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21/03/2019 | FRANCE | N°18NC02129

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 21 mars 2019, 18NC02129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 mars 2018 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800881 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2

018, M. D...B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 mars 2018 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800881 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 juillet 2018, M. D...B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de l'Aube de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur le refus de séjour :

- le préfet de l'Aube aurait dû saisir la commission du titre de séjour de son cas ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- la décision contestée est contraire à l'article 371-2 du code civil ;

- la décision contestée est contraire à la circulaire du 28 novembre 2012 ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

Sur la fixation du pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2018, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. D...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 05 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E...Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D...B..., ressortissant congolais (RDC) né le 7 février 1984, déclare être entré en France le 1er mai 2012. Il a été condamné à une peine d'interdiction du territoire français pour une durée de trois ans par un jugement du tribunal correctionnel d'Albertville du 7 juillet 2014 pour séjour irrégulier et refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques nécessaires à l'alimentation et à la consultation des fichiers de police. Par un jugement du tribunal correctionnel de Strasbourg du 31 mars 2017, le requérant a été condamné à une peine d'emprisonnement de six mois pour usage de faux et il a été écroué le même jour. Par un arrêté du 17 juin 2017, le préfet du Bas-Rhin a fixé la République démocratique du Congo comme pays de destination du requérant en application de la peine d'interdiction du territoire français prononcée par le jugement du tribunal correctionnel d'Albertville du 7 juillet 2014. Par un jugement du 25 juillet 2017, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Le 5 février 2018, M. D...B...a demandé au préfet de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour. Par un arrêté du 26 mars 2018, le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Le requérant relève appel du jugement du 5 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision contestée comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté. Le requérant n'est également pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait statué ultra petita en se bornant à écarter ce moyen au motif qu'il était manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

4. M. D...B...soutient qu'il est père d'un enfant français, né le 28 septembre 2017, qu'il vit avec la mère de cet enfant, qui est une compatriote en situation régulière, et qu'il s'occupe également des deux autres enfants de sa compagne, nés d'une précédente union. Le requérant a notamment déclaré aux services de police le 29 mars 2017, à la suite d'une interpellation pour vol, qu'il résidait chez sa cousine et qu'il ne se souvenait plus exactement des nom et prénom de la mère de son enfant, ni de son adresse exacte. Le requérant ne produit aucun document qui permettrait d'établir la réalité du concubinage dont il se prévaut, ni de la nationalité française de son fils. M. D...B...ne démontre également pas, par les divers documents qu'il produit, qu'il contribuerait à l'entretien et à l'éducation de son fils. Dans ces conditions, et eu égard également aux condamnations dont M. D...B...a fait l'objet, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doivent être écartés. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aube aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. D...B...doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". M. D...B...ne démontre pas avoir conservé des liens avec son fils, ni contribuer à son entretien et à son éducation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté.

6. En quatrième lieu, M. D...B...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'aucun récépissé de demandeur d'asile ne lui a été délivré. Si le requérant a entendu faire valoir que c'est à tort que le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un tel document après le dépôt de sa demande d'asile formulée le 8 août 2017, il lui appartenait de contester un tel refus, ce qui n'a pas été fait.

7. En cinquième lieu, les stipulations de l'article 9 de la convention des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ne créent seulement des obligations qu'entre Etats. Par suite, M. D...B...ne peut utilement se prévaloir de ces stipulations à l'encontre de la décision attaquée.

8. En sixième lieu, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière ne revêt pas de caractère réglementaire. Elle a seulement pour objet, par des orientations générales, de rappeler et de préciser aux autorités chargées de la police des étrangers, qui en sont destinataires, les conditions d'examen et critères permettant d'apprécier les demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit. Par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que sa situation répondrait à l'un des cas de figure énoncés dans cette circulaire.

9. En septième lieu, la décision contestée ne fait pas par elle-même obstacle à ce que M. D...B...contribue à l'entretien et à l'éducation de son fils à proportion de ses ressources. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 371-2 du code civil doit être écarté comme inopérant. Au surplus, M. D...B...n'établit pas, par les documents produits, qu'il se conforme aux obligations prévues par cet article, ainsi qu'il vient d'être dit.

10. Enfin, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Aube n'était pas tenu de soumettre le cas de M. D...B...à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.

Sur la décision obligeant M. D...B...à quitter le territoire français :

11. En premier lieu, que la décision contestée comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. M. D...B...n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'elle est entachée d'un défaut de motivation.

12. En deuxième lieu, les moyens tirés de ce que la décision serait contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D...B...doit être écartée pour les motifs exposés au point 4.

13. En troisième lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

14. En premier lieu, l'arrêté attaqué, en ce qu'il fixe le pays à destination duquel M. D...B...pourra être renvoyé, comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté.

15. En second lieu, si le requérant a entendu se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, il résulte de ce qui précède qu'un tel moyen doit être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

2

N° 18NC02129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC02129
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : PARISON

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-03-21;18nc02129 ?
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