Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour M. Christophe A, ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement no 0702256, du 28 juillet 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2004 au 28 décembre 2006 ;
2°) de prononcer la restitution demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. A soutient que les actes de chiropraxie relèvent de la catégorie des actes médicaux mentionnés par l'arrêté du 6 janvier 1962, dont la pratique est réservée aux professions médicales ou aux auxiliaires médicaux ; qu'il est titulaire du diplôme de chiropraticien délivré par le Palmer College of Chiropraxie, situé aux Etats-Unis, et qu'une telle pratique fait l'objet de contrôles réguliers ; qu'ainsi, le principe de neutralité fiscale et les objectifs définis par l'article 13 de la sixième directive ont été méconnus ; que la profession de chiropraticien s'inscrit nécessairement dans le champ des professions de santé et que la qualité des actes pratiqués est reconnue ; que la carence de l'Etat à produire les textes en application de la loi du 4 mars 2002 ne peut lui être objectée, dès lors que le législateur a clairement entendu, par cette loi, classer les chiropracteurs dans la catégorie des professions paramédicales réglementées ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, tendant au rejet de la requête ;
Le ministre fait valoir que, faute de décret d'application de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002, le requérant ne peut se prévaloir de l'exonération prévue par l'article 261-4-1° du code général des impôts ; qu'en l'absence de décret, les actes ne peuvent être considérés comme constituant des prestations de soins effectuées dans le cadre d'une profession réglementée ; que le principe de neutralité n'a pas été méconnue, dès lors que le contribuable ne démontre pas qu'il a, compte tenu de sa qualification, délivré des traitements d'une qualité équivalente à celle des traitements délivrés par des professions bénéficiant de l'exonération ; que le requérant ne produit aucun élément relatif à sa propre pratique ;
Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 31 mars 2010, présenté pour M. A ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la sixième directive n°77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu l'arrêté du 6 janvier 1962, modifié, fixant la liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoire d'analyses médicales non médecins ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2010 :
- le rapport de Mme Jourdan, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;
Considérant que M. A, qui exerce une activité de chiropraxie, relève appel du jugement du 28 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti pour la période du 1er janvier 2004 au 28 décembre 2006 au titre de cette activité ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la sixième directive n° 77-388-CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, alors en vigueur : A.- Exonérations en faveur de certaines activités d'intérêt général. 1. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à chaque Etat membre de définir, dans son propre droit interne, les professions paramédicales dans le cadre desquelles l'exercice des soins à la personne est exonéré de la taxe sur la valeur ajoutée ; que les Etats membres disposent pour ce faire d'un pouvoir d'appréciation, limité par l'objectif poursuivi par ces dispositions, lesquelles visent à garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne qui sont fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises, ainsi que par le principe de neutralité fiscale, lequel s'oppose à ce que des prestations de services semblables, qui se trouvent donc en concurrence les unes avec les autres, soient traitées de manière différente du point de vue de la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c), de la sixième directive n'est contraire au principe de neutralité fiscale que s'il peut être démontré que les personnes exerçant cette profession ou activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles aptes à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalent à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de cette même réglementation nationale, de l'exonération ; que, dès lors, pour apprécier si la qualité des traitements effectués par une personne exerçant une telle activité peut être considérée, compte tenu des qualifications professionnelles de ce praticien, comme équivalente à celle des traitements similaires prodigués par des membres d'autres professions médicales ou paramédicales non soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, il convient de tenir compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la formation suivie par l'intéressé, ainsi que des conditions d'exercice de son activité, telles que, notamment, l'existence ou non, au cours de la période considérée, d'une réglementation spécifique, prévoyant, par exemple, un contrôle de sa pratique ou son inscription sur un registre, ou encore la circonstance que des patients lui seraient adressés par des membres d'autres professions médicales ou paramédicales ;
Considérant qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts : Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4.1° Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...). ; que le législateur a ainsi entendu exonérer de la taxe sur la valeur ajoutée les actes régulièrement dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées par une disposition législative ou par un texte pris en application d'une telle disposition ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R.194-1 du livre des procédures fiscales : Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal fondé ;
Considérant que l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui a défini les modalités d'exercice de l'activité de chiropraxie dont la profession n'était pas réglementée, a renvoyé à des décrets d'application le soin de déterminer, notamment, les conditions permettant aux chiropracteurs en exercice de bénéficier du titre de chiropracteurs, les actes que les titulaires de ce titre sont autorisés à effectuer et les conditions dans lesquelles ils les accomplissent ; que ces décrets n'avaient pas été pris lors de la période d'imposition litigieuse courant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ; que cette absence faisait obstacle à l'application des dispositions de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 ; que le requérant ne peut, dès lors, utilement se prévaloir, à l'appui de sa demande de restitution, de la seule volonté du législateur de classer les chiropracteurs dans la catégorie des professions paramédicales réglementées ;
Considérant que M. A n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les actes de chiropraxie qu'il a lui-même accomplis durant la période courant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 doivent être regardés comme d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués par un médecin, auraient été exonérés, au seul motif que les actes de chiropraxie relèvent par nature de la catégorie des actes médicaux mentionnés par l'arrêté du 6 janvier 1962 dont la pratique est réservée aux professions médicales ou aux auxiliaires médicaux ; qu'en particulier, l'intéressé, qui fait référence, notamment, aux rapports émanant d'autorités mondiales en matière de chiropraxie ou d'un rapport de l'organisation mondiale de la santé, n'établit pas, par les éléments qu'il produit, y compris pour la première fois en appel, les caractéristiques de sa propre pratique qui permettraient d'appréhender la nature des actes qu'il a accomplis sous la dénomination d'actes de chiropraxie ainsi que les conditions dans lesquelles lesdits actes ont été effectués ;
Considérant que M. A, qui n'est pas titulaire du diplôme de docteur en médecine, invoque le principe communautaire de neutralité fiscale pour soutenir que, dès lors qu'il a suivi une formation lui ayant permis d'acquérir une compétence en chiropraxie reconnue par la délivrance d'un diplôme par le Palmer College of Chiropraxie , situé aux Etats Unis, au moins équivalente à celle acquise dans cette discipline par les membres de professions de santé, dont les médecins, il était en droit de bénéficier, au même titre que ces derniers, de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée à raison des actes qu'il a dispensés ; que, toutefois, il n'établit pas, par ces seules allégations, que les actes de chiropraxie qu'il a lui-même accomplis, alors même qu'ils feraient l'objet d'un contrôle régulier par des organismes extérieurs appartenant à un réseau européen et mondial très structuré d'accréditation des centres de formation chiropratiques , auraient pu être considérés comme d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués par des médecins pratiquant la chiropraxie, auraient été exonérés ; que, par suite, les moyens tirés de la violation du principe de neutralité fiscale et des objectifs définis par l'article 13 de la sixième directive précité, ainsi que de l'existence d'une concurrence illégale entre les différents praticiens de la chiropraxie, ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant que le moyen selon lequel les décrets pris dans le domaine de l'ostéopathie, notamment le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007, seraient peu exigeants quant à la pratique de cette activité, alors que la profession de chiropraticien s'inscrirait nécessairement dans le champ des professions de santé, délivrant des prestations de qualité exécutées par des personnes formées et diplômées pour ce faire, est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christophe A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2010 à laquelle siégeaient :
M. Montsec, président,
Mme Jourdan et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 27 avril 2010.
''
''
''
''
No 09LY02141