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14/11/1996 | FRANCE | N°95-86005

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 novembre 1996, 95-86005


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la Compagnie Prévidente (venant aux droits de la compagnie Latina Assicurazioni),
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 19 septembre 1995, qui, dans les poursuites exercées contre Giovanni X... et Roger Y... pour blessures involontaires ayant entraîné une ITT de plus de 3 mois et infraction au Code du travail, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 222-19

A1. 1 du nouveau Code pénal, L. 451-1, L. 454-1 et du Code de sécurité so...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la Compagnie Prévidente (venant aux droits de la compagnie Latina Assicurazioni),
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 7e chambre, en date du 19 septembre 1995, qui, dans les poursuites exercées contre Giovanni X... et Roger Y... pour blessures involontaires ayant entraîné une ITT de plus de 3 mois et infraction au Code du travail, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 222-19 A1. 1 du nouveau Code pénal, L. 451-1, L. 454-1 et du Code de sécurité sociale, 1382 du Code civil, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a reçu les constitutions de parties civiles de Georges Z... et Abdallah A... salariés de l'entreprise Parachini, mis à la disposition de la société Tensiter à l'encontre de cette dernière société, à la suite de l'accident du travail dont ils ont été victimes le 10 mai 1990 ;
" aux motifs que la preuve d'un travail des employés de la société Parachini : Georges Z... et Addallah A... sous le seul contrôle et la direction unique de la société Tensiter n'est nullement démontrée tant par les parties qui invoquent cette hypothèse, que par les faits et les responsabilités analysés et déterminés ci-avant ;
" alors que les propres motifs de l'arrêt excluent que la société Tensiter, sous-traitante exclusive de l'édification du mur antibruit, au cours de laquelle l'accident s'est produit, ait eu la qualité de tiers à l'égard des 3 ouvriers de la société Parachini mis à sa disposition ; que l'arrêt spécifie lui-même que la société Tensiter devait assumer, selon le contrat de sous-traitance, la pose des éléments préfabriqués du mur antibruit, le ferraillage, le bétonnage et le coffrage des semelles et que l'accident est précisément dû à la pose défectueuse d'éléments préfabriqués (étayage insuffisant) à laquelle participaient Georges Z... et Abdallah A..., ce pour quoi ils ont été blessés ; que, de surcroît, l'arrêt constate que " les victimes Georges Z... et Abdallah A... ont déclaré être intervenus pour l'étaiement des éléments... qui se sont effondrés " ; qu'il importe peu que la société Parachini n'ait prétendument pas perdu tout contrôle sur ses employés dès lors que l'accident est intervenu au moment même où Georges Z... et Abdallah A... travaillaient pour le seul compte de la société Tensiter dans le cadre d'une opération confiée à elle seule ; que l'action dirigée contre cette société par ceux qui travaillaient pour elle et qu'elle rémunérait comme tels, était bien irrecevable au regard de l'article L. 454-1 du Code de sécurité sociale ; qu'enfin, à supposer qu'il y ait eu travail en commun, l'action civile était encore irrecevable dès lors que la direction unique de l'opération en cours incombait à la société Tensiter ; "
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Georges Z... et Abdallah A..., employés de la Société Nouvelle Prachini (SNP), ont été blessés par l'effondrement de panneaux préfabriqués en béton, au cours de travaux de construction d'un mur anti-bruit de l'autoroute A 8, qui avaient été sous-traités à la société Tensiter par la SNP, titulaire de l'ensemble du marché des travaux d'élargissement de l'autoroute ; que Giovanni X..., responsable de la sécurité de la société Tensiter, et Roger Y..., directeur des travaux de la SNP, ont été poursuivis pour blessures involontaires et infraction au Code du travail ; que le tribunal, après les avoir déclarés tous 2 coupables de ces délits, a condamné in solidum Giovanni X..., en sa qualité de tiers, et en application de l'article L. 454-1 du Code de la sécurité sociale, ainsi que son employeur, la société Tensiter, et l'assureur de cette dernière, la compagnie Latina Assicurazioni, à réparer le préjudice corporel des 2 victimes ;
Attendu que, pour confirmer les dispositions civiles du jugement, la cour d'appel énonce qu'il ne résulte ni des faits de la cause, ni des documents versés aux débats, que les deux salariés de la SNP, victimes de l'accident, travaillaient sur le chantier pour le compte de la société Tensiter et sous son seul contrôle, relevant que la SNP était amenée à intervenir conjointement avec la société Tensiter sur ce chantier et qu'elle avait conservé une partie des travaux, notamment dans l'ancrage définitif des éléments préfabriqués ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision ; qu'en effet il n'y a travail en commun, limitant le dédommagement du salarié victime de l'accident aux seules réparations forfaitaires assurées par les prestations sociales, que lorsqu'il est constaté que les préposés de plusieurs entreprises travaillant simultanément dans un intérêt commun, sont placés sous une direction unique ; que tel n'était pas le cas en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais, sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles L. 451-1 et s. L. 454-1, L. 455-1 du Code de sécurité sociale, 1382 du Code civil, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevables et fondées les constitutions de parties civiles de Georges Z... et Abdallah A... à l'encontre de Giovanni X... et de la société Tensiter, à la suite de l'accident du travail dont ils ont été victimes le 10 mai 1990 et rejeté la demande subsidiaire de l'assureur de la société Tensiter sollicitant une limitation de sa responsabilité, dès lors que l'employeur était lui-même tenu pour responsable de cet accident, le préjudice ne pouvant notamment être indemnisé " que pour la part de celui non réparé par la sécurité sociale " ;
" aux motifs qu'il n'est pas de la compétence de la juridiction répressive de statuer sur un partage de responsabilité entre les 2 employeurs retenus en partie ou totalement dans les liens de la prévention ;
" alors qu'il résulte de l'article L. 454-1, alinéas 2 et 4 du Code de la sécurité sociale, que lorsque la responsabilité d'un accident du travail est partagée entre l'employeur de la victime et un tiers, la caisse primaire d'assurance maladie dispose d'un recours contre ce dernier dans la mesure où les indemnités dues par elle en vertu de la loi dépassent celles réparant l'atteinte à l'intégrité physique qui auraient été mises à la charge de l'employeur selon le droit commun ; que dans la mesure où l'arrêt condamne pénalement l'employeur (Roger Y... et l'entreprise Parachini) en même temps que le " tiers " Giovanni X... et l'entreprise Tensiter, et réserve sans restriction les droits de la CPAM des Alpes-Maritimes à laquelle l'arrêt est déclaré commun, il ne pouvait se refuser à fixer la part de responsabilité de chacun " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon l'article L. 454-1, alinéa 4, du Code la sécurité sociale, lorsque la responsabilité d'un accident du travail est partagée entre l'employeur de la victime et un tiers, la caisse primaire d'assurance maladie dispose d'un recours contre ce dernier dans la mesure où des indemnités dues par elle en vertu de la loi dépassent celles réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun ;
Attendu que, pour écarter la demande de la compagnie la Prévidente, faite en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, et tendant à voir prononcer un partage de responsabilité avec l'employeur des victimes, la cour d'appel énonce " qu'il n'est pas de la compétence de la juridiction répressive de statuer sur un partage de responsabilité entre les 2 employeurs retenus en partie ou totalement dans les liens de la prévention " ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, afin de permettre la fixation ultérieure des droits de la caisse, de se prononcer sur les parts respectives de responsabilité de l'employeur et du tiers responsable, bien qu'un tel partage ne soit pas opposable aux victimes, la cour d'appel a méconnu les dispositions du texte précité ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 19 septembre 1995, en ses seules dispositions écartant la demande tendant à statuer sur le partage de responsabilité, toutes autres dispositions étant maintenues, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-86005
Date de la décision : 14/11/1996
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - Accident du travail - Travail en commun - Définition - Direction unique - Nécessité.

1° Il n'y a travail en commun, limitant le dédommagement du salarié victime aux seules réparations forfaitaires assurées par les prestations sociales, que lorsqu'il est constaté que les préposés de plusieurs entreprises, travaillant simultanément dans un intérêt commun, sont placés sous une direction unique(1).

2° SECURITE SOCIALE - Accident du travail - Tiers responsable - Recours des caisses - Partage de responsabilité entre le tiers et l'employeur - Compétence de la juridiction répressive.

2° Si la responsabilité d'un accident du travail est imputée à l'employeur de la victime et à un tiers, la juridiction pénale doit se prononcer sur le partage de responsabilité, bien qu'un tel partage ne soit pas opposable à la victime, afin de permettre la fixation ultérieure des droits de la caisse d'assurance maladie ; celle-ci dispose, en effet, d'un recours contre le tiers, dans la mesure où des indemnités dues par elle en vertu de la loi dépassent celles réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime qui auraient été mises à la charge de l'employeur en vertu du droit commun(2).


Références :

2° :
Code de la sécurité sociale L454-1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 septembre 1995

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1985-11-05, Bulletin criminel 1985, n° 345 (1), p. 883 (cassation partielle), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1990-03-29, Bulletin criminel 1990, n° 139, p. 370 (cassation partielle)

arrêt cité ;

Chambre criminelle, 1993-02-03, Bulletin criminel 1993, n° 60, p. 141 (rejet et cassation partielle), et les arrêts cités. A comparer : Assemblée plénière, 1988-12-22, Bulletin criminel 1988, n° 446, p. 1182 (cassation : arrêt n° 1 ;

rejet : arrêts n°s 2 et 3), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 nov. 1996, pourvoi n°95-86005, Bull. crim. criminel 1996 N° 412 p. 1197
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1996 N° 412 p. 1197

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Cotte.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Françoise Simon.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Defrénois et Levis, la SCP Rouvière et Boutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.86005
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