Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 2011, présentée pour M. Jérôme A, domicilié ..., complétée par un mémoire enregistré le 12 juillet 2011 ;
M. A demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0701409 du 26 novembre 2010 du Tribunal administratif de Grenoble en tant seulement qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Grenoble à lui verser une indemnité au titre des pertes de revenus futurs ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Grenoble à lui verser une somme supplémentaire de 118 583,73 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient qu'il ne peut plus porter d'objets lourds ce qui implique une inaptitude au poste de monteur en installations thermiques, emploi exigeant de porter les éléments de l'installation ; qu'il a été licencié et a dû suivre une formation professionnelle ; qu'il occupe actuellement un emploi de monteur en télécommunications, moins bien rémunéré ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 avril 2011, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Grenoble à lui verser la somme de 44 845,82 euros au titre de ses débours, l'indemnité forfaitaire de 980 euros ainsi que les intérêts et leur capitalisation, et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 juin 2011, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Grenoble tendant au rejet de la requête et, à titre incident, à l'annulation du jugement en tant que le Tribunal l'a condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Grenoble la somme de 17 585,85 euros ;
Il soutient que M. A n'a pas apporté la preuve de l'existence d'une incidence professionnelle indemnisable ; qu'il utilise normalement son avant-bras et son poignet gauche ; qu'il a retrouvé un emploi similaire qui exige l'usage normal des deux mains ; que son emploi actuel est rémunéré au SMIC, comme son emploi précédent ; que la caisse n'est pas non plus susceptible de démontrer l'existence d'un lien de causalité entre la rente accident du travail et la faute de l'hôpital ; qu'elle ne justifie pas plus en appel qu'en première instance que les frais de santé sont en rapport avec la faute ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 septembre 2011, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Grenoble qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :
- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;
- les observations de Me Detroyat, avocat de M. A, de Me Demailly, avocat du centre hospitalier de Grenoble et de Me Michaud, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie d'Isère ;
- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;
Sur l'appel principal de M. A :
Considérant que le 19 août 2004, M. A s'est blessé sur son lieu de travail au poignet gauche et qu'il a été transporté au centre hospitalier universitaire de Grenoble où sa plaie a été explorée et suturée ; que ce n'est que le 15 septembre 2004 qu'une échographie pratiquée en raison de douleurs persistantes a mis en évidence une lésion du tendon du grand palmaire ; que par le jugement attaqué du 26 novembre 2010, le Tribunal administratif de Grenoble a jugé le centre hospitalier responsable d'une erreur de diagnostic et l'a condamné à verser à M. A une somme de 14 000 euros en réparation de son préjudice personnel ; que M. A relève appel de ce jugement en tant seulement qu'il ne lui a pas accordé d'indemnité au titre des pertes de revenus futurs ;
Considérant que M. A soutient qu'il a été licencié de son emploi de monteur en installations thermiques en raison de son incapacité à porter des objets lourds, et qu'après avoir suivi une formation professionnelle, il occupe actuellement un emploi de monteur en télécommunications, moins bien rémunéré ; que toutefois, selon l'expert, même dans le cas d'une suture parfaite de la blessure, il y aurait eu nécessairement une perte de force de la flexion palmaire du poignet dès lors qu'à son avis un tendon cicatriciel ne peut avoir de performances normales ; qu'il évalue la perte de force musculaire résultant de la blessure au poignet à 4/5, tout en précisant que cette perte aurait été deux fois moins importante en l'absence de faute de l'hôpital ; qu'il n'est donc pas certain que même si la perte de force musculaire n'avait été que de 2/5, M. A aurait pu continuer d'occuper son emploi de monteur en installations thermiques ; que, dans ces conditions, le lien de causalité entre l'erreur de diagnostic imputable au centre hospitalier et la perte de revenus alléguée n'est pas certain ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'indemnisation au titre des pertes de revenus futurs ;
Sur l'appel incident du centre hospitalier :
Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère verse à M. A une rente d'accident du travail ; que l'objet de cette rente est de contribuer à la réparation du préjudice subi par l'intéressé dans sa vie professionnelle du fait du handicap ; que l'expert nommé par le Tribunal a évalué à 12 % le taux d'incapacité permanente partielle dont M. A est atteint, dont 8 % sont imputables au défaut de prise en charge immédiate de la lésion tendineuse ; que la caisse, ainsi qu'elle le demande, a droit au remboursement de la moitié de cette rente ; que, par suite, le centre hospitalier universitaire de Grenoble n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la somme de 17 585,85 euros correspondant à la moitié des arrérages échus et du capital représentatif des échéances futures de cette rente ;
Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère :
Considérant que le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier universitaire de Grenoble à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la somme de 41 340,70 euros correspondant aux indemnités journalières de 23 754,85 euros et aux arrérages et au capital représentatif de la rente, soit 17 585,85 euros ; que ladite caisse demande en outre le remboursement de frais médicaux et pharmaceutiques, d'un montant de 2 083,09 euros et de frais d'hospitalisation de 1 422,23 euros ; que le lien entre ces frais médicaux et pharmaceutiques et la faute du centre hospitalier est suffisamment établi par l'attestation du médecin-conseil produite devant les premiers juges ; qu'en revanche, il ne résulte pas de l'instruction que les frais d'hospitalisation engagés pour l'intervention réparatrice du 4 octobre 2004, d'un montant de 1 422,23 euros, soient supérieurs à ceux qui auraient été exposés dans l'hypothèse où la lésion aurait été décelée dès la consultation initiale de M. A au service des urgences ; que, dès lors, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère n'a droit qu'au remboursement de la somme de 2 083,09 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2007 et de la capitalisation à chaque échéance annuelle ;
Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 980 euros auquel elle est fixée, à la date du présent arrêt, par l'arrêté interministériel du 10 novembre 2010 ; qu'il y a lieu de mettre la somme de 980 euros à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A et les conclusions de l'appel incident du centre hospitalier universitaire de Grenoble sont rejetées.
Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la somme complémentaire de 2 083,09 euros. Cette somme portera intérêts à compter du 18 avril 2007 et les intérêts seront capitalisés à chaque échéance annuelle.
Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère l'indemnité de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, d'un montant de 980 euros.
Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 26 novembre 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble versera à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A, au centre hospitalier universitaire de Grenoble et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère. Copie en sera adressée à l'expert.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2011 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 octobre 2011.
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N° 11LY00219