LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la SMABTP du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Ateim ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 7 septembre 2017), que la société Arcelor Mital Atlantique et Lorraine (la société Arcelor) a confié à la société Etablissements Couturier (la société Couturier), assurée au titre de la responsabilité décennale auprès du Gan, devenue Allianz, et de la responsabilité civile auprès de la société UAP, devenue Axa France, la réalisation d'une installation de manutention de bobines de tôles d'acier, appelées coils, ayant pour objet de transporter les coils arrivant par le train de l'usine voisine à température tiède aux emplacements où ils devaient subir un refroidissement à l'air libre, puis à les reprendre pour les diriger vers le cœur de l'usine pour obtenir le produit fini et comportant une structure fixe, le « chemin de roulement », et une structure mobile, « le pont roulant », qui se déplace en roulant sur la structure fixe et lève les coils depuis le sol puis les dépose en une autre position ; que la réalisation du pont roulant a été confiée à la société Seval, assurée au titre de la responsabilité civile auprès de la société Axa France ; que la société Préventec a réalisé un contrôle préalable de dimensionnement d'un secteur de la poutre de roulement ; que la société Arcelor a chargé la société Bureau Veritas, assurée en responsabilité décennale auprès de la société SMABTP et en responsabilité civile auprès de la société QBE european services Ltd, d'une mission d'examen de la structure ; que la réception de l'installation est intervenue le 30 décembre 2005 sans réserves en lien avec les désordres litigieux ; que, des désordres étant apparus, la société Arcelor a, après expertise, assigné les intervenants et leurs assureurs en indemnisation de ses préjudices et que des appels en garantie ont été formés ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et les moyens uniques des pourvois incidents des sociétés Seval, Axa France et Allianz, réunis :
Attendu que la SMABTP et les sociétés Seval, Axa France et Allianz font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum avec d'autres, à verser diverses sommes à la société Arcelor, alors, selon le moyen :
1°/ qu'au regard de la loi applicable au litige [n° 78-12 du 4 janvier 1978], la présomption de responsabilité décennale s'étend aux dommages affectant la solidité des éléments d'équipement d'un bâtiment lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, c'est-à-dire lorsque la dépose de l'élément, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de l'ouvrage ; que les ouvrages de construction et les éléments d'équipement remplissant une fonction de construction sont ainsi soumis à la garantie décennale, tandis que les éléments d'équipement dont la fonction est purement industrielle sont soumis à la responsabilité de droit commun ; qu'en l'espèce, ainsi que l'avait rappelé la SMABTP, l'installation litigieuse n'avait pas vocation à répondre aux contraintes d'exploitation et d'usage de l'ouvrage, le chemin de roulement et le pont roulant sur rails étant situés en extérieur, en plein air, et longeant un bâtiment existant clos et couvert, sans être intégrés à sa charpente, le chemin de roulement [partie fixe] et le pont roulant [par mobile, sur rails] étant dissociables sans compromettre l'ensemble de l'exploitation de l'usine de production ; que l'expert lui-même a présenté cette installation comme « un élément d'une installation industrielle constituant une « machine » selon la terminologie de l'Union Européenne » ; qu'ainsi, la nature de l'installation litigieuse, définie par son objet, se confondait avec sa fonction mécanique qui était de déplacer des colis en les levant depuis le sol pour les redéposer en une autre position ; qu'en jugeant dès lors que cette installation constituait un ouvrage ou une partie d'ouvrage, la cour a violé l'article 1792 et l'article 1792-2 du code civil, dans sa version applicable au litige, par fausse application ;
2°/ que la différence entre un ouvrage relevant de la garantie décennale et un élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle qui y échappe est tirée, sous le régime de la loi du 4 janvier 1978, de la finalité de l'installation ; qu'en l'espèce, la cour a constaté que « le chemin de roulement et le pont roulant (...) forment un ensemble (...) pour obtenir le but recherché de manutention des colis », qui est de « transporter des colis qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement, puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck » ; qu'il résultait de cette finalité qu'il s'agissait d'un instrument mécanique servant une activité industrielle, c'est-à-dire d'une « machine » au sens de la terminologie européenne, ainsi que l'avait relevé l'expert E..., entrant de ce chef dans la catégorie des éléments d'équipement à vocation exclusivement professionnelle, exclusive de la garantie décennale ; qu'en jugeant dès lors que l'ensemble « relève de la fonction construction », la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles 1792 et 1792-2 du code civil, celui-ci dans sa version applicable au litige ;
3°/ que, dès lors que l'élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle se définit par sa finalité, la circonstance que cet élément soit ou non ancré au sol et qu'il contribue accessoirement à stabiliser l'ensemble auquel il est intégré, ce qui ne répond pas aux finalités de son installation, est indifférent ; qu'en jugeant dès lors que l'installation litigieuse, dont elle a constaté la finalité consistant à manier des coils, à les transporter, à les reprendre et à les diriger vers le coeur de l'usine, constituait un ouvrage relevant de la garantie décennale, au motif inopérant qu'elle était ancrée au sol et stabilisait l'ensemble charpente-chemin de roulement, la cour a privé sa décision de motif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer que la responsabilité de plein droit de Seval est engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil, sans procéder à une analyse, même sommaire des éléments de preuve sur lesquels elle se fonde et qu'elle n'identifie pas, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que les éléments d'équipement à vocation industrielle ne constituent pas un ouvrage relevant de la garantie des constructeurs ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que la société Seval a fourni un pont roulant, distinct du chemin de roulement édifié par la société Établissements Couturier en exécution d'un autre contrat, lequel constituait un élément d'équipement industriel, peu important que celui-ci participe de l'opération de manutention des colis, de sorte qu'en retenant que la responsabilité de plein droit de la société Seval était engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil, la cour d'appel a violé ledit texte ;
6°/ que, dans ses conclusions d'appel, la société Seval faisait valoir que le pont qu'elle avait fourni n'était ni un ouvrage de bâtiment, ni un ouvrage faisant appel à des travaux de bâtiment, mais une simple machine à poser sur des rails, de sorte qu'elle ne répondait pas de sa responsabilité sur le fondement de l'article 1792 du code civil ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ que seul le dommage en relation causale avec la faute est réparable ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le dommage résultant de la ruine du chemin de roulement édifié par la société Couturier ne se serait pas inévitablement produit même si le pont roulant fourni par la société Seval n'avait pas accusé un excès de masse eu égard aux spécifications contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
8°/ que les éléments d'équipement qui sont dissociables de l'ouvrage auquel ils sont affectés, c'est-à-dire dont la dépose, le démontage ou le remplacement peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de l'ouvrage, ne peuvent être assimilés à un ouvrage au sens de la loi du 4 janvier 1978 ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD, venant aux droits de la société Gan, faisait valoir que l'ossature métallique mise en oeuvre par la société Établissements Couturier était simplement adossée en extérieur sur le bardage du bâtiment existant, et n'était pas intégrée aux éléments structurels de l'usine, de sorte que le chemin de roulement pouvait être ôté ou déplacé sans détériorer le bâtiment existant ou compromettre l'usage de l'usine ; qu'en jugeant néanmoins que cette installation constituait un ouvrage ou une partie d'ouvrage, au motif de l'ancrage au sol et de la fonction de stabilité de l'ensemble charpente-chemin, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cet ensemble pouvait être ôté ou déplacé sans détériorer le bâtiment existant ni compromettre l'usage de l'usine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792-2 du code civil, ce dernier dans sa version applicable en la cause ;
9°/ qu'un élément d'équipement à vocation exclusivement industrielle ne peut être qualifié d'ouvrage, au sens de l'article 1792 du code civil ; qu'en l'espèce, la société Allianz exposait que le chemin de roulement créé par cette dernière était un équipement extérieur au bâtiment existant, n'était pas couvert, et avait pour unique fonction de servir d'appareil de levage des bobines d'acier stockées ; que la cour d'appel a constaté que « le chemin de roulement et le pont roulant [...] forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coïls », qui est de « transporter des colis qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement, puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck » ; qu'il résulte de ces constatations que l'installation était un élément d'équipement à vocation exclusivement industrielle ; qu'en jugeant pourtant que l'ensemble relevait de la fonction de construction et devait, dès lors, être qualifié d'ouvrage, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles 1792 et 1792-2 du code civil, celui-ci dans sa version applicable au litige ;
10°/ que, dès lors que l'élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle se définit par sa finalité, la circonstance que cet élément soit ou non ancré au sol et qu'il contribue accessoirement à stabiliser l'ensemble auquel il est intégré, ce qui ne répond pas aux finalités de son installation, est indifférent ; qu'en jugeant dès lors que l'installation litigieuse, dont elle a constaté la finalité consistant à manier des colis, à les transporter, à les reprendre et à les diriger vers le coeur de l'usine, constituait un ouvrage relevant de la garantie décennale, au motif inopérant qu'elle était ancrée au sol et stabilisait l'ensemble charpente-chemin de roulement, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792-2 du code civil, ce dernier dans sa version applicable en la cause ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les travaux confiés à la société Couturier concernaient des travaux de charpente métallique, couverture, bardage, création de poutres et poteaux métalliques, que l'ensemble charpente-chemin de roulement était constitué d'une structure fixe ancrée au sol, dont l'ossature métallique reposait sur des poteaux érigés sur des fondations en béton et qui prolongeait un bâtiment trentenaire préexistant dans la halle 1 et prenait appui pour une de ses deux files sur la halle 2 et sa structure, que la société Couturier avait livré une structure fixe sous-dimensionnée et, la société Seval, un pont roulant affecté d'un excès de masse incompatible avec l'utilisation de la structure fixe et ayant retenu, procédant à la recherche prétendument omise, que cet excès de masse avait contribué au dommage, la cour d'appel, qui, motivant sa décision et répondant aux conclusions prétendument délaissées, a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que cette installation constituait un ouvrage et que son ancrage au sol et sa fonction sur la stabilité de l'ensemble permettaient de dire qu'il s'agissait d'un ouvrage de nature immobilière, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu que la SMABTP fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec son assurée le Bureau Véritas, à payer diverses sommes à la société Arcelor ;
Mais attendu qu'ayant relevé, procédant à la recherche prétendument omise, que la proposition d'intervention du Bureau Veritas, intitulée « pour la mission de diagnostic technique », mentionnait au titre des objectifs que cette mission avait pour objet de formuler un avis sur la structure métallique constituant l'extension sud de la halle 1 selon documents reçus, avis formulé sur les documents d'exécution, plans, notes de calcul et ajoutait « Afin d'atteindre les objectifs visés, nous vous proposons d'exercer un contrôle technique sur le dossier d'exécution, au sens du D.T.U 32.1, pour être assuré de la solidité à froid de l'ouvrage », et qu'en exécution de sa mission, le Bureau Véritas avait formulé des avis sur les documents d'exécution, la cour d'appel a pu en déduire que celui-ci avait ainsi effectué une mission de contrôle technique, la circonstance que celle-ci fût limitée à la structure métallique étant indifférente ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Great Lakes Insurance SE, ci-après annexé :
Attendu que la société Great Lakes Insurance SE fait grief à l'arrêt d'écarter l'exception d'incompétence territoriale ;
Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant, que, si la police APCFPCF souscrite entre la société de droit luxembourgeois Arcelor et la société de droit anglais Great Lakes couvrait un grand risque au sens de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 et de l'article 13.5 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, la clause attributive de juridiction stipulée conformément à l'article 13 point 5 de ce règlement n'était pas opposable à l'assuré bénéficiaire de ce contrat qui n'y avait pas expressément souscrit, avait son domicile dans un autre Etat contractant et était protégé par la convention comme partie économiquement la plus faible, la cour d'appel en a exactement déduit que l'exception d'incompétence devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SMABTP, Axa France et Allianz aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour la société SMABTP.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SMABTP, assureur décennal sans limitation, in solidum avec son assurée, la société Bureau Veritas, la société Seval et son assureur, la société QBE Insurance Europe Ltd [à hauteur de 936 484 €], la société Préventec et les assureurs de la société Couturier, Allianz [assureur décennal sans limitation et au titre des préjudices immatériels dans les limites de son contrat] et Axa France Iard [au titre des préjudices immatériels non consécutifs, dans les limites de son contrat], à payer la somme de 6 236 155,10 euros à la société Arcelor Mittal Atlantique et Lorraine avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2012 ;
AUX MOTIFS QUE l'installation litigieuse de manutention des coils relève de la loi du 4 janvier 1978 qui fait peser sur tous les constructeurs une présomption de responsabilité pour les dommages affectant l'ouvrage qui sont cachés au jour de la réception ; que l'installation en cause sert à transporter des coils qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck ; qu'elle comporte une structure fixe appelée « chemin de roulement » et une structure mobile, le « pont roulant », qui se déplace en roulant sur la structure fixe et lève les coils depuis le sol pour les y déposer en une autre position ; que le chemin de roulement sur poutres et structure est destiné à supporter un pont roulant sur rails en hauteur ; que ce chemin et le pont roulant, bien que distincts, forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coils ; que les travaux confiés à la société Couturier le 23 décembre 2004 concernent des travaux de charpente métallique, couverture, bardage, création de poutres et poteaux métalliques ; que l'ensemble charpente-chemin de roulement constitué d'une structure fixe ancrée au sol [une ossature métallique reposant sur des poteaux érigés sur des fondements en béton] qui prolonge un bâtiment trentenaire préexistant dans la halle 1 et qui prend appui pour une de ses deux files sur la halle 2 et sa structure constitue un ouvrage, ou à tout le moins une partie d'ouvrage, peu important son incorporation physique au bâtiment existant ; que son ancrage au sol et sa fonction sur la stabilité de l'ensemble permettent de dire qu'il s'agit d'un ouvrage ou d'une partie d'ouvrage de nature immobilière ; qu'il résulte des constatations de l'expert que l'erreur de dimensionnement commise par la société Couturier rendait la structure fixe impropre à sa destination et que l'excès de masse du pont roulant était incompatible avec l'utilisation de la structure fixe même si elle avait été convenablement calculée, que le phénomène physique, révélateur des désordres est la fissuration par fatigue et que ces deux anomalies conduisent l'une et l'autre et a fortiori par leur conjugaison à la ruine de la structure réalisée par la société Couturier ; qu'ainsi l'ouvrage ou la partie d'ouvrage réalisée par la société Couturier, charpente-chemin de roulement, qui ne permet pas de supporter le « pont roulant » dont la vocation est de se déplacer en roulant sur la structure fixe et lever les coils depuis le sol puis les y déposer en une autre position, est impropre à sa destination ; que les désordres [fissurations] dont le caractère de gravité de caractère décennal est avéré en ce qu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination et de surcroît, portent atteinte à la solidité de l'ensemble, charpente-chemin de roulement, pont roulant, affectent la structure fixe qui relève des travaux de construction ou à tout le moins de travaux de génie civil faisant appel aux techniques des travaux du bâtiment ; qu'enfin, même à admettre que les désordres affecteraient un élément d'équipement, l'ensemble charpente-chemin de roulement, ne pourrait être considéré comme un équipement à vocation industrielle alors qu'il relève de la fonction de construction, comme résultant de travaux de bâtiment ou de génie civil engageant ainsi la responsabilité décennale des constructeurs pour impropriété de l'ouvrage à sa destination ; qu'il ne peut dès lors être dit que le chemin de roulement qui supporte le pont roulant est un élément d'équipement industriel ne jouant qu'un rôle purement industriel et ne relève pas de la construction ; que l'ouvrage confié à la société Couturier relève du champ de l'assurance décennale et de l'assurance obligatoire de l'article L. 241-1 du code des assurances ;
1° ALORS QU'au regard de la loi applicable au litige [n° 78-12 du 4 janvier 1978], la présomption de responsabilité décennale s'étend aux dommages affectant la solidité des éléments d'équipement d'un bâtiment lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, c'est-à-dire lorsque la dépose de l'élément, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de l'ouvrage ; que les ouvrages de construction et les éléments d'équipement remplissant une fonction de construction sont ainsi soumis à la garantie décennale, tandis que les éléments d'équipement dont la fonction est purement industrielle sont soumis à la responsabilité de droit commun ; qu'en l'espèce, ainsi que l'avait rappelé la SMABTP, l'installation litigieuse n'avait pas vocation à répondre aux contraintes d'exploitation et d'usage de l'ouvrage, le chemin de roulement et le pont roulant sur rails étant situés en extérieur, en plein air, et longeant un bâtiment existant clos et couvert, sans être intégrés à sa charpente, le chemin de roulement [partie fixe] et le pont roulant [par mobile, sur rails] étant dissociables sans compromettre l'ensemble de l'exploitation de l'usine de production ; que l'expert lui-même a présenté cette installation comme « un élément d'une installation industrielle constituant une "machine" selon la terminologie de l'Union Européenne » ; qu'ainsi, la nature de l'installation litigieuse, définie par son objet, se confondait avec sa fonction mécanique qui était de déplacer des coils en les levant depuis le sol pour les redéposer en une autre position ; qu'en jugeant dès lors que cette installation constituait un ouvrage ou une partie d'ouvrage, la cour a violé l'article 1792 et et l'article 1792-2 du code civil, dans sa version applicable au litige, par fausse application ;
2° ALORS QUE la différence entre un ouvrage relevant de la garantie décennale et un élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle qui y échappe est tirée, sous le régime de la loi du 4 janvier 1978, de la finalité de l'installation ; qu'en l'espèce, la cour a constaté que « le chemin de roulement et le pont roulant (
) forment un ensemble (
) pour obtenir le but recherché de manutention des coils » (arrêt, p. 28, § 7), qui est de « transporter des coils qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement, puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck » (p. 28, § 5) [c'est nous qui soulignons] ; qu'il résultait de cette finalité qu'il s'agissait d'un instrument mécanique servant une activité industrielle, c'est-à-dire d'une « machine » au sens de la terminologie européenne, ainsi que l'avait relevé l'expert E..., entrant de ce chef dans la catégorie des éléments d'équipement à vocation exclusivement professionnelle, exclusive de la garantie décennale ; qu'en jugeant dès lors que l'ensemble « relève de la fonction construction » (p. 29, § 3), la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles 1792 et 1792-2 du code civil, celui-ci dans sa version applicable au litige ;
3° ALORS QUE dès lors que l'élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle se définit par sa finalité, la circonstance que cet élément soit ou non ancré au sol et qu'il contribue accessoirement à stabiliser l'ensemble auquel il est intégré, ce qui ne répond pas aux finalités de son installation, est indifférent ; qu'en jugeant dès lors que l'installation litigieuse, dont elle a constaté la finalité consistant à manier des coils, à les transporter, à les reprendre et à les diriger vers le coeur de l'usine, constituait un ouvrage relevant de la garantie décennale, au motif inopérant qu'elle était ancrée au sol et stabilisait l'ensemble charpente-chemin de roulement, la cour a privé sa décision de motif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN, subsidiaire, DE CASSATION
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SMABTP, assureur décennal sans limitation, in solidum avec son assurée, la société Bureau Veritas, et d'autres intervenants et leurs assureurs, à verser la somme de 6 236 155,10 euros à la société Arcelor Mittal Atlantique et Lorraine avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2012, d'AVOIR dit que Me Y..., ès qualités, pouvait obtenir la garantie notamment de la SMABTP au titre des préjudices matériels dans les limites de son contrat, que la société Bureau Veritas pouvait obtenir la garantie notamment de la SMABTP pour les préjudices matériels, et que la société Allianz pouvait obtenir notamment la garantie de la SMABTP dans la proportion de 15,43 %,
AUX MOTIFS QUE le chemin de roulement et le pont roulant forment un ensemble indivisible ; l'ensemble charpente-chemin de roulement constitué d'une structure fixe ancrée au sol qui prolonge un bâtiment trentenaire préexistant dans la halle 1 et qui prend appui sur la halle 2 et sa structure constitue un ouvrage ; que son ancrage au sol et sa fonction sur la stabilité de l'ensemble permettent de dire qu'il s'agit d'un ouvrage ou d'une partie d'ouvrage de nature immobilière ; que la SMABTP, assureur décennal de la société Bureau Veritas, dénie sa garantie et demande sa mise hors de cause, en soutenant que son assuré n'était investi que d'une mission de vérification technique portant sur les plans et notes de calcul de la charpente métallique et non d'une activité de contrôle technique au sens de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation ; que la proposition d'intervention pour la société Sollac Atlantique « Site Mardyck Extension Sud halle 1 » du Bureau Veritas, intitulée « pour la mission de diagnostic technique », mentionne au titre « objectifs » que la mission a pour objet de formuler un avis sur la structure métallique constituant l'extension Sud de la halle 1 selon documents reçus, avis formulé sur les documents d'exécution, plans, notes de calcul et ajoute « afin d'atteindre les objectifs visés, nous vous proposons d'exercer un contrôle technique sur le dossier d'exécution, au sens du D.T.U. 32.1, pour être assuré de la solidité à froid de l'ouvrage » ; que Bureau Veritas, en exécution de sa mission, a formulé des avis sur les documents d'exécution ; qu'il a ainsi effectué une mission de contrôle technique, la circonstance que celle-ci soit limitée à la structure métallique étant indifférente ; que Bureau Veritas étant assuré auprès de la SMABTP, suivant contrat de responsabilité civile décennale pour son activité de contrôleur technique dont les conditions particulières précisent qu'il a pour objet de répondre à l'obligation d'assurance instituée par la loi 78-12 du 4 janvier 1978, la SMABTP est tenu de le garantir ; qu'en conséquence, Arcelor est fondée, au titre de son action directe contre l'assureur de responsabilité, à rechercher la condamnation de la SMABTP, assureur civil en responsabilité décennale du Bureau Veritas au titre des dommages matériels sans limitation de montant ; que, selon le rapport d'expertise, le coût de reconstruction s'élève à 4 119 370,92 euros, auquel s'ajoutent les frais de maîtrise d'oeuvre d'Auxitec [411 937 €], les frais de gestion de crise [628 538,40 €] et les frais de « flux logistiques » [936 484 €], soit un total de 6 096 330,32 euros ; que, sur la garantie des assureurs, le Bureau Veritas étant assuré en responsabilité décennale auprès de la SMABTP, celle-ci doit sa garantie à cet égard à Arcelor à hauteur de la somme de 4 531 307,92 euros [4 119 370,92 € + 411 937 €] sans limitation de plafond ; qu'il convient en conséquence de condamner la SMABTP, assureur décennal sans limitation, in solidum avec les société Seval, Bureau Veritas et QBE Insurance Europe Ltd, à hauteur de la somme maximale de 936 484 euros et dans les limites de son contrat, Préventec ainsi que les assureurs de Couturier, Allianz, assureur décennal sans limitation et au titre des préjudices immatériels dans les limites de son contrats et Axa France Iard, cette dernière au titre des préjudices immatériels non consécutifs à un dommage garanti dans les limites de son contrat, à payer la somme de 6 236 155,10 euros à Arcelor avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2012, date de l'assignation devant le tribunal de commerce, en application de l'article 1153-1 alinéa 1er du code civil, avec capitalisation des intérêts ; que Me Y..., ès qualités, pourra obtenir la garantie notamment de la SMABTP au titre des préjudices matériels dans les limites de son contrat ; que le Bureau Veritas pourra obtenir la garantie notamment de la SMABTP pour les préjudices matériels dans les limite de son contrat ; que la société Allianz pourra obtenir notamment la garantie de la SMABTP, assureur de Bureau Veritas dans la proportion de 15,43 % ; que la SMABTP ne pourra obtenir que la garantie de Axa France Iard, de Couturier, de Seval et de son assureur Axa France Iard, de SVMM, de Préventec et de QBE assureur de Bureau Veritas dans les limites de son contrat dans les proportions de 53,70 % de Seval, 11,73 % de Préventec, 19,14 % des Établissements Couturier, 15,43 % du Bureau Veritas ;
1° ALORS QUE toute personne dont la responsabilité peut être engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil à propos de travaux de bâtiment, doit être couverte par une assurance et être en mesure de justifier, à l'ouverture d'un chantier, qu'elle a souscrit cette assurance la couvrant pour cette responsabilité ; que la garantie de l'assureur concerne le seul secteur d'activité professionnelle déclaré par le constructeur ; que l'activité de « contrôleur technique », définie par l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation, a pour objet de « contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages », sur la demande du maître de l'ouvrage, notamment en ce qui concerne la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes ; qu'en l'espèce, la SMABTP avait soutenu, pour justifier que sa garantie n'était pas due à la société Bureau Veritas, son assurée, que celle-ci lui avait déclaré une activité de « contrôleur technique au sens de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation », quand elle avait en fait rempli, selon ses propres dires, une activité de diagnostic technique, portant uniquement sur la partie métallique de l'ouvrage, sans établir aucun rapport initial ni final de contrôle technique, en se bornant à émettre des avis sur des documents d'exécution, plans et notes de calcul ; qu'en jugeant que cette activité technique constituait un « contrôle technique » au sens légal, justifiant l'application du contrat de responsabilité décennale de la SMABTP en garantie des fautes commises par la société Bureau Veritas, la cour a violé l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article L. 241-1 du code des assurances ;
2° ALORS QUE la SMABTP, pour justifier que sa garantie n'était pas due à son assurée, avait soutenu dans ses écritures (p. 15) que si la société Bureau Veritas avait déclaré au titre du contrat d'assurance une activité de « contrôleur technique au sens de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation », les Conditions générales d'intervention de ladite société, intitulées « Proposition d'intervention du Bureau Veritas pour la mission de diagnostic technique » (16 novembre 2004), avaient exclu, en termes explicites, toute activité de cet ordre, en indiquant que « les présentes conditions générales s'appliquent aux prestations et interventions des sociétés du groupe Bureau Veritas, hors activité, manne et contrôle technique (dans le cadre de la loi du 4 janvier 1978) » (art. 1) ; qu'en jugeant dès lors que la garantie de la SMABTP était due, au motif que la société Bureau Veritas avait émis des avis en exécution de sa mission de « diagnostic technique », sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si les termes susvisés des Conditions générales de sa proposition d'intervention n'excluaient pas toute mission de « contrôle technique » au sens légal, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 241-1 du code des assurances, ensemble de l'article L. 111-23 susvisé ;
3° ALORS QU'en vertu de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation, le « contrôleur technique » a « pour mission de contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages », et son avis « porte notamment sur les problèmes qui concernent la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes » ; qu'en l'espèce, la cour a jugé, à propos de la responsabilité décennale des constructeurs, que l'ouvrage était en l'espèce constitué par « l'ensemble charpente-chemin de roulement » qui est l'ouvrage et que « le chemin de roulement et le pont roulant, bien que distincts, forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coils » ; qu'il s'ensuit que le « contrôle technique au sens de l'article L. 111-33 du code de la construction et de l'habitation », objet de la déclaration faite par la société Bureau Veritas au contrat d'assurance, à en supposer l'existence, ne pouvait être qu'un contrôle portant sur la totalité de cet « ensemble indivisible » que la cour a jugé devoir constater ; que, cependant, la cour a jugé que la mission de la société Bureau Veritas était « limitée à la structure métallique », ce dont il résultait que cette mission, non exercée sur l'ouvrage en son entier, ne pouvait pas constituer un contrôle technique « au sens de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation », justifiant la mise en oeuvre du contrat d'assurance ; qu'en jugeant le contraire, au motif que l'intervention de la société Bureau Veritas sur la seule structure métallique était indifférente (arrêt, p. 30, § 9), la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 241-1 du code des assurances, ensemble de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour les sociétés Seval et Axa France IARD.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, d'AVOIR condamné la société Seval, in solidum avec Bureau Veritas, ainsi que ses assureurs, la Smabtp, assureur responsabilité décennale sans limitation et QBE Insurance Europe Mimited, à hauteur de la somme maximale de 936.484 euros, et dans les limites de son contrat (franchise et plafond), Preventec ainsi que les assureurs de Couturier, Allianz, assureur responsabilité décennale sans limitation et au titre des préjudices immatériels dans les limites de son contrat (franchise et plafond) et Axa France Iard, cette dernière au titre des préjudices immatériels non consécutifs à un dommage garanti, dans les limites de son contrat (plafond et franchise), à payer la somme de 6.236.155,10 euros à Arcelor Mittal Atlantique et Lorraine avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2012 et d'AVOIR dit que Me Y... ès-qualités pourra obtenir la garantie de Seval et de son assureur Axa France Iard dans les limites de son contrat dans la proportion de 53,70 %, dit que la société Allianz pourra obtenir la garantie de Seval dans la proportion de 53,70 %, dit que la Smabtp pourra obtenir la garantie de Seval et de son assureur Axa France Iard dans la proportion de 53,70 %, que QBE Insurance LTD pourra obtenir la garantie de Seval et de son assureur Axa France Iard dans la proportion de 53,70 % ;
AUX MOTIFS QUE Arcelor a commandé d'une part à Couturier, suivant marché du 17 décembre 2004,
A/ à l'égard d'Arcelor, de Couturier, du Bureau Véritas et de Seval, l'installation d'un chemin de roulement sur poutres et structure destiné à supporter un pont roulant ("installation de manutention des coils"), et, d'autre part, à Seval, suivant marché du 16 décembre 2004, un pont roulant ; que de nombreuses ruptures de boulons sont survenues peu après la réception, puis il a été observé que la structure fixe présentait de graves endommagements de type fissurations ; que selon l'expert, M. E..., l'endommagement par fatigue de la structure fixe provient de la conjugaison de deux causes : le sous-dimensionnement de la structure fixe et l'excès de masse du pont : qu'il indique que :
- l'erreur de calcul commise (ou de dimensionnement) par Couturier qui n'a été détectée ni par Preventec, ni par le Bureau Veritas, rendait la structure fixe construite par les établissements Couturier impropre à sa destination,
- l'excès de masse du pont imputable à Seval, significatif par rapport aux valeurs communiquées à Arcelor, était incompatible avec l'utilisation de structure fixe même si celle-ci avait été convenablement calculée,
- le phénomène physique, révélateur des désordres, est la fissuration par fatigue, - les deux anomalies : erreur de calcul et excès de masse conduisaient l'une et l'autre, a fortiori par leur conjugaison à la ruine de la structure fixe réalisée par Couturier ;
Que le technicien précise en outre que le fait générateur du désordre associé à l'erreur de calcul de Couturier, est survenu à la fin de 2004 pour ce qui concerne Couturier et Préventec et en 2005 pour ce qui concerne le Bureau Veritas, et d'autre part que le fait générateur du désordre associé à l'excès de masse du pont Seval est survenu en 2005 ; qu'en exécution de son marché, Couturier a livré une structure fixe sous dimensionnée, cause avec l'excès de masse du pont roulant de l'endommagement par fatigue de la structure fixe ; que le bureau de contrôle, Bureau Veritas, dont la mission était limitée à la structure fixe, suivant proposition d'intervention acceptée par Arcelor ayant pour objet de formuler un avis sur la structure métallique constituant l'extension sud de la halle 1, l'expert lui reproche de ne pas avoir relevé la non-prise en considération de l'exposition à l'endommagement par fatigue et dit que cette erreur constitue une cause factorielle s'étant conjuguée avec les erreurs de Couturier et Préventec. Il indique à cet égard qu'il aurait suffi que l'une de ces trois parties ne se trompe pas pour que la structure fixe soit convenablement dimensionnée – ou ne soit pas construite ; que le Bureau Veritas ne conteste pas le principe de sa responsabilité aux côtés de Couturier et de Préventec. Son erreur s'est conjuguée à celles commises par Couturier et Préventec ; que Seval a livré un pont roulant affecté d'un excès de masse de plus de 40 tonnes par rapport au poids annoncé (soit de 25 %), incompatible avec l'utilisation de la structure fixe même si celle-ci avait été convenablement calculée, qui porte atteinte à sa solidité ; que l'expert qui fait état du sous-dimensionnement de la structure fixe et de l'excès de masse du pont comme causes de l'endommagement par fatigue de la structure, propose de retenir une imputabilité de 53,7 % à l'excès de masse du pont roulant et 46,30 % au sous-dimensionnement de la structure fixe ; que si le sous-dimensionnement de la structure fixe comme cause de l'endommagement par fatigue de la structure n'est pas contesté, Seval s'étonne que l'expert lui impute un tel pourcentage alors que le pont roulant donne entière satisfaction à Arcelor qui le conserve d'ailleurs dans l'ouvrage reconstruit ; que Seval conteste ainsi l'imputation à l'excès de masse du pont de la reprise des poteaux à hauteur de 16,60 % et reproche à l'expert de ne pas avoir calculé l'éventuel surcoût lié à l'excès de masse du pont, d'avoir procédé selon une loi d'échelle ramenant tout à 20 %, d'avoir raisonné hors situation réelle quant aux désordres et à leurs causes en se plaçant vingt ans plus tard, d'avoir écarté sans justification la recherche de la part d'endommagement due aux deux causes qu'il retient. Il estime que les deux chiffres retenus par l'expert pour lui imputer une part prépondérante de responsabilité sont faux, l'un d'eux résultant d'une grossière erreur de calcul ; qu'en réalité, il apparaît que Seval confond "usure" et "fatigue", cette dernière commençant dès que le pont est positionné sur la structure fixe en raison de son excès de masse, peu important son usage. A cet égard, il convient de se reporter au rapport d'expertise (§ 5.3.5, p. 110) ; qu'ainsi, l'excès de masse du pont a contribué au dommage, étant observé que l'expert précise sans être utilement contredit, que cet excès de masse était incompatible avec l'utilisation de structure fixe même si celle-ci avait été convenablement calculée. Il est ainsi justifié qu'une part prépondérante du sinistre soit imputée à Seval ; qu'à cet égard, Me Y... ès-qualités de liquidateur de Couturier critique justement le jugement entrepris qui fait supporter les deux tiers du sinistre à la non-prise en compte de l'effort de fatigue ; qu'en outre, la circonstance qu'Arcelor conserve le pont roulant en adaptant le nouveau chemin de roulement à la masse réelle de ce pont, n'est pas de nature à exonérer Seval de sa participation au coût de réfection de la structure fixe ; que l'imputation de 53,70 % pour la part de l'excès de masse du pont (§ 5.6.4 et 5.6.5) et de 46,30 % pour la part résultant du sous-dimensionnement de la structure fixe en retenant la quantité d'acier mise en oeuvre par Couturier pour réaliser la structure fixe sous-dimensionnée, la quantité d'acier nécessaire pour réaliser une structure fixe convenablement dimensionnée pour un pont roulant et de la masse convenue et la quantité d'acier nécessaire pour réaliser une structure fixe convenablement dimensionnée pour un pont roulant de la masse constatée, apparaît satisfaisante et doit être retenue ; que l'étude établie plus de deux ans après la clôture des opérations d'expertise par MM. D... et Q... produite par Seval n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions expertales, Arcelor observant avec pertinence que seule une analyse des contraintes a été faite mais non celle des déformations et que l'expert retient l'excès de masse du pont comme une des deux causes qui ont enclenché très rapidement le processus de ruine de l'ouvrage ; que Seval soutient encore qu'une part de responsabilité doit être imputée à Arcelor qui se serait réservée une partie de la conception de l'ouvrage sans démontrer en quoi d'une part le bureau d'études Orion missionné pour l'aide à la réception du pont et/ou d'autre part le bureau de contrôle SHEC missionné pour une assistance technique à maître de l'ouvrage suivant commande du 24 janvier 2005 auraient commis une faute alors que la mission de contrôle du poids du pont roulant ne faisait pas partie des obligations réglementaires de son utilisateur et que la prestation de la société SHEC est antérieure au rapport établi par le CETIM en août 2005 lequel mentionne que le poids du pont à vide est de 168.000 kg ; que, par ailleurs, Allianz, auprès de laquelle Couturier a souscrit un contrat d'assurance responsabilité décennale, invoque l'immixtion du maître de l'ouvrage sans pour autant établir la compétence notoire d'Arcelor dans la construction dans laquelle elle serait intervenue (structure métallique et ponts) ; que de surcroît, elle n'établit pas davantage un acte positif de celle-ci lors de la conception de l'opération ou de la réalisation des travaux ; qu'en outre, la faute du maître de l'ouvrage ne peut découler de la seule absence de maître d'oeuvre ;
B/ Sur la responsabilité décennale des constructeurs,
l'installation litigieuse de manutention des coils consécutive à l'exécution de deux marchés conclus antérieurement à l'ordonnance n° 2005-658 du 8 juin 2005, entrée en vigueur le 9 juin 2005, réformant le champ d'application de l'obligation d'assurance dans le domaine de la construction, relève de la loi du 4 janvier 1978 qui fait peser sur tous les constructeurs une présomption de responsabilité pour les dommages affectant l'ouvrage qui sont cachés au jour de la réception ; que l'article 1792 du code civil prévoit que "tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages, même résultant d'un vice du coil, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination" ; que l'article 1792-2 du code civil qui le complète précise, dans sa version initiale, que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend aussi aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un bâtiment ; qu'ainsi une telle responsabilité suppose la construction d'un ouvrage et des désordres relevant d'une certaine gravité affectant l'ouvrage construit ; que l'installation en cause sert à transporter les coils qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement, puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck ; qu'elle comporte une structure fixe appelée "chemin de roulement" et une structure mobile, le "pont roulant" qui se déplace en roulant sur la structure fixe et lève les coils depuis le sol pour les y déposer en une autre position ; que le chemin de roulement sur poutres et structure est destiné à supporter un pont roulant sur rails en hauteur ; que le chemin de roulement et le pont roulant, bien que distincts, forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coils ; qu'en l'espèce, les travaux confiés à Couturier suivant marché du 23 décembre 2004 concernent des travaux de charpente métallique, couverture, bardage, création de poutres et poteaux métalliques ; que l'ensemble charpente-chemin de roulement constitué d'une structure fixe ancrée au sol (une ossature métallique reposant sur des poteaux érigés sur des fondations en béton) qui prolonge un bâtiment trentenaire préexistant dans la halle 1 et qui prend appui pour une de ses deux files sur la halle 2 et sa structure constitue un ouvrage, ou à tout le moins d'une partie d'ouvrage, peu important son incorporation physique au bâtiment existant ; que son ancrage au sol et sa fonction sur la stabilité de l'ensemble permettent de dire qu'il s'agit d'un ouvrage ou d'une partie d'ouvrage de nature immobilière ; qu'or, il résulte des constatations de l'expert que l'erreur de dimensionnement commise par Couturier rendait la structure fixe impropre à sa destination et que l'excès de masse du pont roulant était incompatible avec l'utilisation de la structure fixe même si elle avait été convenablement calculée, que le phénome physique, révélateur des désordres est la fissuration par fatigue et que ces deux anomalies conduisent l'une et l'autre et a fortiori par leur conjugaison à la ruine de la structure fixe réalisée par Couturier ; qu'ainsi l'ouvrage ou la partie d'ouvrage réalisée par Couturier, charpente-chemin de roulement, qui ne permet pas de supporter le "pont-roulant" dont la vocation est de se déplacer en roulant sur la structure fixe et lever les coils depuis le sol puis les y déposer en une autre position, est impropre à sa destination ; que les désordres (fissurations) dont le caractère de gravité décennal est avéré en ce qu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination et de surcroît, portent atteinte à la solidité de l'ensemble, charpente-chemin de roulement, pont roulant, affectent la structure fixe qui relève des travaux de construction ou à tout le moins de travaux de génie civil faisant appel aux techniques des travaux du bâtiment ; qu'enfin, même à admettre que les désordres affecteraient un élément d'équipement, l'ensemble, charpente-chemin de roulement, ne pourrait être considéré comme un équipement à vocation industrielle alors qu'il relève de la fonction construction, comme résultant de travaux de bâtiment ou de génie civil engageant ainsi la responsabilité décennale des constructeurs pour impropriété de l'ouvrage à sa destination ; qu'il ne peut dès lors être dit que le chemin de roulement qui supporte le pont-roulant constitue un élément d'équipement industriel, ne joue qu'un rôle purement industriel et ne relève pas de la construction ; que le jugement qui a exclu la responsabilité de plein droit des constructeurs est infirmé ; que l'ouvrage confié à Couturier relève du champ d'application de la responsabilité décennale des articles précités ainsi que du champ de l'assurance obligatoire de l'article L. 241-1 du code des assurances ;
C/ Sur les conséquences,
Arcelor est ainsi fondée à solliciter la condamnation in solidum du Bureau Veritas et de Seval dont la responsabilité de plein droit est engagée, comme celle de Couturier, à l'égard d'Arcelor sur le fondement de l'article 1792 du code civil et dont les fautes ont concouru avec celle de Couturier à la réalisation de l'entier dommage ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer que la responsabilité de plein droit de Seval est engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil, sans procéder à une analyse, même sommaire des éléments de preuve sur lesquels elle se fonde et qu'elle n'identifie pas, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS DE DEUXIEME PART QUE les éléments d'équipement à vocation industrielle ne constituent pas un ouvrage relevant de la garantie des constructeurs ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que la société Seval a fourni un pont roulant, distinct du chemin de roulement édifié par la société Établissements Couturier en exécution d'un autre contrat, lequel constituait un élément d'équipement industriel, peu important que celui-ci participe de l'opération de manutention des coils, de sorte qu'en retenant que la responsabilité de plein droit de la société Seval était engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil, la cour d'appel a violé ledit texte ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE dans ses conclusions d'appel (p. 49), la société Seval faisait valoir que le pont qu'elle avait fourni n'était ni un ouvrage de bâtiment, ni un ouvrage faisant appel à des travaux de bâtiment, mais une simple machine à poser sur des rails, de sorte qu'elle ne répondait pas de sa responsabilité sur le fondement de l'article 1792 du code civil ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS DE QUATRIEME ET DERNIERE PART et en toute hypothèse QUE seul le dommage en relation causale avec la faute est réparable ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le dommage résultant de la ruine du chemin de roulement édifié par la société Couturier ne se serait pas inévitablement produit même si le pont roulant fourni par la société Seval n'avait pas accusé un excès de masse eu égard aux spécifications contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Allianz IARD, assureur de responsabilité décennale de la société Établissements Couturier, in solidum avec les sociétés Seval, Bureau Veritas, SMABTP, QBE Insurance Europe Limited, Préventec et Axa France IARD à payer la somme de 6.236.155,10 € à la société Arcelor Mittel Atlantique et Lorraine et d'avoir condamné la société Allianz IARD à garantir M. Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Établissements Couturier, ainsi que les sociétés Axa France IARD, et QBE Insurance LTD dans la proportion de la responsabilité de la société Établissements Couturier, soit 19,14% ;
AUX MOTIFS QUE l'installation litigieuse de manutention des coils relève de la loi du 4 janvier 1978 qui fait peser sur tous les constructeurs une présomption de responsabilité pour les dommages affectant l'ouvrage qui sont cachés au jour de la réception ; que l'installation en cause sert à transporter des coils qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck ; qu'elle comporte une structure fixe appelée « chemin de roulement » et une structure mobile, le « pont roulant », qui se déplace en roulant sur la structure fixe et lève les coils depuis le sol pour les y déposer en une autre position ; que le chemin de roulement sur poutres et structure est destiné à supporter un pont roulant sur rails en hauteur ; que ce chemin et le pont roulant, bien que distincts, forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coils ; que les travaux confiés à la société Couturier le 23 décembre 2004 concernent des travaux de charpente métallique, couverture, bardage, création de poutres et poteaux métalliques ; que l'ensemble charpente-chemin de roulement constitué d'une structure fixe ancrée au sol [une ossature métallique reposant sur des poteaux érigés sur des fondements en béton] qui prolonge un bâtiment trentenaire préexistant dans la halle 1 et qui prend appui pour une de ses deux files sur la halle 2 et sa structure constitue un ouvrage, ou à tout le moins une partie d'ouvrage, peu important son incorporation physique au bâtiment existant ; que son ancrage au sol et sa fonction sur la stabilité de l'ensemble permettent de dire qu'il s'agit d'un ouvrage ou d'une partie d'ouvrage de nature immobilière ; qu'il résulte des constatations de l'expert que l'erreur de dimensionnement commise par la société Couturier rendait la structure fixe impropre à sa destination et que l'excès de masse du pont roulant était incompatible avec l'utilisation de la structure fixe même si elle avait été convenablement calculée, que le phénomène physique, révélateur des désordres est la fissuration par fatigue et que ces deux anomalies conduisent l'une et l'autre et a fortiori par leur conjugaison à la ruine de la structure réalisée par la société Couturier ; qu'ainsi l'ouvrage ou la partie d'ouvrage réalisée par la société Couturier, charpentechemin de roulement, qui ne permet pas de supporter le « pont roulant » dont la vocation est de se déplacer en roulant sur la structure fixe et lever les coils depuis le sol puis les y déposer en une autre position, est impropre à sa destination ; que les désordres [fissurations] dont le caractère de gravité de caractère décennal est avéré en ce qu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination et de surcroît, portent atteinte à la solidité de l'ensemble, charpente-chemin de roulement, pont roulant, affectent la structure fixe qui relève des travaux de construction ou à tout le moins de travaux de génie civil faisant appel aux techniques des travaux du bâtiment ; qu'enfin, même à admettre que les désordres affecteraient un élément d'équipement, l'ensemble charpente-chemin de roulement, ne pourrait être considéré comme un équipement à vocation industrielle alors qu'il relève de la fonction de construction, comme résultant de travaux de bâtiment ou de génie civil engageant ainsi la responsabilité décennale des constructeurs pour impropriété de l'ouvrage à sa destination ; qu'il ne peut dès lors être dit que le chemin de roulement qui supporte le pont roulant est un élément d'équipement industriel ne jouant qu'un rôle purement industriel et ne relève pas de la construction ; que l'ouvrage confié à la société Couturier relève du champ de l'assurance décennale et de l'assurance obligatoire de l'article L. 241-1 du code des assurances (arrêt, p. 28 et 29) ;
1°) ALORS QUE les éléments d'équipement qui sont dissociables de l'ouvrage auquel ils sont affectés, c'est-à-dire dont la dépose, le démontage ou le remplacement peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de l'ouvrage, ne peuvent être assimilés à un ouvrage au sens de la loi du 4 janvier 1978 ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD, venant aux droits de la société Gan, faisait valoir que l'ossature métallique mise en oeuvre par la société Établissements Couturier était simplement adossée en extérieur sur le bardage du bâtiment existant, et n'était pas intégrée aux éléments structurels de l'usine, de sorte que le chemin de roulement pouvait être ôté ou déplacé sans détériorer le bâtiment existant ou compromettre l'usage de l'usine (concl., p. 16 § 6 et 7) ; qu'en jugeant néanmoins que cette installation constituait un ouvrage ou une partie d'ouvrage, au motif de l'ancrage au sol et de la fonction de stabilité de l'ensemble charpente-chemin (arrêt, p. 28 § 11 et 12), sans rechercher, comme elle y était invitée, si cet ensemble pouvait être ôté ou déplacé sans détériorer le bâtiment existant ni compromettre l'usage de l'usine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792-2 du code civil, ce dernier dans sa version applicable en la cause ;
2° ALORS QU'un élément d'équipement à vocation exclusivement industrielle ne peut être qualifié d'ouvrage, au sens de l'article 1792 du code civil ; qu'en l'espèce, la société Allianz exposait que le chemin de roulement créé par cette dernière était un équipement extérieur au bâtiment existant, n'était pas couvert, et avait pour unique fonction de servir d'appareil de levage des bobines d'acier stockées (concl., p. 15 § 10 à 13) ; que la cour d'appel a constaté que « le chemin de roulement et le pont roulant [
] forment un ensemble indivisible pour obtenir le but recherché de manutention des coïls » (arrêt, p. 28, § 7), qui est de « transporter des coïls qui arrivent par train de l'usine voisine aux emplacements où ils subiront le refroidissement, puis à les reprendre pour les diriger vers le coeur de l'usine de Mardyck » (p. 28, § 5) ; qu'il résulte de ces constatations que l'installation était un élément d'équipement à vocation exclusivement industrielle ; qu'en jugeant pourtant que l'ensemble relevait de la fonction de construction et devait, dès lors, être qualifié d'ouvrage (p. 29, § 3), la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles 1792 et 1792-2 du code civil, celui-ci dans sa version applicable au litige ;
3° ALORS QUE dès lors que l'élément d'équipement à vocation exclusivement professionnelle se définit par sa finalité, la circonstance que cet élément soit ou non ancré au sol et qu'il contribue accessoirement à stabiliser l'ensemble auquel il est intégré, ce qui ne répond pas aux finalités de son installation, est indifférent ; qu'en jugeant dès lors que l'installation litigieuse, dont elle a constaté la finalité consistant à manier des coils, à les transporter, à les reprendre et à les diriger vers le coeur de l'usine, constituait un ouvrage relevant de la garantie décennale, au motif inopérant qu'elle était ancrée au sol et stabilisait l'ensemble charpente-chemin de roulement, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1792 et 1792-2 du code civil, ce dernier dans sa version applicable en la cause. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Marlange et de La Burgade, avocats aux Conseils, pour la société Great Lakes Insurance SE.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par la société GREAT LAKES REINSURANCE,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la police APCF souscrite entre la société ZURICH INTERNATIONAL, société de droit irlandais ayant une succursale en BELGIQUE et la société de droit luxembourgeois ARCELOR GROUPE prévoit en son paragraphe 2.2 : « La présente police est soumise à la loi belge et les tribunaux belges sont seuls compétents en cas de litige sauf ce qui est dit en matière d'arbitrage. La décision d'avoir recours à la juridiction d'arbitrage ou aux tribunaux ordinaires sera prise de commun accord après que le litige soit survenu » ; que de même, la police APCF souscrite entre la société de droit anglais GREAT LAKES et la société de droit luxembourgeois ARCELOR SA prévoit à l'article 3.5 des conditions particulières : « La présente police est régie par le droit belge et seuls les tribunaux belges auront compétence en cas de litige, sous réserve de ce qui est dit aux conditions générales au sujet de l'arbitrage. La décision de recourir à l'arbitrage ou aux tribunaux ordinaires sera prise par accord mutuel après apparition d'un litige » ; que s'agissant d'une demande en garantie présentée par deux sociétés ayant leur siège en FRANCE (COUTURIER et SEVAL) contre une société de droit irlandais (ZURICH ) et une société de droit anglais (GREAT LAKES), après le 1er mars 2002 et avant le 10 janvier 2015, le Règlement (CE) du Conseil 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale est applicable ; qu'aux termes de la section 3 dudit règlement, l'assureur peut être attrait devant la juridiction :- du pays où se situe le siège social (article 9.1 a)- du lieu du domicile du demandeur (article 9.1 b) - du lieu où le fait dommageable s'est produit (article 10) ; que les assureurs APCF dont la garantie est recherchée, se prévalent de l'article 13 de la convention aux termes duquel : « Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions .... 5) qui concernent un contrat d'assurance en tant que celui-ci couvre un ou plusieurs des risques énumérés à l'article 14 » ; qu'ils disent que l'article 14 vise tous les « grands risques » au sens de la directive 73/239/CEE du Conseil et que, leur police respective couvrant un « grand risque », leur clause d'élection de for est valable ; que si les polices en cause couvrent bien « un grand risque » au sens de la directive 2009/138/CEE et de l'article 13.5 du règlement 44/2001 contrairement à ce que soutiennent COUTURIER et SEVAL, cette clause conclue entre un preneur d'assurance (ARCELOR) et un assureur n'est pas pour autant opposable à l'assuré bénéficiaire qui a son domicile dans un autre État contractant alors que l'assuré bénéficiaire est comme le preneur d'assurance protégé par la convention comme partie économiquement la plus faible ; que dès lors, la clause attributive de juridiction stipulée conformément à l'article 13, point 5 du règlement 44/2001 n'est pas opposable à l'assuré bénéficiaire de ce contrat qui n'y a pas expressément souscrit et qui a son domicile dans un autre État contractant ; le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée tant par ZURICH que par GREAT LAKES » (arrêt pp. 37 et 38) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « les exceptions d'incompétence territoriale soulevées par les assureurs APCF appelés en cause seront écartées puisque ceux-ci se prévalent de clauses dont rien ne prouve leur spécification de façon très apparente dans l'engagement de chacune des entreprises auxquelles elles sont opposées, vu l'article 48 (du code de procédure civile), sans qu'il y ait lieu de disjoindre en conséquence de ces exceptions infondées » (jugement, p. 10) ;
ALORS QUE 1°), est opposable par l'assureur au bénéficiaire de l'assurance pour compte, la clause attributive de juridiction insérée dans le contrat d'assurance qui porte sur un grand risque au sens de la directive 73/239/CEE du Conseil, le bénéficiaire n'étant alors, du fait de l'objet du contrat, pas considéré comme une partie économiquement faible méritant une protection particulière en matière de règles de compétence ; que dès lors, en retenant, pour rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la société GREAT LAKES REINSURANCE UK PLC en application de la clause des contrats d'assurance pour le compte des fournisseurs souscrits par la société ARCELOR soumettant les litiges nés de ces contrats aux seuls tribunaux belges, que si ces polices couvraient bien un grand risque, la clause n'était pas pour autant opposable à l'assuré bénéficiaire ayant son domicile dans un autre Etat, celui-ci étant, tout comme le preneur d'assurance, protégé par la convention en tant que partie économiquement la plus faible, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations relatives à l'objet du contrat, a violé les articles 13, point 5 et 14, point 5 du règlement 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ;
ALORS QUE 2°), lorsque l'une des parties au moins est domiciliée dans un État signataire, que la situation est internationale et que la juridiction désignée est celle d'un État contractant, la validité des clauses attributives de juridiction doit être appréciée à l'aune des seules conditions posées par l'article 23 du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, à l'exclusion de celles qui pourraient résulter d'une application de l'article 48 du code de procédure civile ; qu'en retenant, pour écarter la clause de compétence insérée dans les contrats APCF conclus entre la société ARCELOR et la société GREAT LAKES REINSURANCE UK PLC, quand bien même les parties étaient, à la date de la convention, domiciliées sur le territoire d'États communautaires, la situation était internationale et la clause, rédigée par écrit et relative à un rapport de droit déterminé, désignait les tribunaux d'un État communautaire, que rien ne prouvait leur spécification de façon très apparente dans l'engagement de chacune des entreprises auxquelles elles étaient opposées ainsi que cela est exigé par l'article 48 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a ajouté à l'article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 une condition qu'il ne comporte pas, a violé ce texte.