LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° M 12-22. 575 à Q 12-22. 578 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 29 mai 2012), que Mmes X..., Y..., Z...et A..., salariées de l'association Partage solidarité accueil, ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de contester les modalités de reclassement appliquées par leur employeur le 1er janvier 2006 lors du changement de système de rémunération et réclamer un rappel de prime d'ancienneté ;
Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts d'accueillir ces demandes, alors, selon le moyen, que l'avenant interprétatif d'un accord collectif signé par l'ensemble des parties à l'accord initial s'impose avec effet rétroactif à la date d'entrée en vigueur de ce dernier accord aussi bien à l'employeur et aux salariés qu'au juge qui ne peut en écarter l'application ; qu'en l'espèce, un avenant n° 2009-01 du 3 avril 2009, signé par l'ensemble des parties signataires de l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002, a précisé que la prise en compte des années de services effectifs pour le calcul de la prime d'ancienneté prévue à l'article 08. 01. 1 de la convention collective du 31 octobre 1951 s'entend « sous réserve des dispositions spécifiques relatives au reclassement des personnels présents au 1er juillet 2003, prévues par l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002 » ; que l'association Partage solidarité accueil faisait valoir que cet avenant du 3 avril 2009, qui vise à préciser le sens du texte issu de l'accord du 25 mars 2002 et reconnaît expressément le caractère spécifique des modalités de calcul de l'ancienneté lors du reclassement des personnels présents au 1er juillet 2003, a la valeur d'un avenant interprétatif qui s'impose au juge ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'avenant du 25 mars 2002 à la convention Fehap du 31 octobre 1951 opère une réforme du système de rémunération reposant sur l'abandon des grilles et leur remplacement par des coefficients ; que suivant l'article 08. 01. 1 de l'avenant, au salaire de base est appliquée une prime d'ancienneté de 1 % par année de services effectifs dans la limite de 30 % ; que le nouveau système de rémunération, intégrant la prime d'ancienneté, se substitue à l'ensemble des éléments de rémunération existant au moment du passage à la convention collective rénovée ; qu'il en résulte que la durée de l'ancienneté à prendre en compte pour le calcul de cette prime correspond à la totalité des services effectifs accomplis par le salarié dans l'entreprise ; que l'avenant n° 2009-01 du 3 avril 2009, qui ne remet pas en cause la notion d'ancienneté telle que définie par l'avenant de 2002, en se bornant à y renvoyer, pour les personnels présents à la date d'application de cet avenant, n'a pas valeur d'avenant interprétatif ;
Et attendu qu'en retenant que la durée de l'ancienneté à prendre en compte était celle correspondant à la totalité des services accomplis par les salariés dans l'entreprise et non celle prise en compte antérieurement dans chacun de leurs échelons successifs, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes, n'encourt pas les griefs du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne l'association Partage solidarité accueil aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Partage solidarité accueil à payer à Mmes A..., Y..., X... et Z...la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen commun produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour l'association Partage solidarité accueil
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR dit que les défenderesses aux pourvois ont droit à un rappel de primes d'ancienneté en fonction de leurs années de service effectif dans le cadre de l'association PARTAGE SOLIDARITE ACCUEIL établissement CANTO MAI, soit 1 % par an à compter du mois de juin 1986 sous réserve de la prise en considération à hauteur de moitié du congé parental pour Madame Y..., 1 % par an à compter du mois de décembre 1987 pour Madame X..., 1 % par an à compter du mois de décembre 1985 pour Madame A...et 1 % par an à compter du mois d'août 1983 pour Madame Z..., d'AVOIR condamné l'association PARTAGE SOLIDARITE ACCUEIL à payer à chacune des défenderesses aux pourvois un rappel de salaires dus du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2009, congés payés compris, avec intérêts de droit au taux légal à compter du 23 juillet 2009 et d'AVOIR dit que l'association PARTAGE SOLIDARITE ACCUEIL devra fournir à chacune des défenderesses aux pourvois des bulletins de paye rectifiés ;
AUX MOTIFS QUE « l'avenant du 25 mars 2002 à la convention FEHAP du 31 octobre 1951 opère une réforme du système de rémunération reposant sur l'abandon des grilles et leur remplacement par des coefficients ; que suivant l'article 08. 01. 1 de l'avenant, au salaire de base est appliquée une prime d'ancienneté de 1 % par année de services effectifs dans la limite de 30 % ; que ce nouveau système de rémunération, intégrant la prime d'ancienneté, se substitue à l'ensemble des éléments de rémunération existant au moment du passage à la convention collective rénovée ; que la cour de cassation ayant rappelé que l'avis du comité de suivi prévu à l'article 14 de l'avenant du 25/ 03/ 2002, n'avait pas valeur d'avenant interprétatif au contraire de ce que soutient l'Association Partage, Solidarité, Accueil, il en résulte que la durée de l'ancienneté à prendre en compte pour le calcul de la prime d'ancienneté correspond à la totalité des services effectifs accomplis par le salarié dans l'entreprise » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « la convention de l'association pour le personnel des établissements PSA du 1er juillet 1998 stipulait, en son article 13, que " les rémunérations sont fixées conformément aux grilles de classification du protocole d'accord salarial de l'association jointes en annexes " ; qu'il y avait une prise en compte de l'ancienneté pour le changement d'échelon, qui ne s'obtenait pas chaque année, puisque l'annexe de la convention prévoyait que " afin de passer à un échelon supérieur dans le même groupe, le salarié devra justifier au minimum d'un an d'ancienneté dans cet échelon, et au minimum de 3 ans. Il devra justifier par ailleurs d'acquisition de compétences nouvelles. Celles-ci seront évaluées par le directeur de l'établissement en présence du délégué du personnel, sur la base de certains critères, entre autres le nombre d'heures de formation, la participation aux réunions de travail, la modification des tâches/ fiche de poste, l'assiduité, l'implication dans le projet de vie et les qualités relationnelles. Un salarié ne pourra passer à un groupe ou à un niveau supérieur que sur appréciation du directeur de l'établissement " ; que c'est dire que l'ancienneté n'était pas prise en considération en tant que telle ; que la convention du 30 juin 2006 a changé les choses en ce qu'elle a abandonné la référence aux grilles et instauré le système suivant : " La rémunération du personnel de l'association PSA est déterminée suivant les principes suivants :- un coefficient de référence est fixé pour chaque regroupement de métier (annexe 1) ;- le salaire de base est obtenu en appliquant au coefficient de base conventionnel la valeur du point en vigueur ;- à ce salaire de base est appliquée une prime d'ancienneté de 1 % par année de services effectifs dans la limite de 30 % ;- les cadres bénéficient en outre d'une majoration spécifique de 1 % par an dans la limite de 20 % calculée sur le salaire de base défini ci-dessus ; A la rémunération déterminée comme indiqué ci-dessus, peuvent s'ajouter le cas échéant, pour les salariés en place au moment de l'application du présent dispositif :- une indemnité de carrière qui a pour objet de garantir à chaque salarié pour la totalité de la carrière lui restant à parcourir, une rémunération totale égale à celle qui aurait été la sienne sur cette même période dans l'ancien dispositif conventionnel ;- une indemnité différentielle destinée à maintenir en euros courants au moment du reclassement le niveau de rémunération acquis au dernier mois complet précédant le nouveau dispositif, dès lors que ce résultat ne serait pas atteint en tenant compte des éléments de rémunération et de l'indemnité de carrière " ; qu'il en résulte que la nouvelle convention met en place une prime d'ancienneté de 1 % par an par année de services dans l'entreprise, et ce dès l'entrée dans l'entreprise, dans la limite de 30 % ; que l'article 2 de la convention du 30 juin 2005 stipule que " la présente convention, conclue le 30 juin 2005, se substituera intégralement à l'accord en date du 1° juillet 1998 modifié par avenant du 2 9 décembre 2000, qu'elle annulera et remplacera à compter du 1° janvier 2006 " ; que c ela signifie que l'ancienne convention " disparaît " à compter du 1° janvier 2006 ; que ça n'est pas faire une application rétroactive de la nouvelle convention, mais une application immédiate que de décider que la prime d'ancienneté du nouveau texte s'applique aux salariés déjà en place dans l'entreprise depuis leur entrée dans celle-ci, faute de quoi ces salariés se trouveraient dans une position différente, voire défavorable, par rapport aux nouveaux venus ; que certes la fiche technique n° 17 et l'additif à la fiche technique n° 17 rédigés pour mettre en place l'aven ant de rénovation de 2002 de la convention FEHAP similaire à la convention du 30 juin 2005 expliquent que " les partenaires sociaux ont fait le choix d'un reclassement au 1° juillet 2003 sur la base de la situation réelle des salariés et non sur la base d'une reconstitution de carrière. C'est ainsi que le pourcentage d'ancienneté dont bénéficient les salariés au moment du reclassement est déterminé par leur position sur la grille qu'ils occupent au 30 juin 2003. L'ancienneté résulte donc de l'addition de la durée de tous les échelons, du 1° échelon jusqu'à l'échelon occupé par le salarié au 30 juin 2003... Ainsi, le pourcentage retenu lors du reclassement ne correspond pas forcément à l'ancienneté totale " ; que certes également, le comité de suivi de l'avenant de rénovation va dans le même sens que la fiche technique en indiquant que le pourcentage d'ancienneté dont bénéficient les salariés au moment du reclassement est déterminé par leur position sur la grille qu'ils occupent au 30 juin 2003, et que cette ancienneté résulte de l'addition de la durée de tous les échelons, du 1° échelon jusqu'à l'échelon occupé par le salarié au 30 juin 2003 ; que toutefois la Cour de Cassation, dans un arrêt du 11 juillet 2007, a clairement indiqué que l'avis du comité de suivi n'a pas valeur interprétative et ne s'impose pas au Juge ; que cette même Cour, dans deux arrêts du 11 juillet 2007 et du 10 mars 2010 concernant l'avenant de rénovation a clairement statué pour dire que " le nouveau système de rémunération, intégrant la prime d'ancienneté, se substitue à l'ensemble des éléments de rémunération existant au moment du passage à la convention rénovée ; qu'il en résulte que la durée de l'ancienneté à prendre en compte pour le calcul de cette prime correspond à la totalité des services effectifs accomplis par le salarié dans l'entreprise " ; que, ce faisant, elle a confirmé la décision critiquée devant elle au terme de laquelle la Cour d'Appel avait décidé que la durée de l'ancienneté à prendre en compte était celle correspondant à la totalité des services accomplis par le salarié dans l'entreprise et non celle prise en compte antérieurement dans chacun de ses échelons successifs " ; que la solution de ces arrêts peuvent être transposés à la convention spécifique PSA, puisque les règles applicables sont les mêmes ; que, contrairement à ce que prétend l'employeur, cela ne revient pas à prendre en compte deux fois l'ancienneté du salarié ; qu'en effet, on peut considérer que, dans l'ancien système, l'ancienneté n'était qu'un facteur déclenchant du changement d'échelon, ce changement dépendant de beaucoup d'autres considérations laissées à l'appréciation du chef d'établissement, à savoir l'acquisition de compétences nouvelles sous de multiples formes ; que c'est cette acquisition de compétences nouvelles qui est déterminante dans le changement d'échelon ; qu'en revanche, le nouveau système prend l'ancienneté en considération pour elle-même ; Attendu que c'est donc à juste titre que (la salariée) sollicite une prime d'ancienneté correspondant à son nombre d'années de services dans l'entreprise » ;
ALORS QUE l'avenant interprétatif d'un accord collectif signé par l'ensemble des parties à l'accord initial s'impose avec effet rétroactif à la date d'entrée en vigueur de ce dernier accord aussi bien à l'employeur et aux salariés qu'au juge qui ne peut en écarter l'application ; qu'en l'espèce, un avenant n° 2009-01 du 3 avril 2009, signé par l'ensemble des parties signataires de l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002, a précisé que la prise en compte des années de services effectifs pour le calcul de la prime d'ancienneté prévue à l'article 08. 01. 1 de la Convention collective du 31 octobre 1951 s'entend « sous réserve des dispositions spécifiques relatives au reclassement des personnels présents au 1er juillet 2003, prévues par l'avenant n° 2002-02 du 25 mars 2002 » ; que l'association PARTAGE SOLIDARITE ACCUEIL faisait valoir que cet avenant du 3 avril 2009, qui vise à préciser le sens du texte issu de l'accord du 25 mars 2002 et reconnaît expressément le caractère spécifique des modalités de calcul de l'ancienneté lors du reclassement des personnels présents au 1er juillet 2003, a la valeur d'un avenant interprétatif qui s'impose au juge ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 455 du Code de procédure civile.