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18/03/1986 | FRANCE | N°84-15609

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 mars 1986, 84-15609


Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. X... a fait installer, en mars 1977, par la Société Moderne d'Electronique (S.M.E.) un système d'alarme par sirène pour protéger sa villa contre le vol ; que, dans l'après-midi du 12 juillet 1979, des cambrioleurs ont pénétré par effraction dans la villa et ont emporté une quantité importante d'objets de valeur ; qu'invoquant un vice caché de l'installation, M. X... a assigné la S.M.E. en réparation de son préjudice ; que la Mutuelle Assurance des Instit

uteurs de France, qui avait versé à son assuré une indemnité de 173 23...

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. X... a fait installer, en mars 1977, par la Société Moderne d'Electronique (S.M.E.) un système d'alarme par sirène pour protéger sa villa contre le vol ; que, dans l'après-midi du 12 juillet 1979, des cambrioleurs ont pénétré par effraction dans la villa et ont emporté une quantité importante d'objets de valeur ; qu'invoquant un vice caché de l'installation, M. X... a assigné la S.M.E. en réparation de son préjudice ; que la Mutuelle Assurance des Instituteurs de France, qui avait versé à son assuré une indemnité de 173 233,74 F, est intervenue à l'instance pour obtenir remboursement de cette somme ;

Attendu que la S.M.E. reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir accueilli ces demandes aux motifs que le défaut de fonctionnement du système d'alarme résultait nécessairement d'un vice caché, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il appartient aux juges du fond de constater que le vice caché au sens de l'article 1641 du Code civil a une cause antérieure ou concomitante à la vente et inhérente à la chose vendue ; qu'en se bornant à relever que l'appareil n'aurait pas fonctionné lors du vol et que ce défaut de fonctionnement aurait nécessairement résulté d'un vice caché, sans préciser en quoi la cause du vice aurait été inhérente au système d'alarme et si celle-ci était antérieure ou concomitante à la vente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale ; alors, d'autre part, qu'ont été laissées sans réponse les conclusions faisant valoir que le système d'alarme avait été vérifié à plusieurs reprises, notamment en mai 1979, et fontionnait normalement et qu'ainsi la cause du vice ne pouvait être ni antérieure à la vente ni inhérente au système d'alarme ; et alors, de troisième part, qu'il appartient à l'acquéreur de rapporter la preuve de l'existence du vice caché et de l'imputabilité de ce vice à la chose ; qu'en décidant que le défaut de fonctionnement du système d'alarme résultait nécessairement d'un vice caché dont l'acquéreur aurait ainsi prouvé l'existence sans avoir, en outre, à en déterminer la nature, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve ;

Mais attendu qu'après avoir justement énoncé que le vice caché n'était en mesure de se révéler, en l'espèce, que lorsque se produiraient les circonstances dans lesquelles l'appareil était destiné à entrer en action, c'est-à-dire une introduction dans la villa, la Cour d'appel a relevé que des malfaiteurs avaient pénétré par effraction dans celle-ci et retenu que le S.M.E. avait remplacé l'installation après le vol, ce qu'elle n'aurait manifestement pas fait si son agent n'avait pas constaté le défaut de fonctionnement de celle-ci ; que les juges du second degré, qui n'étaient pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ont vu dans ces circonstances, sans inverser la charge de la preuve, des présomptions qui, dans l'exercice de leur pouvoir souverain, leur ont paru suffisantes pour établir l'existence d'un vice caché ; qu'ils ont ainsi légalement justifié leur décision ; d'où il suit qu'en aucune de ses trois premières branches le moyen n'est fondé ;

Et sur la quatrième branche du moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué ainsi qu'il a été dit, aux motifs que l'utilité d'un système d'alarme résidant exclusivement dans son effet de dissuasion, il ne saurait être prétendu qu'il n'est pas démontré que les voleurs n'auraient pas poursuivi leur action si l'alarme s'était déclanchée alors, selon le moyen, que la cause du dommage peut résider, selon les circonstances, soit dans le défaut de fonctionnement d'un système d'alarme, soit dans les agissements des voleurs ; qu'il appartient aux juges du fond de rechercher le rôle causal de chacun de ces événements et de préciser si l'attitude des voleurs et la gravité de leur faute n'étaient pas de nature à rompre le lien de causalité entre le vice de la chose et le dommage ; qu'en se bornant à considérer le rôle causal du défaut de fonctionnement du système d'alarme, sans rechercher si l'attitude des voleurs, leur détermination et la gravité de leur faute n'étaient pas des circonstances propres à interrompre ce lien de causalité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Mais attendu que, se fondant sur les constatations de l'enquête de police, la Cour d'appel a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de la cause, que les cambrioleurs, qui sont restés un long moment dans la villa au cours d'un après-midi du mois de juillet, n'auraient pas agi ainsi si la sirène d'alarme s'était déclenchée ; que, sans négliger de prendre en considération l'attitude des malfaiteurs, les juges du second degré ont, par ces motifs, caractérisé l'existence d'un lien de causalité directe entre le vice de la chose et le dommage et, par suite, légalement justifié leur décision ; d'où il suit que le grief énoncé en la quatrième branche n'est pas mieux fondé que les précédents ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-15609
Date de la décision : 18/03/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Garantie - Vices cachés - Définition - Caractère occulte - Pouvoir d'appréciation des juges du fond.

VENTE - Garantie - Vices cachés - Définition - Caractère occulte - Système d'alarme - Défaut de fonctionnement lors de l'introduction du voleur dans les lieux.

Un système d'alarme, installé dans une habitation, n'ayant pas fonctionné lors d'un cambriolage, justifie légalement sa décision la Cour d'appel, qui estime établie l'existence d'un vice caché en relevant, d'une part, qu'un tel vice n'était en mesure de se révéler que lorsque se produiraient les circonstances dans lesquelles l'appareil était destiné à entrer en action, c'est-à-dire une introduction dans les lieux, et d'autre part, que l'installateur de ce système d'alarme l'avait remplacé après le vol, ce qu'il n'aurait pas fait s'il n'avait pas constaté son défaut de fonctionnement. C'est, en effet, dans l'exercice de son pouvoir souverain que la juridiction du second degré a vu dans ces circonstances des présomptions suffisantes pour établir l'existence d'un vice caché.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)

A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre civile 1, 1980-03-26, bulletin 1980 I N° 107 p. 87 (Rejet). Cour de Cassation, chambre commerciale, 1981-06-15, bulletin 1981 IV N° 273 p. 217 (Rejet) et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 mar. 1986, pourvoi n°84-15609, Bull. civ. 1986 I N° 75 p. 72
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 75 p. 72

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Joubrel -
Avocat général : Avocat général : M. Gulphe -
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Viennois -
Avocat(s) : Avocats : la Société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Liard et M. Le Prado.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.15609
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