Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 1er juin 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1604064 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 février et le 19 avril 2017, M. B..., représenté par Me Garcia, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1604064 du tribunal administratif de Bordeaux du 24 janvier 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 1er juin 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un certificat de résidence algérien dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de certificat de résidence méconnait les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet s'est exclusivement fondé sur l'absence de visa long-séjour alors qu'il est arrivé en France à l'âge de 16 ans, qu'il a été recueilli par sa soeur par acte de kafala car ses parents malades ne pouvaient plus participer à son éducation et son entretien. Dès son arrivée en France il a été scolarisé en seconde générale puis s'est orienté vers un cursus professionnel spécialisé dans " l'accès aux soins et à la personne " pour lequel il bénéficie de résultats scolaires très satisfaisants et d'appréciations élogieuses de ses professeurs. Il a également effectué de nombreux stages professionnels et a obtenu des appréciations très favorables. En Algérie, sans ressources financières et en l'absence de cursus équivalent, il serait dans l'obligation d'abandonner ses études ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- cette décision porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance dont il joint une copie.
Par une ordonnance du 13 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2017 à 12 heures.
Par une décision du 23 mars 2017, la demande d'aide juridictionnelle de M. B...a été rejetée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
- le rapport de M. Paul-André Braud,
- et les observations de Me Garcia, avocat de M. B...;
Considérant ce qui suit :
1. M. A...B..., ressortissant algérien né le 20 mars 1998, est entré en France le 6 juillet 2014, à l'âge de 16 ans, muni d'un visa court-séjour. Il a été confié à sa soeur qui réside en France par acte de kafala du 11 novembre 2014. Le 12 février 2016, il a sollicité la délivrance d'un premier titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ou un titre de séjour mention " étudiant " dans le cadre des dispositions du titre III du protocole complétant l'accord franco-algérien susvisé. Par un arrêté du 1er juin 2016, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement n°1604064 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 1er juin 2016 :
En ce qui concerne le refus de certificat de résidence :
2. En premier lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté litigieux, qui rappelle les conditions d'entrée sur le territoire national de l'intéressé ainsi que sa situation familiale, que, contrairement à ce que soutient M.B..., le préfet de la Gironde a procédé à un examen individuel de sa situation personnelle.
3. En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
4. M. B...soutient qu'il réside depuis son arrivée en France à l'âge de seize ans chez sa soeur, titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, à qui il a été confié par acte de kafala en date du 11 novembre 2014 et qu'il a suivi une seconde générale et une première professionnelle " accès aux soins et aide à la personne " pour laquelle il a effectué des stages et a obtenu des résultats satisfaisants ainsi que des appréciations positives des professeurs et proviseurs. Cependant, quand bien même la filière " soins et services à la personne " n'existerait pas en Algérie, il n'est pas établi que l'intéressé ne pourrait y poursuivre des études équivalentes. Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que M. B...a été confié à sa soeur par acte de kafala en raison de l'état de santé de ses parents, lesquels étaient et semblent demeurer dans l'impossibilité de travailler et donc de contribuer à l'entretien et à l'éducation de leur fils, la kafala n'est qu'une délégation de l'autorité parentale alors que M. B...est désormais majeur. Or il est constant que ses parents et l'un de ses frères résident toujours en Algérie. Dès lors, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment à la durée du séjour en France de M.B..., qui est célibataire et sans enfant et qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le refus de certificat de résidence en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. B... doit être écarté pour les mêmes motifs.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de délivrance d'un certificat de résidence.
6. Par ailleurs, les moyens tirés de l'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les motifs énoncés au point 4.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 juin 2017.
Le rapporteur,
Paul-André BRAUDLe président,
Jean-Claude PAUZÈS
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 17BX00587