Vu la requête, enregistrée le 11 avril 2014, présentée pour le SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS, dont le siège est Bourse du travail, place Crève coeur à Calais (62100), par Me Philippe Brun ; le SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1307584 du 26 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 octobre 2013 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) élaboré unilatéralement par la SELARL AJJIS et la SELARL FHB, administrateurs judiciaires de la SAS Calaire Chimie ;
2°) d'annuler cette décision et de refuser l'homologation ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Christophe Hervouet, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,
- les observations de Me Philippe Brun, avocat du syndicat CGT de l'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS ;
- les observations de M.B..., pour le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ;
- les observations de Me Pierre-Alexis Dumont, avocat de MeA... ;
1. Considérant que la société Calaire chimie, qui a subi entre 2007 et 2012 une très importante baisse de son chiffre d'affaires en raison, outre de la crise économique, de la perte des ventes de son principal produit, dont le brevet est arrivé à expiration, a accumulé à partir de l'année 2009 des pertes qui ont conduit à des difficultés de trésorerie, lesquelles ont contraint les dirigeants à déclarer l'entreprise en cessation de paiement ; que par trois jugements des 28 mai, 22 octobre et 24 octobre 2013, le tribunal de commerce de Boulogne-sur-mer l'a placée en redressement judiciaire, a arrêté le plan de cession totale de la société au profit de la société Synthexim, avec reprise de 80 salariés, les 111 autres étant licenciés, et prononcé sa liquidation judiciaire ; que le SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS relève appel du jugement du 26 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 octobre 2013 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) élaboré unilatéralement par la SELARL AJJIS et la SELARL FHB, administrateurs judiciaires de la SAS Calaire Chimie ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " En l'absence d'accord collectif (...), l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. (...) Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L. 1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à l'article L. 1233-71 " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-61 de ce code : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-62 de ce code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; (...) 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; / 4° Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; / 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; (...) " ;
3. Considérant que la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi doit être appréciée en fonction de l'ensemble des mesures qu'il contient et des moyens dont disposent l'entreprise et le groupe dont elle fait partie ;
4. Considérant que le plan de sauvegarde de l'emploi homologué par l'autorité administrative prévoit, au bénéfice des 111 salariés licenciés, une somme de 1,4 million d'euros permettant de contribuer au financement des contrats de sécurisation professionnelle des salariés licenciés par le versement d'une allocation au moins égale à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et, durant une période de 12 mois, d'une allocation mensuelle égale à 80 % du salaire brut ; qu'il prévoit également, dans le cadre de cette même somme, des aides à la mobilité géographique destinées à faciliter les reclassements internes et externes au groupe ICIG, le financement d'actions de formation au nouveau poste de travail et de formations qualifiantes, d'aides à la création ou à la reprise d'activités, une contribution au maintien du régime de protection sociale complémentaire durant 12 mois, la priorité de réembauche au sein de la société Synthexim et le financement d'une plateforme d'écoute et de soutien destinée à la prévention des risques psychosociaux ; que prises dans leur ensemble, ces mesures précises et concrètes sont de nature à faciliter le reclassement externe du personnel, à limiter ainsi le nombre des licenciements, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que certaines mesures, prises isolément, seraient moins favorables que les mesures de même nature contenues dans un plan de sauvegarde de l'emploi adopté en 2010 au bénéfice de salariés de la même société, laquelle, au demeurant, appartenait à cette date à un autre groupe ; qu'ainsi, alors même que, comme le fait valoir la société, le groupe ICIG emploie 3 300 salariés dans 17 entités et a un chiffre d'affaires global d'environ 800 millions d'euros, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi contenant ces mesures, l'autorité administrative n'aurait pas tenu compte des moyens dont disposent l'entreprise et le groupe et aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que l'état de cessation des paiements de la société ne résulterait pas des effets d'une conjoncture économique défavorable, mais de la planification et de la stratégie du groupe ICIG, lequel aurait détourné la procédure collective de son véritable objet afin d'être dispensé de prévoir certaines mesures dans le plan de sauvegarde de l'emploi n'est, en tout état de cause, pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS le versement à la SELARL AJJIS, la SELARL FHB et Me C...A...la somme qu'ils demandent au titre des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SELARL AJJIS, la SELARL FHB et Me C... A... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au SYNDICAT CGT DE L'UNION LOCALE DE CALAIS ET ENVIRONS, à la SELARL AJJIS, la SELARL FHB et Me C... A...et au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.
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N°14DA00635