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11/01/2018 | FRANCE | N°16-22829

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 11 janvier 2018, 16-22829


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 juin 2016), qu'à la suite d'une première procédure de saisie immobilière à l'issue de laquelle a été constatée la péremption du commandement valant saisie immobilière, la Banque populaire du Sud (la banque) a fait délivrer à M. et Mme X... un nouveau commandement à fin de saisie immobilière le 2 septembre 2014 ; qu'assignés devant le juge de l'exécution à fin de vente forcée de leur bien immobilier, les débiteurs

saisis ont, par conclusions du 30 mars 2015, sollicité reconventionnellement du j...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 juin 2016), qu'à la suite d'une première procédure de saisie immobilière à l'issue de laquelle a été constatée la péremption du commandement valant saisie immobilière, la Banque populaire du Sud (la banque) a fait délivrer à M. et Mme X... un nouveau commandement à fin de saisie immobilière le 2 septembre 2014 ; qu'assignés devant le juge de l'exécution à fin de vente forcée de leur bien immobilier, les débiteurs saisis ont, par conclusions du 30 mars 2015, sollicité reconventionnellement du juge de l'exécution qu'il constate la prescription de la créance et de l'action en paiement de la banque ; que le 4 mai 2015, la banque a déposé des conclusions de désistement ; que par conclusions du 5 août 2015, M. et Mme X... ont demandé au juge de l'exécution de juger recevables et bien fondées les demandes reconventionnelles qu'ils avaient formées ;

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de donner acte à la banque de ce qu'elle se désiste de la procédure de saisie immobilière engagée contre eux par commandement valant saisie immobilière délivré le 2 septembre 2014, et de les déclarer irrecevables à prétendre faire juger les autres contestations et demandes reconventionnelles malgré l'extinction de la procédure immobilière, alors selon le moyen :

1°/ que le désistement n'est parfait et ne met fin à l'instance que par l'acceptation du défendeur, lorsque celui-ci a présenté une défense au fond, une fin de non-recevoir ou une demande reconventionnelle ; qu'assignés devant le juge de l'exécution par la banque le 10 décembre 2014, ils ont, par conclusions du 30 mars 2015, formé diverses demandes reconventionnelles, dont l'une tendait à voir déclarer prescrite la créance de la banque ; que postérieurement à la formation de ces demandes reconventionnelles, la banque a, par conclusions datées du 4 mai 2015, déclaré se désister de son instance ; que par conclusions du 5 août 2015, ils n'ont que partiellement accepté ce désistement et maintenu leurs demandes reconventionnelles ; qu'en reconnaissant la validité du désistement de la banque et en jugeant que celui-ci ôtait compétence au juge de l'exécution pour statuer sur les demandes reconventionnelles formées par eux, cependant que ce désistement n'avait pas été accepté et que l'instance demeurait liée par les demandes reconventionnelles formées par les défendeurs avant le désistement, la cour d'appel a violé les articles 394 et 395 du code de procédure civile ;

2°/ que suivant les dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; que le juge de l'exécution initialement saisi d'une procédure de saisie immobilière demeure compétent pour statuer sur les contestations nées de cette procédure et présentées à titre reconventionnel, quand bien même le demandeur aurait ultérieurement déclaré se désister de l'instance qu'il a initiée, dès lors que ces contestations n'échappent pas à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en énonçant que le juge de l'exécution, pourtant valablement saisi par la banque d'une procédure de saisie immobilière, et compétent pour statuer sur leurs demandes reconventionnelles nées de cette saisie, n'avait plus compétence pour trancher sur les demandes reconventionnelles au motif inopérant que la banque avait déclaré se désister de la procédure de saisie immobilière qu'elle avait engagée, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;

3°/ que le désistement n'est parfait que par l'acceptation du défendeur, lorsque celui-ci a présenté une défense au fond, une fin de non-recevoir ou une demande reconventionnelle ; qu'en jugeant irrecevables leurs demandes reconventionnelles, cependant qu'il était constant que celles-ci avaient été formées avant le désistement de la banque, la cour d'appel a violé l'article 395 du code de procédure civile ;

4°/ que le juge ne saurait méconnaître l'objet du litige tel qu'il a été défini par les parties ; qu'en jugeant irrecevables les demandes formées par eux au motif que ceux-ci ne pouvaient se prévaloir d'un intérêt légitime à prétendre s'opposer au désistement de la voie d'exécution dont ils étaient l'objet, cependant que leur refus d'accepter le désistement d'instance de la banque ne visait pas à s'opposer à la procédure d'exécution formée par la banque, mais à voir juger que la créance de cette dernière était prescrite, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige tel qu'il avait été défini par les parties et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que la seule condition de la recevabilité d'une demande reconventionnelle est de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé irrecevables leurs demandes reconventionnelles, tendant notamment à voir juger prescrite l'action en remboursement de la banque, au motif que le désistement de la banque de la procédure de saisie immobilière ôtait au juge de l'exécution toute compétence pour trancher les demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était invitée par M. et Mme X..., si leur demande reconventionnelle tendant à voir juger prescrite l'action en remboursement de la banque se rattachait à la demande initiale de cette dernière par un lien suffisant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 64 et 70 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu, sans méconnaître l'objet du litige, que, dès lors que le créancier avait déclaré par conclusions écrites se désister de la procédure de saisie immobilière qu'il avait engagée, le juge de l'exécution n'était plus compétent pour trancher les contestations qui avaient été élevées à l'occasion de celle-ci ni pour statuer sur les demandes reconventionnelles nées de cette procédure ou s'y rapportant ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir donné acte à la banque de ce qu'elle se désiste de la procédure de saisie immobilière engagée contre les époux X... par commandement valant saisie immobilière délivré le 2 septembre 2014, et d'avoir déclaré les époux X... irrecevables à prétendre faire juger les autres contestations et demandes reconventionnelles malgré l'extinction de la procédure immobilière,

AUX MOTIFS QU'« 'aux termes de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire :

Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en oeuvre.

Le juge de l'exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit »;

Attendu qu'il en résulte que, dès lors que le créancier a déclaré par conclusions écrites se désister de la procédure de saisie immobilière qu'il a engagée, le juge de l'exécution, dont cette procédure est l'unique objet de l'intervention et l'unique support de la compétence exclusive, n'a plus compétence pour trancher les contestations qui avaient été élevées sur celles-ci pas plus que pour les demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, sauf abus de saisie et frais non compris dans les dépens ;

Que les époux X..., qui par surcroît ne peuvent se prévaloir d'un intérêt légitime à prétendre s'opposer à ce désistement de la voie d'exécution forcée dont ils étaient l'objet, sont en conséquence irrecevables à prétendre faire juger néanmoins sur leurs contestations de ladite procédure et leurs demandes reconventionnelles autres que l'abus de saisie ;

Qu'ils ne contestent pas le jugement en ce qu'il a rejeté leur demande de dommages-intérêts pour un abus de saisie qualifié en référence à un abus procédural ;

Attendu que le jugement est en conséquence réformé, sauf en ce qu'il a ordonné la radiation du commandement valant saisie immobilière, rejeté la demande de dommages-intérêts pour abus de saisie ainsi que les demandes du chef de l'article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à la charge de la banque » ;

1°/ ALORS QUE le désistement n'est parfait et ne met fin à l'instance que par l'acceptation du défendeur, lorsque celui-ci a présenté une défense au fond, une fin de non-recevoir ou une demande reconventionnelle ; qu'assignés devant le juge de l'exécution par la Banque Populaire du Sud le 10 décembre 2014, les époux X... ont, par conclusions du 30 mars 2015, formé diverses demandes reconventionnelles, dont l'une tendait à voir déclarer prescrite la créance de la banque ; que postérieurement à la formation de ces demandes reconventionnelles, la Banque Populaire du Sud a, par conclusions datées du 4 mai 2015, déclaré se désister de son instance ; que par conclusions du 5 août 2015, les époux X... n'ont que partiellement accepté ce désistement et maintenu leurs demandes reconventionnelles ; qu'en reconnaissant la validité du désistement de la banque et en jugeant que celui-ci ôtait compétence au juge de l'exécution pour statuer sur les demandes reconventionnelles formées par les époux X..., cependant que ce désistement n'avait pas été accepté et que l'instance demeurait liée par les demandes reconventionnelles formées par les défendeurs avant le désistement, la cour d'appel a violé les articles 394 et 395 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE suivant les dispositions de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; que le juge de l'exécution initialement saisi d'une procédure de saisie immobilière demeure compétent pour statuer sur les contestations nées de cette procédure et présentées à titre reconventionnel, quand bien même le demandeur aurait ultérieurement déclaré se désister de l'instance qu'il a initiée, dès lors que ces contestations n'échappent pas à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en énonçant que le juge de l'exécution, pourtant valablement saisi par la Banque populaire du Sud d'une procédure de saisie immobilière, et compétent pour statuer sur les demandes reconventionnelles des époux X... nées de cette saisie, n'avait plus compétence pour trancher sur les demandes reconventionnelles au motif inopérant que la Banque avait déclaré se désister de la procédure de saisie immobilière qu'elle avait engagée, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;

3°/ ALORS QUE le désistement n'est parfait que par l'acceptation du défendeur, lorsque celui-ci a présenté une défense au fond, une fin de non-recevoir ou une demande reconventionnelle ; qu'en jugeant irrecevables les demandes reconventionnelles des époux X... cependant qu'il était constant que celles-ci avaient été formées avant le désistement de la banque, la cour d'appel a violé l'article 395 du code de procédure civile ;

4°/ ALORS QUE le juge ne saurait méconnaître l'objet du litige tel qu'il a été défini par les parties ; qu'en jugeant irrecevables les demandes formées par les époux X... au motif que ceux-ci ne pouvaient se prévaloir d'un intérêt légitime à prétendre s'opposer au désistement de la voie d'exécution dont ils étaient l'objet, cependant que le refus des époux X... d'accepter le désistement d'instance de la banque ne visait pas à s'opposer à la procédure d'exécution formée par la banque, mais à voir juger que la créance de cette dernière était prescrite, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige tel qu'il avait été défini par les parties et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ ALORS ENFIN QUE la seule condition de la recevabilité d'une demande reconventionnelle est de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé irrecevables les demandes reconventionnelles des époux X..., tendant notamment à voir juger prescrite l'action en remboursement de la banque, au motif que le désistement de la banque de la procédure de saisie immobilière ôtait au juge de l'exécution toute compétence pour trancher les demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était invitée par les exposants, si la demande reconventionnelle des époux X... tendant à voir juger prescrite l'action en remboursement de la banque se rattachait à la demande initiale de cette dernière par un lien suffisant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 64 et 70 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-22829
Date de la décision : 11/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SAISIE IMMOBILIERE - Procédure - Désistement du créancier poursuivant - Effets - Détermination - Portée

JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Limitation - Cause - Créancier poursuivant se désistant de la procédure de saisie immobilière - Portée

Lorsque le créancier se désiste de la procédure de saisie immobilière qu'il a engagée, le juge de l'exécution n'est plus compétent pour trancher les contestations qui ont été élevées à l'occasion de celle-ci ni pour statuer sur les demandes reconventionnelles nées de cette procédure ou s'y rapportant


Références :

articles 385, 394 et 395 du code de procédure civile

article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 03 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 11 jan. 2018, pourvoi n°16-22829, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 5
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 5

Composition du Tribunal
Président : Mme Brouard-Gallet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22829
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