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20/11/2014 | FRANCE | N°13MA00553

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2014, 13MA00553


Vu, enregistrée le 8 février 2013, la requête présentée pour M. A...B..., demeurant ... par les avocats associés Colonna d'Istria-Gasior ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906616 du 11 décembre 2012 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a estimé le taux de perte de chance à 16,66 % et qu'il a limité, par son article 1, la condamnation de l'assistance publique-hôpitaux de Marseille à lui verser la somme totale de 118 562,75 euros et une rente annuelle de 11 934 euros en réparation de son préjudice résultant d'un défaut de prise en

charge par le centre hospitalier de la Conception à Marseille le 7 juil...

Vu, enregistrée le 8 février 2013, la requête présentée pour M. A...B..., demeurant ... par les avocats associés Colonna d'Istria-Gasior ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906616 du 11 décembre 2012 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a estimé le taux de perte de chance à 16,66 % et qu'il a limité, par son article 1, la condamnation de l'assistance publique-hôpitaux de Marseille à lui verser la somme totale de 118 562,75 euros et une rente annuelle de 11 934 euros en réparation de son préjudice résultant d'un défaut de prise en charge par le centre hospitalier de la Conception à Marseille le 7 juillet 2005 ;

2°) d'estimer le taux de perte de chance à 50 % et de condamner sur ce fondement solidairement l'assistance publique-hôpitaux de Marseille et les marins-pompiers de Marseille à lui verser la somme totale de 3 158 652,27 euros au titre de l'indemnisation de l'ensemble de son préjudice ;

3°) de condamner solidairement l'assistance publique-hôpitaux de Marseille et les marins- pompiers de Marseille à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me F... pour la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et de Me G...de la Selarl Abeille pour la commune de Marseille ;

1. Considérant que, le 7 juillet 2005, vers 6 h 30, M.B..., alors âgé de 33 ans, a fait une chute dans la cage d'escalier de son immeuble à Marseille, dans des conditions restées inexpliquées ; que les marins-pompiers, alertés par ses voisins, sont arrivés à 6 h 42 sur les lieux, ont fait appel au médecin du SMUR qui l'a examiné à 7 h 20 et l'ont ensuite transporté aux urgences de l'hôpital de la Conception à Marseille où il a été admis à 8 h 03 ; qu'une fracture du rachis cervical et une fracture du crâne entrainant une tétraplégie ont été diagnostiquées à 13 h par une radiologie, laquelle tétraplégie a été confirmée par le scanner cervical réalisé à 14 h, mentionnant une fracture par Tear drop de C4 et C5 avec une angulation importante du canal cervical avec rétrécissement de l'ordre de 30 % du canal cervical ; que M. B...a été ensuite transporté dans le service de neurologie de l'hôpital de la Timone à 15 h 05 ; que, malgré une opération à 21 h visant à mettre en place un greffon iliaque maintenu par une plaque vissée, il est atteint d'une tétraplégie définitive ; qu'à sa demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille a désigné un expert qui a rendu son rapport le 15 juin 2008 ; que, non satisfait des résultats de cette première expertise et estimant que sa prise en charge à l'hôpital de la Conception constituait une faute de nature à engager sa responsabilité, il a demandé au tribunal administratif de Marseille de désigner par jugement avant-dire-droit un nouvel expert et la condamnation solidaire de la commune de Marseille et de l'APHM à lui verser la somme de 2 000 000 euros, tous postes confondus, au titre de la réparation des préjudices résultant de sa tétraplégie ; que, par jugement n° 0906616 avant-dire-droit du 30 novembre 2010, le tribunal administratif a estimé que les fautes commises par les pompiers lors des premiers soins donnés au requérant engageaient la responsabilité de la ville de Marseille dont relève le bataillon des marins-pompiers, que les fautes commises tant dans l'examen clinique initial que dans la prise en charge ultérieure du patient par le service des urgences de l'hôpital de la Conception engageaient la responsabilité de l'assistance publique-hôpitaux de Marseille, a ordonné une expertise par un collège de trois experts (un neurochirurgien, un chirurgien orthopédique et un urgentiste) sur le point de savoir si la tétraplégie dont souffre M. B...a été acquise immédiatement lors de sa chute ou au contraire si les fautes commises par les marins-pompiers puis par le service des urgences de l'hôpital de la Conception dans la prise en charge du patient lui ont fait perdre une chance d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation et, le cas échéant, de quantifier la perte de chance strictement imputable aux manquements retenus, et a réservé tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent jugement ; que le collège d'experts a rendu son rapport le 22 septembre 2011 ; que M. B... a alors demandé la somme globale de 3 158 652,27 euros en réparation de ses préjudices, en prenant en compte une perte de chance de 50 % ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que les gestes fautifs des marins-pompiers n'ont pas aggravé son état, ont fixé la perte de chance à 17 %, ont condamné l'APHM à payer à M. B...la somme de 51 340 euros en réparation de ses préjudices personnels et celle de 67 222,75 euros en réparation de ses préjudices patrimoniaux, ainsi qu'à lui verser une rente annuelle fixée à 11 934 euros revalorisée, ont condamné l'APHM à payer à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône une somme de 73 916,43 euros en remboursement de ses débours et a rejeté le surplus des conclusions des parties ; qu'en appel, le requérant demande à la Cour de porter le taux de perte de chance à 50 % et de condamner solidairement l'assistance publique-hôpitaux de Marseille et les marins-pompiers de Marseille à lui verser la somme totale de 3 158 652,27 euros ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône conclut à la condamnation de l'APHM et de la ville de Marseille à lui rembourser la somme définitive de 578 371,78 euros, portant intérêts, au titre de ses débours et celle de 1 015 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que la ville de Marseille conclut, à titre principal, au rejet de la requête de M. B...et des conclusions de la caisse, à titre subsidiaire, à réduire la demande indemnitaire du requérant à de plus justes proportions ; que l'APHM conclut à titre principal, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a retenu sa responsabilité et au rejet des conclusions indemnitaires du requérant et des conclusions de la caisse, à titre subsidiaire, au rejet de la requête de M.B... ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, applicable pour des soins réalisés après le 5 septembre 2001 : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...). " ;

3. Considérant que, par jugement avant-dire-droit devenu définitif du 30 novembre 2010, les premiers juges du tribunal administratif de Marseille ont retenu d'abord la responsabilité de la ville de Marseille, au motif que les marins-pompiers ont manipulé M. B...sans prendre les précautions d'usage qui imposent de considérer tout blessé à terre, même en état d'ébriété, comme s'il était porteur d'une lésion cervicale jusqu'à la preuve radiologique contraire, qu'ils ont déplacé le blessé sans le disposer au préalable dans un matelas coquille et sans le munir d'un collier minerve et que le blessé a été assis et a reçu des gifles pour le tenir éveillé ; que les premiers juges ont aussi retenu la responsabilité de l'APHM au motif que le malade n'a pas fait l'objet d'un examen initial médical attentif et conforme aux données de la science, au motif que le diagnostic de tétraplégie n'a pas été sérieusement évoqué par le service des urgences du centre hospitalier de la Conception et que les lésions associées n'ont pas été recherchées, et qu'en outre, la prise en charge ultérieure du patient a été fautive, dès lors que le praticien hospitalier, persuadé que le patient était ivre, l'a déclaré sortant à 12 h, malgré la radiographie réalisée à 11 h 30 qui mettait en évidence la tétraplégie de la victime, laquelle a été confirmée par un scanner cervical à 14 h ; que les motifs explicites de ce jugement, qui viennent au soutien du dispositif ordonnant une expertise précisément pour déterminer si ces fautes ont eu une incidence sur l'état de santé de M. B...ou si elles lui ont fait perdre une chance et qui concluent à une responsabilité conjointe de la ville de Marseille et de l'APHM sont revêtus de l'autorité de la chose jugée et s'imposent à la Cour ; que, par suite, ni la ville de Marseille, ni l'APHM ne sont fondés à soutenir que leur responsabilité n'est pas engagée en l'espèce ;

Sur l'existence d'une perte de chance de M. B...de se soustraire à une tétraplégie complète et définitive :

4. Considérant qu'il résulte d'un certificat daté du 4 août 2005, établi un mois après l'accident faute d'examens cliniques diligents réalisés tout de suite après sa chute, que M. B... a souffert de fractures du rachis cervical responsable d'une tétraplégie flasque, d'un tassement des plateaux supérieurs D5D6D7, d'une fracture de l'occiput droit, de l'omoplate gauche, du sternum avec contusion du lobe pulmonaire droit, de la tête du péroné gauche et des rotules droite et gauche ; qu'il présentait ainsi un grave polytraumatisme initial à la suite de sa chute ;

En ce qui concerne les fautes des marins-pompiers :

5. Considérant que les premiers juges, s'ils ont retenu la responsabilité des marins-pompiers de Marseille dans leur décision du 30 novembre 2010, ont écarté le lien de causalité entre les fautes susdécrites des marins-pompiers et les dommages causés à M. B...dans leur jugement du 11 décembre 2012 ; que le requérant soutient que le retard de prise en charge adéquate par les pompiers et le fait d'avoir induit le service des urgences en erreur sur le diagnostic a nécessairement contribué à l'aggravation de son état de santé, en se fondant sur un rapport d'un neurochirurgien, le DrC..., mandaté par la MAIF, son assureur, qui indique que " on ne peut pas affirmer que les fautes commises par les pompiers n'ont pas eu de conséquence sur l'état de santé de M.B..., comme on ne peut affirmer que ces fautes ont eu des conséquences " ; que, toutefois, le jugement avant-dire-droit susmentionné du 30 novembre 2010 devenu définitif a limité la faute des marins-pompiers aux manipulations sans précaution du patient lors de leur arrivée sur place immédiatement après sa chute ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à invoquer d'autres fautes qui auraient été commises selon lui par les marins-pompiers ; que, ni le rapport du 15 juin 2008 du DrE..., neurochirurgien désigné par le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille, ni le rapport critique du Dr D...de la SHAM, ni celui du collège d'experts du 22 septembre 2011 ne mentionnent un lien entre les manipulations physiques réalisées par les pompiers sur le patient et la survenue ou l'aggravation des lésions à l'origine de la tétraplégie de M.B... ; que les experts Dr E...et Dr D...excluent même expressément l'existence de lésions imputable à un déplacement du rachis ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les gestes fautifs des marins-pompiers n'avaient pas aggravé l'état du patient et que ces fautes n'avaient pas fait perdre de chance à M. B...d'échapper à l'aggravation de son état de santé ;

En ce qui concerne les fautes de l'APHM :

6. Considérant que le requérant dans son appel principal soutient que le taux de perte de chance de 17 % retenu par les premiers juges est insuffisant et qu'il devrait être porté à 50 % ; que l'APHM, par la voie de l'appel incident, soutient à titre principal que le retard thérapeutique de 3 heures du centre hospitalier de la Conception n'est à l'origine d'aucune perte de chance pour la victime d'éviter une tétraplégie aussi importante que celle qui est advenue, eu égard à son état initial résultant de sa chute, et à titre subsidiaire, que ce taux de 17 % doit être maintenu ;

7. Considérant que M. B...est atteint d'une tétraplégie, c'est à dire d'une paralysie définitive des quatre membres, de niveau C6 à gauche et C6 C7 à droite avec motricité nulle des membres inférieurs, une sensibilité conservée aux membres supérieurs et des troubles sphinctériens complets ; que le DrE..., expert désigné par le juge judiciaire et le Dr D...neurochirurgien assistant technique de la SHAM lors des opérations réalisées par le collège d'experts, estiment que les lésions à l'origine de la tétraplégie définitive du requérant se sont constituées immédiatement et définitivement dès sa chute et excluent de manière certaine l'incidence des retards de diagnostic et de prise en charge sur l'état de santé de la victime, sans toutefois analyser l'ampleur des troubles associés à la tétraplégie ; que le médecin expert de la MAIF assureur de la victime retient quant à lui une constitution progressive de la tétraplégie du fait que les lésions médullaires mettent six heures à s'installer, laquelle tétraplégie aurait pu être réduite d'au moins 50 % et limitée à une tétraparésie avec " récupération sans trop de complication sur une période de deux ans " en l'absence de faute ; que le collège d'experts désigné précisément sur la question de la perte de chance par le jugement avant-dire-droit du tribunal administratif conclut dans un rapport très bref à une tétraplégie ou tétraparésie très transitoire ayant rapidement et partiellement récupéré en phase de sidération médullaire, suivie d'un développement de lésions secondaires de la moelle épinière ayant évolué vers une tétraplégie définitive, dès lors que, dans une première phase, à l'arrivée des pompiers, le requérant déclarait ne plus sentir ses membres, mais a réagi à la stimulation et qu'une mobilité sans signe de déficit moteur a été notée à l'arrivée au service des urgences, mais que dans une seconde phase, la tétraplégie était définitivement installée lors du diagnostic posé à 13 h et du scanner réalisé à 14 h ; que ce collège estime au contraire que le retard thérapeutique fautif de trois heures a été source d'une perte de chance " parce qu'un certain nombre de gestes auraient dû être faits pour limiter autant que faire se peut les conséquences de l'accident " ; que s'il résulte de l'ensemble de ces éléments et de manière certaine que M. B...aurait été définitivement tétraplégique même en l'absence de faute du centre hospitalier eu égard à l'impossibilité de mettre en oeuvre dans les délais nécessaires une thérapie de la compression médullaire avant sa constitution définitive, en revanche, ce retard fautif de trois heures du centre hospitalier de la Conception a fait perdre à M. B...une chance de souffrir d'une tétraplégie et de troubles associés moindres ; que le collège de trois experts a estimé une perte de chance de 30 % imputable à ce retard thérapeutique sans préciser davantage, en indiquant que ce pourcentage correspond au surcroît d'incapacité de M. B...du fait de sa prise en charge fautive, sans tenir le raisonnement probabiliste qui s'impose pour déterminer le taux de perte de chance ; que M. B... ne conteste pas utilement le taux de 17 % retenu par les premiers juges en se prévalant du rapport du médecin de son assureur qui suggère un taux minimum de perte de chance de 50 % de ne pas être lourdement handicapé, sans mentionner de taux de perte de chance d'avoir un état tétraplégique et des troubles associés moins graves sans la faute du centre hospitalier ; que l'assistance publique-hôpitaux de Marseille ne conteste pas ce taux de 17 % ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé ce taux à 17 % ;

Sur le préjudice :

8. Considérant que seuls sont indemnisables les préjudices résultant de l'aggravation de l'état de santé de M.B..., seule en lien avec la faute du centre hospitalier et non ceux résultant de sa tétraplégie ;

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

S'agissant des dépenses de santé :

9. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône produit une notification définitive de ses débours datée du 26 septembre 2014 pour un montant total de 881 575,52 euros, ainsi que l'attestation d'imputabilité de médecin conseil de l'échelon local du service médical, comprenant une somme de 150 660,35 euros au titre des frais de séjour de M. B... au centre de rééducation de la clinique Saint-Martin ; qu'en l'absence de tout élément permettant de distinguer le surcoût de la rééducation lié à la seule aggravation de l'état de santé de la victime, dont la tétraplégie, qui résulte de sa chute, aurait en tout état de cause imposé un long séjour dans un tel centre, il n'y a pas lieu d'allouer cette somme de 150 660,35 euros à la caisse ; que l'organisme social n'établit pas davantage qu'une part de la pension d'invalidité qu'elle a versée à M. B...serait imputable à l'aggravation de son état de santé causée par la faute de l'établissement hospitalier ; que les frais relatifs à l'assistance pour tierce personne auraient été exposés à raison de la tétraplégie même en l'absence de faute ; qu'ainsi, il y a lieu de rejeter la demande de la caisse tendant au versement d'une somme de 139 462,97 euros représentant le montant capitalisé de la pension d'invalidité et des prestations de tierce personne versées du 15 mai 2007 au 31 août 2014 ;

10. Considérant que sur la base du relevé des débours de la caisse, arrêté le 20 janvier 2012, pour un montant de 434 802,57 euros correspondant aux dépenses exposées jusqu'au 7 octobre 2009 après déduction des frais liés à un mois d'hospitalisation nécessaire même en l'absence de faute, le tribunal a, après application du taux de perte de chance de 17 %, condamné l'assistance publique-hôpitaux de Marseille à payer la somme de 73 916,43 euros à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ; que l'assistance publique-hôpitaux de Marseille ne conteste pas cette somme ; que le relevé des débours actualisé au 26 septembre 2014 ne modifie pas le montant de ces dépenses ; que, après déduction de la somme de 150 660,35 euros mentionnée au point précédent et application du taux de perte de chance de 17 %, il y a lieu d'allouer à la caisse la somme de 48 304,17 euros au titre de l'ensemble de ses débours ;

11. Considérant que le requérant n'établit pas plus en appel la réalité des frais d'alèse, de suppositoires, de crème hydratante et de shampoing spécifiques, à les supposer même en lien avec la faute, qui resteraient selon lui à sa charge ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'indemnisation de ces frais ;

S'agissant des frais de logement et d'un véhicule adapté :

12. Considérant que le requérant n'établit pas que ces frais, écartés à juste titre par les premiers juges, seraient en lien avec la seule aggravation de son état de santé due à la faute de l'hôpital ;

S'agissant des frais d'assistance de tierce personne :

13. Considérant que le premier expert a chiffré ces frais d'assistance active pour effectuer les gestes de base de la vie quotidienne à 10 heures par jour et de surveillance passive à 10 h par jour ; que le requérant n'établit pas que cette assistance n'aurait pas été rendue nécessaire du seul fait des déficiences motrices liées à sa tétraplégie ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont indemnisé ce chef de préjudice ;

S'agissant de la perte de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle :

14. Considérant que l'expert désigné par le juge des référés indique que le requérant ne sera pas capable d'exercer une quelconque activité professionnelle ; que M. B...n'établit pas que compte tenu du handicap prévisible résultant de la chute elle-même, il aurait pu occuper un emploi ; que, par suite c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'indemnisation de ces postes de préjudice ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont alloué à M. B...la somme de 67 222,75 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

16. Considérant que l'expert a fixé la date de consolidation au 15 mai 2007, date de la sortie du requérant de la clinique de rééducation, deux ans après l'accident ; que M. B...présente une tétraplégie basse, complète sur le plan moteur et sphinctérien avec conservation d'une sensibilité sous lésionnelle ;

17. Considérant que l'expert a fixé le déficit fonctionnel temporaire total du 7 juillet 2005 au 15 mai 2007 compte tenu de son hospitalisation et de sa rééducation ; qu'il a chiffré son déficit fonctionnel permanent à 85 % au regard de sa tétraplégie basse, complète sur le plan moteur et sphinctérien avec conservation d'une sensibilité sous lésionnelle ; que ses souffrances endurées sont évaluées à 6 /7 ; que toutefois, ni le préjudice esthétique temporaire allégué par le requérant du fait des escarres liées à la longue hospitalisation relative à sa tétraplégie, ni son préjudice esthétique permanent du fait de cicatrices notamment sur le visage consécutives aux opérations chirurgicales rendues nécessaires par ses multiples fractures suite à sa chute ne présentent de lien de causalité direct avec la faute du centre hospitalier ; que le requérant n'établit pas non plus que son préjudice d'agrément, son préjudice d'établissement et son préjudice sexuel n'auraient pas été les mêmes en l'absence de faute ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence de M. B...en allouant au requérant, compte tenu du coefficient de perte de chance, la somme de 59 296 euros ; que M. B...est ainsi fondé à soutenir que la somme de 51 340 euros qui lui a été allouée par les premiers juges au titre de ses préjudices personnels soit portée à celle de 59 296 euros ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...a droit au versement par l'assistance publique-hôpitaux de Marseille de la somme de 59 296 euros ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a droit à la somme de 48 304,17 euros ;

Sur les frais d'expertise :

19. Considérant qu'il y a lieu de confirmer la mise des frais d'expertise, d'un montant total de 3 920 euros, à la charge de l'assistance publique-hôpitaux de Marseille ;

Sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'assistance publique-hôpitaux de Marseille et la ville de Marseille soient condamnées à verser à M. B...une quelconque somme au titre de ses frais d'instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. B...à verser à la commune de Marseille la somme qu'elle demande au titre de ses frais non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 118 562,75 euros que l'APHM a été condamnée à verser à M.B... par l'article 1 du jugement du 11 décembre 2012 du tribunal administratif de Marseille est ramenée à celle de 59 296 euros.

Article 2 : L'article 2 du jugement est annulé.

Article 3 : La somme de 73 916,43 euros que l'APHM a été condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône par l'article 3 du jugement du 11 décembre 2012 du tribunal administratif de Marseille est ramenée à 48 304,17 euros.

Article 4 : Le jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à l'APHM, à la commune de Marseille et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

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N° 13MA005536

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00553
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-04-02 Procédure. Instruction. Moyens d'investigation.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : DEPIEDS PINATEL CAZERES AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-11-20;13ma00553 ?
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