LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 mars 2017), que la caisse de Crédit agricole Centre-Est, aux droits de laquelle est venue la société Girardet, a fait pratiquer, le 16 décembre 1991, quatre saisies-arrêts entre les mains de l'Association de sécurité et d'assistance collective (Asac) afin d'appréhender des primes versées par MM. Jean-François et Christian Y... et Mmes Catherine et Elisabeth Y... puis a signifié, le 11 décembre 2006, une saisie-attribution entre les mains de ce même tiers ; que la société Girardet a par la suite assigné l'Asac et la société Allianz vie pour les voir condamnées au paiement des sommes objet des saisies-arrêts et de la saisie-attribution sur le fondement de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu que la société Girardet fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites ses demandes dirigées contre Allianz vie et l'Asac, à raison de la saisie-attribution du 11 décembre 2006, alors selon le moyen :
1°/ que la demande du créancier saisissant, tendant à voir condamner le tiers saisi qui a violé son obligation de renseignement à payer les causes de la saisie, consiste à poursuivre, à l'encontre dudit tiers, l'exécution du titre exécutoire en vertu duquel la saisie avait été pratiquée à l'encontre du débiteur saisi ; qu'il en résulte qu'une telle demande ressortit au régime de l'exécution des titres exécutoires judiciaires et se prescrit par dix ans ; qu'au cas présent, pour déclarer irrecevable la demande présentée par la société Girardet contre l'Asac et Allianz vie à fin de voir celles-ci condamnées à payer les causes de la saisie pratiquée contre les consorts Y..., la cour d'appel relève qu'une telle demande consisterait en une action personnelle se prescrivant selon le délai quinquennal de droit commun, déjà écoulé ; qu'en statuant ainsi, cependant que la demande de la société Girardet consistait à poursuivre contre l'Asac et Allianz vie l'exécution d'une cause déjà constatée par un titre exécutoire judiciaire, la cour d'appel, qui, confondant les alinéas premier et second de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution, n'a pas appliqué le régime de prescription qui s'imposait et devait conduire à constater la recevabilité de la demande de la société Girardet à cet égard, a violé l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 2224 du code civil ;
2°/ qu'en tout état de cause, que, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, à supposer que le premier alinéa de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution institue une action personnelle, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à payer les causes de la saisie, ces dernières doivent être constatées irrévocablement en justice, de sorte que l'irrévocabilité du titre exécutoire judiciaire, qui constate lesdites causes, est nécessaire à l'action du créancier ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action de la société Girardet contre l'Asac et Allianz vie, en paiement des causes de la saisie, au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par la société Girardet contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que le titre exécutoire judiciaire ayant présidé à la saisie n'était devenu irrévocable qu'après l'ordonnance de péremption rendue en 2010 par la Cour de cassation, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action de la société Girardet, n'a finalement pas tenu compte de la date de fixation irrévocable des causes de la saisie, dont la connaissance était essentielle à l'exercice de ladite action contre l'Asac et Allianz vie, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
3°/ qu'en tout état de cause, que, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à l'indemniser du dommage ayant découlé de ses déclarations mensongères ou négligentes, il importe que ledit dommage soit établi ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action indemnitaire, présentée à titre subsidiaire, de la société Girardet contre l'Asac et Allianz vie au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par lui contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que le titre exécutoire judiciaire ayant présidé à la saisie n'était devenu irrévocable qu'après l'ordonnance de péremption rendue en 2010 par la Cour de cassation, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité de la société Girardet, n'a pas tenu compte de la date de cristallisation du dommage souffert par ce créancier, dont la connaissance était essentielle à l'exercice de ladite action indemnitaire contre l'Asac et Allianz vie, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
4°/ qu'enfin, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à l'indemniser du dommage ayant découlé de ses déclarations mensongères ou négligentes, il importe que la réalité et la gravité du dommage et de la faute soient établies ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action indemnitaire de la société Girardet contre l'Asac et Allianz vie au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par la société Girardet contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que la nature insaisissable des fonds saisis, du fait qu'ils auraient été versés à Allianz vie par l'Asac pour le compte des consorts Y... dans le cadre d'une assurance-vie collective, n'avait été révélée par les défendeurs qu'incidemment, dans leurs conclusions de 2014, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité de la société Girardet, n'a pas tenu compte de la date où la connaissance effective de la gravité du dommage et de la faute commise par l'Asac et Allianz vie avait été rendue possible, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu, d'une part, que le créancier qui agit à l'encontre du tiers saisi pour le faire condamner, sur le fondement de l'article R. 211-5 alinéa premier du code des procédures civiles d'exécution, au paiement des sommes pour lesquelles la saisie-attribution des créances a été pratiquée n'exécute à l'égard de ce tiers saisi aucun titre exécutoire ; que c'est dès lors à bon droit que la cour d'appel a retenu que la prescription décennale prévue par l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution n'était pas applicable à cette action ;
Et attendu, d'autre part, que cette action qui n'est pas soumise à la démonstration d'un dommage pouvant être introduite dès que le créancier a connaissance de l'absence de déclaration "sur le champ", par le tiers saisi, des renseignements prévus à l'article L. 211-3 du code des procédures civiles d'exécution, c'est à bon droit que la cour d'appel a fixé le point de départ du délai de prescription à la date de signification du procès-verbal de saisie-attribution ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier et deuxième moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Girardet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Girardet, la condamne à payer à l'Association de sécurité et d'assistance collective et à la société Allianz vie la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Girardet
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu au rejet des débats des dernières conclusions du 3 janvier 2017 et pièces de la société Allianz Vie et de l'ASAC ;
Aux motifs que « sur la demande de rejet des débats des dernières conclusions de l'ASAC et Allianz Vie signifiées le 3 janvier 2017 : au soutien de sa demande de rejet des conclusions de l'ASAC et Allianz Vie signifiées le 3 janvier 2017, la société Girardet fait valoir que celles-ci ne visent pas uniquement à faire état de la décision du juge de l'exécution de Montpellier du 18 novembre 2016 qui a prononcé un sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal saisi de la question de l'opposabilité au créancier saisissant de l'insaisissabilité des contrats d'assurance vie et des conséquences que l'ASAC et Allianz Vie en tirent sur leur propre demande de sursis à statuer, mais complètent encore les précédentes en pages 25, 52, 57, sous réserve d'autres ajouts qui ne seraient pas apparents sur les 63 pages d'écritures, qu'au surplus, en ce qui concerne les trois nouvelles pièces communiquées soit la décision du juge de l'exécution de Montpellier du 18 novembre 2016 et le jugement rectificatif du même jour qui rectifie le précédent uniquement sur la date à laquelle l'affaire sera appelée pour examen, elles pouvaient, comme la pièce relative à la situation des contrats au 15 novembre 2016, être communiquées bien avant l'assignation en référé aux fins d'autorisation d'appel du jugement prononçant le sursis à statuer en date du 12 décembre 2016 qui n'apporte rien aux débats ; mais qu'en ce qu'elles font état de l'issue d'instances connue des parties sans modifier les demandes, sinon l'abandon par l'ASAC et Allianz Vie de la demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive à intervenir dans le cadre de la procédure engagée devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Montpellier, ni les termes du débat, les conclusions signifiées et les pièces communiquées le 3 janvier 2017 ne heurtent pas le principe de la contradiction en sorte qu'il n'y a pas lieu de les rejeter » (arrêt attaqué, p. 6) ;
Alors que les parties doivent se faire connaître mutuellement, en temps utile, les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ; qu'à cet égard, le juge, qui doit faire observer le principe de la contradiction, doit écarter les conclusions de dernière heure comportant des modifications non apparentes et auxquelles la partie adverse n'aurait pas été en mesure d'apporter les réponses nécessaires ; que si le rejet ne s'impose pas en présence de conclusions de dernière heure qui comprennent des modifications des demandes qui sont identifiables et n'appellent pas, en soi, de réponse particulière, le principe de la contradiction commande d'écarter les conclusions comportant des moyens nouveaux ; qu'au cas présent, pour dire n'y avoir lieu à rejeter les conclusions de l'ASAC et d'Allianz Vie signifiées le 3 janvier 2017, soit deux jours avant la tenue des débats en audience publique, la cour d'appel se borne à affirmer que lesdites conclusions ne modifient pas les demandes ni les termes du débat ; qu'en se déterminant ainsi, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (conclusions de rejet des débats, p. 2), si ces conclusions de dernière heure ne comportaient pas, quant aux moyens de fait et de droit présentés, des modifications substantielles non apparentes auxquelles la société Girardet n'aurait pas été en mesure d'apporter les réponses nécessaires, la cour d'appel, qui ne s'est pas assurée de la loyauté des débats, a privé sa décision de base légale au regard des articles 15, 16, 135 et 455 du code de procédure civile, ensemble les principes de loyauté procédurale et de la contradiction.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait dit n'y avoir lieu à saisine du juge de l'exécution s'agissant des demandes formulées au titre des saisies-arrêts du 16 décembre 1991 ;
Aux motifs propres que « sur la compétence du juge de l'exécution s'agissant des saisies-arrêts du 16 décembre 1991 : la société Girardet critique le jugement pour avoir d'office prononcé son incompétence en application de l'article R. 121-4 du code des procédures civiles d'exécution alors que ces quatre saisies restent régies par les dispositions transitoires définies à l'article 97 de la loi n° 91650 du 9 juillet 1991 et que c'est en connaissance de ces dispositions et des limites éventuelles de la définition légale de compétence du juge de l'exécution issue de l'article L. 2123-6 du code de l'organisation judiciaire que, dans son assignation du 12 juin 2014, elle a demandé que la compétence soit retenue pour "l'ensemble des demandes résultant de la présente assignation" soit les demandes relatives aux saisies-arrêts de 1991 et à la saisie-attribution de 2006, dans la mesure où ces demandes qui concernent les mêmes faits sont connexes et tendent aux mêmes fins ; qu'elle observe que l'ASAC et Allianz Vie n'ont pas jugé utile de contester la compétence du juge de l'exécution, qu'elles se sont ravisées en appel en sollicitant la confirmation de cette disposition mais sont irrecevables à former cette prétention pour la première fois par application de l'article 74 du code de procédure civile et encore de l'article 75 du même code, faute de désigner la juridiction qu'elles estiment compétente ; que, pratiquées le 16 décembre 1991, soit avant le 1er janvier 1993, date d'entrée en vigueur de la loi n° 91650 du 9 juillet 1991, conformément à l'article 97 de cette loi, les quatre saisies-arrêts sont, en effet, soumises aux dispositions des articles 48 à 57, 557 à 580 de l'ancien code procédure civile qui déterminent, en l'espèce, la compétence du tribunal de grande instance ; que s'agissant d'une règle de compétence d'ordre public, il ne saurait être reproché au premier juge de l'avoir relevé d'office, étant souligné que le moyen a été soumis à la contradiction des parties ; que, par ailleurs, en présence d'un moyen relevé d'office, il ne peut être fait grief aux parties qui sollicitent confirmation de la décision sur ce point de ne pas avoir respecté la règle de l'ordre de présentation des exceptions de procédure ou de ne pas avoir désigné la juridiction compétente, laquelle est désignée clairement aux motifs, sinon au dispositif, du jugement dont appel ; qu'il convient de confirmer ce chef du jugement sans qu'il y ait lieu de faire application de la faculté d'évocation prévue à l'article 89 du code de procédure civile » (arrêt attaqué, p. 7) ;
Et aux motifs, éventuellement adoptés du premier juge, que : « sur les saisies-arrêt du 16 décembre 1991, il est expressément stipulé à l'article 97 de la loi du 9 juillet 1991 que celle-ci entrera en vigueur "le 1er jour du 13ème mois suivant le mois de sa publication" et "qu'elle ne sera pas applicable aux mesures d'exécution forcées ni aux mesures conservatoires engagées avant sa mise en vigueur" ; que ces nouvelles dispositions sont entrées en application au 1er janvier 1993 en sorte que les quatre saisiesarrêts pratiquées par la société Girardet le 16 décembre 1991 relèvent des dispositions des articles 48 à 57, 557 à 580 de l'ancien code de procédure civile (ci-après ACPC) ; qu'en application de l'article 567 de l'ACPC : "la demande en validité et la demande en mainlevée formée par la partie saisie, seront portées devant le tribunal du domicile de la partie saisie" ; que l'article 568 du même code poursuit : "le tiers saisi ne pourra être assigné en déclaration, s'il n'y a titre authentique, ou jugement qui ait déclaré la saisie-arrêt ou l'opposition valable" ; qu'enfin, l'article 570 de l'ACPC énonce : "le tiers saisi sera assigné sans citation préalable en conciliation, devant le tribunal qui doit connaître de la saisie [
]" ; qu'il est constant qu'en application de ces dispositions, les demandes relatives à la condamnation du tiers saisi relevaient, selon le montant de la demande, de la compétence du tribunal d'instance ou du tribunal de grande instance ; qu'en réponse au moyen, soulevé d'office par le juge de l'exécution en sa formation collégiale, tiré de son incompétence à connaître des demandes formulées du chef de ces saisies-arrêts, la société Girardet présente les observations suivantes : qu'elle fait en premier valoir que l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire confère à la présente formation une compétence exclusive pour statuer sur toutes les contestations nées de l'exécution d'une décision de justice, dont notamment, celles visant à voir personnellement condamné le tiers saisi, lors même que les mesures concernées demeureraient soumises aux dispositions de l'ancien code de procédure civile ; qu'elle fait, par ailleurs, observer que ces demandes concernant les mêmes faits, sont connexes et tendent aux mêmes fins, étant ajouté qu'aucune des parties adverses n'a remis en cause la compétence du juge de l'exécution ; qu'elle ajoute enfin que l'article 92 du code de procédure civile confère au juge la faculté de soulever son incompétence sans lui en faire l'obligation ; qu'il convient préalablement de rappeler que l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire (préalablement article L. 311-12 du même code) n'est que la transposition légale, au plan de l'organisation judiciaire, de la création du juge de l'exécution tel qu'issu de la loi du 9 juillet 1991 ; qu'ainsi, ce texte attribue aux juges de l'exécution trois principaux chefs de compétence auxquels s'ajoutent des attributions complémentaires résultant de dispositions spécifiques ; que l'article R. 121-4 du code des procédures civiles d'exécution dispose : "les règles de compétence prévues au présent code sont d'ordre public" ; qu'il est constant qu'un texte spécial déroge aux dispositions générales ; qu'en conséquence de quoi, il ne saurait valablement être tiré argument des dispositions de l'article 92 du code de procédure civile qui attribuent une simple faculté au juge de relever d'office son incompétence d'attribution lorsque cette règle est d'ordre public ; qu'ainsi, lors même que les fonctions du juge de l'exécution sont exercées par un ou plusieurs juges du tribunal de grande instance délégué par le président dudit tribunal, celui-ci n'en constitue pas moins une "juridiction d'exception", dont les attributions sont strictement délimitées par la loi du 9 juillet 1991 et son décret d'application, ce jour codifiés par le code des procédures civiles d'exécution ; qu'il en résulte pareillement que sa compétence ne saurait d'avantage faire l'objet d'une prorogation conventionnelle de ses attributions, à la supposer même établie au vu des éléments de la cause ; qu'il se déduit en conséquence de ces développements que, s'agissant des demandes formulées relativement aux saisies-arrêts pratiquées le 16 décembre 1991, il n'y a lieu à saisine du juge de l'exécution » (jugement entrepris, p. 9 s.) ;
1° Alors que sont connexes les demandes dérivant du même complexe de faits ; qu'il en va ainsi de demandes en condamnation au paiement des causes d'une saisie-arrêt et d'une saisie-attribution entreprises sur de mêmes fonds entre les mains du même tiers saisi au regard du même titre exécutoire ; qu'il importe peu, à cet égard, que les dispositions transitoires de la loi n° 91650 du 9 juillet 1991 aient écarté son application immédiate aux saisies engagées avant son entrée en vigueur, notamment pour ce qui concerne la compétence d'attribution du juge de l'exécution, ; qu'au cas présent, la cour d'appel s'est bornée à constater que le juge de l'exécution pouvait relever d'office son incompétence, les saisies-arrêts ressortissant à la compétence du tribunal de grande instance en vertu d'une règle d'ordre public et les dispositions transitoires de la loi n° 91650 du 9 juillet 1991 ayant spécifié qu'elle était inapplicable aux mesures d'exécution forcée et aux mesures conservatoires engagées avant son entrée en vigueur ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de la société exposante (p. 21), si, les saisies-arrêts de 1991 et la saisie-attribution de 2006 concernant les mêmes fonds saisis, les mêmes tiers saisis (Allianz Vie et l'ASAC), en vertu du même titre exécutoire devenu irrévocable en 2010 (la condamnation des consorts Y...) et ayant été bridées par la même réquisition pénale des fonds saisis (dont la mainlevée n'a été prononcée qu'en 2014), il n'existait pas une situation de connexité des demandes présentées par Girardet contre Allianz Vie et l'ASAC, autorisant le juge de l'exécution à en connaître au sein d'une même instance, a privé sa décision de base légale au regard des articles 92 et 101 du code de procédure civile, ensemble l'article 8 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution devenu l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
2° Alors que, lorsque le juge de l'exécution est saisi, outre de demandes qui relèvent incontestablement de sa compétence, de demandes qui ne relèvent pas de sa compétence, il n'est pas tenu de se déclarer (partiellement) incompétent, la décision d'incompétence à l'égard des demandes excédant son office relevant d'une simple faculté ; qu'au cas présent, le juge de l'exécution s'est déclaré compétent à l'égard des voies d'exécution de 2006 ; que, s'il s'estimait incompétent à l'égard des voies d'exécution de 1991, il n'était pas tenu de refuser d'en connaître ; qu'en confirmant sa déclaration d'incompétence à leur égard au motif que son incompétence serait d'ordre public, quand cet ordre public n'avait rien d'absolu, la cour d'appel a violé l'article 92 du code de procédure civile, ensemble l'article 8 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution devenu l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
3° Alors que, en tout état de cause, la cour d'appel ayant une plénitude de juridiction, elle ne peut pas, au prétexte de l'incompétence du premier juge, refuser de statuer au fond dès lors qu'elle est juge d'appel du juge qui eût été compétent ; qu'au cas présent, la cour d'appel a estimé fondée en droit la déclaration d'incompétence du juge de l'exécution à l'égard des voies d'exécution de 1991 ; qu'elle a toutefois refusé de connaître elle-même de ces saisies, cependant qu'elle était incontestablement juge d'appel du tribunal désigné comme compétent (le tribunal de grande instance) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 88 du code de procédure civile et 6-§1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe de plénitude de juridiction de la cour d'appel.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il a déclaré non prescrite l'action de la société Girardet dirigée contre Allianz Vie et l'ASAC à raison de la saisie-attribution du 11 décembre 2006 et, statuant à nouveau du chef infirmé, d'avoir déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de la société Girardet dirigées contre Allianz Vie et l'ASAC à raison de la saisie-attribution du 11 décembre 2006 ;
Aux motifs que « sur la prescription de l'action fondée sur la saisie-attribution du 11 décembre 2006 : pour rejeter la fin de non-recevoir prise de la prescription de l'action intentée le 19 septembre 2014 par la société Girardet à l'encontre d'Allianz Vie et de l'ASAC sur le fondement des dispositions de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a retenu que les demandes formulées ne sont pas régies par la prescription quinquennale applicable aux actions personnelles ou mobilières, mais en ce qu'elles relèvent de l'exécution de divers titres exécutoires, et se trouvent dès lors soumises aux dispositions de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution prévoyant que l'exécution peut être poursuivie pendant dix ans, délai qui n'était pas acquis lors de la délivrance de l'assignation ; qu'Allianz Vie et l'ASAC critiquent le jugement en faisant valoir que l'action, qui tend à obtenir la condamnation du tiers saisi au paiement des causes des saisies ou de dommages et intérêts en considération de l'inexécution de l'obligation de déclaration, a la nature d'une action en responsabilité qui est soumise à la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil d'une durée de cinq ans, le point de départ du délai se situant au jour de la mesure d'exécution soit, pour la saisie-attribution, le 11 décembre 2006, et la réduction du délai par la loi du 17 juin 2008 conduisant à appliquer la nouvelle durée à compter de l'entrée en vigueur de la réforme, de sorte que la prescription était acquise le 18 juin 2013 ; que l'action contre le tiers saisi à raison de sa défaillance au regard de l'obligation de renseignement due au créancier saisissant, prévue pour les saisies-attribution par l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution, est une action personnelle en responsabilité quasi-délictuelle, qui est soumise, faute de dispositions spéciales, au délai de prescription de droit commun, fixé à cinq ans par l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008 ; que cette action en responsabilité est bien celle engagée par la société Girardet et ne se confond pas avec l'action en exécution de titres exécutoires à laquelle est applicable la prescription décennale de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution ; que le point de départ du délai de droit commun est, selon l'article 2224 du code civil, le jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer soit, en l'espèce, la date de signification du procès-verbal de la saisie-attribution, le 11 décembre 2006, à laquelle le créancier saisissant était à même d'apprécier l'exécution par le tiers saisi de son obligation de renseignement et d'agir à son encontre et non, comme le soutient à titre subsidiaire la société Girardet, l'ordonnance du 9 septembre 2010 constatant la péremption de l'instance introduite par les débiteurs saisis selon pourvoi en cassation contre l'arrêt de 2007 ; que, compte tenu de la réduction du délai de prescription de dix à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, s'applique l'article 26, II de cette loi dont il résulte que les dispositions nouvelles qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'il s'ensuit que la société Girardet disposait d'un délai de cinq ans, jusqu'au 19 juin 2013, pour exercer son action et que la prescription était acquise lors de la délivrance de l'assignation des 11 et 12 juin 2014 ; que l'action fondée sur la saisie-attribution du 11 décembre 2006 est donc prescrite ; que le jugement sera infirmé en ce sens et toutes les demandes dirigées par la société Girardet contre Allianz Vie et l'ASAC à raison de cette mesure seront déclarées irrecevables » (arrêt attaqué, p. 7 s.) ;
1° Alors que la demande du créancier saisissant, tendant à voir condamner le tiers saisi qui a violé son obligation de renseignement à payer les causes de la saisie, consiste à poursuivre, à l'encontre dudit tiers, l'exécution du titre exécutoire en vertu duquel la saisie avait été pratiquée à l'encontre du débiteur saisi ; qu'il en résulte qu'une telle demande ressortit au régime de l'exécution des titres exécutoires judiciaires et se prescrit par dix ans ; qu'au cas présent, pour déclarer irrecevable la demande présentée par la société Girardet contre l'ASAC et Allianz Vie à fin de voir celles-ci condamnées à payer les causes de la saisie pratiquée contre les consorts Y..., la cour d'appel relève qu'une telle demande consisterait en une action personnelle se prescrivant selon le délai quinquennal de droit commun, déjà écoulé ; qu'en statuant ainsi, cependant que la demande de Girardet consistait à poursuivre contre l'ASAC et Allianz Vie l'exécution d'une cause déjà constatée par un titre exécutoire judiciaire, la cour d'appel, qui, confondant les alinéas premier et second de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution, n'a pas appliqué le régime de prescription qui s'imposait et devait conduire à constater la recevabilité de la demande de Girardet à cet égard, a violé l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 2224 du code civil ;
2° Alors, en tout état de cause, que, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, à supposer que le premier alinéa de l'article R. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution institue une action personnelle, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à payer les causes de la saisie, ces dernières doivent être constatées irrévocablement en justice, de sorte que l'irrévocabilité du titre exécutoire judiciaire, qui constate lesdites causes, est nécessaire à l'action du créancier ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action de Girardet contre l'ASAC et Allianz Vie, en paiement des causes de la saisie, au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par Girardet contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que le titre exécutoire judiciaire ayant présidé à la saisie n'était devenu irrévocable qu'après l'ordonnance de péremption rendue en 2010 par la Cour de cassation, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action de Girardet, n'a finalement pas tenu compte de la date de fixation irrévocable des causes de la saisie, dont la connaissance était essentielle à l'exercice de ladite action contre l'ASAC et Allianz Vie, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
3° Alors, en tout état de cause, que, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à l'indemniser du dommage ayant découlé de ses déclarations mensongères ou négligentes, il importe que ledit dommage soit établi ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action indemnitaire, présentée à titre subsidiaire, de Girardet contre l'ASAC et Allianz Vie au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par lui contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que le titre exécutoire judiciaire ayant présidé à la saisie n'était devenu irrévocable qu'après l'ordonnance de péremption rendue en 2010 par la Cour de cassation, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité de Girardet, n'a pas tenu compte de la date de cristallisation du dommage souffert par ce créancier, dont la connaissance était essentielle à l'exercice de ladite action indemnitaire contre l'ASAC et Allianz Vie, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
4° Alors que, enfin, en matière d'action personnelle, le point de départ du délai de prescription quinquennal de droit commun est fixé au jour où le titulaire du droit d'action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que, pour que le créancier saisissant puisse demander la condamnation du tiers saisi à l'indemniser du dommage ayant découlé de ses déclarations mensongères ou négligentes, il importe que la réalité et la gravité du dommage et de la faute soient établies ; qu'au cas présent, la cour d'appel a fixé le point de départ de la prescription de l'action indemnitaire de Girardet contre l'ASAC et Allianz Vie au jour de la signification de la saisie-attribution exercée par Girardet contre les consorts Y... ; qu'en statuant ainsi, sans relever que la nature insaisissable des fonds saisis, du fait qu'ils auraient été versés à Allianz Vie par l'ASAC pour le compte des consorts Y... dans le cadre d'une assurance-vie collective, n'avait été révélée par les défendeurs qu'incidemment, dans leurs conclusions de 2014, la cour d'appel, qui, pour déterminer le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité de Girardet, n'a pas tenu compte de la date où la connaissance effective de la gravité du dommage et de la faute commise par l'ASAC et Allianz Vie avait été rendue possible, a violé l'article 2224 du code civil, ensemble l'article L. 211-5 du code des procédures civiles d'exécution.