Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25 février 2019, 2 septembre 2019, 26 novembre 2019, 28 avril 2020, 20 juillet 2020 et 4 septembre 2020, l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens, l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente et M. A... C..., représentés par Me Gendreau, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel la préfète de la Charente a délivré à la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne une autorisation unique pour l'installation et l'exploitation d'un parc éolien sur le territoire de la commune de Saint-Fraigne ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 en tant que la durée d'exploitation du projet de la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne pendant une quarantaine d'années n'a pas été soumise à l'information du public lors de l'enquête publique et d'enjoindre à la préfète de la Charente de reprendre l'instruction à la phase de l'enquête publique ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne chacun la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'arrêté attaqué méconnaît les articles L. 411-1, L. 411-2 et L. 511-1 du code de l'environnement en raison de la présence du circaète Jean-le-Blanc et de chiroptères à proximité du projet ;
- l'étude d'impact est insuffisante en ce qu'elle ne fait pas mention d'un couple de circaètes Jean-le-Blanc à 850 mètres du projet, qu'elle ne précise ni les modalités de raccordement au réseau électrique ni les impacts environnementaux du raccordement du projet au réseau, qu'elle ne mentionne pas la présence de l'autour des palombes, qu'elle comporte des irrégularités de calcul de distance des aérogénérateurs avec les canopées et bois situés à proximité et qu'elle n'a pas analysé les impacts sur le logis de Cherconnay, monument historique, en opérant une confusion avec le logis du Vivier situé à l'ouest de ce hameau ;
- le dossier ne comporte pas de demande de dérogation " espèce protégée " ;
- la société pétitionnaire ne justifie pas qu'elle disposera de capacités techniques et financières de manière suffisamment certaine en méconnaissance de l'article L. 181-27 du code de l'environnement ;
- à titre subsidiaire, le dossier soumis à enquête publique est incomplet faute de mentionner la durée d'exploitation des éoliennes pendant quarante années ;
- le projet méconnaît les recommandations nationale et internationale pour la protection des chiroptères d'une distance de 200 mètres entre les pointes des pales et les bois ;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'environnement en raison de l'atteinte portée au logis de Cherconnay classé au titre de la protection des monuments historiques ;
- les avis des propriétaires, du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent sur les conditions de remise en état du site après l'arrêt définitif de l'installation n'ont pas été recueillis en méconnaissance du 7° du I de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;
- l'arrêté attaqué ne détermine pas l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation en méconnaissance de l'article R. 512-30 du code de l'environnement.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 mai 2019, 26 novembre 2019, 30 avril 2020, 4 juin 2020 et 29 juillet 2020, la société la Ferme éolienne de Saint-Fraigne, représentée par Me Guiheux, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants solidairement la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en ce que l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente et M. C... n'ont pas d'intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté attaqué ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2019, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public,
- et les observations de :
- Me Gendreau, représentant l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens, l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente et M. A... C...,
- de Me Galipou, représentant la Ferme éolienne de Saint-Fraigne,
- et de Mme Baudrillart, présidente de l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente.
Deux notes en délibéré présentées par Me Guiheux pour la Ferme éolienne de Saint Fraigne ont été enregistrées les 17 et 23 novembre 2021.
Une note en délibéré présentée par Me Gendreau pour l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens, l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente et M. A... C... a été enregistrée le 22 novembre 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La société Ferme éolienne de Saint-Fraigne, filiale de la société Volkswind France, a déposé le 29 septembre 2016 une demande d'autorisation unique, complétée le 3 avril 2017, pour l'exploitation d'un parc éolien composé de huit éoliennes d'une hauteur en bout de pales de 180 mètres et de deux postes de livraison sur la commune de Saint-Fraigne. Par arrêté du 8 novembre 2018, la préfète de la Charente a délivré à la société l'autorisation sollicitée. Par la présente requête, l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens (ADSF), l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente (APAPPA) et M. C... demandent l'annulation de cet arrêté.
Sur les fins de non-recevoir opposées en défense :
2. Si la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne soutient que l'APAPPA n'a pas intérêt à agir en raison de l'imprécision de ses statuts et de l'absence de mention de la possibilité d'exercer des recours à l'encontre d'autorisations administratives, il ressort de l'article 3 des statuts de cette association qu'elle a notamment pour objet social " de protéger le patrimoine du Pays d'Aigre et du Nord Charente contre les menaces de pollution, de modifications profondes ou de destruction de ses particularités et de ses richesses naturelles et architecturales ". Cet objet, qui est suffisamment précis sur le plan tant matériel que géographique, confère à l'association un intérêt suffisant pour contester l'arrêté d'autorisation unique du 8 novembre 2018 concernant une installation susceptible de porter atteinte aux intérêts que l'association défend. En outre, l'association a produit sa déclaration de création faite le 16 décembre 2002 auprès de la préfecture de la Charente et publiée au Journal officiel du 1er février 2003. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée en défense, tirée de l'absence d'intérêt à agir de l'APAPPA, doit être écartée.
3. Il résulte de l'instruction que M. C... réside au logis de Cherconnay, dont la façade et la toiture sont inscrites aux monuments historiques, situé au hameau du Vivier à Longré, à environ 2 kilomètres de distance du projet. L'étude paysagère jointe au dossier de demande d'autorisation indique que le logis de Cherconnay est situé au cœur d'un tissu bâti à proximité des " Grands Bois ". Si les quatre éoliennes de la zone Nord d'implantation du projet seront masquées, il ressort des photomontages joints à l'étude paysagère que les éoliennes de la zone Sud seront nettement visibles depuis le site du logis de Cherconnay, en dépit du relief et des boisements. Dans ces conditions, eu égard à la configuration des lieux et à la hauteur des éoliennes, M. C... justifie d'un intérêt suffisant lui donnant qualité à agir contre l'autorisation unique litigieuse. La circonstance que le nombre des éoliennes de la zone Sud a été réduit de six à quatre ne suffit pas à priver l'intéressé de son intérêt à agir. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée en défense doit être écartée.
Sur la légalité de l'autorisation unique du 8 novembre 2018 :
En ce qui concerne l'insuffisance de l'étude d'impact :
4. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II.- L'étude d'impact présente : (...) 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages (...) le patrimoine culturel (...) le bruit, les espaces naturels, (...) 3° Une analyse des effets négatifs et positifs (...) du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° (...) la commodité du voisinage (bruits...), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique (...) 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : (...) - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement (...) qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. (...) ".
5. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce. Les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'autorisation d'une installation classée relèvent des règles de procédure. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant ce dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
S'agissant des impacts du projet sur le circaète Jean-le-Blanc, l'autour des palombes et les chiroptères :
6. Il ressort d'un rapport du groupe ornithologique des Deux-Sèvres du 10 août 2018 que la présence d'un nid de circaètes Jean-le-Blanc, espèce rare et protégée inscrite à l'annexe I de la directive 2009/147 du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages, a été relevée entre 850 mètres et 1 000 mètres de distance des éoliennes E01 et E03 du projet de la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne. La circonstance que la présence de circaètes Jean-Le-Blanc n'ait pas été détectée lors des prospections réalisées du 22 décembre 2014 au 12 novembre 2015 dans le cadre de l'étude écologique finalisée le 27 mars 2017 ne permet pas de remettre en cause le constat de la présence d'au moins un couple de circaètes Jean-le-Blanc à proximité du site à la date de l'autorisation litigieuse. Eu égard à leur présence et compte tenu des déplacements de ces oiseaux, l'absence, dans l'étude d'impact, d'analyse des impacts du projet sur cette espèce peut être regardée comme entachant sur ce point l'étude d'impact d'insuffisance. Une telle lacune n'a toutefois pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et n'a pas été de nature à exercer une influence sur la décision de la préfète dès lors que la présence du circaète Jean-le-Blanc et l'impact du projet sur l'espèce ont été évoqués dans diverses observations au cours de l'enquête publique et d'ailleurs mentionnés dans les conclusions du commissaire enquêteur, lequel a estimé que le risque généré par le parc éolien, s'agissant du circaète Jean-le-Blanc, était négligeable.
7. En outre, si les requérants allèguent une " présence régulière " de l'autour des palombes qui n'aurait pas été mentionnée dans l'étude d'impact, cette présence a été recensée au sein de l'étude d'impact comme " possible " dans la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) " Forêt de Tusson " située à 4,3 km du projet.
8. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'étude écologique mentionne les distances des éoliennes par rapport aux linéaires boisés les plus proches, qu'il s'agisse de haies ou de boisements. Si les distances des éoliennes par rapport aux haies et boisements peuvent présenter une marge d'erreur dans leur mesure, elles permettent néanmoins d'apprécier l'ordre de grandeur des distances et les requérants ne sauraient utilement se prévaloir des recommandations nationales et internationales, notamment celles issues de l'accord Eurobats, dépourvues de toute valeur réglementaire, selon lesquelles les appareils devraient être implantés à 200 mètres au moins des lisières boisées, pour soutenir que l'étude d'impact sur la biodiversité serait insuffisante de ce fait.
S'agissant des impacts du projet sur le logis médiéval de Cherconnay :
9. Les requérants soutiennent que l'appréciation de l'atteinte au patrimoine du logis médiéval de Cherconnay, dont les façades et la toiture sont classées en tant que monument historique, serait biaisée dans la mesure où l'étude paysagère aurait confondu le logis du Vivier et le logis de Cherconnay. Toutefois, si la vignette de localisation en page 87 de l'étude paysagère identifie à tort le logis du Vivier comme étant le logis du Cherconnay, cette erreur a été corrigée à la suite d'observations émises au cours de l'enquête publique. En outre, l'étude paysagère indique clairement que les photomontages ont été réalisés à partir de vues prises à proximité du logis de Cherconnay et non depuis le logis lui-même. A cet égard, il ne résulte pas de l'instruction que ces vues prises depuis la sortie du bourg du Vivier auraient été de nature à induire en erreur l'autorité administrative et le public quant aux impacts du projet sur le patrimoine.
S'agissant du raccordement du parc au réseau électrique :
10. Aux termes de l'article R. 512-8 du code de l'environnement : " I.-Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / II.-Elle présente successivement : / (...) 4° a) Les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter et, si possible, compenser les inconvénients de l'installation ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes. Ces mesures font l'objet de descriptifs précisant les dispositions d'aménagement et d'exploitation prévues et leurs caractéristiques détaillées. (...) ".
11. Si, en vertu de ces dispositions, l'étude d'impact doit comporter des documents précisant notamment les conditions " du transport des produits fabriqués " au sein de l'installation, le raccordement d'une installation de production d'électricité aux réseaux de transport de distribution et de transport d'électricité, qui incombe aux gestionnaires de ces réseaux et qui relève d'une autorisation distincte, ne constitue pas un transport des produits fabriqués au sens de ces dispositions. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'étude d'impact, faute de comporter des indications relatives aux modalités de raccordement envisagées et aux impacts d'un tel raccordement, serait entachée d'insuffisance.
12. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'étude d'impact est entachée d'insuffisances et d'omissions de nature à entrainer l'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne les conditions de démantèlement et de remise en état du site :
13. Aux termes du I de l'article R. 512-6 du code de l'environnement applicable au litige : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; (...) ".
14. Il résulte de l'instruction que le maire de Saint-Fraigne et les propriétaires des terrains concernés par l'implantation du parc éolien ont pris connaissance des conditions de démantèlement et de remise en état du site telles que définies par l'arrêté du 26 août 2011 modifié relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent et ont émis des avis favorables, lesquels ont été joints au dossier de demande d'autorisation unique. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'avis du maire et des propriétaires en méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement doit être écarté.
15. Aux termes de l'article R. 512-30 du code de l'environnement : " Dans le cas d'une installation implantée sur un site nouveau, l'arrêté d'autorisation détermine également l'état dans lequel doit être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation. ".
16. L'arrêté attaqué indique, à son article 9, qu'outre les dispositions prévues par l'arrêté ministériel du 26 août 2011, les terrains sont remis en état (usage agricole), sauf si leur propriétaire souhaite le maintien des aires de grutage et des chemins d'accès, dès la fin de l'exploitation des installations et quel que soit le motif de cessation de l'activité. Une telle mention, suffisamment précise sur la remise en état du site, satisfait aux exigences de l'article R. 512-30 du code de l'environnement. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué aurait méconnu ces dispositions.
En ce qui concerne l'information du public quant à la durée d'exploitation du parc éolien :
17. Il ressort de l'étude d'impact en page 279, jointe au dossier d'enquête publique, que la durée d'exploitation prévue pour le parc éolien est de 20 à 25 années et qu'au terme de cette période, soit la production d'énergie est reconduite pour un nouveau cycle avec de nouvelles éoliennes, soit la production est arrêtée et le parc est démantelé. La circonstance que la société pétitionnaire aurait signé une promesse de bail emphytéotique d'une durée de quarante ans n'est pas de nature à avoir induit le public en erreur sur la durée de l'exploitation du parc éolien projeté. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré du défaut d'information du public sur la durée de l'exploitation du parc éolien doit être écarté.
En ce qui concerne les capacités techniques et financières de la société pétitionnaire :
18. D'une part, en vertu du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de délivrance de l'autorisation attaquée, la demande d'autorisation mentionne " les capacités techniques et financières de l'exploitant ". Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières.
19. Il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'autorisation, qui figurait au dossier soumis à enquête publique, comportait, dans sa partie relative aux capacités techniques et financières du pétitionnaire, une présentation de la société Volkswind GmbH, actionnaire unique de la SAS Ferme éolienne de Saint-Fraigne, le montant de son chiffre d'affaires, une liste des parcs éoliens qu'elle exploite en France, une lettre d'engagement ferme et définitif de la société Volkswind GmbH en date du 27 juillet 2016 par laquelle elle atteste que sa filiale dispose des ressources financières permettant d'assurer la bonne exploitation et la remise en état des installations éoliennes faisant l'objet de la demande d'autorisation et s'engage, en cas de refus total ou partiel de prêts bancaires, à mettre à sa disposition ses capacités techniques et financières et enfin d'un document attestant de sa solvabilité et de sa stabilité financière établi par le cabinet Euler Hermès Rating. Les indications ainsi fournies par la pétitionnaire, qui comportaient par ailleurs un plan de développement précisément chiffré, étaient de nature à apporter des informations suffisamment précises sur les conditions dans lesquelles elle entendait mener à bien son projet et satisfaire aux obligations qui lui sont imparties par le code de l'environnement et comportait des engagements fermes de la société mère à l'égard de sa filiale. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation sur ce point doit être écarté.
20. D'autre part, aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement, issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". L'article D. 181-15-2 du même code, issu du décret du 26 janvier 2017, dispose que : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir. Dans ce dernier cas, l'exploitant adresse au préfet les éléments justifiant la constitution effective des capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation (...) ". Ces dispositions modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 du code de l'environnement.
21. Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'elles posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site, au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.
22. Il ressort du plan de financement joint au dossier de demande d'autorisation de la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne que le coût de réalisation du projet s'élève à 59 786 695 euros HT et que le financement sera assuré pour partie sur fonds propres à hauteur de 12 065 000 euros et pour partie grâce à un emprunt bancaire à hauteur de 47 721 695 euros. Il résulte de l'instruction que la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne, laquelle a été créée pour l'exploitation du parc éolien de Saint-Fraigne, est une filiale à 100 % de la société Volkswind GmbH, elle-même filiale à 100% du groupe Axpo, qui justifie d'un chiffre d'affaires atteignant environ 80 millions d'euros en 2016 et d'une expérience aboutie dans le domaine de l'exploitation des parcs éoliens en Allemagne depuis 1993 et en France depuis 2001. Le dossier de demande d'autorisation comporte, d'une part, une lettre d'intention de la société Volkswind GmbH du 27 juillet 2016 par laquelle elle atteste que sa filiale dispose des ressources financières permettant d'assurer la bonne exploitation et la remise en état des installations éoliennes faisant l'objet de la demande d'autorisation et s'engage, en cas de refus total ou partiel de prêts bancaires, à mettre à disposition de sa filiale ses capacités techniques et financières, afin de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés l'article L. 511-1 du code de l'environnement et d'être en mesure de satisfaire aux obligations du code de l'environnement lors de la cessation d'activité et, d'autre part, un document établi par le cabinet Euler Hermès Rating attestant de sa solvabilité et de sa stabilité financière, comme en témoigne sa notation en " A " depuis 2002 par ledit cabinet, cette note correspondant aux entreprises " dont la garantie d'avenir est considérée de grande qualité ". Par suite, et quand bien même elle ne disposerait pas d'un engagement ferme et définitif d'un établissement bancaire, la société pétitionnaire doit être regardée comme justifiant, avant la mise en service de l'installation, conformément à l'article L. 181-27 du code de l'environnement, du caractère pertinent des capacités et garanties financières qu'elle entend mettre en œuvre.
En ce qui concerne les atteintes alléguées aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
23. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) "
S'agissant du circaète Jean-le-Blanc et des chiroptères :
24. Ainsi qu'il a été dit au point 6, un nid de circaètes Jean-le-Blanc a pu être recensé à proximité du site d'implantation du projet litigieux. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que cette espèce pourrait subir des risques de mortalité élevés ni que sa conservation dans un état favorable soit compromise par le projet litigieux. A cet égard, il n'apparaît pas que les mesures et prescriptions liées à la préservation de l'avifaune auxquelles le projet est soumis ne seraient pas adaptées à cette espèce. Les requérants ne sauraient utilement se prévaloir sur ce point d'un avis de l'autorité environnementale du 20 octobre 2016 concernant un autre projet de parc éolien. S'agissant des chiroptères, les requérants se bornent à invoquer l'atteinte portée à ces espèces du fait du non-respect des recommandations nationale et internationale préconisant une distance de 200 mètres entre les éoliennes et les lisières boisées. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 8, ils ne sauraient utilement se prévaloir de ces recommandations dépourvues de toute valeur réglementaire. En tout état de cause, les requérants ne produisent aucun élément permettant d'infirmer les conclusions de l'étude d'impact, aux termes de laquelle le niveau d'impact sur les chiroptères, après mesures d'évitement et de réduction, sera non significatif. Par suite, en l'absence de risques résiduels avérés pour le circaète Jean-le-Blanc et les chiroptères, le projet pouvait être autorisé par la décision en litige sans méconnaître sur ce point les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
S'agissant du logis de Cherconnay :
25. Il résulte de l'instruction que si le logis de Cherconnay, dont les façades et la toiture sont classées au titre des monuments historiques, et le projet d'implantation des huit éoliennes sont distants d'environ 2 kilomètres et sont covisibles depuis le sud du site ainsi que depuis les hauteurs du logis, seules les quatre éoliennes situées au sud du site d'implantation du projet seront visibles depuis les hauteurs du logis de Cherconnay. Il ne résulte pas de l'instruction, notamment du photomontage produit par les requérants selon une méthodologie qui n'est pas connue, que le projet nuirait de manière significative, sur le plan visuel, au logis de Cherconnay. A cet égard, le photomontage produit par les requérants aboutit à une représentation qui apparait à la fois approximative et disproportionnée des éoliennes, figurées de plus en couleur noire, ce qui accentue artificiellement leur perception alors que la réglementation exige qu'elles soient blanches. Dans ces conditions, en l'absence d'atteinte significative au patrimoine et aux paysages, le projet pouvait être autorisé par la décision en litige sans méconnaître sur ce point les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
En ce qui concerne la dérogation à la destruction d'espèces protégées au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement :
26. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) "
27. Aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement, créé par l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 12-1. (...). " En vertu du I de l'article L. 181-2 du même code : " L'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181 1 y est soumis ou les nécessite : (...) / 5° Dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° de l'article L. 411 2 (...) ". Selon l'article L. 181-3 de ce code : " (...) II. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation (...) ". L'article L. 181-18 du code de l'environnement, créé par la même ordonnance, précise le régime contentieux de l'autorisation environnementale. Ses dispositions mentionnent la faculté pour le juge de prononcer des annulations limitées soit à une ou plusieurs des anciennes autorisations désormais regroupées dans l'autorisation environnementale, soit à certains éléments de ces autorisations à la condition qu'ils en soient divisibles et prévoient que le juge, en cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties non viciées de celle-ci.
28. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 susvisée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont (...) contestées (...) / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...) ".
29. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les autorisations uniques instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure au 1er mars 2017, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, sont considérées, à compter de cette date, comme des autorisations environnementales. Dès lors que l'autorisation environnementale créée par cette ordonnance tient lieu des diverses autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés au I de l'article L. 181-2 du code de l'environnement, dont la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale issue de l'autorisation unique délivrée par la préfète de la Charente du 8 novembre 2018 peut être utilement contestée au motif qu'elle n'incorpore pas, à la date à laquelle la cour statue, la dérogation dont il est soutenu qu'elle est requise pour le projet en cause.
30. Il ressort en particulier du rapport du groupe ornithologique des Deux-Sèvres du 10 août 2018 qu'un nid de circaètes Jean-le-Blanc a été recensé à proximité du site d'implantation du projet litigieux et que l'espèce peut chasser jusqu'à 30 kilomètres de son nid. Les mesures et prescriptions liées à la préservation de l'avifaune auxquelles le projet est soumis, à l'exception des mesures de réduction des impacts qui n'ont pas à être prises en compte aux fins d'examiner si le projet nécessitait une dérogation au sens de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, n'apparaissent pas de nature à éviter entièrement le risque de collision et de perturbation de cette espèce rare. Dans ces conditions, la société pétitionnaire était dans l'obligation de solliciter et d'obtenir la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Il est constant que la pétitionnaire n'a pas sollicité une telle dérogation. Par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité en tant qu'il ne comporte pas la dérogation prévue par les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en ce qui concerne le circaète Jean-le-Blanc. Ce vice, qui est divisible des autres parties de l'autorisation environnementale, n'est toutefois pas de nature à l'entacher d'illégalité dans son ensemble.
31. S'agissant des chiroptères, l'étude écologique jointe à l'étude d'impact a identifié quinze espèces de chiroptères dans l'aire d'étude dont majoritairement la pipistrelle commune, la barbastrelle d'Europe et la sérotine commune ainsi que des corridors écologiques à proximité immédiate de certains aérogénérateurs et l'étude d'impact souligne que les risques de collision et de barotraumatisme sont qualifiés de " forts " pour la pipistrelle commune et de " faible à modéré " pour la pipistrelle de Kuhl et la pipistrelle de Nathusius. Si la société pétitionnaire soutient que les déplacements de ces espèces suivent pour la plupart les milieux bocagers et boisés, cette circonstance n'est pas, à elle seule, de nature à remettre en cause les risques de collision et de perturbation intentionnelle identifiés par l'étude d'impact, dès lors que certains aérogénérateurs sont situés à proximité immédiate de lisières et notamment les éoliennes E01-N et E02-S. Les mesures d'évitement prévues par la pétitionnaire consistant à installer le projet sans défrichement, à optimiser les dates de travaux en évitant la période de reproduction et à prévoir une hauteur de mâts limitant les collisions pour les spécimens volant à mi-hauteur n'apparaissent pas de nature à éviter entièrement le risque de collision et de perturbation intentionnelle de ces espèces. Par ailleurs, si des mesures de bridage seront prévues, ces dernières constituent des mesures de réduction et non d'évitement des impacts, de sorte qu'elles n'ont pas à être prises en compte aux fins d'examiner si le projet nécessitait une dérogation au sens de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. A supposer même que le projet ne soit pas susceptible de nuire au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces de chiroptères concernées dans leur aire de répartition naturelle, une telle appréciation est seulement de nature à permettre la délivrance de la dérogation prévue par les dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, sous réserve que les autres conditions fixées par ce texte soient remplies, sans exempter le pétitionnaire de l'obligation de solliciter et obtenir une telle dérogation. Il est constant que la pétitionnaire n'a pas sollicité une telle dérogation. Dans ces conditions et au regard de ce qui précède, les requérants sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité en tant qu'il ne comporte pas la dérogation prévue par les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement en ce qui concerne les chiroptères. Ce vice, qui est divisible des autres parties de l'autorisation environnementale, n'est toutefois pas de nature à l'entacher d'illégalité dans son ensemble.
32. Il résulte de tout ce qui précède que l'autorisation unique, devenue autorisation environnementale, délivrée par l'arrêté de la préfète de la Charente du 8 novembre 2018, est illégale en tant seulement qu'elle ne comporte pas la dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées en ce qui concerne le circaète Jean-le-Blanc et les chiroptères.
Sur la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
33. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, il y a lieu de mettre en œuvre les pouvoirs résultant des dispositions rappelées au point 27 ci-dessus de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et, à ce titre, d'annuler l'arrêté de la préfète de la Charente du 8 novembre 2018 seulement en tant qu'il ne comporte pas la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement et de suspendre l'exécution de la partie non viciée de l'arrêté, jusqu'à la délivrance éventuelle de la dérogation requise.
Sur les frais liés au litige :
34. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des requérants, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat et de la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne chacun une somme globale de 800 euros à verser aux requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : L'arrêté du 8 novembre 2018 de la préfète de la Charente est annulé en tant qu'il ne comporte pas la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Article 2 : L'exécution des parties non viciées de l'arrêté du 8 novembre 2018 de la préfète de la Charente est suspendue jusqu'à la délivrance éventuelle de la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.
Article 3 : L'Etat et la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne verseront chacun une somme globale de 800 euros à l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens, à l'Association de protection et avenir du patrimoine en pays d'Aigre et en Nord Charente et à M. C..., pris ensemble, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association de défense des habitants de Saint-Fraigne et alentours contre les projets éoliens, désignée en application de l'article R.751-3 du code de justice administrative, à la société Ferme éolienne de Saint-Fraigne et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Charente.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Laury Michel, première conseillère,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.
La rapporteure,
Laury B...
La présidente,
Elisabeth JayatLa greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
8
N° 19BX00681