LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Florian,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 16 juillet 2008, qui, pour diffamation envers un citoyen chargé d'un mandat public, l'a condamné à 3 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 31 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Vu l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que le texte précité ne punit de peines particulières les diffamations dirigées contre une personne revêtue de la qualité qu'il énonce que lorsque ces diffamations sont faites en raison de leurs fonctions ou de leur qualité ; que les imputations, qui doivent s'apprécier non d'après l'intention de leur auteur ou le but par lui recherché, mais d'après leur objet même et la nature du fait sur lequel elles portent, doivent présenter un rapport direct et étroit avec les fonctions ou la qualité ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Christophe D..., conseiller général du canton de Belfort-est et conseiller municipal, a porté plainte avec constitution de partie civile contre, notamment, Florian X..., pour diffamation envers un citoyen exerçant des fonctions publiques, en incriminant les propos suivants, publiés dans deux journaux :
" M. D... a, selon le compte rendu d'interrogatoire de Mme Y..., dicté à cette dernière une lettre accusant Damien Z..., avant de transmettre le dossier à ses amis socialistes " et " M. D... est apparu à visage découvert en portant plainte contre Jackie A... " ;
et :
" L'UMP constate que, dans les deux cas, les mises en examen sont le résultat de manoeuvres entreprises par Christophe D... " qui utilise " systématiquement la justice pour essayer d'éliminer ses adversaires politiques " ;
Attendu que, palliant les insuffisances de la plainte qui avait omis de viser l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881, le procureur de la République a requis d'informer, sur ce fondement, pour diffamation envers un citoyen chargé d'un mandat public ;
Attendu que, Florian X..., renvoyé devant le tribunal correctionnel, ayant soutenu que les propos incriminés ne concernaient pas la partie civile prise en sa qualité de citoyen chargé d'un mandat public " mais l'individu, pris isolément, comme militant et adversaire politique " et que le visa erroné de l'article 31 de la loi sur la presse devait entraîner la nullité de la poursuite, l'arrêt, pour rejeter cette exception, énonce que les articles incriminés font état de la qualité de celui-ci comme " conseiller général et municipal divers droite de Belfort " et " conseiller général et municipal " et que la diffamation s'adresse à l'homme public, titulaire de ses mandats publics locaux, en raison de sa qualité d'élu municipal et départemental ;
Mais attendu que ces écrits, même si leur objet pouvait être de discréditer l'élu qu'ils désignent plutôt que la personne privée, ne contiennent pas la critique d'un acte de la fonction ou d'un abus de la fonction ni n'établissent que la qualité ou la fonction de la personne visée a été, soit le moyen d'accomplir l'acte imputé, soit son support nécessaire, ou qu'ils caractérisent un acte se rattachant à la fonction ou à la qualité ;
D'où il suit qu'en prononçant comme elle l'a fait, au lieu de relaxer les prévenus après avoir constaté l'irrecevabilité de la poursuite, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé, et que la censure est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens proposés :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 16 juillet 2008 ;
Attendu qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, l'annulation aura effet à l'égard de Gérard B... et de Jean-Dominique C... qui ne se sont pas pourvus ;
Et attendu que l'action publique n'a pas été régulièrement engagée ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.