LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2314-3-1, L. 2324-3-1 et L. 2314-23 du code du travail ;
Attendu que les modalités d'organisation du scrutin, fixées par un protocole préélectoral dont la régularité n'est pas contestée, s'imposent à l'employeur et aux organisations syndicales ;
Attendu, selon le jugement attaqué, qu'un protocole préélectoral a été signé le 2 septembre 2010, complété par un avenant du 29 septembre 2010, pour l'organisation des élections professionnelles au sein de la société GFK-ISL ; que le second tour devait se dérouler le 4 novembre 2010 ; que reprochant à l'employeur d'avoir écarté les listes qu'elle avait déposées pour ce second tour, collège enquêteurs, en raison de la tardiveté du dépôt, la Fédération nationale des personnels des sociétés d'études de conseil et de prévention CGT (le syndicat) a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation du second tour ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, le tribunal énonce qu'un envoi certes tardif d'une liste de candidatures pouvait néanmoins être pris en compte par l'employeur dès lors que l'organisation du scrutin n'avait pas été perturbée, le retard étant en l'espèce de courte durée ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que le protocole préélectoral, prévoyait que les listes de candidatures devaient être déposées au plus tard le 25 octobre à 17 heures, et que le syndicat CGT avait envoyé sa liste vers 22 heures, ce dont il se déduisait que l'employeur n'avait commis aucune irrégularité en refusant d'en tenir compte, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 17 décembre 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Puteaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Courbevoie ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour la société GFK ISL Custom Research France
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR constaté l'irrégularité du scrutin intervenu au titre de l'élection des membres du comité d'entreprise, mais aussi des délégués du personnel sur le seul établissement de Rueil-Malmaison, Collège Enquêteurs, titulaires et suppléants, d'AVOIR annulé, en conséquence, ces opérations électorales qui devront être réitérées dans les conditions légales et, d'AVOIR condamné la société GFK à verser à la Fédération nationale des personnels des sociétés d'études, de conseil et de prévention CGT, la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la régularité de l'élection des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel du site de Rueil dans le cadre du second Tour Collège Enquêteurs au sein de la SAS GFK-ISL CUSTOM RESEARCH FRANCE : au second tour des élections les candidatures sont libres ; que par ailleurs les listes présentées par une organisation syndicale au premier tour sont présumées maintenues au second tour, le syndicat restant libre de les modifier ; que l'employeur, même avec l'accord des organisations syndicales, ne peut se faire juge de la validité de l'élection et ne peut en application de ce principe général du droit, refuser de sa seule initiative une candidature ou un liste de candidats dont il a l'obligation de tenir compte ; qu'en l'espèce il est constant que : 1°) le protocole d'accord, signé notamment de F. X..., délégué syndical CGT, le 06 septembre 2010 prévoyait les mêmes modalités de dépôt de candidatures pour le second tour qu'au premier soit : " les listes seront communiquées soit par lettre recommandée, soit par remise en main propre contre décharge soit compte tenu de l'éloignement géographique par courrier électronique " ; que les listes pour le second tour devaient être déposées le 11 octobre avant 17 h ; qu'il était précisé que : " compte tenu de l'organisation du vote par correspondance et du délai nécessaire pour que les électeurs votant par correspondance soient informés en temps utile, la Direction sera fondée à refuser les listes déposées après ces dates " ; que l'avenant au protocole électoral le 29 septembre 2010, également signé de F. X..., fixait au 25 octobre 2010 la date limite de communication à la Direction des candidatures à 17h étant précisé que les documents nécessaires au vote par correspondance seraient envoyés aux électeurs le 28 suivant ; que cet avenant stipulait (article 5) qu'ayant pour seul et unique objet de modifier les dates des élections et d'envoi du matériel de vote par correspondance, " toutes les autres dispositions prévues dans le cadre du protocole d'accord du 6 septembre 2010 demeur (ai) ent inchangées " ; que les candidatures CGT ont été transmises pour le premier tour par F. X..., et ont dû être remaniées pour être recevables (échange de courriels du 14 au 17. 09, 10) ;
qu'à la suite du premier tour, A. Y...a adressé un message rappelant les conditions de dépôt de candidatures pour le second tour, en indiquant " tout courrier de candidature reçu après le 25 octobre à 17h ne pourra être pris en compte " ; que la D. R. H. a été avisée par F. X...de ce que G. Z...se présentait sur la liste CGT dans le collège Enquêteur en tant que suppléant DP/ CE le 22 octobre 2010 ; il a donc été demandé en retour au délégué de refaire une liste complète ; que par ailleurs C. A...s'est désisté le 24 octobre 10 et en a avisé la Direction et F. X...; qu'une liste a été transmise sur une adresse personnelle de J. B...non salarié de l'entreprise le 25 octobre 2010 à 11h15, signée T. C... ; que la validité de cette liste a été mise en cause dès réception par A. Y...dès lors que les modifications concernant C. A...et G. Z...n'y figuraient pas ; qu'une liste rectifiée a été adressée par F. X...le même jour à 17h03 ; que la liste diffusée par l'employeur et transmise le 25 octobre 2010 à23h04 pour impression, pour le second tour des élections, ne comportait aucun des noms présentés par la CGT ; que la FEDERATION NATIONALE DES PERSONNELS DES SOCIETES D'ETUDES, de CONSEIL et de PREVENTION CGT ayant contesté le 29 octobre 2010 les conditions dans lesquelles s'étaient déroulées les élections, la SAS GFK – ISL CUSTOM RESEARCH France a répliqué en particulier le 10 novembre 2010 que accepter une liste arrivée tardivement exposait l'entreprise à une demande d'annulation des élections par les autres organisations syndicales qui entendaient voir strictement appliquer les règles du protocole ; que dès lors que le syndicat CGT avait indiqué régulièrement par courriel qu'un nouveau candidat se présentait sur ses listes, G. Z..., une ambiguïté se présentait puisqu'il s'agissait de savoir, ce qui a été relevé par la D. R. H. dans ses échanges avec le délégué syndical CGT, si la liste devait être constituée de ce seul nom, ambiguïté que l'employeur ne pouvait prendre l'initiative de trancher de lui-même sans recours judiciaire et en omettant autoritairement toute liste CGT ; que l'employeur était habilité en revanche par la jurisprudence à retirer de la liste initiale CGT le nom de C. A...qui s'était formellement désistée (C. Cass Soc 05. 03. 1997 n° 96-60. 034) ; que ce seul moyen justifie l'annulation du scrutin en raison de l'irrégularité constatée étant rappelé que le tribunal prend en application de la Loi les moyens de répondre en urgence dans un contexte préélectoral aux requêtes qui lui sont présentées ; que par ailleurs, il a pu être jugé qu'un envoi certes tardif d'une liste électorale pouvait néanmoins être pris en compte par l'employeur dès lors que l'organisation du scrutin n'avait pas été perturbée, le retard étant en l'espèce de courte durée mais d'une durée bien supérieure au retard reproché à la requérante ; qu'en l'espèce il convient de relever que la D. R. H. a admis elle-même avoir pris connaissance de la liste rectifiée de la CGT vers 22h alors qu'il ressort des éléments versés par l'employeur que l'ensemble des listes a été communiqué à l'imprimeur seulement à 23h : elle avait donc encore la possibilité de la joindre à cet envoi ; qu'en conséquence il convient en raison des irrégularités commises d'annuler le scrutin litigieux ; qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la requérante une partie des sommes exposées et non comprises dans les dépens.
ALORS, d'une part, QUE le juge est tenu par les termes du débat tels qu'il sont fixés par les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la CGT contestait uniquement la validité du scrutin en ce que n'auraient pas été prises en considération par la société GFK – ISL, d'abord une première liste dite « CGT » déposée le 25 octobre 2010 à 11h15, dans le délai fixé par le protocole préélectoral, et ensuite, la liste officielle CGT déposée le même jour, après le délai fixé par le protocole d'accord préélectoral à 17h03 ; qu'en annulant le scrutin au motif que la candidature de Monsieur Z...au second tour des élections, aurait dû être prise en compte puisque présentée par courriel dès le 22 octobre 2010, le tribunal qui a statué hors des termes du débat tels que fixés par les conclusions respectives de parties, a méconnu les exigences des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, d'autre part, QUE sauf circonstances particulières, l'employeur est en droit de refuser une candidature déposée hors du délai fixé, non par lui-même, mais par le protocole d'accord préélectoral dont les dispositions, en l'absence de contestation, s'imposent à toutes les parties ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance qui a annulé l'élection des membres du comité d'entreprise et des délégués du personnel sur le seul établissement de Rueil-Malmaison, collège enquêteurs, titulaires et suppléants, en raison du refus de l'employeur de prendre en considération la liste des candidats CGT qui avait été déposée 5 heures après le délai fixé par le protocole préélectoral, sans avoir recherché si la CGT démontrait l'existence de circonstances particulières de nature à justifier ce retard, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2314-23, L. 2324-21 du Code du travail et 1134 du Code civil.