CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI DE LA SOCIETE ANONYME DES TRANSPORTS ROBLET CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 22 OCTOBRE 1968, QUI STATUANT SUR LES INTERETS CIVILS EN SUITE D'UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION, DONT X..., CHAUFFEUR AU SERVICE DE LADITE SOCIETE, A ETE DECLARE ENTIEREMENT RESPONSABLE, A CONDAMNE CELUI-CI A DES DOMMAGES-INTERETS ENVERS LES PARTIES CIVILES ET A DIT LA SOCIETE ROBLET CIVILEMENT RESPONSABLE ;
LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2 ET 3, 85 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 319 DU CODE PENAL, 1382 DU CODE CIVIL, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A COMPRIS DANS LE PREJUDICE SUBI PAR LA VEUVE DE LA VICTIME D'UNE INFRACTION D'HOMICIDE PAR IMPRUDENCE, LA PERTE DE LA CHANCE QU'ELLE POSSEDAIT DE VOIR SON MARI REUSSIR BRILLAMMENT DANS LA CARRIERE A LAQUELLE IL SE PREPARAIT ;ALORS QU'UN TEL PREJUDICE DEPEND DES CIRCONSTANCES INCONNUES TELLE QUE LA DUREE DE LA VIE DU MARI SANS L'INFRACTION ET SA REUSSITE EFFECTIVE DANS SA PROFESSION ET QUE LES DOMMAGES-INTERETS NE PEUVENT REPARER UN PREJUDICE A LA FOIS INCERTAIN DANS SON EXISTENCE ET SANS LIEN DIRECT DE CAUSE A EFFET AVEC L'INFRACTION ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DES JUGES DU FOND QUE BAPTISTE Y... A ETE MORTELLEMENT BLESSE DANS UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION, DONT X... CHAUFFEUR AU SERVICE DE LA SOCIETE ROBLET A ETE RECONNU ENTIEREMENT RESPONSABLE ET LADITE SOCIETE DECLAREE CIVILEMENT RESPONSABLE ;
QUE LES JUGES DU FOND PRECISENT QUE BAPTISTE Y... ETAIT AU MOMENT DE SA MORT ETUDIANT EN MEDECINE DE SIXIEME ANNEE, TRES BRILLANT INTERNE DES HOPITAUX DE PARIS ET QU'IL SE DESTINAIT A LA CHIRURGIE ;
QU'IL VOYAIT S'OUVRIR DEVANT LUI A BREF DELAI DE BELLES PERSPECTIVES D'AVENIR DONT SA FEMME DEVAIT PROFITER ET QUI LUI AURAIENT ASSURE UNE SITUATION TRES SUPERIEURE A CELLE QU'ELLE AVAIT ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS, EN TENANT COMPTE POUR REPARER LE PREJUDICE MATERIEL ET MORAL SUBI PAR LA DAME BAPTISTE Y... DU FAIT DE LA MORT ACCIDENTELLE DE SON MARI DE LA SITUATION A LAQUELLE CELUI-CI DEVAIT ACCEDER, LA COUR N'A VIOLE AUCUN DES TEXTES VISES AU MOYEN ;
QU'EN EFFET, LA DAME BAPTISTE Y... A PERDU LA CHANCE DE BENEFICIER DE LA SITUATION A LAQUELLE DEVAIT ACCEDER SON MARI ET QUE CETTE PERTE CONSTITUE UN PREJUDICE CERTAIN ET ACTUEL DECOULANT DIRECTEMENT DE L'ACCIDENT DONT X... A ETE DECLARE RESPONSABLE ;
QUE LE MOYEN NE SAURAIT DONC ETRE ACCUEILI ;
SUR LE
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2, 3, 85 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 1382 DU CODE CIVIL, 319 DU CODE PENAL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A COMPRIS DANS LE PREJUDICE SUBI PAR LA MERE DE LA VICTIME LA BRILLANTE REUSSITE A LAQUELLE SON FILS AURAIT ETE PROMIS ET L'ANEANTISSEMENT DES SACRIFICES QU'ELLE ET SON MARI AVAIENT FAITS POUR SON EDUCATION ;ALORS QUE LE PREMIER DE CES PREJUDICES DEPEND DE CIRCONSTANCES INCONNUES TELLES QUE LA DUREE DE LA VIE DE LA VICTIME ET SA REUSSITE EFFECTIVE ET EST DONC A LA FOIS INCERTAIN ET EVENTUEL ET SANS LIEN DIRECT DE CAUSE A EFFET AVEC L'INFRACTION ;
ET ALORS QUE LE SECOND EST NECESSAIREMENT SANS LIEN DIRECT DE CAUSE A EFFET AVEC L'INFRACTION PUISQUE LES DEPENSES CONSIDEREES AVAIENT ETE DEPENSEES AVANT CETTE INFRACTION ET QUE, DE PLUS, LA MERE NE PEUT OBTENIR REPARATION INTEGRALE DE SACRIFICES QU'ELLE N'AVAIT PAS FAITS SEULE MAIS AVEC SON MARI ;
ATTENDU QUE L'ARRET ENONCE QUE LA DAME Y...
Z... MERE DE LA VICTIME A DROIT A LA REPARATION DU PREJUDICE MORAL, QU'ELLE A SUBI DU FAIT DE LA MORT ACCIDENTELLE DE SON FILS ET QU'EN EVALUANT CE PREJUDICE A 12000 FRANCS, LA COUR D'APPEL N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2, 3, 85, 496 ET SUIVANTS, 506, 515 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE, SUR LE SEUL APPEL DU CIVILEMENT RESPONSABLE, ET DU FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE, LA COUR D'APPEL A AJOUTE AU JUGEMENT UNE CONDAMNATION AUX INTERETS SUR LES REPARATIONS CIVILES ET CE A COMPTER DU JUGEMENT ;ALORS, D'UNE PART, QU'EN L'ABSENCE D'APPEL DES PARTIES CIVILES, ELLE NE POUVAIT RIEN AJOUTER AUX REPARATIONS CIVILES ALLOUEES EN PREMIERE INSTANCE NI AGGRAVER LE SORT DU CIVILEMENT RESPONSABLE APPELANT ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, LA CREANCE DELICTUELLE NE PEUT PRODUIRE D'INTERETS MORATOIRES QUE DU JOUR DE LA DECISION QUI EN CONSACRE L'EXISTENCE ET QUE L'ARRET NE DONNE AUCUN MOTIF DE NATURE A JUSTIFIER L'ALLOCATION DES INTERETS A COMPTER DU JUGEMENT A TITRE COMPENSATOIRE ;
EN CE QUI CONCERNE LA CONDAMNATION AUX INTERETS A COMPTER DU JUGEMENT AU PROFIT DES CONSORTS Y... ;
ATTENDU QUE LA CONDAMNATION AUX INTERETS MORATOIRES A ETE PRONONCEE PAR LA COUR D'APPEL SUR LA DEMANDE COMPRISE DANS LEURS CONCLUSIONS DES CONSORTS Y..., QUI AVAIENT DEJA RECLAME DANS LEURS CONCLUSIONS DE PREMIERE INSTANCE LES INTERETS DES SOMMES QUI LEUR SERAIENT ALLOUEES ;
QU'EN FAISANT DROIT A CETTE DEMANDE, LA COUR N'A PAS STATUE SUR UNE DEMANDE NOUVELLE ET N'A PAS AGGRAVE LE SORT DES APPELANTS ;
QU'EN DECIDANT QUE LES INTERETS SERAIENT DUS A PARTIR DU JUGEMENT EN CE QUI CONCERNE LES SOMMES REPRESENTANT LES DOMMAGES ET INTERETS DONT ELLE CONFIRMAIT LE MONTANT, LA COUR D'APPEL N'A VIOLE AUCUN DES TEXTES VISES AU MOYEN ;
QU'EN EFFET UNE CREANCE DELICTUELLE PRENANT NAISSANCE DU JOUR OU ELLE EST ALLOUEE JUDICIAIREMENT ET POUVANT PRODUIRE DES INTERETS A PARTIR DUDIT JOUR, C'EST A BON DROIT QUE LES JUGES DU FOND ONT DECIDE QUE LES INTERETS AFFERENTS A CES CREANCES SERAIENT DUS DANS LES LIMITES OU ELLES ONT ETE CONFIRMEES PAR LA COUR, A COMPTER DU JUGEMENT ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN EN CETTE BRANCHE NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
EN CE QUI CONCERNE LES INTERETS DES SOMMES ALLOUEES AUX AUTRES PARTIES ;
VU LES ARTICLES CITES CI-DESSUS ;
ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND NE PEUVENT STATUER AU POINT DE VUE DES REPARATIONS CIVILES QUE DANS LES LIMITES DES CONCLUSIONS DONT ILS SONT SAISIS ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, EN ACCORDANT A LA CAISSE PRIMAIRE DE SECURITE SOCIALE ET A L'ADMINISTRATION DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE LES INTERETS DES SOMMES QU'ELLE LEUR ALLOUAIT SANS QUE CES INTERETS AIENT ETE RECLAMES TANT EN PREMIERE INSTANCE QU'EN APPEL PAR LESDITES PARTIES, A MECONNU LE PRINCIPE CI-DESSUS ENONCE ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS EN DATE DU 22 OCTOBRE 1968, PAR VOIE DE RETRANCHEMENT ET SANS RENVOI, MAIS SEULEMENT EN CE QU'IL A DIT QUE LES SOMMES ALLOUEES A LA CAISSE PRIMAIRE DE SECURITE SOCIALE ET A L'ADMINISTRATION DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE PORTERAIENT INTERETS, TOUTES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES ;