Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 juillet 2008, présentée pour le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES, dont le siège est 55 rue Martin Luther King, BP 627 à Mont-de-Marsan (40006), par Me Krust ; le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES (SYDEC) demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0502209 en date du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la délibération du comité syndical du syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable (SIAEP) de Mugron en date du 21 septembre 2005 autorisant son président à signer la convention de délégation de service public pour l'alimentation en eau potable avec la société SOGEDO et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à ce syndicat soit de résilier ladite convention, soit de saisir le juge du contrat pour en constater la nullité ;
2°) d'annuler cette délibération ;
3°) d'enjoindre au SIAEP de Mugron soit de résilier la convention de délégation du service public pour l'alimentation en eau potable, soit de saisir le juge du contrat pour en constater la nullité dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 700 euros par jour de retard ;
4°) de condamner le SIAEP de Mugron à lui verser la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, notamment son article 38 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2010 :
- le rapport de M. Braud, premier conseiller,
- les observations de Me Krust, pour le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES, de Me Cazcarra, pour le SIAEP de Mugron et de Me Le Jariel, pour la société SOGEDO,
- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;
La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;
Considérant que le 9 juillet 2004, le syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable (SIAEP) de Mugron a engagé une procédure afin de renouveler la délégation de la gestion du service d'alimentation en eau potable précédemment exploité par la société SOGEDO en vertu d'un contrat d'affermage dont le terme était fixé au 30 juin 2005 ; qu'à l'issue de cette procédure, le conseil syndical du SIAEP de Mugron, approuvant le choix de son président, a, par une délibération en date du 21 septembre 2005, décidé de confier à nouveau l'affermage de ce service à la société SOGEDO et a donc autorisé son président à signer le contrat y afférent ; que, par un jugement en date du 5 juin 2008, le Tribunal administratif de Pau a rejeté les demandes du SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES (SYDEC) DES LANDES, candidat à la délégation de service public dont l'offre n'a pas été retenue, tendant à l'annulation de cette délibération et à ce qu'il soit enjoint au SIAEP de Mugron de résilier cette convention ou, à défaut, de saisir le juge du contrat pour qu'il constate la nullité de cette convention ; que le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES relève appel de ce jugement ;
Considérant, en premier lieu, que les délégations de service public sont soumises aux principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique ; que, pour assurer le respect de ces principes, la personne publique doit apporter aux candidats à l'attribution d'une délégation de service public, avant le dépôt de leurs offres, une information sur les critères de sélection des offres ; que la circonstance que les dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, codifiées à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, prévoient seulement que, après avoir dressé la liste des candidats admis à présenter une offre, la collectivité publique " adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager " est sans incidence sur l'obligation d'informer également ces candidats des critères de sélection de leurs offres ; que, toutefois, les dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 prévoyant que la personne publique négocie librement les offres avant de choisir, au terme de cette négociation, le délégataire, elle n'est pas tenue d'informer les candidats des modalités de mise en oeuvre de ces critères ; que ces règles s'imposent à l'ensemble des délégations de service public, qu'elles entrent ou non dans le champ du droit communautaire ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de l'avis d'appel public à la concurrence et du dossier de consultation, que le SIAEP de Mugron ait fourni aux candidats à l'attribution de cette délégation de service public une information sur les critères de sélection des offres ; que le contenu du dossier de consultation ne peut, contrairement à ce que soutient le SIAEP de Mugron, suppléer à cette omission dès lors qu'il comporte un simple exposé des caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations et des modalités formelles de présentation des offres ; que, par suite, la délibération litigieuse a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) Au vu de l'avis de la commission, l'autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre. Elle saisit l'assemblée délibérante du choix de l'entreprise auquel elle a procédé. Elle lui transmet le rapport de la commission présentant notamment la liste des entreprises admises à présenter une offre et l'analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l'économie générale du contrat " ;
Considérant que si, dans la partie du rapport du président consacrée au " choix de la société fermière ", ce dernier indique les motifs pour lesquels il n'a pas retenu l'offre adressée par le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES, il n'expose pas pour autant les motifs pour lesquels il a choisi l'offre de la société SOGEDO ; qu'en effet, en se bornant à reproduire, sans aucun commentaire, des tableaux comparatifs des offres des trois candidats retenus en ce qui concerne les comptes d'exploitation prévisionnels, les moyens techniques, les moyens humains et l'accueil des usagers et à indiquer que " la société SOGEDO de Saint-André de Cubzac (...) présente la meilleure offre, pour une durée de contrat de dix (10) ans ", le président du SIAEP de Mugron n'a pas exposé les motifs pour lesquels il a considéré que l'offre de la société SOGEDO était la meilleure ; que, dans ces conditions, le rapport du président du SIAEP de Mugron ne peut être regardé comme satisfaisant aux exigences de l'article L. 1411-5 précité du code général des collectivités territoriales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat ; qu'il appartient au juge de l'exécution, saisi d'une demande d'un tiers tendant à ce qu'il soit enjoint à une partie au contrat de saisir le juge compétent afin d'en constater la nullité, de prendre en compte la nature de l'acte annulé ainsi que le vice dont il est entaché et de vérifier que la nullité du contrat ne portera pas, si elle est constatée, une atteinte excessive à l'intérêt général ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la délibération du conseil syndical du SIAEP de Mugron attribuant la délégation de la gestion du service d'alimentation en eau potable à la société SOGEDO et autorisant son président à signer la convention d'affermage y afférente est illégale notamment au motif que le président du syndicat n'avait pas exposé au conseil syndical les motifs de son choix en violation de l'article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales ; que ce défaut d'information constitue un vice affectant les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement ; qu'il ne résulte de l'instruction ni que la résiliation de cette convention est susceptible d'imposer au SIAEP de Mugron de supporter une charge indemnitaire d'une importance telle qu'elle pourrait obérer sa capacité à assumer sa vocation, ni qu'il lui est impossible de prendre des mesures transitoires pour assurer la continuité du service d'alimentation en eau potable durant la période nécessaire à la passation d'une nouvelle convention d'affermage ; que, dans ces circonstances, la nullité de la convention ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général ; que, par suite, le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au SIAEP de Mugron, s'il ne peut obtenir de la société SOGEDO qu'elle accepte la résolution amiable du contrat passé avec elle pour l'exploitation du service d'alimentation en eau potable, de saisir, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, le juge du contrat afin de faire constater la nullité du contrat en cause ; qu'il n'y a pas lieu toutefois d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au SIAEP de Mugron et à la société SOGEDO les sommes qu'ils demandent sur ce fondement ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions du SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES présentées sur le même fondement en condamnant le SIAEP de Mugron à lui verser une somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0502209 du Tribunal administratif de Pau en date du 5 juin 2008 est annulé.
Article 2 : La délibération du conseil syndical du SIAEP de Mugron en date du 21 septembre 2005 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au SIAEP de Mugron, s'il ne peut obtenir de la société SOGEDO qu'elle accepte la résolution amiable du contrat passé avec elle pour l'exploitation du service d'alimentation en eau potable, de saisir le juge du contrat afin de faire constater la nullité dudit contrat dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le SIAEP de Mugron versera au SYNDICAT MIXTE DEPARTEMENTAL D'EQUIPEMENT DES COMMUNES DES LANDES une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions présentées par le syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de Mugron et la société SOGEDO au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 08BX01968