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15/10/1996 | FRANCE | N°94-12383

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 octobre 1996, 94-12383


Attendu que, par ordonnance du 26 mars 1993, le président du tribunal de grande instance de Paris a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, à effectuer une visite et saisie de documents dans les locaux de la SARL SECO, ..., en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de cette société ; que, lors des opérations, le 31 mars 1993, les agents des Impôts ont saisi une pièce n° 405, photocopie d'une lettre adressée par un établissement financier du Luxembourg à Mme X..., dont la restitution a ét

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Attendu que, par ordonnance du 26 mars 1993, le président du tribunal de grande instance de Paris a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, à effectuer une visite et saisie de documents dans les locaux de la SARL SECO, ..., en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de cette société ; que, lors des opérations, le 31 mars 1993, les agents des Impôts ont saisi une pièce n° 405, photocopie d'une lettre adressée par un établissement financier du Luxembourg à Mme X..., dont la restitution a été ordonnée par le président du tribunal de Paris par ordonnance contradictoire du 31 janvier 1994 ; que, le 3 février 1994, le directeur général des Impôts s'est pourvu en cassation de cette ordonnance ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu que le Directeur général des Impôts fait grief à l'ordonnance contradictoire d'avoir ordonné la restitution de la pièce saisie et de lui avoir interdit toute utilisation en double ou copie, alors, selon le pourvoi, que, premièrement, dès lors qu'il est constaté, comme en l'espèce, qu'est régulière l'appréhension d'une pièce se présentant comme la photocopie d'une correspondance échangée entre des tiers, le destinataire de la correspondance ne peut revendiquer la photocopie de cette correspondance détenue par le contribuable visité et faire interdire à l'Administration d'en conserver un double ou une copie qu'après avoir démontré que le contribuable détenait irrégulièrement la photocopie de la correspondance, pour s'en être emparé à la suite d'une perte ou l'avoir appréhendé frauduleusement ; que, en omettant de rechercher si tel était le cas en l'espèce, le président du tribunal de grande instance de Paris a privé sa décision de base légale au regard des articles 544 et 2279 du Code civil et L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors que, deuxièmement, dès lors qu'il est constaté, comme en l'espèce, qu'est régulière l'appréhension de la pièce se présentant comme la photocopie d'une correspondance échangée entre des tiers, et à supposer même que le destinataire de la correspondance puisse revendiquer la photocopie, de toute façon, le contribuable, qui a fait l'objet de la visite, a seul qualité pour faire interdire à la Direction générale des Impôts d'en conserver un double ou une copie ; d'où il suit qu'en faisant droit à une telle mesure, sur la seule demande du destinataire de la correspondance, le président du tribunal de grande instance de Paris a violé les articles 32 du nouveau Code de procédure civile et L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors, plus subsidiairement, que, quand bien même le destinataire de la correspondance aurait qualité pour faire interdire à l'Administration de conserver un double ou une copie de la photocopie appréhendée, une telle demande ne peut être accueillie que si le destinataire, qui a la charge de la preuve, établit que la pièce en cause n'a manifestement aucun lien, fût-il indirect, avec l'activité du contribuable qui a fait l'objet de la visite ; qu'en faisant peser la charge de la preuve sur l'Administration, le président du tribunal de grande instance de Paris a violé les règles de la charge de la preuve, ensemble l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; et alors, enfin, que faute d'avoir constaté qu'en l'espèce la photocopie de la correspondance appréhendée était manifestement sans lien, fût-il indirect, avec l'activité du contribuable visité, le président du tribunal de grande instance de Paris, en tout état de cause, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu, en premier lieu, que la personne destinataire d'une correspondance saisie en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, fût-ce dans les locaux d'un tiers, a qualité et intérêt pour contester la régularité de cette saisie ;

Attendu, en second lieu, que le président du tribunal a retenu, à bon droit, que seules pouvaient être saisies au titre de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales les pièces de nature à apporter la preuve des agissements de la société dont la fraude est recherchée ;

Attendu, enfin, qu'en retenant que l'administration fiscale, auteur de la saisie, n'établit pas le lien entre le destinataire de la correspondance litigieuse et la société dans les locaux de laquelle elle a été saisie, et que cette pièce concerne un tiers à la procédure dirigée contre ladite société, le président du Tribunal a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;

Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 94-12383
Date de la décision : 15/10/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Irrégularité - Personne pouvant l'invoquer - Personne intéressée.

1° Le destinataire d'une correspondance saisie par l'administration fiscale en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, fût-ce dans les locaux d'une tierce personne, a qualité et intérêt pour contester la régularité de la saisie.

2° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Saisie - Objet - Preuve de la fraude recherchée.

2° Seules peuvent être saisies au titre de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales les pièces de nature à apporter la preuve des agissements de la société dont la fraude est recherchée.

3° IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Déroulement - Saisie - Lien avec la fraude recherchée - Preuve - Charge.

3° Justifie sa décision de restituer une correspondance à son destinataire et n'inverse pas la charge de la preuve le président du tribunal qui, saisi d'une contestation de la régularité d'une opération de saisie de documents, retient que l'administration fiscale, auteur de la saisie, n'établit pas le lien entre le destinataire de cette lettre et la société dans les locaux de laquelle elle a été appréhendée et que cette pièce concerne un tiers à la procédure dirigée contre la société dont la preuve de la fraude fiscale était recherchée.


Références :

2° :
CGI Livre des procédures fiscales L16 B

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 31 janvier 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 oct. 1996, pourvoi n°94-12383, Bull. civ. 1996 IV N° 240 p. 208
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 IV N° 240 p. 208

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Mourier.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Geerssen.
Avocat(s) : Avocats : M. Foussard, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.12383
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