LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en référé, que M. X... a été engagé le 7 janvier 1990 par la société Midi travel agency en qualité d'agent d'accueil transfériste ; qu'il a été licencié pour motif économique par une lettre du 10 décembre 2010, après autorisation du ministre du travail, ce salarié étant titulaire d'un mandat de délégué syndical et, à ce titre, l'entreprise employant moins de trois cents salariés, de représentant syndical au comité d'entreprise ; que par un jugement du 23 novembre 2011, le tribunal administratif a annulé la décision du ministre ; que réintégré au sein de la société Miki travel agency dans un emploi « temporaire » d'agent d'accueil des étudiants à compter du 22 janvier 2012, M. X... a été de nouveau licencié, par une lettre du 22 mai 2012, « pour impossibilité matérielle de réintégration » ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 2422-2 du code du travail, ensemble l'article 5 de la Convention n° 135 de l'Organisation internationale du travail ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à référé sur la demande de réintégration présentée par le salarié, l'arrêt énonce qu'aux termes de l'article L. 2422-2 du code du travail, le membre du comité d'entreprise dont l'autorisation de licenciement a été annulée, est réintégré dans son mandat si l'institution n'a pas été renouvelée et dans le cas contraire, si l'institution a été renouvelée, bénéficie pendant une durée de six mois à compter de sa réintégration de la protection prévue à l'article L. 2411-5 du code du travail ; qu'en l'espèce non seulement le comité d'entreprise n'a pas été renouvelé, mais il est constant qu'il a disparu à compter de l'année 2010 en raison de la baisse des effectifs en sorte que l'intéressé n'est pas en droit de se prévaloir de ce texte pour bénéficier du statut de salarié protégé, tandis que pour le même motif, une contestation sérieuse existe sur l'application de l'article L. 2411-8 compte tenu de la date de la disparition du comité d'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le délégué syndical, représentant de droit le syndicat au comité d'entreprise, réintégré dans l'entreprise après l'annulation de l'autorisation donnée en vue de son licenciement, sans avoir pu retrouver son mandat du fait de la disparition de ce comité d'entreprise, bénéficie de la protection complémentaire de six mois suivant sa réintégration, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Miki travel agency aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Miki travel agency à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de réintégration formée par Monsieur X... à l'encontre de la SARL Miki Travel Agency ;
Aux motifs propres qu'il est constant qu'à la date de son premier licenciement, prononcé pour motif économique le 10 décembre 2010 par la Sarl Miki Travel Agency, dont l'autorisation a été annulée par jugement du 23 novembre 2011 par le tribunal administratif de Paris, M. Y. X... exerçait les mandats de délégué syndical et de membre de droit, en tant que délégué syndical, du comité d'entreprise de la dite société ; que les parties sont en litige, d'une part, sur le point de savoir si M. Y. X... bénéficiait du statut de salarié protégé à la date à laquelle a été prononcé son deuxième licenciement, soit le 22 mai 2012, postérieurement à sa réintégration, le 11 février 2012, consécutive à l'annulation de l'autorisation de son premier licenciement susvisé, prononcé le 10 décembre 2010 et, d'autre part, sur les conditions d'effectivité de la réintégration dont le salarié a bénéficié à sa demande, à compter du 12 février 2012, à la suite de l'annulation de l'autorisation de son premier licenciement ; que sur le statut de salarié protégé, aux termes de l'article L. 2422-2 du code du travail, dont se prévaut le salarié, le délégué du personnel ou le membre du comité d'entreprise dont l'autorisation de licenciement a été annulée, est réintégré dans son mandat si l'institution n'a pas été renouvelée ; dans le cas contraire, si l'institution a été renouvelée, il bénéficie pendant une durée de six mois à compter de sa réintégration de la protection prévue à l'article L. 2411-5 du code du travail ; or qu'en l'espèce non seulement le comité d'entreprise n'a pas été renouvelé au sein de la Sarl Miki Travel Agency du seul fait de la réduction de ses effectifs en deçà de 50 salariés en mai 2010 mais il est constant qu'il a disparu pour ce motif à compter de cette dernière date ; que M. Y. X... n'est en conséquence pas en droit de se prévaloir de ce texte pour bénéficier du statut de salarié protégé ; que de même, alors que M. Y. X... se prévaut des dispositions de l'article L. 2411-8 du code du travail, force est de constater qu'une même contestation sérieuse se pose sur l'application de ce texte à sa situation dans la mesure où le texte précité dispose que l'ancien membre élu du comité d'entreprise, ce qui n'est pas son cas, ou l'ancien représentant syndical au comité d'entreprise , ce qui était son cas, qui n'est pas reconduit dans son mandat lors du renouvellement du comité, bénéficie de la protection légale pendant les six premiers suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de cette institution ; or qu'il est constant que le comité d'entreprise a disparu au sein de la Sarl Miki Travel Agency depuis le mois de mai 2010 ; qu'en conséquence, M. Y. X... ne pouvait plus bénéficier du statut de salarié protégé lors de son deuxième licenciement au titre de ses mandats de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges, qu'aux termes de l'article R 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que sur le statut de salarié protégé de Monsieur X..., la société MIKI TRAVEL AGENCY emploie moins de 300 salariés ; que Monsieur Yoshifumi X... avait été désigné délégué syndical ; que de ce fait, et en application de l'article L. 2143-22 du code du travail, il était de plein droit représentant syndical au comité d'entreprise ; que le licenciement pour motif économique de Monsieur Yoshifumi X... lui a fait perdre son mandat de délégué syndical, ce qu'il ne conteste pas dans ses écritures ; qu'en effet, il est constant que l'annulation de la décision autorisant le licenciement d'un salarié titulaire d'un mandat de délégué syndical n'entraîne pas le rétablissement de plein droit du salarié dans son mandat de sorte qu'il doit, pour être rétabli dans ses fonctions représentatives, faire l'objet d'une nouvelle désignation ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que dès lors qu'il a perdu son mandat de délégué syndical, celui de représentant syndical au comité d'entreprise est perdu également ; que seule la qualité de délégué syndical autorise le salarié à siéger au comité d'entreprise de droit, sans désignation ni élection ; que l''article L. 2411-8 du code du travail prévoit que "l'ancien membre élu du comité d'entreprise ainsi que l'ancien représentant syndical qui, désigné depuis deux ans, n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité bénéficient également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution" ; que ces dispositions ne s'appliquent qu'aux membres élus et désignés du comité d'entreprise et non aux membres de droit ; que Monsieur Yoshifumi X... ne bénéficie plus de la protection due à ses mandats de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise depuis le prononcé de son licenciement pour motif économique ; que le fait que Monsieur Yoshifumi X... n'ait pu se présenter aux élections organisées dans la société en 2011 ne lui permet pas d'invoquer une quelconque protection, dès lors qu'à cette période il ne faisait plus partie des effectifs de la société ayant été licencié pour motif économique par décision d'autorisation du ministre du travail ;
Alors qu'en cas d'annulation d'une décision autorisant le licenciement d'un délégué syndical au comité d'entreprise, celui-ci est réintégré dans son mandat s'il a fait l'objet d'une nouvelle désignation par son organisation syndicale ; que dans le cas contraire, il bénéficie pendant une durée de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la procédure prévue à l'article L. 2411-8 du code du travail ; qu'en jugeant la Société Miki Travel Agency autorisée à licencier Monsieur Yoshifumi X..., qui exerçait le mandat de délégué syndical au comité d'entreprise avant son licenciement, moins de six mois après sa réintégration sans demande préalable d'autorisation de licenciement, la Cour d'appel a violé l'article L. 2422-2 du Code du travail, ensemble l'article L. 2411-8 du même Code.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de réintégration formée par Monsieur X... à l'encontre de la SARL Miki Travel Agency ;
Aux motifs propres que M. Y. X... soutient qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé à tout le moins et en tout état de cause à titre d'ancien délégué syndical en application des dispositions de l'article L. 2411-3 alinéa 2 du code du travail aux termes duquel l'autorisation de l'inspecteur du travail est requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an ; Or, alors que la date de cessation de ses fonctions de délégué syndical doit être fixée au jour de son premier licenciement soit le 10 décembre 2010, que M. Y. X... ne bénéficiait plus de la protection liée à son ancienne fonction dans la mesure où il a été réintégré à la suite de l'annulation par le tribunal administratif de l'autorisation de licenciement ; qu'en effet, il ne justifie pas avoir fait l'objet d'une nouvelle désignation par son organisation syndicale, condition nécessaire pour être rétabli dans ses fonctions ; qu'il s'ensuit de ces constatations que M. Y. X... ne démontre pas avec l'évidence nécessaire en référé qu'il bénéficiait du statut de salarié protégé à la date de son deuxième licenciement, à savoir le 22 mai 2012 ; que dès lors, en l'absence de preuve de trouble manifestement illicite, sa demande de voir dire son licenciement entaché de nullité et de voir ordonner en conséquence sa réintégration au sein de la Sarl Miki Travel Agency se heurte à une contestation sérieuse dépassant les pouvoirs du juge des référés ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges qu'aux termes de l'article R 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que sur le statut de salarié protégé de Monsieur X..., la société MIKI TRAVEL AGENCY emploie moins de 300 salariés ; que Monsieur Yoshifumi X... avait été désigné délégué syndical ; que de ce fait, et en application de l'article L. 2143-22 du code du travail, il était de plein droit représentant syndical au comité d'entreprise ; que le licenciement pour motif économique de Monsieur Yoshifumi X... lui a fait perdre son mandat de délégué syndical, ce qu'il ne conteste pas dans ses écritures ; qu'en effet, il est constant que l'annulation de la décision autorisant le licenciement d'un salarié titulaire d'un mandat de délégué syndical n'entraîne pas le rétablissement de plein droit du salarié dans son mandat de sorte qu'il doit, pour être rétabli dans ses fonctions représentatives, faire l'objet d'une nouvelle désignation ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que dès lors qu'il a perdu son mandat de délégué syndical, celui de représentant syndical au comité d'entreprise est perdu également ; que seule la qualité de délégué syndical autorise le salarié à siéger au comité d'entreprise de droit, sans désignation ni élection ; que l''article L. 2411-8 du code du travail prévoit que "l'ancien membre élu du comité d'entreprise ainsi que l'ancien représentant syndical qui, désigné depuis deux ans, n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité bénéficient également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution" ; que ces dispositions ne s'appliquent qu'aux membres élus et désignés du comité d'entreprise et non aux membres de droit ; que Monsieur Yoshifumi X... ne bénéficie plus de la protection due à ses mandats de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise depuis le prononcé de son licenciement pour motif économique ; que le fait que Monsieur Yoshifumi X... n'ait pu se présenter aux élections organisées dans la société en 2011 ne lui permet pas d'invoquer une quelconque protection, dès lors qu'à cette période il ne faisait plus partie des effectifs de la société ayant été licencié pour motif économique par décision d'autorisation du ministre du travail ;
Alors qu'en cas d'annulation d'une décision autorisant le licenciement d'un délégué syndical, celui-ci bénéficie pendant une durée de douze mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la procédure prévue à l'article L. 2411-3 du Code du travail ; qu'en jugeant la Société Miki Travel Agency autorisée à licencier Monsieur Yoshifumi X... moins de douze mois après sa réintégration sans demande préalable d'autorisation de licenciement, la Cour d'appel a violé les articles L. 2411-3 et 2422-1 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur la constatation de l'absence de réintégration effective de Monsieur X... au sein de la SARL Miki Travel Agency ;
Aux motifs propres que sur l'absence de réintégration effective de M. Y. X... au sein de la Sarl Miki Travel Agency, M. Y. X... ne démontre pas plus avec l'évidence nécessaire en référé que l'employeur a violé son obligation de le réintégrer dans le même emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent à la suite de l'annulation de son autorisation relative à son premier licenciement ; qu'en effet, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, les parties sont en désaccord sur le fait même que son emploi "d'agent d'accueil transfériste" a été ou non maintenu au sein de l'entreprise dans le cadre de la réorganisation qui y est intervenue ; que dès lors, et particulièrement dans la mesure où M. Y. X... revendique d'être réintégré dans le même emploi, sa demande se heurte à une contestation sérieuse qui dépasse les pouvoirs du juge des référés et relève de l'appréciation du seul juge du fond, au demeurant déjà saisi ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise en ce que les premiers juges ont exactement dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes formées par M. Y. X... à l'encontre de la Sarl Miki Travel Agency ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges, que Monsieur Yoshifumi X... conteste par ailleurs, les conditions de sa réintégration en qualité d'agent d'accueil et fait valoir que contrairement à ce qu'indiqué la société, il existait des postes disponibles pour permettre sa réintégration ; que cependant, le juge des référés n'est pas compétent pour examiner les conditions de la réintégration de Monsieur X... postérieurement à la décision du tribunal administratif de Paris et ce dès lors qu'au jour de l'audience, le contrat de travail entre Monsieur Yoshifumi X... et la société MIKI TRAVEL AGENCY était rompu ; que la condition d'urgence prévue à l'article R 1455-5 n'existe plus ; que Monsieur Yoshifumi X... ne démontre pas non plus l'existence d'un trouble manifestement illicite ;
Alors que, selon l'article R. 1455-6 du Code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en décidant, après avoir constaté que par jugement du 23 novembre 2011, le tribunal administratif de Paris avait annulé la décision du ministre du Travail autorisant le licenciement pour motif économique de Monsieur X..., que la demande de ce dernier tendant à être réintégré dans le même emploi se heurte à une contestation sérieuse qui dépasse les pouvoirs du juge des référés et relève de l'appréciation du seul juge du fond, la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article R. 1455-6 du Code du travail, ensemble l'article L. 2422-1 du même Code.