Vu le recours, enregistré le 4 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement nos 0706228-0706229-0706313-0706314 du 1er octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles
M. et Mme Bachir A ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ;
2°) de remettre les impositions en cause à la charge de M. et Mme A ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Perrine Hamon, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Capon pour M. et Mme A ;
Considérant que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ont été établies à partir de constatations faites par l'administration fiscale au cours de la vérification de la comptabilité de la SARL Boulangerie Le Synthois, qui avait désigné M. A comme bénéficiaire de revenus distribués, en application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de ces impositions supplémentaires ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ; qu'aux termes de l'article 117 du même code : Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale(...), celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ;
Considérant que, sous la signature de M. A, son gérant et associé, la SARL Boulangerie Le Synthois, en réponse à la demande que l'administration lui avait adressée, en application des dispositions précitées de l'article 117 du code général des impôts, a désigné M. A comme bénéficiaire, pour moitié avec un autre associé, des excédents de distribution allégués ; que, dans ces conditions, M. A doit être regardé comme ayant appréhendé les revenus réputés distribués, à défaut de preuve contraire apportée par lui devant le juge de l'impôt ; qu'en revanche, il appartient à l'administration de justifier de l'existence et du montant des bénéfices réintégrés dans les bases de l'impôt sur les sociétés assigné à la SARL Boulangerie Le Synthois, qui sont à l'origine de cette distribution, dès lors que M. A a refusé, dans le délai légal, d'accepter les redressements qui lui ont été notifiés ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la comptabilité de la SARL Boulangerie Le Synthois était dépourvue, entre autres, d'inventaire matériel détaillé pour les années 2002 et 2003, de pièces justificatives des recettes et dépenses pour l'année 2002, de brouillard de caisse et de bandes de contrôle de caisse ; qu'elle présentait des recettes globalisées, une confusion des recettes entre l'activité de vente de boulangerie et d'épicerie, sans que soit établi que l'incendie, qui a détruit une partie des pièces comptables, présente le caractère d'un évènement de force majeure ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que cette comptabilité a été rejetée comme irrégulière et dénuée de force probante et que, dès lors, l'administration a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL Boulangerie Le Synthois ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a suffisamment tenu compte de l'incidence de l'inflation, entre les années 2002 et 2005, en pratiquant un abattement de 10 % sur les chiffres d'affaires reconstitués, conformément à l'avis de la Commission départementale des impôts ; que la comptabilité de la SARL Boulangerie Le Synthois présentait un compte de caisse créditeur au 31 décembre 2002 ainsi qu'un compte courant d'associé débiteur à cette même date ; que la détermination des prix d'achat et de vente de certains produits, ainsi que la prise en compte des remises pratiquées pour certains clients et du taux de perte de marchandises ont été déterminés contradictoirement pendant les opérations de contrôle et arrêtés conformément aux déclarations de ses dirigeants ; qu'enfin, la SARL Boulangerie Le Synthois n'ayant nullement justifié, par ses seules déclarations, que les frais de voyage de certains de ses salariés au titre des années 2002 et 2003 ont été exposés dans son intérêt, c'est à bon droit que ces sommes ont été réintégrées dans son bénéfice imposable ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT établit l'existence et le montant des bénéfices réintégrés dans les bases de l'impôt sur les sociétés assigné à la SARL Boulangerie Le Synthois ; qu'il est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les requérants devant le Tribunal administratif de Lille ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...). Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement, en date du 30 septembre 2005, adressée à M. et Mme A indiquait, après avoir rappelé que M. A avait été désigné comme le bénéficiaire des revenus distribués par la SARL Boulangerie Le Synthois, d'une part, le montant de l'imposition au titre des revenus de capitaux mobiliers auxquels M. et Mme A seraient assujettis à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Boulangerie Le Synthois, d'autre part, se référait expressément à la proposition de rectification antérieurement adressée à ladite société, dont une copie était annexée ; qu'ainsi M. et Mme A étaient informés des motifs de droit et de fait fondant les redressements de manière suffisante pour leur permettre de présenter utilement leurs observations ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette notification manque en fait ;
Considérant qu'il résulte également de l'instruction que, dans sa réponse aux observations des contribuables, en date du 10 novembre 2005, l'administration s'est expressément référée à la réponse qu'elle avait faite aux observations de la SARL Boulangerie Le Synthois et a exposé les considérations de fait et de droit ayant motivé la mise en oeuvre de la majoration pour mauvaise foi ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette réponse à leurs observations sommaires, doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à demander que les impositions litigieuses soient intégralement remises à la charge de M. et Mme A ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement nos 0706228-0706229-0706313-0706314 du 1er octobre 2009 du Tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : M. et Mme A sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 2002 et 2003 à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui leur ont été assignés.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT,
PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. et Mme Bachir A.
Copie sera transmise au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
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N°10DA00157