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01/03/2016 | FRANCE | N°14BX02809

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 01 mars 2016, 14BX02809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sas Securities and Financial Solutions France a demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006 ainsi que des cotisations de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre de ces mêmes années.

Par un jugement n°1002087-1201332 du 29 juillet 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ces demandes.

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rocédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 29 septembre 2014...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sas Securities and Financial Solutions France a demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquels elle a été assujettie au titre des années 2004 à 2006 ainsi que des cotisations de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie au titre de ces mêmes années.

Par un jugement n°1002087-1201332 du 29 juillet 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 29 septembre 2014, le 2 septembre 2015 et le 5 novembre 2015, la Sas Securities and Financial Solutions France, représentée par Me B...F...et Me A...E...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 29 juillet 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Riou,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Securities and Financial Solutions (SFS) France, qui exerce une activité de courtage et d'intermédiaire en assurances, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2006, à l'issue de laquelle l'administration a, sur le fondement des dispositions des articles 39 et 57 du code général des impôts, réintégré dans ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés des commissions et honoraires versés à la société de droit britannique London Mercurian Limited (LM) pour un montant total de 1 047 150 euros sur les exercices 2004 à 2006 et les a taxés en tant que revenus distribués sur le fondement du c de l'article 111 du même code, lesdites sommes étant en outre assujetties à la retenue à la source sur le fondement du 2 de l'article 119 bis du même code. La société SFS France relève appel du jugement du 29 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt et des pénalités y afférentes ainsi que des retenues à la source et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2004 à 2006 pour un montant total de 762 260 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le jugement attaqué, qui répond à tous les moyens soulevés devant le tribunal administratif en indiquant notamment les motifs pour lesquels les juges ont estimé que la société requérante ne démontrait pas que les sommes versées à la société LM avaient eu pour elle des contreparties, n'est pas entaché d'insuffisance de motivation.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L.64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que l'administration n'a écarté aucun des contrats liant la société requérante à la société LM et n'a pas remis en cause l'identité réelle des deux sociétés. En se bornant à relever que le paiement à la société LM des sommes litigieuses n'avait pas eu de contrepartie pour la société SFS France, l'administration ne s'est pas placée, même implicitement, sur le terrain de la répression des abus de droit. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité à défaut de mise en oeuvre de la procédure prévue par les dispositions citées au point précédent ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Aux termes de l'article 57 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d 'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France (...) / A défaut d'éléments précis pour opérer les rectifications prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement " .

6. L'article 57 du code général des impôts institue une présomption de l'existence d'un transfert indirect de bénéfices par une société assujettie à l'impôt sur les sociétés en France vers l'étranger lorsque l'administration fiscale établit, d'une part, l'existence de liens de contrôle ou de dépendance entre cette société et des entreprises situées hors de France, - sauf dans l'hypothèse, pour laquelle cette condition n'est pas exigée, où ces dernières sont établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A du même code -, d'autre part, l'octroi d'avantages consentis par cette société à ces entreprises. Il s'agit d'une présomption simple, que la société contribuable peut combattre en apportant la preuve que ces avantages ont été justifiés par l'obtention de contreparties favorables à sa propre exploitation et ne constituent pas un transfert indirect de bénéfices.

7. Il résulte de l'instruction que M.D..., gérant et associé de la société SFS France, détient 56 % du capital de la société de droit britannique London Mercurian Limited (LM) dont il assure la direction et qui a son siège à Londres et que le directeur général de la société SFS France, M.C..., détient, quant à lui, 31% du capital de la société LM . En outre, il n'est pas contesté que la société LM, qui a souscrit trois contrats avec la société requérante, réalise la totalité de son chiffre d'affaires avec celle-ci. Dès lors, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un lien de dépendance entre la société LM et la société SFS France au sens des dispositions précitées de l'article 57 du code général des impôts, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté. La réalité et le montant des versements opérés par la société SFS France au profit de la société LM ne sont pas davantage contestés. Il appartient, dans ces conditions, à la société requérante d'apporter la preuve que ces avantages ont eu des contreparties favorables à sa propre exploitation.

8. La société requérante, société de courtage et intermédiaire en assurance dans le domaine de la construction, se prévaut des contrats passés entre les deux sociétés les 3 février 2004, 31 mars et 25 mai 2005, en vertu desquels la société LM lui fournit des prestations d'intermédiation avec les courtiers du Lloyd's et de gestion administrative des contrats d'assurance. Elle produit une lettre, en date du 17 novembre 2003, émanant de la société EBA relevant de " Lloyd's Insurance Brokers " et l'invitant à constituer une société à Londres, ainsi que des attestations d'assurance émises par la société LM.

9. Il résulte de l'instruction que la société LM ne possède aucune immobilisation et ne verse pas de salaires à d'autres personnes que M. D...et M.C..., qui exercent par ailleurs respectivement, comme il a été dit, les fonctions de gérant et directeur général de la société SFS France. Cette dernière société est elle-même en relation directe avec le marché des Lloyd's comme l'atteste notamment le fait qu'elle est enregistrée par le Lloyd's en tant qu'apporteur d'affaires. En outre, elle a pris en charge les déplacements effectués par M. D...et C...en Grande-Bretagne au cours des années en litige, ainsi que des voyages relationnels de ces derniers avec des représentants du Loyd's. Dans ces conditions, la société SFS France n'établit pas la réalité et la consistance exacte des prestations d'intermédiaire qu'aurait accompli au cours des années en litige la société LM. S'agissant de la gestion administrative des contrats d'assurance, la société SFS ne fournit pas d'éléments de justification autres que des attestations d'assurance qui, par elles-mêmes, eu égard au peu de moyens dont dispose la société LM, ne sauraient suffire à démontrer la réalité et la consistance des prestations de gestion administrative alléguées. Dans ces conditions, c'est à juste titre que l'administration a, sur le fondement de l'article 57 précité du code général des impôts, réintégré les commissions et honoraires versés en 2004, 2005 et 2006 par la société SFS France à la société LM.

Sur les pénalités :

10. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l' État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

11. Pour justifier l'application des majorations prévues par les dispositions précitées du code général des impôts aux rectifications d'impôts notifiées à la SAS SFS au titre des exercices clos en 2004, 2005 et 2006, l'administration s'est fondée sur la circonstance, non contestable, que la société ne pouvait ignorer, compte tenu de ses liens de dépendance avec la société établie à l'étranger, qu'elle procédait à un transfert de bénéfices destiné à minorer son résultat imposable en France. Cette circonstance traduit une intention délibérée, de la part de la société, d'éluder une partie de l'impôt. L'administration doit, dès lors, être regardée comme ayant apporté la preuve du manquement délibéré de la société à ses obligations fiscales et, par suite, du bien-fondé de l'application des pénalités prévues par l'article 1729 du code général des impôts.

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Securities and Financial Solutions France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur l'article L 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société SFS France la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Securities and Financial Solutions France est rejetée.

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N° 14BX02809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02809
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Bertrand RIOU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SELAS DE GAULLE FLEURANCE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-03-01;14bx02809 ?
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