LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 17 février 2015), qu'ayant souscrit le 17 mars 2011 une déclaration d'accident du travail concernant son salarié M. X... en émettant des réserves sur l'origine professionnelle de l'accident, la société Sarp Centre-Est a contesté devant une juridiction de sécurité sociale l'opposabilité de la décision de prise en charge rendue le 12 mai 2011, après enquête, par la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie (la caisse) ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'accueillir le recours de l'employeur, alors, selon le moyen, que les mesures d'instruction envisagées au § III de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale en cas de réserves motivées de l'employeur ¿ c'est-à-dire l'envoi de questionnaires ou l'organisation d'une enquête ¿ n'ont pas à être menées contradictoirement ; qu'il suffit pour que les droits de chacune des parties soient respectés qu'elles soient invitées, avant que la caisse ne prenne sa décision, à prendre connaissance et à présenter leurs observations notamment sur le questionnaire adressé à une seule des parties ou encore aux conclusions de l'enquête effectuée auprès des seules personnes que l'inspecteur assermenté a jugé opportun d'entendre ; qu'aussi en retenant, pour dire inopposable à l'employeur la décision de la caisse de reconnaître la nature professionnelle de l'accident du 31 janvier 2011, que l'inspectrice assermentée de la caisse n'avait pas mené une enquête contradictoire, faute d'avoir entendu un représentant de la société Sarp Centre-Est, la cour d'appel a violé les articles R. 441-11 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu, selon l'article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés ;
Et attendu que l'arrêt constate que la société Sarp Centre-Est n'a pas été contactée par l'inspectrice de la caisse pour recueillir ses observations, que ce soit de vive voix ou par questionnaire ;
Que de ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que la décision de prise en charge de l'accident du travail survenu le 31 janvier 2011 n'était pas opposable à la société Sarp Centre-Est ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie ; la condamne à payer à la société Sarp Centre-Est la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré inopposable à la société SARP Centre Est la décision de prise en charge de l'accident du travail du 31 janvier 2011 de Monsieur X... Stéphane prise par la caisse primaire d'assurance maladie de la SAVOIE.
AUX MOTIFS QU'« il résulte des dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale que la déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur et que, dans cette hypothèse, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procède à une enquête auprès des intéressés ; qu'en l'espèce il est constant que la SAS SARP CENTRE EST n'a aucunement été associée à l'enquête réalisée par la caisse primaire d'assurance maladie à la suite des réserves émises par la SAS SARP CENTRE EST sur la réalité de l'accident du travail déclaré ; que l'inspectrice assermentée chargée de l'instruction s'est bornée à recueillir les témoignages de Stéphane X... et de deux autre salariés et n'a pas contacté la direction de l'entreprise aux fins d'obtenir ses observations, que ce soit de vive voix ou par l'intermédiaire d'un questionnaire ; que la SAS SARP CENTRE EST est dès lors bien fondée à soutenir que l'enquête n'a pas été menée contradictoirement ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la société, il y a lieu, par confirmation, de déclarer la décision de prise en charge de l'accident de Stéphane X... du 31 janvier 2011 au titre de la législation professionnelle prise pas la caisse primaire d'assurance maladie inopposable à l'entreprise. »
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« En application de l'article R 441-1 1 du Code de la sécurité sociale, en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés.
Or, en l'espèce, alors que l'employeur avait formulé des réserves et qu'elle dit avoir elle-même estimé nécessaire de procéder à une enquête, la caisse n'a pris aucun contact avec l'employeur avant de prendre sa décision. Elle n'a donc pas respecté le caractère contradictoire de la procédure.
Elle ne peut pas se retrancher derrière le fait que l'employeur avait fait connaître sa position en émettant des réserves puisque les réserves de l'employeur sont justement un des cas où les textes lui font obligation d'envoyer un questionnaire à cet employeur où à procéder à une enquête auprès des parties.
En conséquence, et sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la qualification d'accident du travail, la décision de la caisse sera déclarée inopposable à la société SARP Centre Est. »
ALORS QUE les mesures d'instruction envisagées au § III de l'article R441-11 du code de la sécurité sociale en cas de réserves motivées de l'employeur ¿ c'est-à-dire l'envoi de questionnaires ou l'organisation d'une enquête ¿ n'ont pas à être menées contradictoirement ; qu'il suffit pour que les droits de chacune des parties soient respectés qu'elles soient invitées, avant que la caisse ne prenne sa décision, à prendre connaissance et à présenter leurs observations notamment sur le questionnaire adressé à une seule des parties ou encore aux conclusions de l'enquête effectuée auprès des seules personnes que l'inspecteur assermenté a jugé opportun d'entendre ; qu'aussi en retenant, pour dire inopposable à l'employeur la décision de la caisse de reconnaître la nature professionnelle de l'accident du 31 janvier 2011, que l'inspectrice assermentée de la caisse n'avait pas mené une enquête contradictoire, faute d'avoir entendu un représentant de la société SARP CENTRE EST, la cour d'appel a violé les articles R. 441-11 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale.