LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que M. X..., se disant de nationalité tunisienne, en situation irrégulière en France, a été interpellé le 15 juillet 2016, à 19 heures 25, et immédiatement placé en garde à vue jusqu'au lendemain à 14 heures 30, pour l'exécution d'un mandat de justice, puis le 16 juillet de 14 heures 30 à 19 heures 25 pour des faits de maintien irrégulier sur le territoire national ; qu'il a été placé en rétention administrative le même jour à 19 heures 25 ; que le préfet a demandé la prolongation de la rétention le 20 juillet ;
Attendu que, pour accueillir la demande, l'ordonnance relève que le procès-verbal de saisine préalable à la seconde mesure de garde à vue vaut procès-verbal d'interpellation ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, le document propre à établir les conditions de l'interpellation ayant conduit au placement initial en garde à vue, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'appel recevable, l'ordonnance rendue, entre les parties, le 22 juillet 2016, par le premier président de la cour d'appel de Douai ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Z..., avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2016 par laquelle le juge des liberté et de la détention de Lille a autorisé l'autorité administrative à retenir M. X... dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt jours, soit à compter du 21 juillet 2016 à 19 h 25 ;
AUX MOTIFS QUE sur l'absence du procès-verbal d'interpellation : selon l'article R. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L.553-1 ; si la loi ne précise pas le contenu des pièces justificatives à l'exception de la copie du registre de rétention, doit être considérées comme des pièces utiles les pièces nécessaires à l'appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l'examen lui permet d'exercer pleinement son pouvoir ; la constatation d'une irrégularité affectant l'interpellation ou la garde à vue, peut conduire à la remise en liberté de l'étranger, placé en rétention administrative, uniquement si l'irrégularité affecte la garde à vue qui précède immédiatement la mesure de rétention litigieuse ; ainsi, dans le cas d'une interpellation unique suivie de plusieurs procédures successives, à l'occasion desquelles plusieurs mesures de garde à vue ont été prises à la suite l'une de l'autre, jusqu'au placement en rétention, une irrégularité affectant la première garde à vue ne précédant pas immédiatement la mesure de rétention litigieuse, est sans incidence sur la régularité de la procédure (arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 6 juin 2012, n° 11-11.384) ; en l'espèce, l'appelant ayant été placé en garde à vue du 15 juillet 2016 à 19 h 25 au 16 juillet 2016 à 14 h 30 pour l'exécution d'un mandat de justice puis du 16 juillet 2016 à 14 h 30 au 16 juillet à 19 h 25 pour infraction au maintien irrégulier sur le territoire national après placement en rétention, les irrégularités qui affectent la première garde à vue sont sans incidence sur la mesure de rétention intervenue le 16 juillet 2016 à 19 h 25 ; en conséquence, le procès-verbal de saisine qui vaut procès-verbal d'interpellation ayant précédé la seconde mesure de garde à vue figurant dans le dossier, le moyen tenant à l'absence de procès-verbal d'interpellation ayant précédé la mesure de garde à vue intervenue entre le 15 juillet 2016 à 19 h 25 et le 16 juillet 2016 à 14 h 30 sera rejeté, ce document ne constituant pas une pièce utile justificative au sens de l'article R. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sur l'absence de pièces afférentes à la première garde à vue : les irrégularités affectant la première garde à vue étant sans incidence sur le placement en rétention de l'intéressé, il n'y a pas lieu d'exiger les pièces afférentes à la première mesure de garde à vue ; par ailleurs, l'article 63 du code de procédure pénale relatif à la fixation rétroactive du point de départ de la garde à vue subordonne son application au fait que les mesures successives de contrainte, d'appréhension et de garde à vue concerne les mêmes faits ; or, en l'espèce, la première garde à vue de l'intéressé a eu lieu pour exécution d'un mandat de justice et la seconde pour l'infraction de maintien irrégulier sur le territoire national après placement en rétention, soit pour des faits différents étant précisé que la seconde mesure de garde à vue n'a pas dépassé le délai légal de 24 h 00 ; de sorte que le moyen relatif à l'absence de pièces afférentes à la première garde à vue sera rejeté (p. 2) ;
ALORS QUE selon l'article R. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la requête tendant à la prolongation de la rétention du ressortissant étranger par le juge des libertés et de la détention est "motivée, datée, signée et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 553-1" ; que les procès-verbaux relatifs à l'interpellation du ressortissant étranger constituent des pièces justificatives utiles au sens de ce texte ; qu'en rejetant le moyen de M. X... tiré de l'absence de production par le préfet du Nord du procès-verbal d'interpellation ayant précédé la seconde mesure de garde à vue, au motif qu'un "procès-verbal de saisine qui vaut procès-verbal d'interpellation ayant précédé la seconde mesure de garde à vue figur(e) dans le dossier", sans donner aucune précision sur la nature exacte de ce document, le conseiller délégué a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article R. 552-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.