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12/12/2017 | FRANCE | N°17BX02175

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2017, 17BX02175


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700698 du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juillet 2017, Mme

B..., représentée par Me Pépin, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700698 du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 juillet 2017, MmeB..., représentée par Me Pépin, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, un récépissé de demande de délivrance de ce titre, dans le délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle est mère d'un enfant français, alors que le préfet n'établit pas que la reconnaissance de cet enfant par un français serait frauduleuse ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'erreur de droit au regard du 6° de l'article L. 511-4 du

code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est mère d'un enfant français ;

- elle est entaché d'erreur de droit dès lors qu'elle peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en sa qualité de mère d'un enfant français ;

- elle est privée de base légale.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision

du 12 juillet 2017.

Par ordonnance du 28 juillet 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au

29 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Didier Salvi a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., épouseB..., ressortissante nigériane née le 9 juillet 1976, est entrée en France, selon ses déclarations, le 21 février 2012. Sa demande d'asile ayant été rejetée le 14 février 2013 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, elle a fait l'objet d'un arrêté du 2 juillet 2013 portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire. Le 31 août 2015, elle a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de la nationalité française de sa fille. Par arrêté du 6 octobre 2016, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme B...relève appel du jugement du 17 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

2. Par arrêté du 5 février 2016, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Haute-Garonne a donné à M. Daguin, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne et signataire de l'arrêté attaqué, délégation pour signer tous actes et décisions à l'exception des arrêtés de conflit. Contrairement à ce que soutient MmeB..., l'arrêté de délégation de signature est suffisamment précis. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux manque en fait.

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein

droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à

l'article L. 311-7 soit exigée (...)".

4. Si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé. Ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ses compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice de ces compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers. Tel est le cas pour la mise en oeuvre des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'ont pas entendu écarter l'application des principes ci-dessus rappelés. Par conséquent, si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les

articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français.

5. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant français ayant reconnu par anticipation, le 23 décembre 2014, la fille de Mme B..., née le 5 mars 2015, a indiqué, lors de son audition par les services de police le 28 avril 2016, avoir rencontré l'appelante en octobre 2013 et avoir entamé une relation avec celle-ci pendant trois à quatre semaines. Il a par la suite été informé par Mme B...de sa grossesse et, sollicité en vue de la reconnaissance de l'enfant par anticipation, il a effectué ces démarches " sans pour autant être sûr de sa paternité ". Selon la même audition, M. A...est incapable de préciser réellement la date et la durée de sa relation avec Mme B...ainsi que la date de la naissance de l'enfant de celle-ci et déclare ignorer où la mère et l'enfant se trouvent. Mme B... n'apporte, quant à elle, aucun élément probant quant à la date de sa relation avec M.A.... Eu égard notamment aux incohérences entre la période au cours de laquelle Mme B...et M. A...ont noué des relations et la date de naissance de l'enfant, qui constituent des éléments suffisamment précis et concordants pour caractériser l'existence d'une fraude entachant la reconnaissance parentale de l'enfant, le préfet, à qui il appartenait de faire échec à cette fraude, n'a pas fait une inexacte application du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer à l'intéressée le titre de séjour qu'elle sollicitait sur ce fondement, alors même que sa fille n'avait pas été déchue de la nationalité française à l'issue d'une action en contestation de paternité.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, Mme B... qui n'établit pas l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale.

7. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...). ". D'autre part, indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prévoit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement.

8. Eu égard à ce qui a été énoncé au point 5 ci-dessus, Mme B... n'est fondée à soutenir ni que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaîtrait les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'elle aurait dû se voir attribuer de plein droit un titre de séjour en qualité de mère d'un enfant français mineur.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 17 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a donc lieu de rejeter sa requête, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de MmeC..., épouseB..., est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C..., épouseB..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2017

Le rapporteur,

Didier Salvi

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa BeuzelinLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17BX02175


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02175
Date de la décision : 12/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : PEPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-12;17bx02175 ?
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