Vu le recours, enregistré le 8 mars 2007 en télécopie et le 12 mars 2007 en original, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0404552 en date du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a partiellement fait droit à la demande de la société Rhodia en lui accordant la restitution d'une somme de 13 759 427 euros correspondant à l'impôt versé au titre du précompte mobilier assis sur les dividendes reçus de ses filiales établies dans les pays membres de l'Union européenne autres que la France, au titre de l'année 2001, et condamné l'Etat à verser à ladite société la somme de 150 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) d'ordonner le remboursement, par la société Rhodia, des sommes de 13 759 427 euros et 150 euros susmentionnées ;
3°) à titre subsidiaire :
- de saisir la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) d'une question préjudicielle portant sur les modalités pratiques de mise en oeuvre de sa jurisprudence en matière d'élimination de la double imposition dans le cadre de systèmes fiscaux comparables à celui de l'avoir fiscal français s'agissant du calcul de l'impôt devant être pris en compte du chef de la société distributrice établie dans un autre Etat membre ;
- d'ordonner un supplément d'instruction contradictoire aux fins d'examen des justifications apportées par la défenderesse quant à l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés à l'étranger, et aux taux effectifs de cet impôt, compte tenu des régimes spéciaux éventuellement appliqués, des sommes distribuées à son profit par ses filiales européennes ;
Il soutient que le tribunal a commis une erreur de droit en considérant que le système de l'avoir fiscal et du précompte était discriminatoire et contraire à la libre circulation des capitaux ; que l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 7 septembre 2004 - Manninen - sur lequel les premiers juges se sont fondés, n'était pas transposable à une personne morale française bénéficiant, à raison des dividendes de source étrangère, du régime fiscal des sociétés mères alors que cet arrêt concernait le régime fiscal finlandais d'avoir fiscal applicable à une personne physique et ne mettait pas en jeu un paiement similaire à celui du précompte mobilier français ; qu'en droit interne, l'avoir fiscal accordé à l'actionnaire est exactement gagé par l'impôt sur les sociétés acquitté, augmenté en tant que de besoin par le précompte ; que le jugement du tribunal est insuffisamment motivé en ce qu'il ne prend pas parti sur le régime français des sociétés mères, qui assure une égalité de traitement entre les dividendes de source française et les dividendes de source étrangère ; que le régime d'exonération prévu par l'article 145 du code général des impôts permet d'appliquer les mêmes règles aux dividendes de source française et aux dividendes de source étrangère reçus par une société mère telle que la société requérante ; que la société Rhodia bénéficie, à raison des participations détenues dans les filiales européennes, du régime des sociétés mères prévu à l'article 145 susmentionné ; que ce régime exonératoire, applicable indifféremment aux dividendes de source étrangère ou française, se substitue, lorsque l'option est exercée par la société mère, au système d'avoir fiscal ; que ces deux régimes sont donc alternatifs et non cumulatifs ; que l'avoir fiscal ne constitue pas un revenu pour les sociétés mères ; que l'article 146-2 du code général des impôts permet une « transparence fiscale » de la société mère pour les dividendes ouvrant droit à l'avoir fiscal, le crédit d'impôt résultant d'une distribution réalisée par une filiale étant transmis aux actionnaires de la société mère dès lors que cette dernière ne peut l'utiliser personnellement ; que le précompte a pour seul effet de neutraliser financièrement l'avoir fiscal des associés et n'a aucun impact sur la société mère, dès lors qu'il ne constitue pas une charge comptable de la société distributrice ; qu'il représente, au plan économique, un prélèvement de l'associé alors même que le redevable juridique est la société distributrice ; que, dans ces conditions, l'avoir fiscal et le précompte résultant de la redistribution des dividendes de filiales européennes sont, au plan comptable et financier, neutres pour la société Rhodia ; qu'en outre, le mécanisme du précompte mobilier français s'applique également à des dividendes de source française redistribués par une société mère française, lorsque la filiale distributrice établie en France bénéficie d'un régime exonératoire du fait notamment de son implantation dans certaines zones du territoire français et que cette situation est comparable à celle d'une société mère percevant des dividendes de source étrangère ; que la société Rhodia, en percevant des dividendes de ses filiales dans le cadre du régime d'exonération des sociétés mères, n'a donc pas subi de restriction aux mouvements de capitaux au sens du Traité ; que la discrimination alléguée n'est pas établie ; qu'en effet, l'arrêt Manninen invoqué ne saurait imposer aux autorités nationales d'accorder un avoir fiscal supérieur à l'impôt effectivement acquitté par les sociétés distributrices dans les Etats membres d'établissement, tel que découlant des règles générales applicables au calcul de la base d'imposition ainsi que du taux d'imposition de l'impôt sur les sociétés dans ces Etats ; que la discrimination ne serait avérée que si les bénéfices distribués par la filiale avaient été assujettis à l'impôt sur les sociétés à l'étranger à un taux au moins égal à 33,33 % et sur une base comparable à celle retenue par le système fiscal français ; que si ce taux devait être inférieur à 33,33 % ou s'il s'agissait d'une base différente, la discrimination serait inexistante ou seulement partielle ; qu'il appartenait dès lors au contribuable de justifier du taux et du montant de l'impôt sur les sociétés effectivement acquitté à l'étranger alors qu'en l'espèce, la société Rhodia n'établit pas que les dividendes perçus de filiales implantées en Allemagne, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni correspondraient à des sommes effectivement assujetties à l'impôt sur les sociétés dans l'Etat de résidence de la société distributrice, ni du taux de cet impôt qui est variable selon les pays et qui peut varier également selon les situations fiscales au sein d'un même pays ; que, compte tenu, toutefois, des incertitudes qui subsistent sur la mise en oeuvre, par les Etats membres, de la jurisprudence de la CJCE en la matière, la question préjudicielle susmentionnée pourrait s'avérer utile ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité de Rome instituant la Communauté économique européenne, devenue la Communauté européenne, et notamment ses articles 56 et 58 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2008 :
- le rapport de Mme Riou, premier conseiller ;
- les observations du représentant du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;
- les observations de Me Meier, pour la société Rhodia ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement du 21 décembre 2006, le Tribunal administratif de Versailles a ordonné la restitution à la société Rhodia de la somme de 13 759 427 euros correspondant à l'impôt versé au titre du précompte mobilier assis sur les dividendes reçus de ses filiales installées dans les pays membres de l'Union européenne autres que la France, au titre de l'année 2001 ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel de ce jugement et demande que soit remise à la charge de la société Rhodia la somme susmentionnée ;
Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées par le ministre :
Considérant que si, par une décision du 16 juin 2004, l'administration fiscale a accordé à la société Rhodia, au titre de l'année 2000, un dégrèvement de 505 770 euros, ce dégrèvement demeure sans influence sur les impositions de l'année 2001, objet du présent litige ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par le ministre :
Considérant que la société Rhodia, société mère redistributrice de dividendes en provenance de ses filiales, est la seule redevable légale du précompte qu'elle est tenue d'acquitter en vertu des dispositions du 1 de l'article 223 sexies du code général des impôts ; que, par suite, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir devant le juge de l'impôt, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle ait cédé ultérieurement sa créance sur le Trésor à un organisme bancaire ;
Sur la violation du principe de libre circulation des capitaux :
Considérant qu'aux termes de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne : « 1. (...) toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites (...) » et qu'aux termes de l'article 58 du même traité : « 1. L'article 56 ne porte pas atteinte au droit qu'ont les Etats membres : a) d'appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis. b) de prendre toutes les mesures indispensables pour faire échec aux infractions à leurs lois et règlements, notamment en matière fiscale (...) 3. Les mesures et procédures visées aux paragraphes 1 et 2 ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements telle que définie à l'article 56 » ;
Considérant que si les impôts directs ne relèvent pas, en tant que tels, du domaine de compétence de la Communauté européenne, les Etats membres doivent exercer leur compétence fiscale dans le respect du droit communautaire et notamment dans le respect de la libre circulation des capitaux garantie par l'article 56, paragraphe 1, précité ; que des dispositions fiscales nationales, en ce qu'elles établissent certaines distinctions, notamment fondées sur la résidence des contribuables, peuvent néanmoins être regardées comme étant compatibles avec le droit communautaire, dès lors qu'elles s'appliquent à des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou peuvent être justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général, notamment au titre de la cohérence du régime fiscal ;
Considérant qu'aux termes de l'article 158 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : « - I. Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d'un revenu constitué : a) par les sommes qu'elles reçoivent de la société ; b) par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le Trésor. Ce crédit d'impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société. Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l'impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de l'impôt (...) » ; qu'aux termes de l'article 216 du même code : « - I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges (...) » ; qu'aux termes du 1 de l'article 223 sexies du même code : « Sous réserve des dispositions des articles 209 quinquies et 223 H, lorsque les produits distribués par une société sont prélevés sur des sommes à raison desquelles elle n'a pas été soumise à l'impôt sur les sociétés au taux normal (...), cette société est tenue d'acquitter un précompte égal au montant du crédit prévu au I de l'article 158 bis. Le précompte est dû au titre des distributions ouvrant droit au crédit d'impôt prévu à l'article 158 bis quels qu'en soient les bénéficiaires (...) » ; qu'aux termes du 2 de l'article 146 du même code : « Lorsque les distributions auxquelles procède une société mère donnent lieu à l'application du précompte prévu à l'article 223 sexies, ce précompte est diminué, le cas échéant, du montant des crédits d'impôts qui sont attachés aux produits des participations visées à l'article 145, encaissés au cours des exercices clos depuis cinq ans au plus (...) » ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 158 bis du code général des impôts que le bénéfice de l'avoir fiscal est réservé aux seules distributions de dividendes réalisées par des sociétés françaises, et non étrangères, alors que les redistributions de dividendes en provenance tant de filiales françaises que de filiales implantées dans un autre Etat membre de l'Union européenne, opérées par une société mère française établie en France, font, par application de l'article 223 sexies, l'objet du versement d'un précompte ; que, par application du 2° de l'article 146 ancien du code général des impôts, l'avoir fiscal attaché aux distributions de dividendes des sociétés françaises est imputé sur le précompte d'égal montant ; que, dans ces conditions et dans la mesure où l'avoir fiscal prévu par l'article 158 bis précité du code général des impôts, destiné à prévenir la double imposition des dividendes, s'applique uniquement en faveur de dividendes versés par des sociétés établies en France, le dispositif français de l'avoir fiscal et du précompte mobilier désavantage les sociétés mères françaises ayant des filiales établies dans un autre Etat membre de l'Union européenne par rapport à celles qui ont des filiales établies en France ; que ce dispositif a ainsi pour effet de dissuader ces sociétés d'investir leurs capitaux dans des filiales ayant leur siège dans un autre Etat membre et de faire obstacle à la collecte de capitaux en France au profit d'entreprises étrangères, dans la mesure où les revenus de ces capitaux sont fiscalement traités de manière moins favorable que les dividendes distribués par les sociétés établies en France ; qu'il ne résulte pas du dossier qu'une telle différence de traitement fiscal puisse s'expliquer par une différence objective de situation entre filiales résidentes et non résidentes, celles-ci devant, dès lors, être traitées de la même manière ; que, par suite, la législation en cause constitue une restriction au principe de libre circulation des capitaux, qui se trouve prohibée par l'article 56 du traité précité ;
Considérant, en second lieu, qu'en application de l'article 58 du traité instituant la Communauté européenne, le droit de réserver le bénéfice de l'avoir fiscal aux seuls dividendes versés par les sociétés établies sur le territoire français pourrait être admis, en tant que dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux, pour autant que la différence de traitement induite par un tel dispositif soit justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général, telle que la nécessité de sauvegarder la cohérence du régime fiscal français, et soit appropriée à l'objectif poursuivi par ladite réglementation ;
Considérant que le ministre fait valoir que le dispositif du précompte et de l'avoir fiscal vise à atténuer les effets d'une double imposition, en termes économiques, qui résulterait de l'imposition, dans le chef de la société, au titre de l'impôt sur les sociétés, des bénéfices réalisés et de l'imposition, dans le chef de l'actionnaire final, des mêmes bénéfices distribués sous forme de dividendes ; qu'il soutient que si les autorités fiscales françaises devaient, en ce qui concerne les dividendes provenant des actions d'une société établie hors de France, leur accorder l'avoir fiscal, elles encourraient le risque d'une perte de recettes fiscales dans la mesure où l'administration fiscale française n'est pas en mesure de connaître le taux et le montant de l'impôt sur les sociétés effectivement acquitté à l'étranger et, qu'en l'espèce, la société Rhodia n'établit pas que les dividendes perçus de ses filiales implantées en Allemagne, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni correspondraient à des sommes effectivement assujetties à l'impôt sur les sociétés dans l'Etat de résidence de la société distributrice, ni ne justifie du taux de cet impôt, qui est variable selon les pays et qui peut varier également selon les situations fiscales au sein d'un même pays ; que, toutefois, d'éventuelles difficultés quant à la détermination de l'impôt effectivement versé par les filiales non résidentes ne sauraient en tout état de cause justifier un obstacle à la libre circulation des capitaux comme celui qui découle de la législation française alors en vigueur ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le dispositif de l'avoir fiscal, en tant qu'il n'était ouvert qu'aux sociétés françaises, présentait un caractère discriminatoire et constituait une entrave à la liberté de circulation des capitaux prohibée par l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne ;
Sur la demande de restitution des impositions en litige :
Considérant, en premier lieu, que le juge national est tenu d'effacer les conséquences dommageables d'une violation d'une des libertés garanties par le traité ; que l'administration fiscale ne peut s'opposer à la restitution d'impositions perçues en méconnaissance du droit communautaire que si elle apporte la preuve que la charge fiscale a été supportée par une personne autre que le redevable et que le remboursement de ce dernier entraînerait un enrichissement sans cause ; que si l'administration fiscale fait valoir que la charge de la double imposition affectant les dividendes en provenance de filiales non résidentes a été supportée, du point de vue économique, par les actionnaires de la société requérante, il ressort des dispositions précitées des articles 146-2, 158 bis, 216 et 223 sexies du code général des impôts que la société mère était tenue d'acquitter le précompte mobilier résultant de la double imposition des dividendes d'origine étrangère et était par suite la redevable légale de l'imposition directe en litige, dont elle ne pouvait répercuter la charge sur des tiers ; qu'elle a été en outre contrainte de distribuer à ses actionnaires des dividendes diminués du montant du précompte et a été par suite dissuadée d'investir les capitaux dont elle disposait dans des filiales ayant leur siège dans un autre Etat membre ; que le ministre n'établit pas, dès lors, que le remboursement du précompte entraînerait pour la société Rhodia un enrichissement sans cause ;
Considérant, en deuxième lieu, que le précompte mobilier en litige ne concerne que des dividendes en provenance de filiales établies dans des Etats membres de l'Union européenne ; que, par suite, le moyen invoqué par le ministre et tiré de ce que le principe de libre circulation des capitaux n'est pas applicable aux dividendes en provenance de pays tiers à l'Union européenne est inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, que, lorsqu'une discrimination contraire au droit communautaire a été constatée, aussi longtemps que des mesures rétablissant l'égalité de traitement n'ont pas été adoptées, le juge national est tenu d'écarter toute disposition nationale discriminatoire, sans qu'il ait à demander ou à attendre l'élimination préalable de celle-ci par le législateur, et d'appliquer aux membres du groupe défavorisé le même régime que celui dont bénéficient les personnes de l'autre catégorie ; qu'en outre, la mise en oeuvre de cette obligation d'égalité de traitement est subordonnée aux principes d'équivalence et d'effectivité ; que le principe d'équivalence doit être interprété en ce sens que le groupe défavorisé ne saurait se voir appliquer, pour obtenir la décharge des impositions litigieuses, des conditions auxquelles, s'agissant des mêmes impositions, n'étaient pas soumises les sociétés nationales quand bien même il en résulterait un traitement fiscal plus favorable pour les dividendes issus de pays à bas taux d'imposition que pour les dividendes d'origine française ; que, par application de l'article 158 bis du code général des impôts alors en vigueur, les sociétés françaises bénéficiaient d'un avoir fiscal « égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société » ; que le principe d'équivalence fait obstacle à ce que le juge national puisse écarter ces dispositions législatives pour les dividendes d'origine communautaire et exiger du contribuable lésé de justifier du taux d'imposition de ses filiales non résidentes ; que l'administration fiscale ne conteste pas que l'application aux filiales non résidentes d'un avoir fiscal égal à la moitié des sommes effectivement versées par les sociétés non résidentes aurait eu pour effet de neutraliser le précompte mis à la charge de la société mère ; que, par suite, le tribunal administratif de Versailles n'a pas commis d'erreur de droit en prononçant la décharge totale du précompte auquel la société Rhodia a été assujettie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice des Communautés européennes d'une question préjudicielle ni d'ordonner un supplément d'instruction, que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société Rhodia la restitution du précompte versé au titre de l'année 2001 qu'elle sollicitait ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Rhodia d'une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la société Rhodia une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Rhodia présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
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07VE00529