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31/12/2014 | FRANCE | N°14PA00342

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 décembre 2014, 14PA00342


Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2014, présentée pour la Fondation Jean et Lili Delaby, dont le siège est au 4 rue de la Paix à Lausanne, Suisse, par le Cabinet Ernst et Young société d'avocats ; la Fondation Jean et Lili Delaby demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206373 du 13 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 à 2010 ;

2°) de prononcer la décharge et la restitution de ce

s impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6...

Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2014, présentée pour la Fondation Jean et Lili Delaby, dont le siège est au 4 rue de la Paix à Lausanne, Suisse, par le Cabinet Ernst et Young société d'avocats ; la Fondation Jean et Lili Delaby demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206373 du 13 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 à 2010 ;

2°) de prononcer la décharge et la restitution de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée ;

Vu la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la Fondation Jean et Lili Delaby ;

1. Considérant que la Fondation Jean et Lili Delaby dont le siège social est en Suisse, a pour objet de soutenir les activités de la Croix Rouge Suisse, section vaudoise et de la Fondation Pro Senectute, qu'elle est propriétaire d'un immeuble situé 49 avenue de Wagram à Paris dans le 17ème arrondissement ; qu'elle relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à raison des revenus générés par la location de cet immeuble ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...). / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives et réglementaires dont elle fait application. / (...) " ; qu'aux termes de l'article

R. 741-7 du même code : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ;

3. Considérant que la minute du jugement attaqué, signée conformément aux dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, ne fait mention que du mémoire introductif d'instance mais pas du mémoire en défense de l'administration, ni du mémoire en réplique de la Fondation Jean et Lili Delaby ; que, toutefois, la mention de ces mémoires et leur analyse sont contenues dans un document qui figure dans le dossier transmis par le tribunal administratif à la Cour de céans ; que ce document, qui comporte les signatures prescrites par l'article R. 741-7, doit être regardé comme faisant partie de la minute ; qu'ainsi, la Fondation Jean et Lili Delaby n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué a été prononcé en méconnaissance des dispositions précitées du code de justice administrative ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;

5. Considérant qu'en précisant que la fondation requérante qui n'exerce qu' " un rôle d'intermédiaire au profit d'associations dont il n'est pas allégué qu'elles seraient d'utilité publique, ni qu'elles gèreraient directement les droits, biens et ressources de la requérante ne constitue pas une fondation pour exercer directement son oeuvre d'intérêt général " les premiers juges ont suffisamment motivé les raisons pour lesquelles la Fondation Jean et Lili Delaby ne constituait pas une fondation reconnue d'utilité publique au sens des dispositions de l'article 18 de la loi du 23 juillet 1987 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Fondation Jean et Lili Delaby n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :

Au regard de la loi fiscale française :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat : " La fondation est l'acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d'une oeuvre d'intérêt général et à but non lucratif " ; et qu'aux termes de l'article 20 de la même loi : " Seules les fondations reconnues d'utilité publique peuvent faire usage, dans leur intitulé, leurs statuts, contrats, documents ou publicité, de l'appellation de fondation. Toutefois, peut également être dénommée fondation l'affectation irrévocable, en vue de la réalisation d'une oeuvre d'intérêt général et à but non lucratif, de biens, droits ou ressources à une fondation reconnue d'utilité publique dont les statuts ont été approuvés à ce titre, dès lors que ces biens, droits ou ressources sont gérés directement par la fondation affectataire, et sans que soit créée à cette fin une personne morale distincte [...] " ; qu'aux termes de l'article 219 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années en litige : " I. Par dérogation aux dispositions de l'article 219, le taux de l'impôt sur les sociétés est fixé à 24 % en ce qui concerne les revenus visés au 5 de l'article 206, perçus par les établissements publics, associations et collectivités sans but lucratif [...] III. Les fondations reconnues d'utilité publique sont exonérées d'impôt sur les sociétés pour les revenus mentionnés au I " ; qu'aux termes l'article 206 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable: " [...] 1 bis. Toutefois, ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les syndicats régis par les articles L. 2131-1 à L. 2136-2 du code du travail, les fondations reconnues d'utilité publique [...]5. Sous réserve des exonérations prévues aux articles 1382 et 1394, les établissements publics, autres que les établissements scientifiques, d'enseignement et d'assistance, ainsi que les associations et collectivités non soumis à l'impôt sur les sociétés en vertu d'une autre disposition, à l'exception, d'une part, des fondations reconnues d'utilité publique et, d'autre part, des fonds de dotation dont les statuts ne prévoient pas la possibilité de consommer leur dotation en capital, sont assujettis [à l'impôt sur les sociétés] en raison : a. De la location des immeubles bâtis et non bâtis dont ils sont propriétaires, et de ceux auxquels ils ont vocation en qualité de membres de sociétés immobilières de copropriété visées à l'article 1655 ter [...] " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions du code général des impôts avec celles précitées de la loi du

23 juillet 1987 sur le développement du mécénat que sont exonérés d'impôt sur les sociétés les revenus patrimoniaux des seules fondations reconnues d'utilité publique et non de tous les organismes à but non lucratif ;

8. Considérant qu'il résulte notamment des stipulations de l'article IV des statuts de la fondation requérante que celle-ci a pour objet de soutenir financièrement les activités de la Croix Rouge Suisse, section vaudoise et de la Fondation Pro Senectute ; que si la Fondation Jean et Lili Delaby peut ainsi être regardée comme un organisme à but non lucratif, cette seule qualité, en dépit de sa reconnaissance de fondation d'utilité publique dans la Confédération Helvétique, ou, Suisse, ne lui permet pas en elle même de bénéficier de l'exonération prévue, par les dispositions précitées de l'article 219 bis III du code général des impôts ; qu'elle n'exerce qu'un rôle d'intermédiaire auprès d'organismes dont il n'est pas allégué qu'ils seraient des fondations reconnues d'utilité publique au sens et pour l'application des dispositions de l'article 219 bis III du code général des impôts, ni qu'ils géreraient directement les droits, biens et ressources de la Fondation Jean et Lili Delaby ; qu'il s'ensuit que la fondation requérante, qui n'établit pas être dans une situation semblable aux fondations reconnues d'utilité publique en France pour l'application des dispositions du III de l'article 219 bis du code général des impôts n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait du bénéficier de la décharge de l'impôt sur les sociétés à raison des revenus locatifs issus de l'immeuble dont elle est propriétaire à Paris ;

Au regard de la convention franco-suissse :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la convention fiscale franco-suisse du

9 septembre 1966 : " 1. Les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat contractant à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même situation [...] 2. Le terme " nationaux " désigne pour chaque Etat contractant : a) toutes les personnes physiques qui possèdent la nationalité de cet Etat ; b) toutes les personnes morales, sociétés de personnes et associations constituées conformément à la législation dudit Etat [...] " ;

10. Considérant d'une part, que les dispositions précitées de l'article 219 bis du code général des impôts n'opèrent aucune distinction entre fondations françaises et étrangères ; que, d'autre part, et ainsi qu'il a été dit au point 8, le Fondation Jean et Lili Delaby ne se trouve pas dans une situation semblable à celle d'une fondation reconnue d'utilité publique en France ; que, par suite la fondation requérante n'est pas fondée à se prévaloir de la clause de non discrimination prévue par les stipulations précitées ;

Au regard du Traité instituant la Communauté européenne :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne alors en vigueur devenu l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites (...) " ; qu'aux termes de l'article 58 du même traité, devenu l'article 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " L'article 56 ne porte pas atteinte au droit qu'ont les Etats membres : a) d'appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que lorsqu'un Etat membre de l'Union européenne exerce sa compétence fiscale à l'égard de contribuables résidents et non résidents, pour que la réglementation fiscale nationale pertinente qui s'applique à ces contribuables puisse être regardée comme compatible avec les stipulations du traité relatives à la libre circulation des capitaux, la différence de traitement entre les contribuables selon leur Etat de résidence doit concerner des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou être justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général ;

12. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 8 que la Fondation Jean et Lili Delaby se trouverait, compte tenu des modalités de l'exercice de son activité à but non lucratif, comme étant dans une situation objectivement comparable aux fondations reconnues d'utilité publique en France ; que, par ailleurs, si la fondation requérante soutient, dans le dernier état de ses écritures, qu'elle exerce son activité dans des conditions comparables à celle d'un fonds de dotation, elle n'établit pas, alors que la preuve lui en incombe, qu'elle affecte de manière irrévocable à une activité d'intérêt général les ressources qu'elle tire des loyers, qu'elle perçoit au titre de l'immeuble dont elle est propriétaire à Paris ; qu'il s'ensuit que la Fondation Jean et Lili Delaby n'est pas fondée à soutenir que l'application qui a été faite des dispositions du III de l'article 219 bis du code de général des impôts serait incompatible avec les stipulations du traité relatives à la libre circulation des capitaux ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Fondation Jean et Lili Delaby n'est pas fondée à soutenir que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la Fondation Jean et Lili Delaby est rejetée.

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N° 14PA00342


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00342
Date de la décision : 31/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CABINET ERNST et YOUNG SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-12-31;14pa00342 ?
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