Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu que la société Mobil North Sea et ses colitigeants font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 16 janvier 1997) de les avoir déboutés, par application de la loi écossaise, de leur action en responsabilité délictuelle à l'encontre du Lloyd's Register of Shipping à l'occasion du naufrage de la plate-forme de forage pétrolier qu'elles exploitaient en mer du Nord alors, selon le moyen, d'une part, qu'en faisant application de cette loi bien que le Lloyd's Register ait effectué les contrôles litigieux en France, parce que la situation présentait des liens plus étroits avec le Royaume-Uni, dont la loi était aussi celle du lieu du dommage, la cour d'appel a violé l'article 3 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en décidant que, les défaillances du Lloyd's Register n'étant pas la seule cause du dommage, celui-ci ayant sa source également dans les manquements des constructeurs, il est impossible, sauf à réduire artificiellement au prix d'une dissociation injustifiée la notion de fait générateur, de le localiser en France et il y a lieu dans ce cas d'appliquer la loi du lieu du dommage, la cour d'appel a également violé le même texte ; alors, encore, qu'en décidant que le fait générateur du dommage ne pouvait être localisé en France parce que le Lloyd's avait effectué des contrôles en France mais aussi dans d'autres pays, alors que la loi française était applicable aux conséquences des fautes délictuelles commises lors des contrôles effectués en France, la cour d'appel a également violé ce texte ; et alors, enfin, qu'en décidant d'écarter l'application de la loi française parce que rien ne permettait de déduire en l'état du rapport du Welding Institute, et à supposer même que le scénario proposé pour la rupture soit exact, que le délignage ou le débardage qui aurait été à l'origine de celle-ci pouvait être techniquement décelé lors des contrôles auxquels le Lloyd's Register était tenu de procéder, la cour d'appel a encore violé le texte précité ;
Mais attendu que l'arrêt, qui relève, d'abord, que le lieu du sinistre est le secteur britannique du plateau continental de la mer du Nord soumis au droit écossais, constate que le Lloyd's Register n'a pas seulement effectué sa mission en France, mais aussi à Londres, en Belgique et en Allemagne ; que recherchant, ensuite, en raison de la multiplicité des lieux de commission des faits générateurs du dommage, le pays qui présente les liens les plus étroits avec le fait dommageable, l'arrêt relève que les parties sont pour la plupart des sociétés britanniques, que les contrats se sont référés aux normes britanniques pour l'exploitation envisagée et que le Lloyd's Register est intervenu en qualité d'organisme habilité par le ministère de l'Energie britannique pour délivrer les certificats de conformité ; que de l'ensemble de ses constatations et énonciations dont il résulte que la localisation en dehors du Royaume Uni de certains éléments du fait générateur n'était pas déterminant, la cour d'appel a exactement déduit que la loi applicable était la loi écossaise, comme étant celle du lieu où s'était produit le dommage ;
D'où il suit que, abstraction faite du motif surabondant relatif au rapport du Welding Institute, le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le moyen, que telle qu'interprétée par la cour d'appel, la loi anglaise qui ne retient pas la responsabilité du Lloyd's parce qu'il n'y a pas de proximité suffisante pour imposer à ce dernier une obligation de soin, est contraire à l'ordre public international français, le principe de l'indemnisation des victimes d'actes fautifs ayant en France valeur constitutionnelle ; que, dès lors, en n'évinçant pas la loi anglaise pour lui substituer la loi française du for, la cour d'appel a violé les articles 3 et 1382 du Code civil ;
Mais attendu que telle qu'interprétée souverainement par la cour d'appel, la loi écossaise n'est pas contraire à la conception française de l'ordre public international du seul fait qu'elle soumet l'obligation de réparer le dommage à certaines conditions, dont les juges du second degré ont souverainement décidé qu'elles n'étaient pas satisfaites en l'espèce ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.