Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 janvier 2013, et régularisée par courrier le 14 janvier 2013, présentée pour la société civile d'exploitation agricole (SCEA) La Lucate, dont le siège est route de Courlouze à Lugos (33830), par Me Guerard, avocat ;
La SCEA La Lucate demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003250 du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la taxe exceptionnelle sur le montant de la réserve spéciale des plus-values à long terme auxquels elle a été assujettie au titre des années 2006 et 2007 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2014 :
- le rapport de Mme Béatrice Duvert, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;
1. Considérant que la société civile d'exploitation agricole (SCEA) La Lucate, qui a pour activité la culture de légumes, melons, racines et tubercules, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période allant du 1er décembre 2004 au 30 novembre 2005 ; qu'à l'issue de ce contrôle, elle a été assujettie à la taxe exceptionnelle mentionnée à l'article 39 IV de la loi susvisée du 30 décembre 2004, assise sur le montant de la réserve spéciale des plus-values à long terme figurant au passif de son bilan de l'exercice clos en 2005 ; que le paiement de cette taxe, qui devait intervenir pour une première partie en 2006 et pour le solde en 2007, a été mis en recouvrement le 26 novembre 2009 pour un montant total, en droits et pénalités, de 40 224 euros ; que la SCEA La Lucate interjette appel du jugement en date du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales (LPF) : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...). " ;
3. Considérant, que, pour l'application de ces dispositions, la date d'interruption de la prescription est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification est remis au contribuable ; qu'il incombe à l'administration d'établir que la proposition de rectification a été régulièrement notifiée au contribuable ; qu'en cas de retour à l'expéditeur du pli recommandé contenant cette proposition, le contribuable ne peut être regardé comme l'ayant reçu que s'il est établi qu'il a été avisé, par la délivrance d'un avis de passage, de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste dont il relève et n'a été retourné à l'expéditeur qu'après l'expiration du délai de mise en instance prévu par la réglementation en vigueur ; que, lorsque des dispositions prévues par l'instruction de la direction générale de la Poste en date du 6 septembre 1990 relatives à la distribution des plis recommandés n'ont pas été respectées, il incombe au juge de rechercher si ces omissions revêtaient ou non un caractère substantiel, compte tenu des garanties pratiques que les dispositions confèrent au destinataire du pli ;
4. Considérant qu'il est constant qu'une proposition de rectification datée du 17 décembre 2008, adressée par pli recommandé avec accusé de réception, a été présentée au siège social de la SCEA La Lucate le samedi 20 décembre 2008 et, qu'en l'absence de représentant de l'intéressée, le préposé de la poste a laissé un avis de passage mentionnant que le pli en cause pouvait être retiré à partir du mardi 23 décembre suivant avant l'expiration du délai de garde (quinze jours ) au bureau de Poste dont la société relève; que le gérant de la société, qui s'est présenté au bureau de Poste le 6 janvier 2009, dernier jour du délai de garde de quinze jours prévu par la réglementation postale, notamment par l'instruction du 6 septembre 1990 de la direction générale de la Poste relative à la distribution des plis recommandés, n'a pas été mis à même de procéder au retrait de ce pli, celui-ci ayant prématurément été retourné aux services fiscaux ; que ce non respect de la réglementation postale par les services postaux a, compte tenu des garanties pratiques de se voir délivrer le pli recommandé qu'elle confère à son destinataire, revêtu un caractère substantiel faisant obstacle à ce que la notification de la proposition de rectification soit réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle elle a été présentée au siège social de la SCEA La Lucate ; que, dés lors, cette proposition doit être regardée comme ayant été notifiée à la requérante, non le 20 décembre 2008, jour de cette présentation mais le 16 janvier 2009, jour auquel, par un nouvel envoi recommandé, la SCEA La Lucate en a accusé réception, soit postérieurement à l'expiration, le 31 décembre 2008, du délai de reprise dont disposait l'administration au titre des impositions en litige ; qu'il suit de là que la SCEA La Lucate est fondée à soutenir que les impositions mises à sa charge sont entachées de prescription ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la SCEA La Lucate tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la taxe exceptionnelle sur le montant de la réserve spéciale des plus-values à long terme figurant au passif de son bilan de l'exercice clos en 2005 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la SCEA La Lucate au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 13 novembre 2012 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la SCEA La Lucate la décharge, en droits et pénalités, de la taxe exceptionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre du montant de la réserve spéciale des plus-values à long terme figurant au passif de son bilan de l'exercice clos en 2005.
Article 3 : L'Etat versera à la SCEA La Lucate la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N°13BX00100