LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° 15-16.865, 15-16.866 et 15-16.867 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mme Y..., M. A... et M. Z... ont été engagés respectivement les 3 août 2000, 15 février 2001 et 9 avril 2004 par la société Grand Casino de [...] exploitant une activité de casino et filiale ; qu'elle fait partie d'un groupe dont la société mère est la Sa DD... G... ; que, placée en redressement judiciaire le 15 juillet 2010, la société Grand Casino de [...] a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par jugement du 6 octobre 2010, M. B... étant nommé mandataire liquidateur ; que les salariés ont été licenciés pour motif économique par lettres des 19 octobre et 8 novembre 2010 ; que, contestant cette mesure, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale et demandé la condamnation des deux sociétés à titre de coemploi ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu que pour condamner la société DD... G... à payer solidairement avec la société Grand Casino de [...] les sommes allouées aux salariés au titre de leur licenciement, les arrêts retiennent que la société DD... G... était systématiquement représentée dans les organes des sociétés filiales du groupe, qu'aux termes du préambule de la convention de trésorerie du 3 février 1998 liant la société mère à ses filiales, celles-ci reconnaissaient que la société DD... G... était la société dominante du groupe et qu'elle disposait de représentants dans les organes de direction de toutes les sociétés du groupe et qu'elle exerce à travers eux dans les faits un pouvoir de décision et de direction ; que les société mère et la société Grand Casino de [...] étaient liées par une convention de prestation de services du 3 février 1998 qui prévoyait l'intervention de la société mère à la demande de la filiale et moyennement une rémunération, dans les prestations de services de marketing, financiers, assistance technique, services de formation du personnel et d'aide au recrutement, services administratifs et de secrétariat général, services de gestion financière, services d'assistance comptable et services de centrale d'achat ou de référencement ; que cette convention a été complétée par un avenant du 31 octobre 2002 disposant que les prestations fournies par la société mère peuvent couvrir l'ensemble des métiers de la filiale et particulièrement les métiers d'assistance et de conseil en matière de stratégie de développement, marketing et commerciale, de communication et d'image de marque, dans la politique architecturale et décorative et dans la gestion de l'image des sites et définition des modalités d'utilisation du nom, de l'image et du logo associée à « DD... G... », dans la mise en oeuvre d'actions destinées à promouvoir et développer dans des conditions économiques compétitives l'exercice de l'activité, en matière financière, fiscale, administrative et comptable et notamment pour la mise en place des procédures budgétaires pour le suivi et l'analyse des reporting, pour l'élaboration des tableaux de bord et des outils de contrôle, pour l'audit des comptes, pour la mise en place des outils adéquat, pour une aide à l'élaboration et à la mise en place de procédures internes et au suivi des interventions conduites par les prestataires extérieurs tels que les experts-comptables ainsi qu'une aide dans le cadre de la délégation de service public liée à l'activité casinotière (procédure d'appel d'offre et d'autorisation d'exploitation des jeux ; suivi des relations avec les collectivités locales ; suivi des contrôles des ministères de tutelle), une assistance en matière informatique couvrant la politique d'implantation des matériels et des systèmes d'information et le pilotage des choix et des mises en place des produits informatiques, une assistance et un conseil en matière juridique et de gestion de ressources humaines, couvrant notamment les procédures de recrutement, de gestion de la mobilité, conseils en matière de droit du travail et de droit social, suivi des contrôles des organismes et administrations, assistance dans le cadre des contentieux, et veille juridique, de sorte que l'autonomie de la filiale Grand Casino de [...], bien que seule détentrice de la délégation de service public et seule autorisée à exploiter juridiquement le casino et notamment à engager, rémunérer et licencier les personnes qui y sont employées à un titre quelconque dans les salles de jeux, n'était qu'apparente, l'intervention effective de la société DD... G... auprès de sa filiale couvrant la quasi-totalité de ses activités de management et allant au delà de la volonté d'harmoniser les pratiques commerciales et de gestion administrative des filiales du groupe ; que cette gestion de fait conduite par la société DD... G... dans le domaine comptable, économique ou commercial et social et la privation de toute autonomie de la société Grand Casino de [...] est corroborée par différentes pièces dont un procès-verbal du comité d'entreprise de la société Grand Casino de [...] du 29 octobre 2009 actant que la réponse à apporter à une question portant sur l'entretien des tenues de travail du personnel et le versement d'une prime de salissure était soumise au siège du groupe, démontrant ainsi une absence de liberté dans la gestion du personnel, que le directeur général de la société Grand Casino de [...] devait soumettre son budget à la société mère et rendre compte régulièrement de sa gestion et appliquer les choix stratégiques de la société mère en matière de politique commerciale et financière et de gestion administrative, comptable et sociale, la filiale étant totalement dépendante sur le plan décisionnel et financier de la société mère DD... G... ; que celle-ci a permis, par son soutien financier anormalement élevé par rapport aux capacités de remboursement de la filiale, la poursuite de l'activité pendant des années et est intervenue dans la procédure de cessation d'activité et que le directeur général de la société Grand Casino de [...] devait soumettre son budget à la société mère et rendre compte régulièrement de sa gestion et appliquer les choix stratégiques de la société mère en matière de politique commerciale et financière et de gestion administrative, comptable et sociale, la filiale étant totalement dépendante sur le plan décisionnel et financier de la société mère DD... G... , celle-ci ayant permis, par son soutien financier anormalement élevé par rapport aux capacités de remboursement de la filiale, la poursuite de l'activité pendant des années et étant intervenue dans la procédure de cessation d'activité de la filiale ;
Attendu cependant que, hors état de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le fait que les dirigeants de la filiale proviennent du groupe et soient en étroite collaboration avec la société dominante, que celle-ci ait apporté à sa filiale un important soutien financier et que pour le fonctionnement de la filiale aient été signées avec la société dominante une convention de trésorerie ainsi qu'une convention générale d'assistance moyennant rémunération, ne pouvaient suffire à caractériser une situation de coemploi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen qui concerne M. Z... :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la société DD... G... a la qualité de coemployeur et la condamne solidairement à payer avec la société Grand Casino de [...] les sommes allouées aux salariés au titre de leur licenciement et à rembourser les sommes versées au titre des allocations chômage, les arrêts rendus le 19 février 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne Mme Y..., MM. Z... et A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société DD... G... , demanderesse aux pourvois n° S 15-16.865, T 15-16.866 et U 15-16.867
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR dit que la société Grand casino de [...] et la société DD... G... étaient co-employeurs de Mme Y..., de M. Z... et M. A..., et en conséquence d'AVOIR dit que les licenciements de Mme Y... et de M. A... étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse, condamné solidairement la société Grand casino de [...], représentée par son mandataire liquidateur, et la société DD... G... à leur payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR dit que le licenciement de M. Z... était nul et dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné solidairement la société Grand casino de [...], représentée par son mandataire liquidateur, et la société DD... G... à payer à M. Z... des dommages et intérêts pour licenciement nul et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR ordonné le remboursement solidairement par la société DD... G... et la société Grand casino de [...] représentée par son mandataire liquidateur au Pôle emploi PACA des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage, et d'AVOIR condamné la société DD... G... aux dépens de première instance et d'appel et à payer à chaque salarié une somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE Sur le co-emploi : Il y a lieu de constater, en premier lieu, que si [le salarié] semble entretenir, dans ses conclusions, une confusion entre le DD... G... et la SA DD... G... ainsi que relevé par cette dernière, ses demandes notamment quant à un co-emploi, sont bien dirigées contre le DD... G... et il demande expressément que soit retenue une situation de co-emploi entre les sociétés DD... G... et Grand casino de [...] (p 6 de ses conclusions dans II-Discussion juridique), même si l'appelant, dans son dispositif, mentionne par erreur le DD... G... et non le DD... G... . [Le salarié] soutient que la SAS Grand casino de [...] était une entité fictive, que son activité économique était entièrement sous la dépendance du DD... G... , qui dictait à la SAS Grand casino de [...] ses choix stratégiques en matière de politique économique, financière, commerciale, de gestion administrative et comptable et de gestion du personnel. Il fait valoir que les éléments suivants permettent de justifier du co-emploi de la SA DD... G... et de la SAS Grand casino de [...] :
- en matière de politique économique, financière et commerciale, c'est la Direction du DD... G... qui définit les règles applicables par les directions de ses sociétés et notamment par celle de la SAS Grand casino de [...],
- la politique de marketing est identique dans l'ensemble des casinos du DD... G... : enseigne commerciale, publicité, sigle G... sur l'ensemble du matériel des casinos, politique d'accueil des clients, carte payeur plus du DD... G... valable dans tous ses casinos ayant nécessité une formation du personnel, dépliants de tous les casinos du DD... G... aux entrées ; les tournois de poker organisés au sein des casinos et notamment de la SAS Grand casino de [...] le sont par un responsable du DD... G... spécialisé dans ce domaine, Monsieur H... ;
- le DD... G... impose ses prestataires de service extérieurs et fournisseurs qu'il choisit à l'ensemble de ses casinos et notamment à la SAS Grand casino de [...] ;
- en matière de financement notamment des travaux (changement de moquettes, travaux de peinture, modification du parc des machines à sous'), la direction de la SAS Grand casino de [...] comme celle de tous les autres casinos, devait chaque fois obtenir l'autorisation du DD... G... ;
- le DD... G... a mis en place une politique de permutabilité du personnel : les quatre directeurs de la SAS Grand casino de [...] ont été nommés par le DD... G... et provenaient d'autres Casinos du DD... ; les directeurs et directeurs adjoints des machines à sous étaient d'anciens salariés du Casino de Juan-les-Pins appartenant au DD... G... ; lors du congé maternité de Madame I..., directrice du Casino, celle-ci a été remplacée par un directeur venant du Casino de Juan-les-Pins ; la plupart des casinos étant en sous-effectif, en cas d'absence, il est recouru à du personnel d'un autre casino pour les remplacements et notamment des casinos de Juan-les-Pins et de Nice pour celui de [...] ;
- la paie de la SAS Grand casino de [...] était assurée par le service paie du Casino Palm Beach du DD... G... et le DD... G... apparaît sur le fond des fiches de paie ;
- de même, le service comptable de la SAS Grand casino de [...] travaillait en étroite collaboration avec le comptable et la Direction du DD... qui devaient tout valider ; pareillement le service comptable de la SAS Grand casino de [...] était suivi pour l'aspect informatique par Appolonia comme l'ensemble du DD... G... ;
- la formation des membres du comité de direction de la SAS Grand casino de [...] était également assurée au niveau du DD... G... ; il en était de même pour le service comptable ;
- lors de la reprise de la SAS Grand casino de [...] par le DD... G... , l'adhésion à la mutuelle du DD... a été imposée à l'ensemble des salariés de la SAS Grand casino de [...] ;
- dans le cadre des relations de la Direction de la SAS Grand casino de [...] avec ses institutions représentatives du personnel, tous les documents officiels mentionnaient l'appartenance de celle-ci au DD... G... .
A ces éléments, Maître Georges-André B... ajoute qu'interpellé sur l'immixtion avérée de la société holding auprès de sa filiale, il a saisi par voie de requête Monsieur le Juge Commissaire en date du 19 octobre 2010 pour voir examiner par un expert les relations économiques et financières liant la SAS Grand casino de [...] aux sociétés du groupe G..., que le rapport définitif de l'expert judiciaire, Monsieur J..., a été rendu le 16 octobre 2012, qu'aux termes de ce rapport, il apparaît indéniable que préexistait une situation de co-emploi entre la SAS Grand casino de [...] et la SA DD... G... en l'état de l'immixtion de la société holding, la SA DD... G... , tant dans l'administration que dans la gestion de la SAS Grand casino de [...] et compte tenu qu'il y a entre les deux sociétés une confusion d'intérêts, une confusion d'activité et une confusion de direction.
Le mandataire liquidateur fait valoir que :
- l'immixtion de la société mère la SA DD... G... au sein de la gestion de la SAS Grand casino de [...] est parfaitement caractérisée : la SAS Grand casino de [...] est une société de façade sans réelle personnalité morale ; elle est totalement dépendante sur le plan décisionnel mais également financier des décisions du DD... G... ; les conditions de ce management exclusivement accompli par la société holding sont confortées par la présence de dirigeants communs au sein de la SAS Grand casino de [...] et de la SA DD... G... , par l'existence de la convention de prestations de services liant les deux entités et par les stipulations contractuelles de la convention de gestion centralisée de trésorerie liant la SAS Grand casino de [...] à la SA DD... G... ;
- l'intérêt entre les deux sociétés est parfaitement identique et ce, en l'état des différentes conventions régularisées entre les deux entités mais surtout en l'état de la mise en place de la convention de trésorerie ;
- en date du 3 février 1998, la SAS Grand casino de [...] a conclu avec sa société holding une convention de prestations de services, puis par avenant du 31 octobre 2002, l'objet de la convention de prestation de services a été étendu ; les services visés par la convention de prestations couvrent la quasi-totalité de l'activité la SAS Grand casino de [...], laquelle ne disposait d'aucune autonomie ;
- une direction de fait était indiscutablement exercée au sein de la SAS Grand casino de [...] par la SA DD... G... du fait de la présence de dirigeants communs entre la société mère et sa filiale : il y a une manifeste confusion de direction.
La SA DD... G... , qui soutient que la qualité de co-employeur ne saurait lui être reconnue, réplique que :
- si la paie de la SAS Grand casino de [...] était réalisée non par la société mère mais par le service paie du Casino [...] de Cannes en vertu d'une convention de prestation de services licite et régulière, la fourniture des données nécessaires à l'établissement des fiches de paie était intégralement de la responsabilité des responsables de la SAS Grand casino de [...] en charge de la paie dans l'établissement, que le fait pour un salarié d'avoir été successivement embauché au sein de différentes filiales du groupe n'est pas de nature à établir la qualité de co-employeur de la société mère, que les mutations au sein du groupe n'existent pas, le salarié souhaitant intégrer une autre filiale devant démissionner avant un éventuel recrutement, que la SA DD... G... n'intervenait jamais en matière de gestion des ressources humaines, qu'elle ne s'occupait ni du recrutement, ni de la gestion ou du congédiement des salariés de la SAS Grand casino de [...], que la SA DD... G... n'a joué aucun rôle dans la mise en place d'une complémentaire santé obligatoire au sein de la SAS Grand casino de [...] tel que cela ressort des procès-verbaux des institutions représentatives du personnel de cette société qui ont été consultées sur ce point et ont opté quant au choix de l'organisme ;
- la démarche marketing d'un groupe n'est pas de nature à caractériser la subordination collective des salariés à l'égard de la société mère, que l'harmonisation des systèmes de gestion administrative des filiales encouragée sans être imposée par la société mère répond à une volonté classique de cohérence des pratiques au sein d'un groupe mais n'a pas pour effet de priver la société-fille de ses prérogatives, que la SAS Grand casino de [...] était maître des travaux à accomplir, des produits à acheter et du règlement des factures, que de simples recommandations et avis de la société mère, à supposer qu'ils soient avérés, ne permettent pas d'en déduire une situation de co-emploi ;
- [le salarié] n'apporte pas le moindre élément susceptible de caractériser une unité de direction sous la conduite de la société dominante ou des choix stratégiques et de gestion décidés par la société mère, que si la société mère apporte son expertise dans un certain nombre de domaines (juridique et comptable notamment), chaque filiale bénéficie cependant d'une autonomie totale lui permettant de faire ses propres choix stratégiques, que la SA DD... G... n'a jamais imposé le recours aux fournisseurs référencés, que la SAS Grand casino de [...] n'a jamais été privée de son indépendance, de son pouvoir managérial ou de ses prérogatives ;
- la SA DD... G... n'est d'ailleurs pas un exploitant autorisé de casinos et ne peut être juridiquement l'employeur [du salarié], employé de jeux, qui ne pouvait être engagé et licencié que par le directeur responsable du Casino, que la SA DD... G... n'est pas titulaire de la convention de délégation de service public qui lui aurait permis d'exercer une autorité sur les employés des salles de jeux ;
- l'expert judiciaire a été dans l'impossibilité de relever la direction de fait qu'aurait exercée la SA DD... G... sur la SAS Grand casino de [...] ;
- l'identité de dirigeants n'existait pas, que Messieurs Isidore et Patrick G... étaient uniquement administrateurs et n'exerçaient en aucune façon le moindre pouvoir de direction opérationnelle sur la SAS Grand casino de [...].
Il est constant qu'une société faisant partie d'un groupe peut avoir la qualité de co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre s'il existe entre elles une confusion d'intérêts, d'activité et de direction se manifestant notamment par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière. La SAS Grand casino de [...] a pour activité l'exploitation du casino de [...] et la société mère, la SA DD... G... , a pour activité « la gestion administrative, financière et comptable de toutes les sociétés constituées ou à constituer notamment dans le secteur des loisirs, de l'hôtellerie, des jeux, la prise d'intérêts sous quelque forme que ce soit dans ces sociétés, l'assistance de ces sociétés par la fourniture de services en vue de favoriser leur développement - achat vente de tous titres sur marchés français ou étrangers - achat et vente de biens mobiliers et immobiliers » (selon extrait Kbis), précision étant apportée dans le rapport annuel 2009 du DD... G... versé par le salarié que « l'activité des casinos représente l'essentiel de l'activité du DD... » (p 31). La société DD... G... n'exploite pas directement d'activités opérationnelles et « assume une fonction de direction de l'ensemble du DD... en faisant bénéficier ses filiales de ses connaissances, ressources et compétences, notamment en terme de personnel et de moyens techniques. Elle fournit à ses filiales un ensemble de prestations définies dans le cadre d'une convention de prestations de services dans le domaine de la stratégie, du marketing, de la communication, du commercial, de l'administratif, du juridique, du financier et de l'informatique » (p 39 du rapport annuel 2009 du DD... G... ). Au regard de l'objet social de la SA DD... G... , il existe entre elle et sa filiale, la SAS Grand casino de [...], une confusion d'activité et d'intérêts. Cela n'est nullement discuté par la SA DD... G... , qui conteste avant tout exercer une direction sur sa filiale. La SA DD... G... relève tout d'abord qu'il ne lui était pas permis d'exercer une quelconque autorité sur les employés des salles de jeux qui ne pouvaient être engagés et licenciés que par le directeur responsable du Casino, selon la réglementation des jeux. Toutefois, l'autonomie de la SAS Grand casino de [...], seule détentrice de la convention de délégation de service public et seule autorisée juridiquement à exploiter le Casino de [...] et à engager, rémunérer et licencier toutes les personnes employées à un titre quelconque dans les salles de jeux, n'était qu'apparente. En effet, il convient d'observer que deux administrateurs de la SAS Grand casino de [...] exerçaient des fonctions de direction de la SA DD... G... :
- Monsieur Isidore G... (fondateur du groupe G...), administrateur de la SAS Grand casino de [...], assurait les fonctions de Président du Conseil de surveillance de la SA DD... G... ,
- Monsieur Patrick G... (fils de Isidore G...), administrateur de la SAS Grand casino de [...], remplissait les fonctions de Président du Directoire de la SA DD... G... .
Par ailleurs, la SA DD... G... en sa qualité d'administrateur de la SAS Grand casino de [...], était représentée par Monsieur Ari Pierre K... (neveu de Isidore G...), membre du Directoire.
[Informations mentionnées dans le rapport de M. J..., expert judiciaire, p 25, et rapport annuel 2009 du DD... G... , p 63 et suivantes sur les organes d'administration, de direction et de surveillance et direction générale].
L'allégation de la SA DD... G... selon laquelle les administrateurs de la SAS Grand casino de [...] n'exerçaient pas de pouvoir de direction opérationnelle au sein de la société est contredite par les termes du préambule de la convention d'omnium de trésorerie du 3 février 1998 (ayant pour but de mettre en commun la trésorerie des deux sociétés sous forme de prêts, crédits, avances ou découverts), selon lesquels : « Les filiales reconnaissent que DD... G... S.A. est la société dominante du groupe et à ce titre, elle a des représentants dans les organes de direction de toutes les sociétés du groupe et exerce à travers eux dans les faits, un pouvoir de décision et de direction. La SA DD... G... détient 99,90 % du capital et droits de vote de la SA G.C.B. (Grand casino de [...]) » (p 27 du rapport de l'expert M. J... déposé le 16.10.2012, dans lequel il est par ailleurs précisé, p12, que la SA DD... G... détient actuellement la totalité des 10.000 actions de la SAS Grand casino de [...]). Cette présence systématique de représentants de la SA DD... G... dans les organes de direction des sociétés du groupe ressort également du rapport annuel du DD... G... 2009 ; Sont également Présidents ou administrateurs de sociétés filiales les dirigeants et membres du directoire et du conseil de surveillance suivants : M. Isidore G..., Président du conseil de surveillance (Vice-Président du conseil de surveillance selon extrait Kbis du 23.11.2014), M. Marcel G... (frère de Isidore G...) Vice-président du conseil de surveillance (en 2009), M. Maurice K... (beau-frère de Isidore G...) membre du conseil de surveillance (en 2009), M. Patrick G... (fils de Isidore G...) Président du directoire (Président du conseil de surveillance selon extrait Kbis de 2014), M. Ari K... (fils de Maurice K... et neveu de Isidore G...) membre du directoire, M. Richard G... (neveu de Isidore G...) membre du directoire (démissionnaire), M. Fabrice L... Directeur général et membre du directoire (Président du Directoire selon extrait Kbis de 2014) et Mme Katy M... (G...) (nièce de Isidore G...) membre du directoire. La SA DD... G... verse différents contrats de travail d'employés de ses différentes filiales (croupier, barman, agent de sécurité/voiturier, contrôleur/agent de sécurité, assistant maître d'hôtel, serveur-bar/restaurant, chef de rang, demi-chef de partie cuisine, technicien assistant de clientèle, caissière machine à sous, employé de jeux, changeur-traiteur de monnaie, collaborateur comptable) aux fins de démontrer que chaque filiale est en charge du recrutement des salariés et de l'élaboration des contrats de travail. Elle ne verse cependant aucun contrat concernant les directeurs responsables (ou directeur général délégué) des casinos, certes juridiquement indépendants au regard de la réglementation des jeux, mais nommés par le conseil d'administration de la filiale et, en ce qui concerne la SAS Grand casino de [...], sous la responsabilité notamment de deux administrateurs dirigeants de la SA DD... G... qui, aux termes de la convention d'omnium de trésorerie, exercent pour le compte de la société mère un pouvoir de fait de décision et de direction sur la filiale. Le constat d'une gestion de fait de la SA DD... G... et de la privation de toute autonomie de la SAS Grand casino de [...] est conforté par l'existence d'une convention de prestations de services en date du 3 février 1998 conclue entre la SA DD... G... , représentée par Monsieur Hubert N... Président du Directoire, et la SAS Grand casino de [...] représentée par Monsieur Patrick G... en qualité de Président-Directeur Général, dans laquelle il est rappelé que « DD... G... assume une fonction de direction de l'ensemble du groupe, et l'ensemble de ses moyens sont consacrés à l'animation et à la direction des sociétés filiales » et que « DD... G... fournira à la société filiale et à sa demande, les services suivants notamment :
- services de marketing,
- services financiers,
- services d'assistance technique,
- services de formation du personnel,
- service d'aide au recrutement,
- services administratifs et de secrétariat général,
- services de gestion financière,
- services d'assistance comptable,
- services de centrale d'achat ou de référencement », en contrepartie d'une rémunération forfaitaire versée à la SA DD... G... par la SAS Grand casino de [...] et proportionnelle au chiffre d'affaires réalisé par la filiale.
L'avenant à cette convention de prestations de services, signé le 31 octobre 2002 avec effet rétroactif au 1er novembre 2001, conclu entre la SA DD... G... toujours représentée par Monsieur Hubert N... et la SAS Grand casino de [...] toujours représentée par Monsieur Patrick G... en sa qualité de Président du Conseil d'Administration, prévoit que « les services fournis par le Prestataire au Bénéficiaire peuvent couvrir l'ensemble des métiers de l'entreprise et plus particulièrement les domaines suivants :
(i) Assistance et conseil en matière de stratégie de développement, notamment pour toutes les décisions importantes
(ii) Assistance et conseil dans le cadre de la délégation de service public (Note : domaine spécifiquement lié à l'activité casinotière) : procédure d'appel d'offre et d'autorisation d'exploitation des jeux ; suivi des relations avec les collectivités locales ; suivi des contrôles des Ministères de tutelle ;
(iii) Assistance et conseil dans la politique architecturale et décorative'
(iv) Assistance et conseil en matière de communication, et notamment d'image de marque'
(v) Assistance dans la gestion de l'image des sites et définition des modalités d'utilisation du nom de l'image associée à « DD... G... », du logo ;
(vi) Assistance et conseil en matière de marketing et commerciale'
(vii) Aide à l'élaboration, à la mise en place et au suivi de procédures internes, notamment liées aux obligations réglementaires (Note : Domaine spécifiquement lié à l'activité casinotière) ; structuration des outils de pilotage et d'analyse ;
(viii) Assistance en matière de mise en oeuvre d'actions destinées à promouvoir et développer dans des conditions économiques compétitives d'exercice de l'activité ;
(ix) Assistance et conseil en matière financière : conseil en financement de projets, études des besoins et moyens de financement, ingénierie financière sur les projets d'investissements, suivi des relations avec les établissements bancaires et négociations relatives aux services courants, assistance en gestion de trésorerie et en régulation quotidienne des flux, conseils en gestion des actifs financiers ;
(x) Assistance et conseil en matière administrative et comptable et notamment pour la mise en place des procédures budgétaires (budget, reporting, découpage analytique, etc.), pour le suivi et l'analyse des reporting, pour l'élaboration des tableaux de bord et des outils de contrôle, pour l'audit des comptes, pour la mise en place des outils adéquats, etc. ; aide à l'élaboration et à la mise en place de procédures internes ; suivi des interventions conduites par les prestataires extérieurs (experts-comptables') ;
(xi) Assistance et conseil en matière fiscale'
(xii) Assistance en matière de gestion de ressources humaines et conseil en matière de politique de ressources humaines : procédures de recrutement, gestion de la mobilité, conseils et assistance en matière de droit du travail et de droit social, suivi des contrôles des organismes et administrations, assistance dans le cadre des contentieux, veille juridique ;
(xiii) Assistance juridique'
(xiv) Assistance et conseil en matière informatique : politique d'implantation des matériels et des systèmes d'information, pilotage des choix et des mises en place produits ».
A noter que l'expert précise que, malgré ses demandes, il ne lui a pas été communiqué les procès-verbaux des conseils d'administration ayant autorisé la convention de prestations de services et par la suite son avenant, pas plus que les procès-verbaux des assemblées générales les ayant ratifiés, seuls étant produits la convention et l'avenant signés par Monsieur Patrick G... en qualité de Président du Conseil d'Administration de la société Grand casino de [...] alors société anonyme. Au vu de l'étendue de l'objet de la convention de prestation de services et de son avenant, il y a lieu de relever que les services rendus par la SA DD... G... couvrent la quasi-totalité des missions de management de la SAS Grand casino de [...] ; cela va au-delà de la volonté d'harmoniser les pratiques commerciales et de gestion administrative des filiales du groupe. La SA DD... G... laisse entendre que l'ensemble des prestations aurait pu ne pas être accompli puisque la filiale restait maître de la décision de solliciter ses services. Certes, l'expert indique n'avoir pu vérifier la réalisation desdites prestations et leur étendue, mais ceci en l'absence de production d'éléments versés tant par la SAS Grand casino de [...] représentée par son mandataire liquidateur que par la SA DD... G... . La SA DD... G... ne verse pas plus, dans le cadre de la présente instance, d'élément permettant de connaître l'étendue des prestations qu'elle a réalisées pour le compte de la SAS Grand casino de [...]. Dans ces conditions, la Cour se réfère au constat de l'expert judiciaire, Monsieur J..., selon lequel les prestations ont été effectivement facturées par la SA DD... G... et en déduit qu'elles ont été entièrement réalisées au profit de la SAS Grand casino de [...]. La SA DD... G... prétend par ailleurs que la fourniture des services visés ci-dessus n'était pas imposée à sa filiale, laquelle restait maître des travaux à accomplir, des produits à acheter et des prestataires à choisir. Elle produit des mails relatifs au référencement de fournisseurs [contrats avec les sociétés Guilbert, Prodirest, Davigel, Pomona, O... P... (photographe) et Tout Pour Le Jeu (dés) - pièces 21, 42 et 43], en soulignant que les filiales restaient libres de leurs choix. Cependant, il résulte des courriels ainsi produits que la SA DD... G... précise uniquement pour le photographe que les Casinos et Hôtels n'ont « aucune obligation de passer par Mr O... P... ». Pour le partenariat avec Guilbert, le courriel du 14 avril 2009 adressé aux directeurs des casinos et hôtels précise les conditions du référencement et leur « demande de respecter ce référencement dans l'intérêt général du DD... G... . Il est donc important de sensibiliser et orienter les économes et le personnel concerné à l'utilisation des produits référencés », la seule exception concernant les cartouches d'encre imprimante et, si les établissements les trouvent à un prix moindre, il leur est demandé d'informer le Directeur de la Restauration et des Achats de la SA DD... G... . Pour le partenariat avec Davigel et Pomona, le courriel du 3 janvier 2006 adressé aux directeurs précise les conditions du référencement et conclut : « je compte sur les efforts de toutes vos équipes pour développer le partenariat avec Davigel et Pomona ». [Le salarié] verse d'ailleurs une attestation du 11 novembre 2012 de Monsieur Fouzi Q..., ancien responsable de la Restauration et Banquets de la SAS Grand casino de [...], qui témoigne avoir « reçu, sur la période allant de 2004 à 2009 des ordres concernant les référencement de produits, de boissons, nourriture et consommables d'entretien et des ratios DD... à respecter pour les prix de vente hors taxes des plats et boissons vendus au sein de nos bars et restaurants de la part du Directeur Restauration et Achats DD... dont le nom est Monsieur Tony FF... ». La SA DD... G... conteste la crédibilité de ce dernier témoignage, qui est malgré tout corroboré par les courriels examinés ci-dessus transmettant des référencements en demandant aux filiales de les respecter « dans l'intérêt général du DD... G... ». La SA DD... G... produit diverses attestations de directeurs de filiales (dont M. Laurent R..., ancien directeur général délégué de la SAS Grand casino de [...]) qui témoignent tous bénéficier d'une entière autonomie quant à la gestion opérationnelle, administrative et sociale de leurs établissements. Cependant, ces directeurs de filiales n'apportent aucune précision sur leurs rapports avec les membres de leur conseil d'administration qui sont également pour certains dirigeants ou membres du directoire ou du conseil de surveillance de la SA DD... G... et à travers lesquels la SA DD... G... exerce « dans les faits, un pouvoir de décision et de direction » aux termes de la convention d'omnium de trésorerie du 3 février 1998. Madame Katy M... (G...), directeur responsable du Casino du Touquet, n'indique pas dans son témoignage du 20 janvier 2014 qu'elle est également membre du directoire de la SA DD... G... . Enfin la SA DD... G... verse des attestations de ses salariés : Madame Marie-Line S... et Messieurs Christophe T..., Julien U..., Jean-Marc V..., Franck W..., Alain XX..., Olivier YY... et Benjamin ZZ..., respectivement assistante juridique, responsable comptable, assistant achats, directeur informatique, responsable Système Paie, directeur financier, directeur financier opérationnel et juriste, qui témoignent que leur rôle au sein de la SA DD... G... se limite à une assistance et conseil, dans leur domaine de compétences, apportée aux filiales et qu' « il n'est en aucun cas de leur donner des ordres » (attestation de M. T...), celles-ci restant « libres de leur gestion et responsables des conséquences de leur choix » (attestation de M. V...). Pourtant, il ressort d'un procès-verbal du comité d'entreprise de la SAS Grand casino de [...] du 29 octobre 2009 que, suite à une question posée par les délégués du personnel quant à l'entretien des tenues de travail ou le versement d'une prime mensuelle de salissure, Monsieur R... directeur responsable de la filiale répond que « ce problème (avait) été transmis au siège du groupe G... et la réponse (serait) donnée à la prochaine réunion du 17 novembre », démontrant ainsi qu'il n'était pas libre de sa gestion du personnel. De même, les témoignages versés par la SA DD... G... sont contredits par celui du 19 juillet 2011 de Madame Véronique AA..., comptable de la SAS Grand casino de [...] depuis le 11 décembre 2000, qui atteste qu'elle a « travaillé en collaboration avec la chef comptable Karine F.... (Elle) était en relation téléphonique avec le comptable Jean-Luc BB... à Paris. Celui-ci s'occupant de tout ce qui concernait les intégrations bancaires. La chef comptable était en relation avec Paris, Mr Fabrice L... et d'autres pour les reportings, budgets, etc. (ils ont) changé de logiciel en cours d'année 2010 et (ont) suivi une formation à Aix dans les locaux du DD... G... où tous les comptables du Sud étaient réunis. (Ils étaient) suivis pour ce qui concernait l'informatique par Appolonia qui est situé à Antibes et qui s'occupait de tout le groupe. (Ils ne pouvaient) rien faire sans l'accord de Paris (changement et création de certains comptes ». Les procédures de contrôle interne explicitées dans le rapport annuel 2009 du groupe G... démontrent que le contrôle interne de la SA DD... G... s'exerce, sous la responsabilité de ses directions opérationnelles et fonctionnelles à tous les niveaux de l'organisation. Ainsi, il est précisé que la direction comptable de la SA DD... G... organise et planifie l'ensemble des travaux comptables grâce à l'utilisation de normes et procédures comptables DD..., à un échange d'informations et une communication régulière assurés avec les responsables des filiales dénommées « unités d'exploitation » ou « sociétés d'exploitation », dont les résultats sont analysés et contrôlés mensuellement (pages 83 à 88 du rapport annuel 2009). D'ailleurs, le directeur général de la SAS Grand casino de [...] devait soumettre son budget à la société mère (p 29 du rapport de l'expert M. J...). La confusion de direction entre les deux sociétés se révèle également par l'anormalité des avances financières de la SA DD... G... à sa filiale depuis 2006, disproportionnées par rapport aux capacités de remboursement de la SAS Grand casino de [...] (celle-ci n'a même pas pu payer les intérêts générés par ces avances), alors même que la convention d'omnium de trésorerie prévoyait que les concours financiers intervenant à l'intérieur du groupe ne devaient pas outrepasser les facultés financières ou la faculté de remboursement de la filiale bénéficiaire des avances. Fin octobre 2009, le compte courant de la SA DD... G... au sein de la SAS Grand casino de [...] s'élevait à la somme de 6904 Keuro et ce, malgré un abandon de créance consenti en janvier 2000 de 2606 Keuro (ramené à 609 Keuro fin octobre 2009) [pages 18 et suivantes du rapport d'expert]. La SAS Grand casino de [...], dont l'activité était structurellement déficitaire depuis plusieurs années, a donc poursuivi son activité du fait de la décision de la SA DD... G... et de son soutien financier. La société mère, contrairement à ce qu'elle allègue, est intervenue lors de la procédure de cessation d'activité de sa filiale puisque, selon l'attestation du 17 août 2011 du Maire de la commune de [...]-sur-Mer, Monsieur Roger CC..., « les représentants du groupe G..., en la personne de Monsieur L..., son Directeur Général, étaient présents lors des différents entretiens qui ont eu lieu en Mairie de [...]-sur-Mer sur la période précédant la liquidation judiciaire de leur filiale la société Grand Casino de [...] », étant précisé que ces entretiens avaient pour objet de solliciter la commune sur une demande de résiliation anticipée de la délégation de service public avec mise en place d'un nouvel appel d'offres par anticipation, tel que rapporté dans le jugement du 8 octobre 2010 du tribunal de commerce de Nice prononçant la liquidation judiciaire de la SAS Grand casino de [...]. En conséquence, malgré l'apparente autonomie de la SAS Grand casino de [...], la SA DD... G... exerçait bien un pouvoir de décision et de direction à travers ses représentants dans le conseil d'administration de sa filiale et à travers le directeur responsable nommé à la tête de la filiale et qui devait rendre compte régulièrement de sa gestion et appliquer les choix stratégiques de la société mère en matière de politique commerciale et financière et de gestion administrative, comptable et sociale, la filiale étant totalement dépendante sur le plan décisionnel mais également financier de la SA DD... G... . Au regard de la confusion d'intérêts, d'activité et de direction entre les deux sociétés, il s'ensuit que la SA DD... G... avait la qualité d'employeur à l'égard du personnel de la SAS Grand casino de [...] ;
1. ALORS QUE hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand ses constatations, révélant seulement la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, ne pouvaient suffire à caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre les deux sociétés, se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de la filiale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2. ALORS en outre QUE la cour d'appel a constaté que la société Grand casino de [...] avait pour activité l'exploitation d'un casino tandis que la société DD... G... n'exploitait pas d'activités opérationnelles, assumant la direction opérationnelle du groupe G... et fournissant à ses filiales un ensemble de prestations ; qu'en affirmant qu'au regard de l'objet social de la société DD... G... , il existe entre elle et sa filiale la société Grand casino de [...] une confusion d'activité et d'intérêts, quand il résultait seulement de ses constatations que les activités des deux sociétés étaient complémentaires, mais aucunement confondues, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3. ALORS enfin QU'il incombe à celui qui invoque le co-emploi d'établir l'existence d'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en reprochant à la société DD... G... de ne pas produire les contrats de travail des directeurs responsables des casinos et de ne pas justifier de l'étendue des prestations effectivement réalisées par la société DD... G... pour la société Grand casino de [...] dans le cadre de la convention de prestation de services, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)IL EST FAIT GRIEF aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR condamné solidairement la société Grand casino de [...], représentée par son mandataire liquidateur, et la société DD... G... à payer à M. Z... la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté qu'aucun recours n'a été exercé à l'encontre de la décision du Ministre du Travail en date du 12 mai 2011 annulant la décision de l'inspecteur du travail et refusant l'autorisation de licenciement, en sorte que cette décision est définitive. Le salarié protégé dont l'annulation de la décision d'autorisation de licenciement est devenue définitive a droit, s'il ne demande pas sa réintégration, à une indemnité correspondant à la totalité du préjudice tant matériel que moral subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision qui remporte le droit à réintégration. Monsieur Pascal Z... réclame l'indemnisation de son préjudice matériel à hauteur de 28 225 € correspondant au montant de ses salaires du 8 novembre 2010 au 12 septembre 2011, date d'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision du Ministre du Travail en date du 12 mai 2011. Cependant, le salarié n'est pas fondé à cumuler l'indemnité au titre du licenciement nul avec les allocations de chômage qu'il a perçues durant la même période. Il ressort d'une attestation du 24 octobre 2011 du Pôle emploi que Monsieur Pascal Z... a perçu la somme de 27 011,42 € entre le 4 janvier 2011 et le 3 octobre 2011 (dernier versement correspondant au mois de septembre 2011, dont il convient de déduire 1507,32 € d'indemnités perçues sur la période du 13 au 30 septembre 2011). Il ressort par ailleurs d'une attestation du 21 octobre 2011 du Pôle emploi que Monsieur Pascal Z..., à la suite de son admission au bénéfice de l'allocation spécifique de reclassement par notification du 31 décembre 2010, a perçu au 30 septembre 2011, 326 allocations journalières, dont 20 allocations journalières antérieurement au mois de décembre 2010 (326 moins 306 allocations journalières versées de décembre 2010 à septembre 2011). Monsieur Pascal Z... a donc perçu un total d'indemnités de chômage de 27 154,30 € (20x 82,51 € + 27 011,42 € - 1507,32 €). Son préjudice matériel s'élève donc à 1070,70 € sur la période du 8 novembre 2010 au 12 septembre 2011 (28 225-27 154,3). Il n'y a pas lieu de prévoir le versement d'une indemnité de congés payés sur l'indemnité due au titre du licenciement nul eu égard au caractère indemnitaire de cette somme qui n'entre pas dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés. Monsieur Pascal Z... ne verse par ailleurs aucun élément sur son préjudice moral. La Cour accorde dans ces conditions au salarié la somme de 5 000 euro à titre d'indemnité pour licenciement nul en réparation de son entier préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision qui emporte le droit à réintégration ;
1. ALORS QUE le salarié dont l'autorisation de licenciement est annulée et qui ne demande pas sa réintégration a droit à une indemnité égale au montant des rémunérations qu'il aurait perçues entre la date de son licenciement et l'expiration du délai de deux mois à compter de la notification de la décision administrative, cette indemnité devant s'apprécier en tenant compte des sommes que celui-ci a pu percevoir pendant la période litigieuse au titre d'une activité professionnelle ou des allocations de chômage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que ce montant s'élevait à 1070,70 € ; qu'en accordant cependant à M. Z... une indemnité de 5 000 €, la cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du code du travail ;
2. ALORS en toute hypothèse QUE seul un préjudice certain est susceptible de réparation et il incombe au demandeur de justifier de son préjudice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le préjudice matériel subi s'élevait à 1070,70 € et que le salarié ne justifiait pas de son préjudice moral ; qu'en lui accordant cependant une indemnité de 5 000 €, la cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du code du travail.