CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Bakumla,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 12e chambre, en date du 20 septembre 1996, qui, pour soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière et entrée et séjour irréguliers d'un étranger en France, l'a condamné à 3 ans d'interdiction du territoire national français.
LA COUR,
Vu le mémoire personnel et le mémoire ampliatif produits ;
Sur le moyen unique de cassation pris d'une violation de l'article 29 du Code civil et d'un excès de pouvoir :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé contre le prévenu une interdiction du territoire français pendant 3 ans ;
" aux motifs que le prévenu produit la photocopie d'un certificat de nationalité française établi le 29 juillet 1994 par le juge du tribunal d'instance de Paris 17e au profit de Séphora X..., née le 7 mai 1992, reconnue par ses deux parents dont le prévenu, de nationalité zaïroise ; qu'il apparaît que ledit certificat dont l'authenticité est douteuse est pour le moins entaché d'une erreur manifeste de droit, que le tribunal correctionnel peut donc constater, qui lui ôte toute force probante ;
" alors que les questions de nationalité sont préjudicielles devant les juridictions répressives autres que la cour d'assises ; qu'en se prononçant eux-mêmes sur la validité du certificat de nationalité produit par le prévenu pour justifier de ce qu'il était père d'un enfant français, et en déniant à ce certificat toute valeur probante, le tribunal puis la Cour ont excédé leurs pouvoirs " ;
Vu ledit article ;
Attendu que, selon l'article 29 du Code civil, l'exception de nationalité française constitue, devant toute autre juridiction que la juridiction civile de droit commun ou les juridictions répressives comportant un jury criminel, une question préjudicielle qui oblige le juge à surseoir à statuer jusqu'à ce que la question ait été tranchée par la juridiction compétente ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le demandeur, ressortissant étranger, est poursuivi notamment pour s'être soustrait à une mesure de reconduite à la frontière ; que, pour échapper aux poursuites, il a présenté devant les juges du fond une exception d'illégalité de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, base des poursuites, au motif que, s'appliquant au père d'un enfant français né en France, cet acte administratif contreviendrait aux articles 22 et 25, alinéa 3, de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Attendu que, pour rejeter cette exception, l'arrêt attaqué énonce que l'authenticité du certificat de nationalité française établi par le juge du tribunal d'instance du 17e arrondissement de Paris au nom de Séphora X..., née le 7 mai 1992, fille du prévenu, aux termes duquel celle-ci est devenue française par déclaration faite à ce magistrat le 26 novembre 1992, produit en photocopie par la défense, est douteuse, et que ce document, " pour le moins entaché d'une erreur de droit manifeste ", et " dépourvu de toute force probante ", doit être écarté ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi alors que, saisie d'une contestation portant sur la nationalité, dont dépendait la solution du litige, la juridiction correctionnelle avait l'obligation de surseoir à statuer et de renvoyer les parties à se pourvoir jusqu'au jugement sur la question préjudicielle par la juridiction compétente, la cour d'appel a méconnu le texte et le principe ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 20 septembre 1996, et, pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles.