPROCHER : (2°). Chambre civile 2, 1999-12-09, Bulletin 1999, II, n° 186, p. 126 (rejet). A RAPPROCHER : (3°). Chambre civile 2, 1999-05-12, Bulletin 1999, II, n° 90, p. 66 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 déc. 1999, pourvoi n°97-21074, Bull. civ. 1999 II N° 187 p. 127
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1999 II N° 187 p. 127

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Buffet .
Avocat général : Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Guerder.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan (arrêts nos 1 et 2), la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Rouvière et Boutet, M. Bouthors (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.21074
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