LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à l'URSSAF d'Ile-de-France du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 242-1, alinéa 6, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, l'URSSAF de Seine-et-Marne, aux droits de laquelle vient l'URSSAF d'Ile-de-France (l'URSSAF), a adressé à la société Nouvelle d'installations électriques (la société), le 27 juillet 2011, une lettre d'observations mentionnant plusieurs chefs de redressement, suivie, le 4 novembre 2011, d'une mise en demeure ; que contestant la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales, de la contribution patronale au financement de la couverture frais et santé souscrite auprès de la SMABTP pour le personnel ETAM, employés et ouvriers, la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour accueillir ce recours, l'arrêt retient essentiellement que le décret du 9 mai 2005 et la circulaire du 30 janvier 2009 qu'invoque l'URSSAF précisent que le caractère collectif du régime implique que la contribution de l'employeur soit fixée à un taux ou à un montant selon les mêmes modalités à l'égard de tous les salariés appartenant à une catégorie objective de personnel ; que cependant, tout comme la convention collective du 28 juin 1993, aucun plafond n'est fixé pour le nombre de catégories à définir ; qu'or suivant l'accord collectif négocié, la société ne distingue pas seulement entre les cadres et les non cadres, mais entre les cadres, les ouvriers chantiers et les ouvriers ateliers de préfabrication regroupés sous l'intitulé "ouvriers travaillant à la tâche", les employés du siège hors ateliers de préfabrication et hors chauffeurs sous celui de "autres salariés" pris comme constituant trois catégories distinctes, et que dans chacune de ces catégories, le taux de participation de l'employeur est bien unique ; que le critère des heures de travail figurant sur les bulletins de paie est inopérant en la matière, les ouvriers à la tâche étant précisément rémunérés au rendement et non en fonction d'heures travaillées ; qu'enfin, si la convention collective prévoit que la rémunération au rendement ne peut avoir pour effet de priver les ouvriers des dispositions conventionnelles notamment en matière d'hygiène, de sécurité et de médecine du travail, elle n'est en rien contredite par la pratique adoptée par la société qui assure tant aux ouvriers travaillant à la tâche qu'aux autres ouvriers, une protection complémentaire ; qu'il ne saurait donc y avoir "privation" au sens précité, même si le taux varie entre les deux ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les modalités de la rémunération des salariés d'une entreprise ne constituent pas un critère objectif de nature à fonder des catégories distinctes au sens du texte susvisé, la cour d'appel a violé ce dernier ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Nouvelle d'installations électriques aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Nouvelle d'installations électriques et la condamne à payer à l'URSSAF d'Ile-de-France la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Ile-de-France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris et, statuant à nouveau, d'AVOIR annulé le redressement effectué sur la base des cotisations versées en 2008 et 2009 par la SNIE au titre de la couverture frais et santé souscrite auprès de la SMABTP pour le personnel ETAM, employés et ouvriers,
AUX MOTIFS QUE "Le seul point de redressement contesté porte sur l'exonération de cotisations versées en 2008 et 2009 par l'entreprise au titre de la couverture frais et santé souscrite auprès de la SMABTP pour le personnel ETAM, employés et ouvriers. Le contrat de prévoyance souscrit sur ce point auprès de la SMABTP est prévu au profit des seuls salariés non cadres ETAM - employés et ouvriers, avec une participation de l'employeur à hauteur de 50 % pour les ouvriers travaillant à la tâche et de 60 % pour les autres salariés. En la matière, l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que : Sont exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées par les organismes régis par les titres III et IV du livre IX du présent code ou le livre II du code de la mutualité, par des entreprises régies par le code des assurances ainsi que par les institutions mentionnées à l'article L. 370-1 du code des assurances et proposant des contrats mentionnés à l'article L. 143-1 dudit code, à la section 9 du chapitre II du titre III du livre IX du code de la sécurité sociale ou au chapitre II bis du titre II du livre II du code de la mutualité, lorsqu'elles revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d'une des procédures mentionnées à l'article L. 911-1 du présent code... Ce dernier article ajoute qu'à moins qu'elles ne soient instituées par des dispositions législatives ou réglementaires, les garanties collectives dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé. En l'espèce, le caractère obligatoire n'est pas contesté. La société justifie d'accords portant sur la négociation annuelle, lesquels reprennent les différentes catégories de personnel, à savoir les employés du siège hors ateliers de préfabrication et hors chauffeurs, les ouvriers chantiers, les ouvriers ateliers de préfabrication et les cadres autonomes. Il s'agit donc bien de classifications précises qui ne relèvent nullement d'un arbitraire de l'employeur, mais de la seule affectation des personnels dans l'entreprise, critère purement objectif. Le décret du 9 mai 2005 et la circulaire du 30 janvier 2009 qu'invoque l'URSSAF précisent que le caractère collectif du régime implique que la contribution de l'employeur soit fixée à un taux ou à un montant selon les mêmes modalités à l'égard de tous les salariés appartenant à une catégorie objective de personnel. Cependant, tout comme la convention collective du 28 juin 1993, aucun plafond n'est fixé pour le nombre de catégories à définir. Or suivant l'accord collectif négocié, la SNIE ne distingue pas seulement entre les cadres et les non cadres, mais entre les cadres, les ouvriers chantiers et les ouvriers ateliers de préfabrication regroupés sous l'intitulé "ouvriers travaillant à la tâche", les employés du siège hors ateliers de préfabrication et hors chauffeurs sous celui de "autres salariés" pris comme constituant 3 catégories distinctes, et dans chacune de ces catégories, le taux de participation de l'employeur est bien unique. Le critère des heures de travail figurant sur les bulletins de paie est inopérant en la matière, les ouvriers à la tâche étant précisément rémunérés au rendement et non en fonction d'heures travaillées. Enfin, si la convention collective prévoit que la rémunération au rendement ne peut avoir pour effet de priver les ouvriers des dispositions conventionnelles notamment en matière d'hygiène, de sécurité et de médecine du travail, elle n'est en rien contredite par la pratique adoptée par la société qui assure tant aux ouvriers travaillant à la tâche qu'aux autres ouvriers, une protection complémentaire, il ne saurait donc y avoir "privation" au sens précité, même si le taux varie entre les deux. En conséquence, c'est à tort que l'URSSAF a considéré que les catégories de personnel n'étaient pas objectives et a réintégré dans l'assiette de cotisations, les cotisations versées en 2008 et 2009 par la SNIE au titre de la couverture frais et santé souscrite auprès de la SMABTP pour le personnel ETAM, employés et ouvriers. Le redressement qui s'en est suivi sera annulé et le jugement entrepris sera infirmé",
1/ ALORS QUE les contributions des employeurs destinées au financement de régimes de prévoyance sont exclues de l'assiette des cotisations sociales seulement lorsque le régime mis en place revêt un caractère obligatoire et collectif ; qu'un contrat de prévoyance complémentaire présente un caractère collectif lorsqu'il bénéficie de façon générale et impersonnelle soit à l'ensemble des salariés, soit à une ou plusieurs catégories objectives de salariés ; que la seule circonstance qu'une catégorie de salariés soit définie par un accord d'entreprise ne permet pas d'en tirer son caractère objectif ; qu'en l'espèce, en énonçant qu'il ressortait de l' « accord collectif négocié » l'existence de trois catégories distinctes de salariés pour dire que les catégories applicables au sein de la société étaient objectives, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si ces catégories de salariés étaient objectivement définies, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 242-1 et D. 242-1 du code de la sécurité sociale,
2/ ALORS QUE les contributions des employeurs destinées au financement de régimes de prévoyance sont exclues de l'assiette des cotisations sociales seulement lorsque le régime mis en place revêt un caractère obligatoire et collectif ; qu'un contrat de prévoyance complémentaire présente un caractère collectif lorsqu'il bénéficie de façon générale et impersonnelle soit à l'ensemble des salariés, soit à une ou plusieurs catégories objectives de salariés ; que ces catégories objectives ne sauraient être caractérisées par des modalités de rémunération distinctes ; qu'en l'espèce, en retenant que les ouvriers à la tâche étaient rémunérés au rendement et non en fonction d'heures travaillées pour justifier de l'objectivité des catégories de salariés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 242-1 et D. 242-1 du code de la sécurité sociale,
3/ ALORS QUE les contributions des employeurs destinées au financement de régimes de prévoyance sont exclues de l'assiette des cotisations sociales seulement lorsque le régime mis en place revêt un caractère obligatoire et collectif ; qu'un contrat de prévoyance complémentaire présente un caractère collectif lorsqu'il bénéficie de façon générale et impersonnelle soit à l'ensemble des salariés, soit à une ou plusieurs catégories objectives de salariés, la cotisation de l'employeur étant identique pour tous les salariés appartenant à une même catégorie ; qu'en l'espèce, pour justifier de l'exonération de cotisations sociales du régime de prévoyance en vigueur au sein de la société, la cour d'appel a relevé que l'ensemble des ouvriers bénéficiaient d'un tel régime, si bien qu'il importait peu que le taux de contribution de l'employeur varie selon les catégories ; qu'en reconnaissant le caractère collectif d'un contrat de prévoyance qui n'accordait pas les mêmes droits à tous les ouvriers de l'entreprise artificiellement distingués selon leur lieu d'emploi et les modalités de leur rémunération, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et D. 242-1 du code de la sécurité sociale.