Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2009 au greffe de Cour, régularisée le 21 septembre 2009, présentée pour M. Fabien A, domicilié 10 rue du Chapeau rouge à Dijon (21000) ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701522, en date du 31 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a spontanément acquittés pour la période du 1er janvier 2004 au 30 novembre 2006 ;
2°) d'ordonner cette restitution ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- il doit être exonéré de taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 13 - A - 1 - c de la 6ème directive n° 77/388/CEE du 17 mai 1977, de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes et du principe de neutralité fiscale ; les chiropraticiens ont la qualité de professionnels de santé ; ayant suivi une formation spécifique assurée par l'Institut franco européen de chiropratique, il a démontré la qualité de cette formation ainsi que de sa pratique ; le fait qu'il soit traité différemment que des professions règlementées telles que celle des médecins, avec lesquelles il se trouve en concurrence, porte atteinte au principe de neutralité fiscale et constitue une rupture d'égalité et une distorsion de concurrence entre contribuables ;
- la carence de l'Etat à produire les textes d'application de la loi du 4 mars 2002 ne peut lui être opposée, le Parlement ayant affirmé sa volonté de réglementer la profession ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, tendant au rejet de la requête de M. A ; le ministre soutient que la charge de la preuve incombe au contribuable, en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ; qu'il n'y a pas d'exonération possible de la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 en l'absence de décret d'application ; que le requérant n'établit pas avoir accompli des actes d'une qualité équivalente à celle de ceux qui, s'ils avaient été pratiqués par des médecins exerçant la chiropraxie, auraient été exonérés de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il n'y a pas en l'espèce violation du principe de neutralité fiscale et des objectifs définis par l'article 13 de la 6ème directive CEE ;
Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 24 juin 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et par les moyens supplémentaires que les pièces produites par le requérant ne démontrent pas que les actes pratiqués pendant la période en litige présentaient une qualité équivalente aux traitements similaires réalisés par des médecins pratiquant la chiropraxie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 14, et l'article 1er du protocole N° 1 additionnel à cette convention ;
Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2010 :
- le rapport de M. Montsec, président assesseur ;
- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;
Considérant que M. Fabien A, qui exerce l'activité de chiropracteur à Dijon (Côte d'Or), a acquitté la taxe sur la valeur ajoutée à raison des recettes afférentes à son activité pour la période allant du 1er janvier 2004 au 30 novembre 2006 ; qu'il a sollicité la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a ainsi spontanément acquittés ; qu'il relève appel du jugement en date du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande ;
Sur la demande de restitution des droits acquittés :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Lorsqu'ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ; qu'en tout état de cause il incombe au requérant, qui ne peut à cet égard utilement invoquer une rupture d'égalité vis-à-vis des contribuables n'ayant pas spontanément acquitté la taxe, d'apporter les éléments, qu'il est le seul à détenir, à même d'établir qu'il remplit les conditions pour bénéficier d'une exonération ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ; que, toutefois, ainsi qu'il résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles aptes à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalent à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;
Considérant que l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé reconnaît l'usage professionnel du titre de chiropracteur aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique en la matière ; qu'il prévoit que les praticiens en exercice à la date d'entrée en vigueur de la loi peuvent se voir reconnaître le titre de chiropracteur dans les conditions qu'il définit et qui seront précisées par décret ; que, si la loi précitée a ainsi reconnu l'existence de la profession de chiropracteur, elle a renvoyé à des décrets d'application la définition des conditions et des modalités selon lesquelles ceux-ci pouvaient dispenser leurs soins, notamment en ce qui concerne tant la formation requise que la nature des actes qu'ils seraient habilités à effectuer ; que les mesures ainsi nécessaires à l'application de cette loi n'ayant pas été prises, M. A n'est pas fondé à se prévaloir de celle-ci pour la période en litige ;
Considérant que, nonobstant la formation dont il fait état, qu'il aurait reçue au Life chiropractic college (Etats-Unis), qui aurait été sanctionnée par un diplôme délivré le 15 décembre 1995, mais à propos de laquelle il n'indique ni sa durée, ni son contenu, M. A, qui au demeurant ne fournit aucune précision sur la nature des soins qu'il prodiguait au cours de la période en litige, ne justifie pas de ce que les actes qu'il a accomplis pendant cette période étaient d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués par un médecin, auraient été exonérés ; qu'il n'est pas ainsi fondé à soutenir que son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée pour cette activité porte atteinte au principe de neutralité fiscale et constitue une rupture d'égalité et une distorsion de concurrence entre contribuables ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il a présentées à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Fabien A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2010, à laquelle siégeaient :
M. Duchon-Doris, président de chambre,
M. Montsec, président assesseur,
M. Raisson, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 octobre 2010.
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N° 09LY01736
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