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30/06/2010 | FRANCE | N°09LY01065

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 30 juin 2010, 09LY01065


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 mai 2009, présentée pour la COMMUNE DE VALENCE, représentée par son maire en exercice, à ce dûment autorisé par délibération du conseil municipal en date du 31 mars 2008 ;

La COMMUNE DE VALENCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900115, en date du 17 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté en date du 28 août 2008 du maire de la commune interdisant la culture de plantes génétiquement modifiées en plein champ, à quelque fin que ce soit, dans les zones r

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 mai 2009, présentée pour la COMMUNE DE VALENCE, représentée par son maire en exercice, à ce dûment autorisé par délibération du conseil municipal en date du 31 mars 2008 ;

La COMMUNE DE VALENCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900115, en date du 17 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté en date du 28 août 2008 du maire de la commune interdisant la culture de plantes génétiquement modifiées en plein champ, à quelque fin que ce soit, dans les zones référencées NAa, NAb, NAlr, NAu, NC, ND, NDfr, NDl du plan d'occupation des sols de la commune, pour une durée de trois ans ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en exigeant l'existence d'un péril grave et imminent pour reconnaître la compétence de police du maire, dès lors que l'existence d'une police spéciale ne fait pas obstacle à l'existence d'une police générale, justifiée par les circonstances locales ; que l'agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique a attiré l'attention des autorités sur l'un des risques principaux de la culture d'organismes génétiquement modifiés en plein champ, qui consiste en un risque de prolifération par colonisation du milieu ; que la dissémination liée aux cultures en plein champ est d'autant plus importante lorsque les champs ainsi ensemencés sont ouverts aux vents ; que la COMMUNE DE VALENCE, qui se trouve au coeur de la vallée du Rhône, est l'une des plus ventée de France et que le risque est amplifié par le passage entre les deux obstacles que constituent le Massif central et les Alpes du sud ; que les études sont loin d'exclure tout risque quant aux effets sanitaires potentiels ; qu'à titre subsidiaire, l'existence d'un péril grave et imminent existe du fait du risque de dissémination et de pollinisation des cultures biologiques et que seul l'Etat connaît l'implantation géographique des cultures d'organismes génétiquement modifiés ; qu'il y a lieu d'appliquer le principe de précaution, de valeur constitutionnelle, justifiant une intervention non seulement en cas de danger avéré, mais aussi en cas de risques de danger ; que la mesure est en l'espèce proportionnée au regard du risque et présente un coût de faible importance, n'atteignant aucune liberté individuelle ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2009, présenté par le préfet de la Drôme, tendant au rejet de la requête ;

Le préfet fait valoir que le régime d'autorisation administrative de dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié, institué dans un but de police par l'article L. 533-3 du code de l'environnement, relève de la compétence du ministre de l'agriculture ; qu'ainsi, le maire ne peut intervenir qu'en cas de danger grave et imminent ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; qu'aucune culture d'organismes génétiquement modifiés n'est actuellement réalisée et qu'aucune demande d'autorisation n'a été effectuée en ce sens dans le secteur ; qu'aucun danger ne justifie l'adoption de la mesure en litige par le maire de la commune ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 novembre 2009, présenté pour la COMMUNE DE VALENCE, tendant, par les mêmes moyens, aux mêmes fins que la requête ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 29 janvier 2010, présenté par le préfet de la Drôme, tendant au rejet de la requête ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2010 :

- le rapport de Mme Jourdan, premier conseiller ;

- les observations de Me Plunian, avocat de la COMMUNE DE VALENCE ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à Me Plunian, avocat de la COMMUNE DE VALENCE ;

Considérant que la COMMUNE DE VALENCE demande l'annulation du jugement du 17 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté en date du 28 août 2008 du maire de la commune interdisant la culture de plantes génétiquement modifiées en plein champ, à quelque fin que ce soit, dans les zones référencées NAa, NAb, NAlr, NAu, NC, ND, NDfr, NDl du plan d'occupation des sols de la commune, pour une durée de trois ans ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 533-2 du code de l'environnement : Au sens du présent chapitre, on entend par dissémination volontaire toute introduction intentionnelle dans l'environnement, à des fins de recherche ou de développement ou à toute autre fin que la mise sur le marché, d'un organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés ; qu'aux termes de l'article L. 533-3 du même code : Toute dissémination volontaire, ou tout programme coordonné de telles disséminations, est subordonné à une autorisation préalable. Cette autorisation est délivrée par l'autorité administrative après examen des risques que présente la dissémination pour la santé publique ou pour l'environnement. (...) ; que cette autorisation relève, selon les cas, du ministre chargé de l'environnement ou du ministre de l'agriculture après avis du ministre chargé de l'environnement ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5°) le soin de prévenir, par des prescriptions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, (...) les pollutions de toute nature, (...) de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (...) ; qu'aux termes de l'article L. 2212-4 du même code : En cas de danger grave ou imminent, tels que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances (...) ;

Considérant que, s'il appartient au maire, en vertu des pouvoirs de police qu'il tient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, le régime d'autorisation administrative de la dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié, institué dans un but de police par l'article L. 533-3 du code de l'environnement, relève de la compétence exclusive du ministre chargé de l'environnement ou du ministre de l'agriculture, selon les cas ; que, dès lors, le maire ne peut s'immiscer dans l'exercice de cette police spéciale que dans l'hypothèse de péril imminent ;

Considérant que le maire de Valence n'établit pas l'existence d'un risque de survenance d'un péril imminent, en se prévalant de circonstances locales particulières sur le territoire de la commune, caractérisées par un risque accru de dissémination et de pollinisation des cultures biologiques du fait des particularités géographiques de la zone et de la présence d'un fort vent, alors qu'aucune autorisation de culture d'organismes génétiquement modifiés n'a été octroyée, ni même sollicité, dans le secteur ou à proximité de la zone concernée ; qu'ainsi, en l'absence de péril imminent, le maire de Valence ne pouvait légalement interdire la culture de plantes génétiquement modifiées en plein champ ; qu'en édictant une telle interdiction, par son arrêté en date du 28 août 2008, il a excédé les pouvoirs de police qu'il tenait du code général des collectivités territoriales ;

Considérant que la COMMUNE DE VALENCE n'est pas fondée à se prévaloir du principe de précaution et de préservation de l'environnement pour justifier de sa compétence à interdire la culture de plantes génétiquement modifiées, dès lors que cette compétence relève selon les cas, ainsi que cela vient d'être dit, du ministre chargé de l'environnement ou du ministre de l'agriculture ;

Considérant que la commune ne peut utilement se prévaloir de la double circonstance que la mesure édictée présente un faible coût et n'affecte sérieusement aucune liberté individuelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE VALENCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande du préfet de la Drôme, l'arrêté du 28 août 2008 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la COMMUNE DE VALENCE la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE VALENCE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE VALENCE, au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2010 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mme Jourdan et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 30 juin 2010.

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No 09LY01065


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01065
Date de la décision : 30/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Dominique JOURDAN
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : PLUNIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-30;09ly01065 ?
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