Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 16 décembre 2011 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Meuse a autorisé la société Miler Gaz à le licencier pour motif économique.
Par un jugement n° 1200288, 1200289, 1200290 et 1200291 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête n° 16NC00382, enregistrée le 29 février 2016, M. C...D..., représenté par la SCP Petit et Grosjean, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 31 décembre 2015 ;
2°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens statuant sur le jugement rendu par le conseil des prud'hommes le 16 décembre 2014.
Il soutient que :
- il a informé le tribunal de l'avancée de la procédure devant la juridiction judiciaire ;
- le jugement du conseil des prud'hommes est frappé d'appel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2016, la société Barrois Gaz, venant aux droits de la société Miler Gaz, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête présentée par M. D...et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à sa charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le requérant n'a fait preuve d'aucune diligence afin de faire trancher la question préjudicielle qu'il lui appartenait de poser ;
- la cessation d'activité de la société Miler Gaz était totale et définitive ;
- aucun des autres moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Fuchs,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la société Barrois gaz.
1. Considérant que M. D...était employé par la société Miler Gaz et avait la qualité de salarié protégé ; que cette entreprise a sollicité l'autorisation de le licencier pour motif économique ; que par la décision contestée du 16 décembre 2011, l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Meuse a accordé cette autorisation ; que le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande d'annulation de cette décision, par le jugement attaqué du 31 décembre 2015, au motif que le requérant ne justifiait pas avoir accompli les diligences nécessaires pour faire trancher par le juge judiciaire la question préjudicielle qu'il avait posée par un jugement avant-dire droit du 24 juin 2014 ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du 6 avril 2012, prise dans le délai de quatre mois dont elle disposait, l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Meuse a retiré d'office la décision du 16 décembre 2011 autorisant le licenciement du requérant motif pris de son illégalité ; que la société Miler Gaz a introduit un recours hiérarchique contre cette décision du 6 avril 2012 qui a été reçu par le ministre chargé du travail le 8 juin 2012 ;
3. Considérant que, le 8 octobre 2012, le ministre chargé du travail a considéré que la décision du 6 avril 2012 était illégale en raison de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure et, par l'article premier de sa décision, a prononcé son annulation ; que le ministre a ensuite estimé, malgré la circonstance que la décision initiale de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement était alors à nouveau en vigueur et sans rapporter explicitement cette décision, qu'il lui appartenait de statuer sur la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société Miler Gaz ; qu'il a alors constaté qu'à la date à laquelle il se prononçait il n'existait plus de lien contractuel entre le requérant et son ancien employeur et, par le second article de sa décision du 8 octobre 2012, il a rejeté la demande d'autorisation de licenciement ;
4. Considérant, d'une part, qu'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; que si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait plus lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite de la requête dont il était saisi ; qu'il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de (...) l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée ;
6. Considérant toutefois que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; qu'en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les parties ont eu connaissance de la décision du ministre chargé du travail au plus tard le 14 novembre 2012, date à laquelle la juridiction leur a communiqué cette décision dans le cadre de la première instance ; qu'ainsi, et alors même que le courrier de notification produit au dossier n'est pas accompagné d'un accusé de réception permettant d'établir la date à laquelle la décision du 8 octobre 2012 a été notifiée, cette décision doit être regardée comme ne pouvant plus faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir à compter du 14 novembre 2013 ;
8. Considérant qu'en statuant à nouveau sur la demande d'autorisation de licenciement du requérant présentée par la société Miler Gaz et en la rejetant, le ministre doit être regardé comme ayant, implicitement mais nécessairement, annulé la décision initiale du 16 décembre 2011 autorisant le licenciement, cette dernière décision ne pouvant subsister concomitamment à la décision prise par le ministre ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 7, la décision du ministre du travail du 8 octobre 2012, qui n'a pas été contestée dans le délai de recours contentieux, est devenue définitive ; que, par suite, la décision du 16 décembre 2011 a été retirée en cours d'instance par une décision ayant acquis un caractère définitif ; qu'il en résulte que, quand bien même la décision ministérielle du 8 octobre 2012 serait entachée d'illégalité et alors que la décision du 16 décembre 2011 a produit des effets, puisque le requérant a été licencié, les conclusions à fin d'annulation de cette dernière décision étaient devenues sans objet ; que le jugement du tribunal administratif de Nancy, qui a statué sur cette demande, doit donc être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres conclusions des parties ou d'examiner les autres moyens ; qu'il y a lieu d'évoquer les conclusions de la demande ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Barrois Gaz la somme demandée par M. D...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas non plus lieu de mettre à la charge du requérant la somme demandée par la société Barrois Gaz sur ce même fondement ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 31 décembre 2015 est annulé en tant qu'il statue sur la demande présentée par M.D....
Article 2 : Il n'y pas lieu de statuer sur la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nancy.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D..., à la société Barrois Gaz et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
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N° 16NC00382