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22/03/2022 | FRANCE | N°19BX04991

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 22 mars 2022, 19BX04991


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 ainsi que des pénalités correspondantes, mises en recouvrement le 30 juin 2017.

Par un jugement n° 1802932 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le

20 décembre 2019 et le 7 septembre 2020, M. B..., représenté par Me de Saint Quentin, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 ainsi que des pénalités correspondantes, mises en recouvrement le 30 juin 2017.

Par un jugement n° 1802932 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 décembre 2019 et le 7 septembre 2020, M. B..., représenté par Me de Saint Quentin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu, des majorations et des intérêts de retard mis à sa charge au titre des années 2013, 2014 et 2015 et d'en ordonner le remboursement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a fondé son jugement sur un raisonnement juridique qui n'était pas en débat en première instance ;

- il remplit l'ensemble des conditions fixées par l'article 81 A du code général des impôts pour bénéficier de l'exonération d'impôt sur le revenu du fait de l'activité de prospection qu'il exerce à l'étranger ;

- la loi fiscale ne prévoit aucune condition tenant à ce que les activités de prospection exercées à l'étranger le soient dans le but d'étendre les marchés à l'étranger de son employeur ;

- à titre subsidiaire, l'activité de prospection qu'il exerce à l'étranger a bien pour but d'étendre les marchés à l'étranger de la société JSA France ;

- la doctrine du BOFIP BOI-RSA GEO-10-20 est opposable à l'administration en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 juillet 2020 et 11 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce qu'il soit procédé à la compensation entre la décharge prononcée et la sous-imposition résultant de l'absence d'application de la règle mentionnée à l'article 197 C du code général des impôts aux impositions initiales.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Anfray, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est salarié de l'entreprise unique à responsabilité limitée Jackson Square Aviation France (EURL JSA France), filiale toulousaine du groupe Jackson Square Aviation ayant pour activité principale la location d'avions commerciaux et dont la société mère Jackson Square Aviation LLC (société JSA LLC) est établie aux Etats-Unis. Dans le cadre de cette activité, la société filiale JSA France assure une mission d'assistance commerciale et administrative. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause le bénéfice de l'exonération d'impôt sur le revenu dont a bénéficié M. B... au titre des années 2013, 2014 et 2015 sur le fondement de l'article 81 A du code général des impôts. Des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu lui ont ainsi été notifiées par une proposition de rectification du 19 décembre 2016, selon la procédure contradictoire. Ces cotisations supplémentaires, mises en recouvrement le 30 juin 2017, ont été contestées par M. B... par une réclamation du 18 octobre 2017, laquelle a fait l'objet d'une décision de rejet du 7 mai 2018. Par un jugement du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015 ainsi que des pénalités correspondantes. Par la présente requête, M. B... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour rejeter les conclusions de M. B... tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu contestés, le tribunal a relevé que le contribuable ne remplissait pas les conditions d'exonération prévues par l'article 81 A du code général des impôts, dès lors que l'activité de prospection à l'étranger exercée par l'intéressé n'avait pas pour objet le développement des exportations de l'entreprise qui l'employait ni l'essor à l'étranger de cette entreprise. Contrairement à ce que soutient le requérant en appel, il résulte de l'examen tant de la proposition de rectification que des écritures en défense de l'administration devant le tribunal que l'administration fiscale justifiait les suppléments d'impôt en litige par ce motif qui n'a donc pas été relevé d'office par les premiers juges. Par suite, et à supposer que M. B... ait entendu soutenir que le tribunal a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure, le moyen doit être écarté.

Sur les conclusions en décharge :

3. Aux termes de l'article 81 A du code général des impôts : " I. - Les personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui exercent une activité salariée et sont envoyées par un employeur dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de cet employeur peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où elles sont envoyées. / L'employeur doit être établi en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne, ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. / L'exonération d'impôt sur le revenu mentionnée au premier alinéa est accordée si les personnes justifient remplir l'une des conditions suivantes : / 1° Avoir été effectivement soumises, sur les rémunérations en cause, à un impôt sur le revenu dans l'Etat où s'exerce leur activité et sous réserve que cet impôt soit au moins égal aux deux tiers de celui qu'elles auraient à supporter en France sur la même base d'imposition ; / 2° Avoir exercé l'activité salariée dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas : / - soit pendant une durée supérieure à cent quatre-vingt-trois jours au cours d'une période de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte aux domaines suivants : a) Chantiers de construction ou de montage, installation d'ensembles industriels, leur mise en route, leur exploitation et l'ingénierie y afférente ; b) Recherche ou extraction de ressources naturelles ; c) Navigation à bord de navires immatriculés au registre international français, - soit pendant une durée supérieure à cent vingt jours au cours d'une période de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte à des activités de prospection commerciale (...) ".

4. Les dispositions précitées créent deux régimes d'exonération des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où sont envoyées les salariés, l'un concernant les salariés qui, quelle que soit leur activité propre, sont employés par des entreprises relevant de trois domaines, les chantiers de construction ou de montage, la recherche ou l'extraction de ressources naturelles et la navigation à bord de navires immatriculés au registre international français et l'autre concernant les salariés qui, quel que soit le domaine dont relève leur employeur, exercent une activité de prospection commerciale. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires relatifs à la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 dont elles sont issues s'agissant des activités de prospection commerciale, que le législateur a entendu favoriser, d'une part, les activités à l'étranger des entreprises de certains domaines économiques et, d'autre part, encourager non pas les activités à l'étranger des entreprises du secteur tertiaire de l'assistance ou prospection commerciale, mais toutes les entreprises établies en France, dans l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, à développer leurs activités de prospection commerciale à l'étranger en employant des salariés qu'elles envoient à l'étranger dans ce but. Ainsi, l'exonération prévue par le I de l'article 81 A du code général des impôts ne trouve à s'appliquer, en ce qui concerne les activités salariées de prospection commerciale à l'étranger, qu'aux missions réalisées pour le compte de l'employeur, dans l'objectif d'une implantation ou du développement de ses marchés à l'étranger.

5. Il résulte de l'instruction que M. B..., seul salarié de l'EURL JSA France, a conclu avec cette société un contrat de travail qui lui donne pour mission, notamment, de prospecter le marché commercial des locations d'avions auprès des compagnies aériennes du Moyen-Orient, d'Afrique et de Russie. Il est cependant constant que ces activités ont pour seul objectif le développement de marchés à l'étranger de la société américaine JSA LLC, qui a pour activité la location d'avions et à laquelle l'employeur de M. B..., la société JSA France, facture ces prestations de service d'assistance à la prospection commerciale. Dans ces conditions, les activités de prospections réalisées par M. B... dans le but de développer des marchés de location d'avions ne peuvent être considérées comme réalisées, même pour partie, dans l'objectif de l'implantation ou du développement de marchés à l'étranger de la société JSA France, dont l'activité est l'assistance commerciale et administrative dans le domaine de la location d'avions commerciaux.

6. Ni les dispositions précitées de l'article 81 A du code général des impôts ni aucune autre disposition ne subordonne l'exonération prévue à la condition que l'activité de prospection à l'étranger du salarié ait pour objet exclusif le développement, dans les pays prospectés, de l'activité de l'entreprise qui emploie le salarié. Toutefois, comme il a été dit, les opérations de prospection de M. B... visent à développer des parts de marché à l'étranger de la société américaine JSA LLC, conformément à l'objet social de la filiale française qui l'emploie. Par suite, si l'activité à l'étranger de M. B... permet à la société qui l'emploie de réaliser le chiffre d'affaires que lui procure son unique client, la société américaine Jackson Square Aviation LLC, cette activité ne peut être regardée comme participant au développement de marchés de la société JSA France aux Etats-Unis.

7. Ainsi, et comme l'ont estimé les premiers juges, M. B... ne remplit pas les conditions de l'exonération prévue à l'article 81 A du code général des impôts.

8. Par ailleurs, et comme l'a jugé le tribunal, la doctrine référencée BOI-RSA-GEO-10-20 § 290 à 340 ne comportant aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle exposée ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande ni à demander le remboursement des sommes acquittées au titre des impositions en litige.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. B... C... la somme qu'il demande sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée pour information au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 22 février 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente assesseure,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mars 2022.

La présidente assesseure,

Fabienne ZuccarelloLa présidente- rapporteure,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04991


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04991
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CAZALS MANZO PICHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-03-22;19bx04991 ?
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