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12/11/2013 | FRANCE | N°12MA04397

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2013, 12MA04397


Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me F...C... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101947 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision du président du conseil d'administration de La Poste du 14 avril 2011 prononçant à son encontre une sanction disciplinaire de révocation, à la condamnation de La Poste à lui verser des rappels de salaire et à l'indemniser de divers préjudices et à ce qu'il soit enjoint

à La Poste de la réintégrer ;

2°) d'annuler la décision de révocation du 14 a...

Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me F...C... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101947 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision du président du conseil d'administration de La Poste du 14 avril 2011 prononçant à son encontre une sanction disciplinaire de révocation, à la condamnation de La Poste à lui verser des rappels de salaire et à l'indemniser de divers préjudices et à ce qu'il soit enjoint à La Poste de la réintégrer ;

2°) d'annuler la décision de révocation du 14 avril 2011 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de la réintégrer au sein de La Poste, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision ;

4°) de condamner La Poste à lui verser un rappel de salaire d'avril 2011 au jour de sa réintégration, la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 15 000 euros au titre de son préjudice moral ;

5°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Busidan, premier conseiller,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour MmeB... ;

1. Considérant que MmeB..., fonctionnaire titulaire à La Poste depuis 1980 et exerçant, depuis 1992, des fonctions de conseiller financier dans l'établissement de Bollène, interjette appel du jugement rendu le 18 octobre 2012 par le tribunal administratif de Nîmes, qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 14 avril 2011 par laquelle le président du conseil d'administration de La Poste lui a infligé la sanction disciplinaire de la révocation, d'autre part, à ce que La Poste soit condamnée à l'indemniser de divers préjudices consécutifs à cette révocation, enfin à ce qu'il soit enjoint à La Poste de la réintégrer ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, que La Poste a versé au dossier le 3 juin 2013 la décision datée du 1er avril 2010 et signée du président directeur général de La Poste, par laquelle ce dernier a donné délégation au directeur des ressources humaines et des relations sociales de La Poste, et en l'absence de celui-ci à M. G...D..., directeur des opérations des ressources humaines, pour signer toute sanction disciplinaire du 4ème groupe ; que, par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision de révocation dont elle a fait l'objet, qui fait partie du quatrième groupe des sanctions applicables aux fonctionnaires de l'Etat et qui a été signée par M.D..., aurait été prise par une autorité incompétente ; que la circonstance que cette délégation ne viserait pas le décret n° 90-1111 du 12 décembre 1990 portant statut de La Poste est sans incidence sur sa régularité ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, comme de celles de l'article 1er du décret du 25 octobre 1984 également susvisé, le fonctionnaire à l'encontre duquel est engagée une procédure disciplinaire a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de tous les documents annexes ; qu'il est constant que le témoignage recueilli le 14 octobre 2010 par les enquêteurs internes de La Poste auprès de M.E..., agent stagiaire de La Poste, n'a pas été versé au dossier individuel que Mme B...a pu consulter, ni d'ailleurs au dossier de la présente instance malgré la demande en ce sens adressée à La Poste par le conseil de l'intéressée dans le cadre du contradictoire ; que, cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette pièce aurait pu comporter des éléments utiles à la défense de Mme B...autres que ceux figurant déjà dans l'attestation de ce même agent, que l'intéressée elle-même a produite devant le conseil de discipline et a versée à l'instance ; que, dans ces conditions, l'absence de ce témoignage au dossier individuel de Mme B...n'est pas de nature à faire regarder ledit dossier comme incomplet, ni, par suite, la procédure ayant conduit à la sanction en litige comme irrégulière au regard des dispositions imposant la communication au fonctionnaire poursuivi de son entier dossier ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le moyen, tiré de ce que le conseil de discipline aurait refusé d'entendre en qualité de témoin la cliente âgée concernée par les faits reprochés, ainsi que le moyen tiré de ce que la sanction en litige serait insuffisamment motivée, doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux exposés par les premiers juges, qu'il convient d'adopter ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que par les pièces versées au dossier, Mme B...n'établit pas que son éviction du service procèderait, non pas de la volonté de sanctionner les faits reprochés, mais de la volonté de réorganiser le service en supprimant son poste de conseiller financier ;

6. Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de ce que La Poste n'a pas saisi le comité d'entreprise n'est pas assorti des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée ;

7. Considérant, en sixième lieu, que l'article 25 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, en vertu duquel les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées, impose par suite à tous les fonctionnaires, du fait même de leur statut et quelles que soient les fonctions qu'ils exercent, une obligation de probité et de désintéressement leur interdisant d'avoir un comportement qui serait inconciliable avec l'exercice de la mission qui leur est confiée ; que, s'agissant des fonctionnaires exerçant leurs fonctions au sein de la branche " Banque Postale " de La Poste, cette obligation générale de probité et de désintéressement est éclairée par les dispositions de l'article 19 bis de l'instruction du 31 août 2009 portant règlement intérieur de La Poste qui s'impose " à tous les personnels travaillant à La Poste quel que soit leur statut ou leur contrat de travail ", et l'annexe 4 à cette instruction ; que l'article 19 bis dispose que : " Dans le cadre des activités professionnelles, il est interdit à tout postier de recevoir, à titre personnel, procuration (ou mandat de gestion) de la part d'un client, sauf si celui-ci est une personne entretenant avec le postier un lien préexistant de nature familiale, fiscale ou légale. / Aucun postier ne peut bénéficier ou faire bénéficier une personne de son entourage (famille, concubinage, Pacs...) directement ou indirectement et sous quelque forme que ce soit: - de prêts, dons, legs et plus généralement toute libéralité ou transfert patrimonial de la part d'un client, sauf si celui-ci est une personne entretenant avec le postier un lien préexistant de nature familiale, fiscale ou légale. - d'un contrat de quelque nature que ce soit souscrit par un client, sauf si celui-ci est une personne entretenant avec le postier un lien préexistant de nature familiale, fiscale ou légale. (...) "; qu'il est reproché à Mme B...d'avoir commis des fautes concernant la même cliente, une dame âgée vivant depuis octobre 2007 au sein de l'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de Bollène, avec laquelle elle entretenait une relation amicale ancienne ; qu'il lui est ainsi fait grief d'avoir signé à la place de la cliente sur deux demandes de rachat de contrats d'assurance-vie et sur une demande d'adhésion à un contrat d'assurance-vie "Cachemire", d'avoir fait porter comme bénéficiaire son fils et sa nièce sur ce contrat d'assurance-vie, d'avoir fait bénéficier son fils de prêt, cadeaux et libéralités de la part de la cliente, d'avoir reçu des cadeaux et gratifications, d'avoir assuré de fait la gestion des comptes de la cliente et d'avoir organisé le transfert patrimonial de la cliente au profit de son fils ;

8. Considérant que, pour soutenir que les cinq derniers griefs cités ne constitueraient pas des violations de l'article 19 bis précité, Mme B...fait valoir des liens de nature familiale ou légale qui la relieraient à la cliente ; que certes, d'une part, il ressort des pièces du dossier que dès le 8 octobre 2007 et l'entrée à l'EPHAD de la dame, celle-ci a désigné Mme B...comme personne de confiance qui serait consultée au cas où elle-même serait hors d'état d'exprimer sa volonté et de recevoir l'information nécessaire à cette fin ; que, cependant, comme l'ont indiqué les premiers juges, le lien légal préexistant ainsi créé en vertu de l'article L. 1111-6 du code de la santé publique ne saurait concerner des décisions intervenant dans un domaine autre que médical et permettre à Mme B...de se prévaloir de l'exception prévue à l'article 19 bis précité ; que, d'autre part, s'il est également établi que Mme B...entretenait, depuis près de vingt ans, une relation suivie avec la cliente concernée qui la considère comme sa fille et s'il ressort du témoignage de cette personne, corroboré par plusieurs autres attestations et documents versés au dossier, qu'elle allait la voir fréquemment et lui a rendu au long de ces années de multiples services, une telle relation ne peut être regardée comme un lien préexistant de nature familiale permettant à la requérante de se prévaloir de ladite exception ; que, par suite, les griefs précités ne peuvent être regardés que comme des fautes au regard des obligations professionnelles qui s'imposaient à Mme B...dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

9. Considérant que, pour soutenir que la sanction dont elle a fait l'objet serait manifestement disproportionnée par rapport aux fautes commises, Mme B...fait valoir qu'elles doivent s'apprécier au regard des circonstances propres à l'espèce ;

10. Considérant à cet égard qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier, et notamment par l'enquête diligentée par La Poste, que les cadeaux et gratifications reçus de la dame auraient consisté en autre chose que des confiseries, vêtements et une montre de 66,50 euros pour Mme B... ainsi qu'une avance de 4 000 euros consentie au fils pour l'achat d'une voiture, dont 3 000 ont été rapidement remboursés à la cliente et 1 000 auraient constitué le montant de sa participation audit achat ;

11. Considérant cependant que l'ensemble des autres griefs motivant la révocation en litige se rattachent aux circonstances dans lesquelles elle a rempli une demande d'adhésion, au nom de la cliente, à un contrat d'assurance-vie "Cachemire" en inscrivant son fils et sa nièce comme bénéficiaires et en contrefaisant la signature de la cliente sur ce formulaire ainsi que sur les demandes de rachats de deux autres contrats d'assurance-vie ; que ces faits, compte tenu des fonctions exercées par l'intéressée, de la nécessaire connaissance qu'elle avait de ses obligations professionnelles dans le cadre de la gestion de dossiers de clients d'un organisme financier et de l'impact que de tels agissements peuvent avoir pour l'établissement en termes d'image et de confiance vis-à-vis de sa clientèle, sont d'une particulière gravité ;

12. Considérant que si Mme B...se prévaut de l'ancienneté de ses relations avec la cliente concernée, du fait que celle-ci ne pouvait pas écrire et lui confiait, de fait, la gestion de ses comptes, de ce que la mention de son fils et de sa nièce comme bénéficiaires du contrat d'assurance vie répondait à la volonté expresse de la cliente qui s'est, postérieurement aux faits reprochés, rendue chez un notaire pour, selon ses déclarations, désigner le fils de la requérante comme légataire universel, ces circonstances ne sont pas de nature à atténuer la gravité des fautes commises, dès lors notamment qu'il incombait à MmeB..., même contre la volonté de la cliente, de ne pas accepter le bénéfice, pour elle-même ou son entourage familial, d'avantages financiers et qu'elle a, au contraire, pris part activement à une telle opération en signant elle-même à la place de la cliente des documents accordant de tels avantages ;

13. Considérant que la requérante ne peut davantage se prévaloir du comportement de son supérieur hiérarchique, conseiller spécialisé en patrimoine chargé du portefeuille de la cliente, qui s'est abstenu de prendre en charge le dossier et qui lui a remis un exemplaire vierge de contrat d'assurance-vie à soumettre à cette cliente alors qu'il est constant qu'elle n'était pas habilitée à proposer ce type de produit, dès lors que cette mission n'impliquait nullement qu'elle établisse elle-même un contrat désignant des membres de sa famille comme bénéficiaires en le signant en outre elle-même aux lieu et place de la cliente ; que ni le fait que la requérante n'ait pas cherché à dissimuler à sa hiérarchie le contrat d'assurance portant les noms de ses fils et nièce, dès lors que sa souscription impliquait en tout état de cause que ce contrat soit porté à la connaissance de l'établissement, ni la circonstance que le jour où elle a signé ce contrat elle aurait pu être affectée par une nouvelle préoccupante relative à son état de santé, ni enfin les très bonnes appréciations émises sur ses qualités professionnelles figurant sur ses fiches d'évaluation et de notations ou dans les attestations de nombreux clients, ne sont davantage de nature à atténuer la gravité des fautes établies à son encontre dont elle devait nécessairement avoir conscience eu égard aux responsabilités qu'elle exerçait et à son expérience ;

14. Considérant qu'au regard de la gravité des fautes commises par Mme B...et des circonstances dans lesquelles elles ont été commises, telles qu'elles sont exposés ci-dessus, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant à son encontre une mesure de révocation La Poste lui a infligé une sanction disciplinaire manifestement disproportionnée ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la sanction de révocation dont elle a fait l'objet ainsi que ses conclusions indemnitaires et à fin d'injonction ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions que Mme B...présente dans la présente instance au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la requérante la somme que La Poste demande au même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...et les conclusions de La Poste tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à La Poste.

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N° 12MA04397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04397
Date de la décision : 12/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : MOURET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-11-12;12ma04397 ?
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