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06/07/2011 | FRANCE | N°10PA01341

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 06 juillet 2011, 10PA01341


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 16 mars 2010 et régularisée le 18 mars 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0913444/3-1 du 2 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 31 juillet 2009 retirant le titre de séjour délivré à M. Tiejun A et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Par...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 16 mars 2010 et régularisée le 18 mars 2010, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0913444/3-1 du 2 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 31 juillet 2009 retirant le titre de séjour délivré à M. Tiejun A et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2011 :

- le rapport de Mme Samson, rapporteur,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Lepine, pour M. A ;

Considérant que M. A, entré en France selon ses déclarations le 18 juillet 1999, a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale valable jusqu'au 20 juillet 2009, prorogé jusqu'au 8 août 2009 et exerçait la profession de gérant du restaurant Sakura Sushi ; qu'à la suite du contrôle de cet établissement, le 10 mars 2009, par les services de police, M. A a été interpellé pour travail dissimulé par dissimulation de salariés et emploi d'étrangers démunis de titre de séjour ; que, par une décision du 31 juillet 2009, le préfet de police a retiré à M. A son titre de séjour sur le fondement du 2ème alinéa de l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vertu duquel la carte de séjour temporaire peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, en infraction avec l'article L. 341-6 du code du travail, a assorti ce retrait d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être renvoyé à défaut de départ volontaire ; que le PREFET DE POLICE relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;

Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire peut être retirée à l'étranger passible de poursuites pénales sur le fondement des articles 222-39, 321-6-1, 225-4-1 à 225-4-4, 225-4-7, 225-5 à 225-11, 225-12-5 à 225-12-7, 311-4 (7°) et 312-12-1 du code pénal. / La carte de séjour temporaire peut également être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, en infraction avec l'article L. 341-6 du code du travail ainsi qu'à tout étranger qui méconnaît les dispositions de l'article L. 341-4 du même code ou qui exerce une activité professionnelle non salariée sans en avoir l'autorisation ( ...) ; qu'aux termes de l'article

L. 341-6 du code du travail : Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que, si M. A réside en France depuis 1999 avec son époux et leurs trois enfants, nés en 1996, 2000 et 2002, qui y sont scolarisés, il ne fait état d'aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'il puisse reconstituer sa cellule familiale en Chine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans avec son épouse qui n'est titulaire que d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale et leurs trois jeunes enfants ; que, dans les circonstances de l'espèce, la mesure de retrait de carte de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire, n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à la gravité des faits d'emploi d'un étranger en situation irrégulière et de non déclaration préalable à l'embauche qui lui étaient reprochés et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le PREFET DE POLICE est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé pour ce motif son arrêté du 31 juillet 2009 ;

Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M A devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur la décision de retrait de titre de séjour :

Considérant que la circonstance que la date de notification de l'arrêté apposée de manière manuscrite sur cet acte adressé à M. A soit le 30 juillet 2009 alors que ledit arrêté est daté du 31 juillet 2009 est sans incidence sur sa légalité ;

Considérant que l'arrêté litigieux a été signé par Mme Béatrice B conseillère d'administration, chef du 10ème bureau qui dispose d'une délégation de signature en vertu de l'arrêté n° 2009 - 00358 du 4 mai 2009 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 12 mai 2009, pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte contesté manque en fait ;

Considérant qu'aucune des circonstances sus-évoquées par M. A ne permet de regarder l'arrêté litigieux comme entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé, à exciper de l'illégalité de la décision de retrait de son titre de séjour pour contester la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si M. A fait valoir que son départ portera atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants qui seront soit séparés de leur père, soit obligés d'interrompre leur scolarité en France alors qu'ils ne connaissent pas la Chine, il ressort toutefois des pièces du dossier que le premier enfant de M. A n'est entré en France qu'à l'âge de 8 ans en 2004 ; que l'intéressé n'établit pas que ses enfants ne pourraient poursuivre leur scolarité en Chine et ne fait état d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce qu'il poursuive sa vie familiale avec son épouse et ses trois enfants dans son pays d'origine ; que dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de ses enfants n'aurait pas été pris en compte dans la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant susvisée doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés, les moyens de légalité externe et ceux tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ; que cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. A ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de retrait de carte de séjour pour soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est illégale ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 31 juillet 2009 lui retirant son titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de la mesure d'éloignement doit être rejetée ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, l'Etat n'étant pas partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du 2 février 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par M. A et ses conclusions d'appel sont rejetées.

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N° 10PA01341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA01341
Date de la décision : 06/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. STORTZ
Rapporteur ?: Mme Dominique SAMSON
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : LEPINE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-07-06;10pa01341 ?
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