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16/03/2020 | FRANCE | N°18BX00391

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 16 mars 2020, 18BX00391


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme globale de 50 173,40 euros en réparation des préjudices financier et moral subis du fait de sa réintégration tardive et de la " résistance " dont a fait preuve l'administration dans le versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2014 et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugeme

nt n° 1500277 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme globale de 50 173,40 euros en réparation des préjudices financier et moral subis du fait de sa réintégration tardive et de la " résistance " dont a fait preuve l'administration dans le versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2014 et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement n° 1500277 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2018, M. C... A..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 1er décembre 2017 ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme de 29 558,40 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2014 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice résultant de son absence de réintégration dans un délai raisonnable ;

3°) de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme de 10 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2014 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice résultant du versement tardif de l'allocation d'aide au retour à l'emploi qui lui était due ;

4°) de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme de 5 615 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2014 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice résultant de la liquidation de sa pension à un montant inférieur à celui qui aurait été obtenu s'il avait été réintégré dans un délai raisonnable ;

5°) de condamner la communauté d'agglomération du Muretain à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

6°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Muretain la somme de 5 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ne procédant pas au versement de ses allocations chômage alors qu'elle ne l'a pas réintégré au terme de sa disponibilité, la communauté d'agglomération du Muretain a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- cette faute lui a causé un préjudice financier qu'il établit ;

- le refus de réintégration est une illégalité constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement public dès lors, d'une part, qu'il a répondu à toutes les propositions de postes qui lui ont été faites et, d'autre part, qu'il ne s'est pas vu proposer 26 postes vacants correspondants à son grade sur la seule année 2012 ;

- l'établissement public a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne saisissant pas le centre de gestion alors que plus d'un an après sa demande de réintégration, aucun poste vacant ne lui avait été proposé ;

- le préjudice financier subi du fait de la perte de rémunération, résultant de la différence entre les traitements qu'il aurait dû recevoir s'il avait été réintégré et les revenus de remplacement qu'il a perçus, s'élève à 29 558,40 euros ; le préjudice résultant du versement de l'indemnité de chômage 16 mois après l'ouverture des droits est estimé à 10 000 euros ; le préjudice résultant du fait que sa pension de retraite sera moindre que celle qu'il aurait pu obtenir s'il avait été réintégré plus tôt doit être estimé à 5 615 euros ; le préjudice moral doit être évalué à 5 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2019, la communauté d'agglomération du Muretain, devenue la communauté d'agglomération " le Muretain Agglo ", représentée par Me E..., conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête tant de première instance que d'appel et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête d'appel et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de première instance comme la requête d'appel sont irrecevables dès lors que les conclusions indemnitaires sont mal dirigées. En première instance, M. A... a dirigé son action contre la communauté de communes du Muretain qui n'existait ni au jour de l'introduction de la requête ni au jour du jugement. En appel, M. A... a dirigé son action contre la communauté d'agglomération du Muretain sise 27 rue Castelvielh à Muret alors, d'une part, que cette adresse correspond uniquement à celle de l'hôtel de ville et que, d'autre part, depuis 2015, l'employeur de M. A... est la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " ;

- la requête de première instance comme la requête d'appel sont irrecevables dès lors que le contentieux n'a pas été lié ;

- les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 29 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 29 novembre 2019 à 12 h 00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... B... ;

- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., adjoint technique de 2ème classe de la communauté d'agglomération du Muretain, devenue la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ", a été placé en position de disponibilité pour convenances personnelles le 1er octobre 2003. Le 11 avril 2012, il a sollicité sa réintégration à compter du 1er octobre suivant. En l'absence de vacance de poste dans un emploi correspondant à son grade, le président de la communauté d'agglomération a maintenu M. A... en disponibilité par arrêté du 6 novembre 2012. M. A... a été réintégré en qualité d'agent d'entretien polyvalent le 5 janvier 2015. Par un jugement du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. A... tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des fautes ayant consisté, pour cet établissement public, à tarder à le réintégrer et à lui verser l'allocation d'aide de retour à l'emploi qui lui était due ainsi qu'à s'abstenir de saisir le centre de gestion local. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

En ce qui concerne la responsabilité :

2. En premier lieu, aux termes du second alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ". Aux termes de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de le disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité. (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) ". Il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire mis en disponibilité pour convenances personnelles a le droit, sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, d'obtenir sa réintégration à l'issue d'une période de disponibilité. Si ces textes n'imposent pas à l'autorité dont relève le fonctionnaire de délai pour procéder à cette réintégration, celle-ci doit intervenir, en fonction des vacances d'emplois qui se produisent, dans un délai raisonnable. Dans le cas où la collectivité dont relève l'agent qui a demandé sa réintégration ne peut lui proposer un emploi correspondant à son grade, elle doit saisir le centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion local afin qu'il lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade.

3. D'une part, il est constant que la période de mise en disponibilité de M. A... pour convenances personnelles a excédé trois mois. Il résulte de l'instruction, notamment de l'état récapitulatif des déclarations de créations et de vacances d'emplois de la communauté d'agglomération du Muretain, qu'entre le 1er octobre 2012, date à compter de laquelle M. A... a demandé sa réintégration, et le 5 janvier 2015, date à laquelle ce dernier a été réintégré, 29 postes correspondants au grade de l'intéressé ont été vacants au sein de l'établissement public. Il résulte également de l'instruction que sept postes vacants correspondants à son grade ont été proposés à M. A... les 8 avril 2013, 18 septembre 2013, 29 janvier 2014 et 24 novembre 2014. Sur ces sept postes, M. A... s'est déclaré intéressé par l'un d'entre eux, qui ne lui a pas été attribué, et s'est porté candidat pour deux autres d'entre eux dont l'un, proposé le 24 novembre 2014, lui a été dévolu. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le délai qui s'est écoulé entre la fin de la disponibilité de M. A... et sa réintégration ne peut être regardé comme déraisonnable. Par suite, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la communauté d'agglomération du Muretain n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 ni commis de faute de nature à engager sa responsabilité.

4. D'autre part, la communauté d'agglomération du Muretain ayant ainsi respecté les obligations que lui imposaient les textes précités de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 13 janvier 1986, le président de cet établissement public n'avait pas à saisir le centre de gestion local afin qu'il propose à M. A... tout emploi vacant correspondant à son grade. Dès lors, en ne procédant pas à une telle saisine, il n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de la communauté d'agglomération du Muretain à l'égard de M. A....

5. En second lieu, il est constant que la communauté d'agglomération du Muretain n'a accordé à M. A... le versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi au titre de la période où il a été maintenu d'office en disponibilité, du 1er octobre 2012 au 5 janvier 2015, que par une décision du 28 janvier 2014, après avoir obligé l'intéressé à effectuer de multiples relances et l'avoir envoyé à tort auprès de Pôle emploi. Ainsi que l'ont à juste titre relevé les premiers juges, si la communauté d'agglomération du Muretain soutient que le comportement de M. A..., qui ne lui aurait pas fourni les pièces nécessaires à l'instruction de son dossier, ne l'a pas mise en mesure de procéder plus tôt à ce versement, il ne résulte pas de l'instruction que cet établissement public aurait adressé quelque demande de pièces que ce soit à l'intéressé qui avait demandé le versement de l'allocation qui lui était due dès le 15 mars 2013. Dès lors, le caractère tardif du versement de ladite allocation est imputable à la communauté d'agglomération du Muretain qui, dans les circonstances de l'espèce, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

En ce qui concerne les préjudices :

6. En premier lieu, M. A... sollicite la réparation du préjudice financier qu'il estime avoir subi du fait du versement tardif de l'allocation d'aide de retour à l'emploi. Toutefois, alors qu'il est constant que l'allocation pour perte d'emploi, sollicitée le 15 mars 2013, a été versée à M. A... au mois de janvier 2014, les justificatifs produits, en première instance comme en appel, à l'appui de l'allégation selon laquelle il rencontre des difficultés financières, sont relatifs à la période courant de novembre 2014 à janvier 2015. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande de réparation de ce préjudice qui ne trouve pas sa cause directe et certaine dans la faute commise par la communauté d'agglomération du Muretain.

7. En deuxième lieu, le préjudice moral dont l'existence est alléguée n'est pas établi.

8. En troisième lieu, en l'absence de faute de la communauté d'agglomération du Muretain, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté les demandes de réparation des préjudices résultant d'une absence de réintégration dans un délai raisonnable et de la liquidation de la pension de M. A... à un montant inférieur à celui qui aurait été obtenu s'il avait été réintégré plus rapidement.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées aux requêtes de première instance et d'appel, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération du Muretain, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. A... de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Muretain sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Muretain tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C... A... et à la communauté d'agglomération " le Muretain Agglo ".

Délibéré après l'audience du 10 février 2020, à laquelle siégeaient :

Mme D... B..., présidente,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mars 2020.

L'assesseur le plus ancien ,

Florence Rey-GabriacLa présidente-rapporteur,

Karine B...

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX00391 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00391
Date de la décision : 16/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité - Réintégration.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-03-16;18bx00391 ?
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